Venu à Grenoble présenter son documentaire « J’irai
dormir en Corse » sur la vie de l’ancien premier ministre disparu il y a
six ans, Jean-Michel Djian dédicaçait son livre au titre parfait pour résumer
l’apport de Rocard à la vie politique français et amorcer une réponse à la
question :
« Par quelle
injustice alors sa pensée survit-elle moins que sa caricature, qu’entrés en
scène au mitan du siècle dernier ses épigones l’escamotent ? ».
J’en avais profité pour regretter qu’il reprenne trop dans
le film la critique malencontreuse envers la complexité du verbe de l’ancien maire
de Conflans Saint Honorine ; les 150 pages du livre ont permis de
détromper cette impression.
« Qui au sein des
nouvelles générations nées en ce début du troisième millénaire sait que ce gros
fumeur fut aussi l’instigateur de la loi anti-tabac, de la CSG, de la paix en
Nouvelle Calédonie, du compte individuel de formation, de la réforme d’air
France et des PTT, du livre blanc des retraites, du revenu minimum d’insertion
surtout ? »
L’intitulé du film extrait d’une lettre testament est
également significatif de la richesse de sa personnalité qui au moment du dépôt de
son urne funéraire avait valu de Jacques Dutronc habitant de Monticello, la
formule : « Un Rocard sinon rien ! »
« Je n’ai pas une goutte de sang corse,
et n’avais jamais mis les pieds sur l’île avant 1968. Le mois de mai de cette
année-là avait échauffé les esprits. Je ressentis puissamment le besoin de
rassembler pour une bonne semaine, la quarantaine la plus active d’étudiants et
de cadres du PSU. La mutuelle étudiante rendit cela possible en Corse. »
L’ouvrage acquis comme consolation de voir en une ville qui
fut jadis « rocardienne » seulement une cinquantaine de personnes
blanchies sous le harnois à l’invitation de Michel Destot, ancien maire, est comme son objet,
tranchant, honnête, stimulant.
« Comment
voulez-vous éclairer les électeurs avec des gens qui cherchent sans cesse à
attiser les peurs, déformer vos propos, les décontextualiser, les tirer vers le
bas. »
Loin de moi de critiquer quelqu'un pour disposer d'un Verbe élégant, un minimum sophistiqué ? à notre époque.
RépondreSupprimerMais il me semble que le devenir de ce Verbe est menacé par la volonté de TOUT mettre sur la place publique. Cela est fatal pour le Verbe, et la société elle-même.
La place publique ne supporte pas la complexité, me semble-t-il, et ne pas s'en rendre compte installe un orateur dans une naïveté qui surprendrait ceux qui, à leurs propres yeux, se veulent sophistiqués, et je pèse mes mots, là.