Convaincu par « Le masque et la plume », je passe
le lendemain à la librairie derrière un client qui vient de commander ce roman sur
la fin de vie déjà en rupture de stock, titré par l’auteure américaine installée en
Angleterre : « Should I Stay
or Should I Go » (The Clash).
Après la mort d’un père au bout d’une longue dégénérescence,
un couple de quinquagénaires décide de se suicider quand ils auront 80 ans,
« Avant de coûter
un bras à nos compatriotes pour survivre à l’état d’imitations grotesques de ce
que nous étions jeunes ou comme de simples outres à souffrance. »
L’auteur, sans que cela tourne à l’exercice de style,
déploie toute son imagination pour inventer plus d’une dizaine de scénarios
possibles après cette décision difficile.
« J'ai un peu
l'impression d'être au milieu d'une flopée d'intrigues incroyables et de devoir
soudain rendre les romans commencés à la bibliothèque. »
L’intime le plus dérisoire se mêle aux questions
fondamentales du choix de la sortie où sont mis en jeux les pouvoirs dans le
couple, les choix d’une vie au temps du Brexit et du confinement. Lui est un ancien médecin, sa femme Kay, infirmière :
« Pour Kay
Wilkinson, le fait que le Royaume unis reste ou non membre de l’UE - ou de l’OTAN
ou des Nations Unies ou du Commonwealth - se situait au même niveau que sa
participation ou non au concours de l’Eurovision. »
L’humour permet de passer d’une résidence haut de gamme à
des établissements sordides au personnel malfaisant, jusqu’à la science-fiction
la plus débridée, d’une planète ensauvagée à un monde apaisé.
« Au lieu de
forcer leurs populations affamées et révoltées à fuir à l’étranger en quête d’ «un
avenir meilleur », les chefs de gouvernement africains supplièrent leurs
diasporas de bien vouloir revenir au pays pour occuper des postes bien
rémunérés qui n’attendaient qu’elles. »
Ces 280 pages très vivantes évoquent une tendresse
indestructible, la solitude, la trahison, entre deux verres de Sauvignon. Le
panorama des affres de la vieillesse se laisse voir sans pleurnicheries
derrière les portes où attendent des représentants de la rupture
générationnelle, vivement campés:
« En sus de la montagne
de comprimés à avaler plusieurs fois par jour, les bilans incessants, les
analyses de sang, d’urine, les coloscopies, les tests auditifs et ophtalmologiques,
les pesées, les analyses de selles, les électrocardiogrammes et les IRM étaient
manifestement le prix à payer pour quiconque dépassait sa date de péremption
sur terre. »
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