Devant les amis du musée de Grenoble, le chargé de cours
d’égyptologie à l’École du Louvre, reconnaissant
le génie de son prédécesseur Jean François Champollion qui avait transgressé
en 1822 certaines règles du déchiffrement alors en vigueur, l’a présenté comme
le dernier maillon d’une quête de plusieurs siècles et qui se poursuit.
« C'est un
système complexe, une écriture tout à la fois figurative, symbolique et
phonétique, dans un même texte, une même phrase, je dirais presque dans un même
mot. »
Le conférencier remonte à Dioclétien dernier « vrai
pharaon » et à l’édit de Théodose
de 380 quand l‘empire romain devint chrétien : les hiéroglyphes, utilisés
depuis 3000 ans, la « langue des dieux », deviennent illisibles, les
temples sont fermés. Le copte, langue d'église, a conservé la langue
ancienne et joué un rôle capital dans le déchiffrement.
Les Égyptiens de l'Antiquité donnaient parfois à leur pays
le nom de « Kemet », « terre noire »,
qu’il convient de nommer « terre arable » car la confusion peut
passer de la couleur de la terre à celle de la peau.Horapollon traite des symboles égyptiens tels qu’ils
furent compris à l’époque romaine mais c’est à la Renaissance, quand furent
exhumés quelques obélisques à Rome et que l’imprimerie a permis de partager les
connaissances que se multiplièrent les avancées.Au XVII° siècle, Blaise
De Vigenere, diplomate imprégné de
sciences occultes, est l’un des premiers à avoir « allumé une
étincelle » avec son «Traité des
chiffres ou secrètes manières d'écrire ».Nicolas-Claude Fabri de Peiresc, « polymathe », c'est-à-dire une personne d'esprit
universel, diplomate et commerçant, collectionneur de curiosités : momies,
sculptures et bas-reliefs, statuettes, vases canopes ... s’intéresse à la
langue copte et correspond avec Athanase Kircher, inventeur de la lanterne magique
qui établit la première grammaire copte.
Jean- Joseph De Guignes auteur de la
thèse fantaisiste mais féconde, en particulier pour l’esprit à « sauts et
gambades » de notre Dauphinois, démontrant que la Chine est une colonie
égyptienne, avait repéré que les cartouches enfermaient des noms royaux.Jacques Barthélemy,
ecclésiastique, numismate, déchiffre l’alphabet palmyrénien, le phénicien et le
premier hiéroglyphe.
« Ces questions
ne pourront jamais être éclaircies par les témoignages des auteurs grecs et latins…
C’est aux monuments qu’on doit recourir. Quand ils parleront clairement, il
faudra bien que les anciens auteurs s’accordent avec eux ».Bonaparte arrive en Egypte occupée par les ottomans où les
livres sont interdits. Les découvertes de l’expédition française sont
divulguées par la première imprimerie d’Égypte, en latin, grec et arabe. Occupé à renforcer le
fort Rachid, le 19 juillet 1799, le lieutenant du génie Pierre François
Xavier Bouchard - la France est le pays le plus lettré - comprend l’importance
de la découverte, de la stèle trilingue (hiéroglyphique, grec, démotique) qui
passera à la postérité sous le nom de « Pierre de Rosette » maintenant
au British Muséum.Le suédois Johan David Åkerblad maîtrise plus de vingt langues antiques et contemporaines, élève de Sylvestre de Sacy, déchiffre les noms propres.
Les premières
réactions de celui-ci aux travaux de Champollion sont réservées, il écrit à Young
brillant scientifique qui travaille sur les textes :
« Si j’ai un
conseil à vous donner, c’est de ne pas trop communiquer vos découvertes à
M. Champollion. Il se pourrait faire qu’il prétendît ensuite à la
priorité. » Mais il sait changer d’avis quand Jean François éclairé par
son ainé Jacques-Joseph Champollion-Figeac « apportera des éléments tangibles concernant ses
théories ».
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