« Les noces de Cana » de Véronèse mesurant 70 m2 étaient
destinées au grand réfectoire des bénédictins de San Georgio Maggiore à Venise.
La toile, maintenant au Louvre, comporte 132 personnages pouvant donner à voir
aux moines astreints au silence pendant les repas.
« Ceux qui cherchent Dieu peuvent le trouver où on ne l’attend
pas. »
Le récit de la transformation de l’eau en vin n’est présent
que dans l’évangile le plus récent (90), celui de Jean, le plus singulier.
De réforme en contre-réforme, après cent ans de guerre, l’art sacré se
distingue de l’art profane, Véronèse devra comparaître devant
l’Inquisition, nous sommes au XVI° siècle :
« Nous, les
peintres, prenons des libertés tout comme les poètes et les fous ».
« L’art permet de voir Dieu qui voit les humains »,
et la parole divine peut rapprocher tout le monde.
Dans le bleu d’un ciel habité, une trinité d’oiseaux
représente le Père qui a donné son fils, et le Saint Esprit l’a fait savoir. Si
le chiffre six pour l’autre vol correspond au vendredi jour de la Passion, c’est
au sixième jour que Dieu créa les hommes. Le campanile rappelle la prière qui
est l’acte de se mettre devant Dieu pour être regardé par lui, après avoir
fermé la porte.
Dans l’orchestre qui mène le bal seraient représentés :
Véronèse, Bassano, le Tintoret,
et le Titien.
Le rouge dit l’amour, le blanc la pureté, c’est un mariage.
« L'homme
quittera son père et sa mère, et s'attachera à sa femme, et les deux
deviendront une seule chair. »
Derrière la balustrade, les pauvres viennent chercher les
surplus à la fin du repas comme il était réglementaire dans la cité des doges
où les fêtes étaient nombreuses.
Les six jarres pleines de l’eau de purification des juifs sont désormais remplies de vin et les convives à bonne trogne s’étonnent que leurs verres ne soient plus vides.
Le fou avec son perroquet sur l’épaule peut rappeler
quelques vérités, quand richesse et pauvreté se côtoient, comme la joie et la
tristesse, l’amour et la division, la lumière et l’ombre, l’eau et le vin , les
« c’est fini ! » avec « encore ! ». Un chat, être
ambivalent, pose sa patte sur la sculpture d’un satyre, divinité antique plus
guère en odeur de sainteté.
Le maître de Sienne permet à chacun d’entendre sa musique
dans la cacophonie du monde.
Le tableau de Rembrandt « Les Pèlerins
d'Emmaüs » est bien plus petit (43 cm X 44 cm) dans cette version
parmi dix du peintre de 23 ans au musée Jacquemart André.
« Le troisième
jour après la mort de Jésus, deux disciples faisaient route vers un village
appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient ensemble
de tout ce qui s’était passé. Or, tandis qu’ils parlaient et discutaient, Jésus
lui-même s’approcha, et il marchait avec eux. » Evangile de Luc.
Ils s’aperçoivent qu’il est « le ressuscité », à
l’auberge, quand il rompt le pain.
« Alors leurs
yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs
regards. »
De la difficulté de voir qui marche avec nous, et celle de croire
quand le maître n’est pas là. L’un se déplace tout à son étonnement, l’autre
s’agenouille dans l’humilité, sa chaise est tombée. Des ténèbres jaillit la
lumière, Dieu se manifeste dans la détresse.
C’est la représentation de l’Eucharistie( détail du Rembrandt de Jaquemart André), « ceci est
mon corps », une théophanie : apparition d’un message divin. L’homme
n’est plus seul. Ils reprendront la besace pour aller dire la bonne nouvelle. La silhouette de la servante donne de la
profondeur au tableau et sur le mur la lumière révèle nos failles.
Les couleurs sont calvinistes et le clair obscur plus obscur
encore que celui du maître Le Caravage.
Quand vint le temps des questions, un spectateur fit
allusion à la « métaphore vive » de Paul Ricoeur, mais si le terme m’a intrigué,
les explications que j’ai pu trouver m’ont parues bien obscures. Par contre,
j’ai appris en cours de soirée qu’Emmanuel signifiait : «
Dieu est avec nous », un christique candidat a travaillé avec le philosophe.