dimanche 28 octobre 2012

Dance. Lucinda Childs.



Quand  après avoir vu son spectacle j’ai cherché quelques renseignements sur la chorégraphe, l’étiquette "post moderne" lui était apposée, notion qui m’évoque Coluche dans «  Omo, plus blanc que blanc » : après le moderne qui date de la renaissance, des cubistes, de la mercière qui a fermé sa moderne boutique, c’est encore du moderne.
Bref !
Le spectacle est bref et pour moi il aurait pu durer jusqu’au bout de la nuit ; les musiques répétitives de Phil Glass ne finissent jamais. La danse se fond dans les rythmes lancinants où se découvrent d’infinies variations, les danseurs sont impressionnants et élégants même pendant les rappels. Parfois, j’aime la beauté quand elle est froide.
Je me suis retrouvé dans cette quête élémentaire du bon pas, comme on peut chercher le mot juste, la seconde exacte où la photographie saisira une vérité.
Nous sommes entrainés dans un tourbillon hypnotique d’une énergie sans transpiration, d’une séduction qui donne le vertige. J’ai pensé aux derviches tourneurs.
Si le temps est aboli durant une heure, l’espace est chamboulé lui aussi avec des projections sur un écran de gaze discret d’images de Sol Lewitt qui accompagnent les 12 acteurs impeccables dans leurs déplacements acharnés et légers, insistants, au-delà de nos pesanteurs.
Quand la rigueur la plus impressionnante donne cet air de liberté le plus élevé, nous applaudissons.

samedi 27 octobre 2012

L’art d’être grand père. Victor Hugo.



Le libraire a été avisé en plaçant en bonne vue le dernier recueil de poèmes de celui qui est bien plus qu’une icône de la république quand elle était fière.
Depuis belle lurette je n’avais acheté de la poésie en pack, le titre m’avait plu, et je venais de vérifier :
« Lorsque l'enfant paraît, le cercle de famille
Applaudit à grands cris.
Son doux regard qui brille
Fait briller tous les yeux,
Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être,
Se dérident soudain à voir l'enfant paraître,
Innocent et joyeux. »
Ces vers si justes ne figurent  d’ailleurs pas dans ces 260 pages, ils sont extraits des « Feuilles d’automne ».
Par contre « Jeanne était au pain sec » figure dans ce recueil programmatique parmi tant d’autres poèmes. Ces vers à profusion élèvent nos perceptions, nous soulèvent  au dessus du tapis d’activités. Ils m'enchantent le regard au moment où l’œil de ma petite brille, et que ses  premiers mots surviennent,  moment de poésie pure.  
Nous apprenons, non en gaga servile prosterné devant des prouesses technologiques, mais à la source des commencements quand la moindre abeille fait merveille.
Dans son exil à Guernesey,  Victor Hugo vit avec ses deux petits enfants Georges et Jeanne. Il vient de perdre sa femme, ses fils Charles, et François-Victor. Adèle sa fille est internée.
Bien sûr les références à l’antique m’ont dépassé et ses allusions à des contradicteurs d’alors m’indiffèrent, comme ces gouffres sombres qui s’ouvrent  trop souvent en bout de ligne. Parfois j’ai eu le sentiment de me retrouver dans un jardin à la française peuplé de statues alors que c’est lui qui nous apprend aussi à préférer les fécondes broussailles.  
Quelle force, quelle fluidité, quelle humanité ! Il se coltine aux bigots et regarde vivre l’innocence, il extrait de chaque vibration de l’air de sublimes images.
« Je suis l’ancêtre aimant ces nains que l’aube azure,
Et regardant parfois la lune avec ennui,
Et la voulant pour eux, et même un peu pour lui ;
Pas raisonnable enfin. C’est terrible. Je règne
Mal, et je ne veux pas que mon peuple me craigne ;
Or, mon peuple, c’est Jeanne et Georges ; et moi, barbon,
Aïeul sans frein, ayant cette rage, être bon,
Je leur fais enjamber toutes les lois, et j’ose
Pousser aux attentats leur république rose. »

vendredi 26 octobre 2012

Peut-on encore produire en France ?



Au forum de Libération désormais lointain, dont je donne un dernier compte rendu, ce débat majeur concernant le « made in France » est revenu alors que les produits Apple par exemple sont « made in Monde ». Quand en Allemagne il s’agit plus d’assemblages : « Made by Germany », avec externalisation des productions dans les pays de l’Est.
Le rappel que depuis les années 80 la France a perdu 2 millions d’emplois industriels, pose des questions cruciales. Cette saignée est sans égal en Europe.
Parmi les intervenants Pascal Canfin alors député européen EE, les verts, très pédagogique :
« J’ai visité récemment une scierie dans les Ardennes : les arbres sont coupés en France puis les troncs partent en Chine pour être transformés en planches de parquet qui sont ensuite vendues en France. »  
« Dans le tunnel du Mont Blanc, un camion français chargé de bouteilles de Badoit croise un camion italien chargé de bouteilles d’eau San Pellegrino. »
Jacques Rigaudiat, économiste : 
« la mondialisation, c’est d’abord et principalement l’Europe : elle représente les 2/3 de notre commerce extérieur. L’Allemagne - cliente ou vendeuse - est notre premier partenaire ; et il faut sans doute quelque peu se forcer pour admettre que nos importations depuis la Belgique, ou l’Italie, ne sont que de peu inférieures à celles en provenance de Chine ! Et que c’est avec la Grande-Bretagne que notre excédent est le plus important ! »
De quoi secouer des idées toutes faites avec de surcroit Gérad Mancret de la  CGPME de l’Isère qui souligne les blocages culturels de « la France qui n’aime pas son industrie », en témoigne l’orientation dans l’éducation nationale quand Polytechnique produit  aujourd’hui plus de traders que d’ingénieurs !
Ce n’est pas le coût du travail qui plombe la France, la main d’œuvre représente seulement 10% de la valeur des produits, par contre l’absence de politique en matière de change pénalise les entreprises qui attendent une harmonisation fiscale et sociale.
La relocalisation semble peu plausible sauf dans l’agro alimentaire mais le rapport de force avec la Chine néo-impérialiste suppose un volontarisme qui dépasse les effets d’annonce d’un jour en appelant à la réciprocité.
Les intervenants ne se sont pas attardés sur  les causes d’une situation dégradée gravement  avec la grande distribution en outil de destruction ni sur le blocage des prix qui a coûté cher au tissu industriel.
Les propositions n’empruntent pas les facilités tribuniciennes du protectionnisme, quand l’état   reprendrait vigueur en stratège répondant aux besoins sociaux par le développement des services collectifs.
Avec la simple idée d’augmenter la durée de garantie des biens comme l’électro ménager nous avancerions vers une économie plus durable. Investir dans l’isolation des logements permettrait  aussi de diminuer l’importation d’énergies fossiles.
Plus récemment Rocard  rappelait: « les délocalisations pèsent pour moins de 9% de notre chômage. »
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Proposé sur Facebook:
 

jeudi 25 octobre 2012

L’histoire de France vue d’ailleurs. Books.



Un dessin du chapeau de Napoléon figure en première page de la revue « Books » de juillet août pour illustrer les cent pages consacrées à notre histoire vue depuis l’étranger.
C’est que le corse est le français le plus connu dans le monde, il fut populaire jusque chez les anglais.
Nous sommes invités à réviser bien de nos images : Charlemagne n’a pas vraiment créé l’Europe, cependant « il œuvra pour le renouveau des écoles et de la connaissance », Saint Louis ne gardait point l’épée dans son fourreau,  Jeanne ne s’appelait point d’Arc, et la figure de Robespierre reste encore énigmatique, le couple Thorez/Vermeersch élevé hors sol témoigne de la foi d’alors dans l’URSS. L’instrumentalisation ne date point d’aujourd’hui : pourquoi Jeanne  oubliée après sa mort renaitra ? La sanctification du Louis vint à un moment où l’église s’affaiblissait.
«Les morts vivent plus longtemps en France que partout ailleurs » Sudhir Hazareesingh
Tout aussi mythiques, des phénomènes collectifs tels que la sorcellerie sont revisités, ainsi que la légion étrangère, l’exode de 1940 venant après celui de 14, la guerre franco anglaise de 1940 à 42…
La pauvreté sous la révolution française ne régressa point.

mercredi 24 octobre 2012

Jacques Danguit, peintre.



L’ancien président de L’ACDA (Atelier de Création et de Développement Artistique) où j’ai trainé un moment mes crayons exposait  récemment à Saint Egrève.
Je suis allé voir ses toiles au moment où des enfants qui étaient à l’accueil péri scolaire arrivaient.
Cette exposition  pleine de couleurs et d’optimisme est  vraiment faite pour eux.
Les villages sont ensoleillés, les champs emplis de fleurs et lorsque une petite fille apparait au bord d’une falaise, soyons sûr qu’elle atterrira sur ses pieds.
Les rochers de son Vercors rythment agréablement ses toiles de différents formats et ses maisons charmantes au bord de la Méditerranée sont celles des livres d’images que l’on a envie d’habiter.
Une de ses comparses avait beau lui reprocher de m’avouer qu’il avait recouvert d’anciennes toiles pour présenter ses nouvelles productions, j’aime imaginer sous la riante couche d’acrylique quelque mystère sous-jacent.
Il est aussi un des responsables de l’organisation du mois du graphisme d’Echirolles, alors ses compositions se devaient d’être rigoureuses.
Si l’on trouve un aspect bande dessinée à ses peintures, l’ancien conseiller municipal de la banlieue sud  n’y verra pas noise, il élargira un peu plus son éternel sourire.

mardi 23 octobre 2012

Storeyville. Frank Santoro.



Quinze cases par page au format d’un journal américain sur 40 pages forment un album hors norme dans sa version cartonnée (28 x 40 cm).
Pendant les années 30, Will un jeune vagabond, circule clandestinement dans des trains de Pittsburgh à Montréal à la recherche de son père « spirituel ». Le découpage est intéressant et convient bien  pour décrire l’errance. Les paysages sont bien dessinés mais le crayonnage à l’état d’ébauche ne m’a pas convaincu quand il s’agit de traiter les personnages.
Et le ton dithyrambique de la préface n’a fait qu’accroitre ma déception en regard d’une complaisance qui se rencontre assez souvent dans les chapelles de la BD.
« Malgré sa diffusion réduite, ce travail n’en est pas moins considéré comme majeur par de nombreux auteurs et spécialistes de bande dessinée. »
Moi, je n’ai pas vu tout ça. Une histoire d’initiation, nonchalante, où le dessin à son premier jet peut traduire une certaine énergie mais aussi une posture arty qui éloigne l’attention.

lundi 22 octobre 2012

Adieu Berthe ou l’enterrement de mémé. Les Podalydès.



Cette comédie servie par de bons acteurs n’est pas expéditive comme peut  le laisser penser le titre ; elle ne fait pas sa maline.
Loufoque et mélancolique, délirant et tendre, le film traite de l’indécision, de l’amour, de la mort,  légèrement : alors crémation ou ensevelissement, ma femme ou ma maîtresse, funérailles cool ou new age?
Quand les affèteries 3D ne fonctionnent pas, la bonne vieille magie opère ; c’est affaire de famille.
Léger, il nous parle de notre époque  où les SMS ont remplacé les lettres.
La poésie circule sur une trottinette électrique pour aller de l’enfance vers des rivages plus âpres où l’humour permet de s’échapper.