mercredi 17 mai 2023

Limoges soir et matin.

Lorsque nous récupérons notre voiture pourtant à l’ombre, le thermomètre indique 40 °
Mais le voyage vers LIMOGES s’avère confortable grâce à la clim.
Selon notre habitude, nous transitons d’abord par l’Office du tourisme recueillir notre lot d’informations avant d’aller prendre possession de notre AirB&B à SOLIGNAC. 
Nous  avons pour voisins de chambre une autre famille composée d’un jeune couple et 2 petites filles avec laquelle nous partagerons la salle de bain. Un certain bazar règne dans la maison tenue par une propriétaire artiste, qui dépose ses œuvres à la vente ou en décoration in situ dans les différentes pièces ; dans notre chambre, un miroir à base de touches de piano, une patère faite à partir d’embauchoirs en bois, donnent un exemple de ses productions. Pour passer à la salle de bain, un sas déborde de matériaux divers entreposés là pour de futures créations.
 
Solignac est un joli petit village sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle, notre logement se situe à côté de la belle  porte Saint Jean protégeant l’Abbaye.
Pas loin, un charmant  pont vouté en pierre surmonte la Briance depuis le XIII° mais la Mairie avertit sur l’état de fragilité de la construction qui permettait le passage des pèlerins. Il existe un restaurant face à ce décor agréable malheureusement il n’est pas ouvert.
D’ailleurs, nous ne trouvons aucun établissement  servant des repas, nous devons donc reprendre la voiture et tenter notre chance à Limoges où nous optons pour le quartier/village médiéval de la boucherie.
Rue de la boucherie,  beaucoup de maisons à pans de bois et une curieuse chapelle participent à raconter le passé de Limoges. Nous nous installons à la terrasse de « Le versant » pour boire un spritz avant de nous régaler d’un sandre à la piperade avec un verre de Viognier et d’un dessert original.
L’heure est douce, nous flânons un peu dans le coin, tirons jusqu’aux halles constituées de verre briques et acier style Eiffel, rehaussées  d’une frise à base de porcelaines de 328 carreaux.
De retour à Solignac, nous prolongeons notre promenade tant vespérale que digestive.
Nous marchons jusqu’à l’église romane jouxtant le monastère bénédictin enfermé derrière des grilles.
Une plaque apposée sur un mur informe de la présence des élèves maîtres de l’école normale d’Obernai pendant la 2ème guerre mondiale.
Il est vrai que cette très ancienne  abbaye après avoir recueilli  différentes congrégations, servit  aussi de pensionnat de jeunes filles sous l’empire et de fabrique de porcelaines au début du XX°. Nous continuons jusqu’à l’ancienne maison d’observations astronomiques des moines avant de rentrer. Le ciel se pommelle de petits nuages, la température avoisine encore les 30° à 21h30  et impose une bonne douche  puis au lit.

Matin
Nous galérons pour trouver un bar ou restau ouvert près de Solignac et même à Limoges pour prendre un petit déjeuner.
Généralement près des gares, ce genre d’établissements ne manquent pas, mais pas ici !
Puisque nous avons atterri devant la gare des bénédictins, nous la visiterons, le ventre vide. Ce monument emblématique de Limoges achevé en 1927 mélange le style néo-classique et l’art nouveau. Il est érigé au- dessus des voies et son campanile contribuant avec le dôme à l’apparenter à un monument religieux,  s’aperçoit de toute la ville.
Des pierres calcaires habillent  le béton jugé trop audacieux pour les gens de l’époque, du cuivre recouvre le dôme et une élégante marquise accueille les usagers
ainsi que deux sculptures bien encrassées qui encadrent la porte
et symbolisent l’une l'émail  l’autre la porcelaine de Limoges.
De belles verrières adoptent les formes et les motifs chers à l’art nouveau.
A l’intérieur, quatre sculptures allégoriques représentent des provinces françaises  (« le Limousin, la Bretagne, la Gascogne et la Touraine, qui étaient à l'origine quatre provinces desservies par la Compagnie du Paris-Orléans ») dont une charmante Gascogne aux jolies fesses.

mardi 16 mai 2023

Ecoute Jolie Marcia. Marcello Quintanilha.

Les couleurs acides permettent une description originale d’une sombre histoire dans une favella de Rio où la vie est difficile, les relations toxiques, même à l’intérieur de la famille de Marcia , aide soignante qui fait de son mieux avec sa fille Jaqueline irrespectueuse au possible.
Les dialogues sont corsés, le quotidien violent mais les femmes résistent.
Marcia est une héroïne forte à tous les sens du terme comme Aluisio, son compagnon, homme de sa vie, un doux parmi une brochette de jeunes coqs si odieux que c’est peu de le dire.
Chronique sociale tragique et comique, vraiment punchy, sans misérabilisme.
Heureusement, il y a toujours les chansons : 
« Je ne savais pas même soupirer avant de te rencontrer.
Mais depuis j’ai croisé ton regard je sais soupirer je sais mourir. »

lundi 15 mai 2023

Nos cérémonies. Simon Rieth.

Les images destinées à décrire un traumatisme d’enfance mal résolu sont statiques.
Des péripéties artificielles peuvent amener des interprétations diverses à ce récit fantastique où les frères rejouent la scène initiale d’un retour à la vie. Nous sont infligés des meurtres contre un frère décédé pour signifier l’envie d’oublier mais aucune émotion ne vient pour partager une culpabilité. La violence jouxte la proximité. 
Bien que les couleurs soient appuyées, l’enfance, les bords de mer, l’été, n’ont aucun charme et les idylles de jeunesse sont dépourvues de sensualité. 

dimanche 14 mai 2023

Pénélope. Jean-Claude Gallotta.

Quel plaisir de retrouver la danse, des petits pas familiers et des inventions nouvelles !
Pénélope vue par notre patrimonial grenoblois n’attend pas son Ulysse en tricotant, solitaire.  Multipliée en cinq , les prétendants doivent déployer autour d'elles, une énergie qui ne s’use pas tout au long de cette heure et quart.
Hommes ou femmes portant bandeaux sur la poitrine et sur le bassin animent des compositions graphiquement réussies, assurés d’une égale dignité.
La reine au foyer qui attend - tic tac tic tac- à Ithaque est-elle faible ou forte ?
Le chorégraphe aime dire que les mythologies sont ré-interprétables sans fin, il le prouve avec une bande son stimulante pour une troupe au point.
Quatre chapitres et un épilogue  découpent le temps : Les Prétendants, Les Guerrières, Les Indociles, Les Réconciliés pour une même vigueur. 
Les couples se font et se défont parfois derrière un écran ou dans une salle de répétition, une femme et un homme en fauteuil roulant esquissent quelques gestes tout en offrant de magnifiques superpositions.
« Nous sommes ce que nous dansons » est-il dit dans un texte accompagnant les gestes qui parlent d’eux-mêmes. Piètre valseur, je ne me sens pas grand-chose, seuls me sauvent quelques « neurones miroir » qui ont eu encore la chance de reluire ce soir.

samedi 13 mai 2023

Le monde d’avant. Marc Lambron.

Petit livre  en hommage à des grands parents nivernais en milieu ouvrier à la campagne  
« On allait vers le monde d’Orwell mais il était ourlé d’une campagne à la George Sand »
Ces 90 pages ressemblent à un cadeau offert aux parents pour leurs noces d’or recueillant les anecdotes familiales et pour lesquelles ont aurait fait appel à l’académicien sachant bien écrire. 
« Etendus sur les fils à linge, les rectangles menstruels permettent de savoir, quand ils disparaissent que la voisine est en état de bonne espérance. » 
Les portraits sont vivement tracés et la nostalgie envers le siècle précédent cultivée à coup de « Piste aux étoiles », de Tour de France et de profession enviable d’institutrice. 
« Il était entendu que la mère Piqueprune, épicière de son état, avait été placée de toute éternité dans son échoppe pour que les enfants du village lui dérobent des bonbons en l’envoyant quérir des denrées dans son arrière-boutique. C’était comme ça. »
Mais tout est bien dosé, les expressions du patois mentionnées sans s’y attarder, la liste des marques vintage restreinte. 
« Ces pauvres m’ont fait riche. » 
La pudeur dont il fait preuve donnerait l’exemple pour s’essayer à l’exercice, si l’on ne craignait d’être lourd. 
« J’écris ici comme un passant des jardins, habité par le scrupule de ne pas désobliger le passé des autres, celui de ne pas m’approprier le crédit de leur vaillance »

vendredi 12 mai 2023

Désert.

Les temps changent. 
Alors que pour partager les émotions dans un stade avec un enfant, il convient malheureusement d’hésiter, je viens de voir avant le défilé du premier mai, une caméra posée sur une maman qui équipait son enfant en poussette de lunettes pour le protéger des gaz lacrymogènes ! Juste après une mamie faisait porter uniquement à la police la responsabilité des violences, prise dans les projecteurs de la toute puissance d’un prométhéen mouvement social à qui tous les gentils Sisyphe pardonnent.
Albert Camus est moins noir qu’Albert Cohen : 
«  Chaque homme est seul et tous se fichent de tous et nos douleurs sont une île déserte. »
« Il n’y a plus de déserts. Il n’y a plus d’îles. Le besoin pourtant s’en fait sentir. 
Pour comprendre le monde, il faut parfois se détourner ; pour mieux servir les hommes, les tenir un moment à distance. » 
Pour avoir beaucoup cotisé au club des naïfs, j’en suis à noircir le caractère de mes semblables souvent dans le déni et l’indulgence coupable envers la brutalité. Alors que progrès scientifique et déploiement des aides sociales ont rendu pour la plupart la vie plus confortable, la moindre anicroche nous insupporte, la moindre contrariété nous fait criser. 
Et les foules africaines qui suivent aveuglément les néo-colonisateurs du XXI° siècle en dénonçant ceux du XIX° me consternent.
Dans la marmite des commentaires, l’étude expéditive des caractères a pris le pas sur le débat de fond. 
Après la contradiction des gilets jaunes : moins d’impôts plus de services, bien peu d’objections sont apportées à ceux qui optent pour la décroissance en demandant la retraite à 60 ans, alors que dans le même temps, plus de pouvoir d’achat demande de la croissance. « Plus d’argent pour profiter de plus de loisirs » ne s’affiche pas aussi nettement que « travailler plus pour gagner plus » mais connaît davantage de succès.
Quand l’agressivité peut en arriver à se déchainer sur le personnel soignant, les profs, les pompiers … les gardiens de la paix, je doute des vertus des référendums, le citoyen disparaissant derrière le consommateur. Les clashs séduisent et les gueulards mateurs prouvent leur efficacité, la modération passe pour de la faiblesse. L’adrénaline spray des disputes est un euphorisant qui comme le gaz hilarant donne des couleurs à l’ordinaire des jours. 
Les «cacerolazos» , firent du bruit contre Allende et les marches au flambeau ne fascinent pas que les fascistes. Ils aiment la nuit propice aux rêves et aux dissimulations; les réveils tardifs sont parfois difficiles.
Avons-nous appris à vivre avec nos faiblesses, nos addictions, nos rides, la mort ?
Ciel bleu et cocotiers figurent le paradis et malgré le funeste réchauffement climatique, le soleil est toujours synonyme de beau temps.
La météo n’est plus un sujet anodin, et dans le bavardage radiophonique qui alerte sans cesse sur la sécheresse, je m’étonne que l’annonce d’une amélioration signifie encore le retour de la chaleur bien qu’on en vienne à prier pour la pluie dans la phrase précédente. 
« L’espérance, c’est sortir par un beau soleil et rentrer sous la pluie.»  Jules Renard

jeudi 11 mai 2023

Séductrices, prostituées. Serge Legat.

Concernant l’image des femmes dans l’art : après les vierges, saintes, ou mères vertueuses, https://blog-de-guy.blogspot.com/2023/04/vierge-sainte-mere-serge-legat.html 
étaient présentées des femmes de petite vertu par le conférencier devant les amis du Musée de Grenoble. 
De l’antiquité au monde chrétien s’est enracinée l’idée de la nature diabolique des descendantes d’Eve, parmi 1001 péchés possibles répertoriés en listes canoniques : luxure et curiosité, commérage. « Les Effets de l'intempérance » Jan Steen, la morale protestante dénonce la mauvaise mère assoupie qui ne s’occupe pas de ses enfants : l’un « donne des roses au cochon », l‘autre lui dérobe sa bourse, laissant présager un avenir de mendicité (béquille et clochette), alors qu’une domestique propose du vin au perroquet.
Le symboliste Giovanni Segantini, qui a perdu sa mère à cinq ans, représente « Les mauvaises mères » exposées à la souffrance pour n’avoir pas voulu d’enfants.
« L'Allégorie de la Chasteté »
de Lorenzo Lotto figure sur le couvercle d’un portrait d’une femme inconnue : les satyres dans l’ombre contrastent avec la pluie lumineuse de fleurs déversée par un putto sur la blanche dame.
Dans un autre double tableau, l’« Allégorie du vice et de la vertu » recouvrait le portrait d’un évêque.
Chez le même Lotto, « Vénus et Cupidon », le jet d’urine à travers la couronne souhaite la fertilité.
Face à « La Femme Adultère », le christ adresse à la foule excitée ses plus belles paroles : « Que celui qui n’a jamais pêché lui jette la première pierre ».
« Jésus chez Simon le pharisien »
  Rubens. Marie Madeleine, la pécheresse repentie, celle qui va oindre les pieds du christ, et les essuyer avec ses cheveux, sera une de ses premières disciples à le voir après sa résurrection, elle synthétise plusieurs personnages.
Le christ appelé auprès de son père n’est plus de ce monde, alors
Fra Angelico peint : « Noli me tangere » (« ne me touche pas ») pour la cellule du couvent San Marco à Florence . Elle l’avait pris pour un jardinier.
Elle avait extériorisé sa douleur dans le « Retable d'Issenheim » consacré à saint Antoine de Matthias Grünewald. 

https://blog-de-guy.blogspot.com/2021/09/musee-unterlinden-colmar.html
Charles Le Brun tenté par le baroque présente « Sainte Marie-Madeleine renonçant aux vanités du monde ».
La poignante « Madeleine pénitente » de Donatello garde de belles mains pour prier. Artemisia Gentileschi, Le Caravage et 
Valentin de Boulogne
ont célébré « Judith », femme forte.  
 https://blog-de-guy.blogspot.com/2019/11/artemisia-jean-seroy.html
Le Titien
 : « Sextus Tarquin viole Lucrèce ». La vertueuse se suicidera pour laver l’honneur de son père et de son mari. Cet évènement mettant en cause la monarchie, la République romaine adviendra.
« L’Entremetteuse »
de Johannes Vermeer du genre « bordeeltjes » (bordel) décrit les amours tarifés 
comme « Société dans la salle de Sophie à Vienne » de Josef Engelhart. 
Toulouse Lautrec pour l’établissement de la rue des moulins 
ou Picasso pour les demoiselles de la rue d’Avignon à Barcelone 
ou Manet et son Olympia ont multiplié les chefs d’œuvres sur ce thème. 
https://blog-de-guy.blogspot.com/2017/12/moderne-olympia-catherine-meurisse.html.
A Saint Lazare, hôpital-prison, Pablo Picasso saisit cette femme assise au fichu blanc signalant sa syphilis, « La Mélancolie ». 
« Marion coûtait cher. 
Pour lui payer sa nuit,
Il avait dépensé sa dernière pistole » Musset
Le tableau de Gervex « Rolla » aurait pu s’intituler « La destructrice » puisque la lumineuse endormie a provoqué la ruine de Rolla qui va se suicider.
« Nana »
d’Edouard Manet peinte deux ans avant le roman de Zola avait fait scandale à cause du corset. 
« Une vraie frimousse de margot, trempée dans du lait, une peau veloutée de pêche, un nez drôle, un bec rose, des quinquets luisants auxquels les hommes avaient envie d’allumer leur pipe. Son tas de cheveux blonds, couleur d’avoine fraîche, semblait lui avoir jeté de la poudre d’or sur les tempes, des taches de rousseur, qui lui mettaient là une couronne de soleil. Ah ! une jolie pépée, comme disaient les Lorilleux, une morveuse qu’on aurait encore dû moucher et dont les grosses épaules avaient les rondeurs pleines, l’odeur mûre d’une femme faite.»
« Le réveil de la conscience » de Hunt le préraphaélite de la période victorienne, où la jeune fille, aux allures de Marie-Madeleine, échappe à l’emprise de l’homme comme l’oiseau échappe au chat, me semble bien mièvre et moralisateur, même épluché dans le détail pour compter les bagues aux doigts de la jeune femme, sauf  à l’annulaire.