samedi 8 juin 2019

Une femme en contre-jour. Gaëlle Josse.

Voilà une occasion de distinguer littérature et journalisme. Le livre commence par la fin d’une vieille dame solitaire. Nous sommes à côté d’elle sur son banc au bord du lac à Chicago : roman.
Puis à partir du récit de la découverte par un dénommé John Maloof des photographies de cette femme, une distance journalistique est prise.
« John Maloof va en effet inventer Viviane Maier. La révéler au sens photographique du terme. Naissance et résurrection d’une artiste de génie. Naissance d’une énigme ».
Le matériau romanesque était fertile rien qu’à partir de la découverte dans un vide-grenier de photos jamais exposées du vivant d'une nounou énigmatique dont l’œuvre connaît aujourd’hui une faveur exceptionnelle.
L’auteure qui a aimé cette femme « aux yeux ouverts », explique honnêtement sa démarche:  
« Entrer dans une vie, c'est brasser les ténèbres, déranger des ombres, convoquer les fantômes. C'est interroger le vide et tendre l'oreille vers les échos perdus. »
Originaire des Hautes Alpes, vivant à New York et Chicago, la nurse a accumulé les images des oubliés de l’opulence, pauvres comme elle.
Les témoignages à son égard sont contradictoires entre ceux qui lui ont rendu à la fin de sa vie l’attention dont elle avait fait preuve à leur égard, et d’autres qui ont souffert de ses colères quand elle n’échappait pas à la reproduction de fatalités familiales.
Son nom même est incertain:
« D’où vient ce nom, qui apparaît puis disparaît comme une bulle de savon ? Nul ne saurait dire. C’est l’inexplicable fantaisie de Marie Maier. Des mensonges, des incohérences, des dénis qui interrogent et laissent imaginer un désir de fuite, ou d’une autre vie, telle la réécriture d’une réel insatisfaisant, qu’un mot suffirait à réparer et à rendre présentable. » 
150 pages qui donnent envie de découvrir des photos qu’elle n’a même pas vues pour la plupart.

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