jeudi 20 mai 2021

Le Postillon. N° 60. Printemps 2021.

A peine publiée ma critique, sévère, du bimestriel local 
qu’en achetant le Dauphiné Libéré, je trouve un nouveau numéro du satirique journal qui ne sait parler de son confrère quotidien qu’en tant que « Daubé », bien qu’il y puise son inspiration. 
Est ainsi réactivée une rubrique historique pour préciser que Raoul Sacorrotti, Arsène Lupin transalpin, monte-en l’air qui vidait les greniers grenoblois dans les années 30 finançait les révolutionnaires espagnols.
Pourtant la rencontre des rédacteurs masqués avec des lycéens autour de la presse pour lesquels ce moyen d’information est étranger aurait pu ouvrir une réflexion féconde. Le constat accablant de vivre sur une autre planète alors que les adultes n’ont pas donné l’exemple m’a semblé un peu court.
Si les porte- paroles de l'association technophobe «Pièces et main d’œuvre» en restent à leur marotte folklorique en militant pour la réinstallation des cabines téléphoniques, le compte-rendu d’une nuit dans les rues grenobloises sous couvre-feu reste assez prévisible. 
Par contre la promotion de l’atelier paysan fabriquant des outils adaptés aux besoins des agriculteurs permet de passer de la critique systémique à des réalisations positives, loin des bavardages.
Pour tourner en ridicule les vendeurs de vent, Le Postillon est toujours pertinent avec Piolle et Ferrari en tête de gondole à l'heure de « la grenobalpisation de la cuvette » : 
tout devient siglé Grenoble Alpes (GA) CHUGA, l’UGA… « invest in Grenoble Alpes »). 
Cette fois la révélation de Gregoire Gambatto, fondateur de Germinal, entreprise de « growth hacking »,« bidouillage de croissance », se définissant lui-même comme « un monstre d’influence sur Linkedin », est tout à fait signifiante des mœurs actuelles.
La dénonciation d’un marchand de sommeil entre dans leur combat habituel du côté des plus défavorisés, mais les bisbilles entre un propriétaire et la mairie de Seyssins ne semblent pas départager si évidemment qu’ils le présentent, le bien et le mal.
L’article intéressant concernant «  Le Magasin » centre d’art contemporain met en évidence la distance entre une communication très « care » et une gestion autoritaire. Est citée l’irrévérencieuse et délicieuse Nicole Esterolle  
qui trouvait que ce lieu  était devenu :  
« le rendez-vous des radicalo-historico-afro-éco-queer-trans- féministe (…) qui ont priorité pour la monstration de leurs performatifs et bidulaires épanchements ». 
Le dossier à propos du CHAI (Centre Hospitalier Alpes-Isère), l’hôpital psychiatrique de Saint Egrève qui emploie 1700 professionnels pour suivre 19 000 malades par an aurait gagné en pertinence en s’allégeant de stéréotypiques illustrations représentant des outils datant de 1764 comme par exemple « une vis permettant de creuser un trou dans le crâne d’un fou ». Il n’était pas indispensable non plus de citer à plusieurs reprises Albert Londres, ni de développer des cas remontant à 2018 pour décrire un lieu de souffrance où des avancées sont tout de même mentionnées. Si certains se souviennent encore de l’assassinat d’un étudiant par un pensionnaire de Saint Robert, comme on disait jadis, quelques témoignages éloignent l’image du « fou qui fait peur » tout en dénonçant des démarches excessivement sécuritaires, alors que la vague psychiatrique ne fait que commencer.

mercredi 19 mai 2021

Amiens # 2

La température fraîche offre un contraste important avec hier.  
Nous destinons notre matinée à la visite commentée de la cathédrale Notre Dame que nous retenons et réglons à l’Office du tourisme.
Notre conférencier, un petit monsieur avec son parapluie partage son érudition à l’ancienne, méthodique et passionné.
Il commence par aborder lhistorique: 1220-1268 : Les fonds pour construire l’Eglise ne manquent pas.
D’abord la ville est riche grâce au commerce des drapiers, aux impôts, aux péages sur les ponts  et aux droits de passages des bateaux sur la Somme.
Rapportent aussi les reliques dont  la tête de Saint Jean-Baptiste. Elles attirent les pèlerins, ainsi que le bleu d’Amiens au procédé de fabrication gardé secret, réputé même hors des frontières. 
La cathédrale fut bâtie en une seule fois et cela lui confère son unité.
Elle fut épargnée par les conflits ; pendant la seconde guerre, les Stukas l’évitaient dans leurs bombardements en plongée se concentrant sur l’anéantissement du reste de la ville.
Elle fut la dernière cathédrale de style « gothique » ou
« ogival » et bénéficia des expériences de celles qui l’avaient précédée. Elle atteint la longueur de 142 m, sa hauteur de 48 m est un peu plus basse que celle de Beauvais mais cette dernière dut  réduire sa longueur suite à l’effondrement de la travée.
Ces deux tours inégales déplaisaient à Eugène Viollet-Le- duc, adepte de la symétrie. Jusqu’à 23 couches de peintures successives ont recouvert l’édifice ; il est difficile aujourd’hui d’imaginer cette façade et ses ornements ainsi que ses statues autrefois multicolores quand on se trouve face à cette pierre claire.
Ce fut l’œuvre des  sculpteurs« imagiers », que l’absence d’images, de livres en papier, voire d’imprimerie ont poussé à raconter le contenu de l’ancien et du nouveau testament, dans une lecture compréhensible par tous.Trois portails donnent accès au lieu saint.
Le portail central est consacré au Jugement dernier représenté dans le tympan. Le Christ apparait dans le trumeau entouré par les statues latérales des apôtres. Les autres personnages en pierre font appel aux prophètes comme Jonas dont l’histoire  est racontée en sculpture dans les quadrilobes.
Le portail de droite fait référence à la naissance du Christ. Dans le trumeau, prennent place la vierge et l’enfant. La tête du petit serait attribuée à Viollet le duc. 
Des traces et restes très atténués de couleurs affleurent par endroit  et témoignent de la peinture disparue.
Au Sud trône une autre belle Vierge dorée.
En dessous de la Vierge à l’enfant du portail de la mère de Dieu, Adam, créé à l’image de Dieu et Eve née de sa côte, chassés tout deux du paradis rappellent la faute originelle, mais Marie sainte mère veille sur les pauvres pécheurs. Les autres sujets sculptés traités concernent l’annonciation, la visitation, la présentation de Jésus au temple.
A gauche, les fidèles peuvent identifier de grandes figures de l’ancien testament  que ce soit  les trois rois mages, ou Hérode surmontant un quadrilobe décrivant le massacre des innocents 
ou encore le roi Salomon fondateur du temple de Jérusalem, (clin d’œil des architectes) accompagné de la reine de Saba. Le portail de gauche est dédié à Saint Firmin.

De chaque côté de l’évêque 12 quadrilobes enferment les signes du zodiaque, en dessous desquels correspondent pour chacun d’entre eux une scène de vie en relation avec les saisons évoquées.
Lorsque nous pénétrons à l’intérieur, nous nous sentons bien petits dans cet espace de hauteur et de lumière caractéristiques de l’art ogival.
Un labyrinthe au sol long de 240 mètres occupe en grande partie le dallage de la nef. Son cheminement le long d’un ruban noir enroulé oblige à poursuivre rigoureusement tout le tracé avant d’atteindre le centre sans possibilité de raccourci.

Au milieu, dans le cercle noir, une croix dont les branches se terminent par un lys indique les quatre coins cardinaux, mais  tout le monde peut constater que le bâtiment n’est pas dans l’axe. Cependant, au moment des solstices la lumière qui filtre par une fenêtre divise parfaitement la croix en deux parties et met en évidence ombre et  lumière : cette symbolique s’explique par une parole de saint Jean Baptiste désignant le Christ : « je suis l’ombre, Il est la lumière ». Des anges évêques et bâtisseurs s’invitent dans le cercle et s’imbriquent entre les branches de la croix.
Nous ne verrons rien de l’orgue de la Renaissance en réfection.
Mais nous  ne manquerons pas l’ange qui pleure au dos du chœur. Pendant la guerre de 14-18, les soldats australiens, néo zélandais et britanniques le rendirent célèbre dans le monde entier lorsqu’ils combattirent au front  à une quinzaine de kilomètres d’Amiens. Pour écrire à leur famille, ils envoyaient des cartes postales de la cathédrale, mais en raison de l’épuisement  du stock, ils se sont rabattus sur celui inexpliqué de l’ange qui pleure. Ce putto est une petite sculpture du XVII° placée au-dessus d’un enfeu d’évêque. Il fut rajouté à la suite d’un différend entre l’artiste  et le commanditaire qui trouvait la note du tombeau trop salée. Main appuyée sur un sablier et  coude reposant sur un crâne, il dénonce la Vanité du monde terrestre.
Les chapelles et monuments du déambulatoire gardent trace aujourd’hui encore du 1er conflit  mondial, comme  par exemple la présence d'un drapeau australien offert, exposé telle une relique…
Quant au bâtiment, il souffre de l’œuvre du temps et des hommes ; pour maintenir l’écartement des piliers et les consolider, une chaîne de métal a été insérée tout le long du triforium, à l’image d’un tonnelage.
Il n’y a plus grand-chose à contempler au niveau des peintures ou fresques, ni au niveau des vitraux encrassés dont seulement 5 % ont survécu aux guerres.
Durant la visite nous avons pu apprécier notre guide ; ce passeur, grand bavard, n’a manqué ni d’anecdotes ni d’érudition, sans mégoter sur le temps consenti.
Lorsque nous quittons les lieux, un prêtre célèbre le  baptême d’un petit métis du nom de Shun au milieu de sa parentèle blanche et noire ; la cérémonie me semble bien plus étoffée que celle pratiquée de par chez nous…

mardi 18 mai 2021

La dérive des confinements. Jul.

Nous en sommes au neuvième album de la série « Silex and the city », une autre ère,
au temps du « cronomagnonavirus » avec « zéro geste barrière au cannibale Saint Martin » et Rahan qui part dans son volcan de campagne : 
« Sérieux, mais tu trouves pas ça abusé toutes ces espèces qui vont se confiner peinardes à la mer ? »
Les parano hygiénistes se gardent de devenir « lithocondriaques » en reconnaissant  qu’il « y a des « espèces qui se lavent jamais et qui sont jamais malades ». Si l’escargot ne risque rien puisqu’il ne serre la main de personne, de lui faire remarquer qu’il laisse de la bave partout, ne fait pas du pilier du PMU (Pari Mammifère Unifié) devant son Mabilis 51, un « gastérophobe primaire »
Les dessins sont toujours peu appliqués et le scénario sans importance, les occasions de jouer avec les mots sont saisies à brassées et les situations révélatrices des absurdités de nos mœurs. « Mammouth » a disparu en tant que super marché, et c’est au« super Hutte» que  Blog Dot Com fait la queue, qu’un lézard coupe bien sûr, il essaie « le plan baie » car le rayon chasse a été dévalisé et qu’il va faire sa réserve de pattes. Sa fille suit une ursidé influenceuse s’apprêtant à hiberner qui recommande « un grand bol de miel de chez Gisèle de Hann © avant de dévorer quelques hominidés bourrés d’Oméga 3 ».
Et tout à l’avenant avec le croco Lacoste à promener, l’attestation pour sortir, chamans en manque de masques et retour des dinosaures, pénurie de feuilles chez l’arboricole qui a été dévalisé, et « chênes d’info en continu » qui apprennent que la « Place Sainte Pierre » était déserte et qu’une manifestation devant le « fémur des lamentations » a été dispersée… 
« C’est dur d’enseigner la sélection naturelle à distance » 
Un bon «  vaccin » comme il est dit au dos de l’album.

lundi 17 mai 2021

Le fabuleux destin d’Amélie Poulain. J.P. Jeunet.

Le film aux 24 millions d’entrées ne s’est aucunement déprécié au bout de 20 ans : le charme est intact, les trouvailles toujours aussi délicieuses. Hors du temps.
Nous retrouvons un Montmartre éternel, Paris colorisé, accordéon, bistrots et épicerie, foire du Trône, pavillons de banlieue, nains de jardins, concierge, photomatons et collections diverses, solitudes, petitesses et gentillesses, poésie, esprit d’enfance et vision d’une humanité drôle et fantaisiste vivement croquée.
Un peintre passe son temps à reproduire un Renoir et invite à profiter de la vie. 
« La chance, c’est comme le Tour de France : on l’attend longtemps et ça passe vite. »
On s’amuse derrière un Dussolier en voix off à reconnaître les acteurs charmants qui révèlent la magie depuis des situations qui ne restent pas longtemps banales : le « fabuleux » du titre est parfaitement illustré.
Nous passons de scènes cocasses à l’émotion et partageons intimement des petits plaisirs qui ne sont pas toujours aussi avouables que celui de casser la croûte sucrée d’une crème brulée, tout en prenant du recul autour des écrans en abyme.
Le parcours d’une espiègle qui fait le bien autour d’elle réussit l’exploit de ne jamais être mièvre et nous fait du bien à nous aussi. 
« Si Amélie préfère vivre dans le rêve et rester une jeune fille introvertie, c'est son droit. Car rater sa vie est un droit inaliénable. »

dimanche 16 mai 2021

Oh ! Pardon tu dormais… Jane Birkin.

Fidèle à la fragile sylphide 
je n’ai pas perçu que sa voix avait vieilli, et avec ses paroles sur des musiques d’Etienne Daho et de Jean Louis Piérot, je pensais revenir en terrain connu parmi les rayonnages qui rétrécissent de la chanson française.
Les jeux sur la pudeur ou l’impudeur sont à la base de la poésie, et  peuvent s’illustrer par exemple dans un duo intitulé  « F.r.u.i.t. » ou l’anglaise ne veut pas dire « sexe », alors que le compagnon auquel elle lia son destin, fit sa notoriété entre autres avec quelque Mickey maousse,  
« gourdin dans sa housse ».
L’ambigüité sur la force des mots court tout au long de l’album.
On entend «  t’as fini de m’emmerder » en cours de conversation,  
« Oh pardon tu dormais… », fin pathétique d’un amour,
mais encore « Promis je t’emmerderai plus »,
en conclusion de « Ta sentinelle » 
et « Dors ! Tu m’emmerdes ! » dans « Je voulais une telle perfection pour toi » 
alors que contraste « l’herbe avait cette odeur de pipi »
dans Paris qui « s’ouvrait comme un coffre à bijoux ». 
Il peut bien y avoir « l’institut médico-légal » 
pour rimer avec « vide sidéral » 
dans la remarquable et déchirante chanson « Cigarettes » puisqu’il est question de la mort de sa fille :
« Ma fille s’est foutue en l’air, et par terre on l’a retrouvée ».
Et encore dans «  Ces murs épais »: 
« Comme je les hais ces murs épais ».
Le sort des amours penche vers des thèmes à peine moins noirs :
« Max », quitté, appelle la sincérité et de belles images : 
« Mon ombre atroce s’est décollée de moi et elle me fait peur » 
« A marée haute » connaît les basses eaux : 
« Si tu ne m’aimes plus, je n’m’aime plus non plus ».  
« Pas d’accord » : 
« Tu m’as touché aux ailes je suis blessée ». 
« Telle est ma maladie envers toi » : 
« Oui, comme l’herbe, ma folle jalousie pousse » 
Je croyais «  Catch me if you can » plus primesautier comme le titre le laissait entendre, mais : 
 « Will you protect me
From the fear of growing old?
Me protégeras-tu?
De la peur de vieillir » 
Pour qui les fantômes sont familiers « Ghosts » peut presque  rassurer avec 
« Grandpa, Grandma, Mother, Father, Daugter, Nephew, Cats, Husbands and Friends »
en ribambelles.
Pourtant même « Les jeux interdits » se jouent au cimetière : 
« Elles enterraient tout
Porcelaines échangées, mes assassines
Légères et clandestines », 
ses autres filles.

samedi 15 mai 2021

Petit pays. Gaël Faye.

«
Le jour se lève et j'ai envie de l'écrire. Je ne sais pas comment cette histoire finira. Mais je me souviens comment tout a commencé. »
 
J’avais attendu pour rencontrer cet auteur enseveli sous les compliments à propos d’un sujet horrible et plein d’ombres : la guerre civile au Rwanda, alors que la tenue, le style, l’habileté du montage passant de la paix à la guerre avec pudeur amplifient la force du témoignage.
Dans ce grand livre, le narrateur réussit pleinement le pari périlleux de prendre la voix d’un enfant et traite de la fin de l’innocence dans un récit bouleversant. 
« Mais le Rwanda du lait et du miel avait disparu. C’était désormais un charnier à ciel ouvert. » 
Je suis embarrassé d’images conventionnelles, mais ne sais résumer ces 215 pages, qu’en employant des mots trop grands: tout est traité avec délicatesse dans ce passage du Paradis à l’Enfer.
Les portraits sont parfaitement brossés : 
« Il adorait les chanteurs français romantiques qu’on entendait en boucle à la radio, ceux qui parlaient d’amour et de tristesse, et de tristesse en amour. Lorsqu’il les reprenait, ces chansons devenaient siennes. Il fermait les yeux, grimaçait, pleurait, et alors toute la famille se taisait, même la vieille Rosalie qui ne comprenait pas un mot de français. On l’écoutait sans bouger, ou alors seulement le bout des oreilles comme les hippopotames qui flottent dans les eaux du port. » 
Quelques réflexions sans affectation scintillent: 
« Je détourne le regard de ces images, elles disent le réel, pas la vérité. »
« On ne doit pas douter de la beauté des choses, même sous un ciel tortionnaire. Si tu n'es pas étonné par le chant du coq ou par la lumière au-dessus des crêtes, si tu ne crois pas en la bonté de ton âme, alors tu ne te bats plus, et c'est comme si tu étais déjà mort. »
Et dans cet univers saccagé, un épisode sur le réconfort apporté par les livres vient comme une mise en abyme, car ce panorama depuis le cœur d’un continent déroutant, fascinant, lointain, nous concerne et nous marque : 
« Il faut se méfier des livres, ce sont des génies endormis. »

vendredi 14 mai 2021

Quand ça a commencé à partir en vrille ?

Sans remonter au serpent qui tenta Eve, cette formule peut se décliner en pire, sous des airs désinvoltes pour broder à propos du regret du temps d’avant, telle « Pénélopsolète ».
Nous avons perdu le goût de la conversation, notre sensibilité aux autres, symptômes d’une épidémie de déshumanisation, alors que les épidermes sont de plus en plus réactifs à toute contrariété. « Burn-out » comme langue universelle et pas de maison nouvelle à côté.
Depuis quand se sont inversées les valeurs qui faisaient de la laïcité la frontière entre droite et gauche ou que le slogan de SOS racisme:  
« La France c'est comme une mobylette pour avancer il faut du mélange »  
soit devenu obsolète à l’heure des réunions non mixtes ? 
Tant de facteurs sont à l’œuvre qu’il est tentant de prendre le petit bout de la lorgnette pour aller voir du côté des « étranges lucarnes ». Les émissions d’Evelyne Thomas, livrent au public des éléments de la vie privée de bienheureux sous les spots, mettent un nom à la marchandisation de nos vies et à l’indécence, mais n’épuisent pas la question. L’émission « C’est mon choix », partie, est revenue : une longévité remarquable, mais ne confondons pas signe tapageur et causes du brouillage des valeurs. Même si la présentatrice fut un instant promue pour servir de modèle au buste de Marianne, ce ne peut être que piètre facétie de lui attribuer quelque responsabilité dans la dégradation de nos mœurs.
Les formules brouillant nos repères ne datent pas d’un mois de mai joli.
Histoires bousculées: nos pères avaient été saoulés des récits de la première guerre, quand nous, nous n’avions su retenir de la seconde que ce qui arrangeait nos héroïsmes d’opérette quelque peu resucés.
Nous voilà « boomers » à notre tour dans la corbeille à papiers de l’histoire.
Le vieux laisse la place au neuf,oui! Mais il regimbe à se retrouver sur une affiche de campagne de vertes personnes qui prétendraient gouverner : 
« Les boomers, eux, ont prévu d’aller voter »
Nous voilà dans le même sac que les chasseurs, promis au tri sélectif : ça c’est de l’intersectionnalité, quand l’âge deviendrait une catégorie, comme la race ! Pitié ! Si j’ai voté Dumont quand il était temps, est-ce que je peux bénéficier d’un sursis avant de mériter un stage de redressement privé de sapin de Noël et de Tour de France, avec prosternation sur les tapis de la religion des opprimés ?
Insouciant citoyen vacciné, je plains ceux qui ne rencontrent dans leur vie qu’ondes nocives, société liberticide, gouvernants mal intentionnés, producteurs empoisonneurs, particules fines, soleil brûlant, entrepreneurs avides, thromboses à tous les coins de rue, ministère à la fois trop dirigiste ou tardant à donner des consignes, et culture introuvable …
Par contre c’est sur le registre comique que je vois les lycéens manquer les cours dès la reprise des cours pour refuser de passer le bac puisque les cours pour le préparer ont été perturbés. L’UNEF va pouvoir bénéficier d’un bon arrivage de victimes que tous les médias plaignent déjà. Quand l’expression «  des trous dans la raquette » devient lieu commun, le conformisme des apitoyés envers la jeunesse coule de source, le courage a déserté les salles où l’on ne rédige plus guère quand les tweets parlent aux tweets. Il est vrai que dans la vraie vie la couardise est  devenue indispensable, alors que sur les réseaux aux interlocuteurs masqués, la violence se déchaine.
En cherchant une citation pour ficeler cet article qui ne sait répondre à la question initiale, je ne pensais pas tomber sur Jacques Chirac, dont pas plus tard que la semaine dernière,http://blog-de-guy.blogspot.com/2021/05/mettre-les-petits-blablas-dans-les.html j’avais évoqué le nom dans une situation moins favorable. Je dorlote les contradictions. 
« C'est le déclin quand l'homme se dit “Que va-t-il se passer ?”,
au lieu de dire “Que vais-je faire ? » 
L’ancien président a arrangé bien du monde à paraître comme le prince au palais dormant et n’a pas vraiment contredit ce qu’il énonce ci-dessus. Je trouve ces mots pourtant justes depuis mon banc à regarder passer les divisions de la gauche fantôme, sous les clameurs d’une sono assurée par jaunes et bruns.