vendredi 3 avril 2009

Vers la douceur. Bégaudeau

J’avais aimé le livre « Entre les murs », je suis retourné vers l’auteur branché dès la parution de son dernier roman. En croyant mieux apercevoir à travers son style nerveux une époque qui m’échappe, je me vautre avec complaisance dans mon péché mignon : courir après la nouveauté. Je n’avais même pas pris connaissance des critiques, dont celle assassine du Nouvel Obs.
Sûrement pour plus de profondeur, je devrais lire Proust et revoir Stendhal ; les pages du prof défroqué tiennent de la bande dessinée en moins drôle, de la chanson de Vincent Delerm en moins gentil, de la désinvolture bobo et de ses dépressions élégantes.
« Il ne se passait rien dans le train du matin. Dans le train du matin jamais rien ne point… »
Le titre est à comprendre à je ne sais quel degré, car il y a si peu de tendresse, de douceur, sinon celle qui accompagnerait l’endormissement après avoir consommé trop de bières et de chips au goût barbecue… animal triste. Je suis allé au bout sans ennui, sans passion. Le name dropping est le sésame de la connivence avec le lecteur. Les personnages sont bien croqués, mais tout est mis sur le même plan : ainsi pirouettent le désespoir, des allusions à la politique, des échos de match de rugby… « Evalué rebondi dans l’œcuménique rut vespéral, son cul était jugé trop gros dans l’intransigeante amertume du matin »
L’illustration provient du musée dauphinois, c’est la Fanny de métal des jeux de boules, que l’équipe perdant par 13 à 0 devait embrasser d’où l’expression « prendre une tôle ».

jeudi 2 avril 2009

Jules Flandrin

Le musée de l’Evêché propose des tableaux de Jules Flandrin, jusqu’au 20 avril.
Il a fréquenté bien des écoles : les Impressionnistes, les Nabis, les Fauves, il a copié bien des classiques.
Il a fait valoir ce qu’il avait appris avec une vigueur bien à lui.
De jolies scènes bucoliques, des portraits d’enfants charmants, des dessins vigoureux, des toiles lumineuses. Cette exposition permet de réviser les caractéristiques d’un début du XX° siècle foisonnant de créativité, en passant un moment agréable.
J’ai découvert cet artiste qui faisait vaguement partie des meubles locaux, avec plaisir, gratuitement.

mercredi 1 avril 2009

Mathématiques Faire classe # 27

Jadis matière reine, les maths ont connu bien des bosses mais aujourd’hui, peu de problèmes se posaient jusque là, avant que des évaluations prématurées en CM2 viennent alerter sur le sujet. Diagnostic d'un inspecteur général: "on fait trop de français". Si, si: il va falloir évaluer les inspecteurs généraux!
La mathématique moderne provoqua des expériences aventureuses mais brèves.
Des séquelles d’incompétences notoires subsistent dans la vie courante pour ceux qui furent exclusivement nourris aux inclusions et patates, pour lesquels la représentation de 33 cl de bière reste une énigme. La leçon de cette catastrophe, engendrée quand les chercheurs prennent seuls le pouvoir, est-elle intégrée ? J’ai pourtant gardé de ce temps une approche d’autres bases de numération que la décimale pour mieux comprendre, prendre du recul par rapport à 99+1= un, zéro, zéro? Dire qu’il fallait quinze séances à ce sujet dans les années 70 ; au XXIième siècle deux heures suffisent : le niveau monte. Les chiffres de l’O.C.D.E. sur ce terrain et les médailles Field attestaient de la bonne santé de la matière.
Apprendre à vivre avec l’incertitude s’affirme comme une injonction et tous les jours nos convictions s’effritent, la précarité s’installe. Alors quel apaisement d’aborder la contrée des nombres incontestables, des lignes claires, des jardins ordonnés même s’il existe, me dit-on, des propositions "indécidables" ! De toutes façons pour les démarches : « peu importe la couleur du chat pourvu qu’il attrape les souris ». Quand la vérification du résultat tombe juste, quel plaisir et quand il a fallu transpirer que de satisfactions !
« La terre était informe et vide ; les ténèbres recouvraient l’abîme…Dieu dit : " que la lumière soit ! » et la lumière fut. Et dieu vit que la lumière était bonne… » La genèse
Les outils :
- Un cahier de maths recueille les exercices quotidiens réalisés à la main.
J’employais plusieurs livrets « maison » ( feuilles 21X29,7 pliées en deux assemblées sous une couverture amusante). Je ne recourais pas à un manuel unique, mais confectionnais des recueils d’artisan où les élèves écrivaient, calculaient. Constitués après des années de photocopies réalisées au jour le jour, et puis scanner aidant, ces outils clairs et maniables évitent les collages surabondants dans les cahiers d’antan à l’aspect double-cheese. Ce matériel concrétisait une programmation sur l’année. Des recours personnalisés et approfondis sous l’appellation « maths plus »attendaient les élèves en difficulté.
- Un livret pour le calcul rapide et le calcul mental où figurent des grilles vierges consacrées aux révisions chronométrées de tables, des cases prévues pour les réponses aux thèmes progressifs abordés un jour sur deux, de petits problèmes à résoudre sans poser d’opération, une partie autocorrective pour quelques techniques opératoires. Les élèves notent les évolutions. Rapidité.
- Un livret pour les problèmes et exercices, intitulé « Exos rapidos et mémo » grappillés dans une multitude d’ouvrages d’auteurs différents pour éviter le formatage. Diversité.
- Un livret pour les défis maths. Douze séries de dix situations mathématiques à résoudre en groupe en une heure.
Le rituel hebdomadaire :
Samedi, délicieux samedi matin, la classe était partagée par affinités en cinq ou six équipes :
« les gunners » « les pros des maths » « les mouettes »… Une heure pour recueillir le maximum de points en plus ou en moins des 100 points alloués. Les scores tournent en général autour de 160. Certaines des dix réponses rapportent plus que d’autres (de 3 à 15 points). Chaque équipe délibère pour miser un joker sur la solution la plus sûre et double les gains ou les pertes. L’émulation joue systématiquement car c’est rarement la même équipe qui gagne ; des suffisances ont été ébranlées. Les énigmes varient dans les domaines de la numération, des mesures, de la logique, des opérations. J’ai trouvé chez les éditions Retz qui proposent ces problèmes judicieux, les meilleures situations pour un travail en équipe qui ne relève pas du simulacre. Sur ce terrain, s’édifie une entreprise efficace, coopérative, évolutive. Un élève seul ne peut pas tout résoudre : nécessité de se répartir les taches, de négocier. Une confiance aveugle au début est assurée à celui qui s’est gagné une réputation de « fort en maths » mais à être bousculé par le temps, il peut se tromper. Il faut vérifier, se mettre d’accord, partager.
La forme habile des problèmes induit que chaque réponse soit validée par d’autres. Le lent, le maladroit peut apporter sa fraîcheur pour accoucher de la bonne réponse et mériter sa petite part de gloire dans un domaine inattendu pour lui. Gagner de la confiance. La pédagogie de l’enseignement mutuel passe par d’autres mots, d’autres cheminements que la parole de l’adulte. Stimulés par le temps qui semble souvent trop court, le frisson de la compétition n’atteint pas les perdants dans leur individualité mais stimule les vainqueurs et incite à la correction les étourdis, lecteurs inattentifs ; moments de travail intense, bourdonnant. Ce zèle s’éteindra peut- être pour quelques-uns uns ; privilège de l’instit, j’ai goûté à ces moments de grâce.
Ce rendez-vous apprécié du samedi a débouché plusieurs années durant sur une compétition au niveau national qui couronnait l’année et là toute la classe ne faisait qu’un.
« Avoir un bon copain
c’est tout ce qui a de meilleur au monde »
J. Boyer
Le cérémonial quotidien :
Assez immuable, a-t-il contribué à ce que ces heures se passent sans ennui manifeste ?
- Révisions de tables ; sur le bristol personnel de la table de Pythagore, le voisin qui interroge barre les réponses exactes, le propriétaire noircit ces cases et abandonne cette aide quand tout vire au noir.
- Entraînement sur ardoise : deux groupes dans la classe : est/ouest. Claquements de mains. Réveil mathématique. Classique des classiques. Vite.
Moi qui ai peu d’habileté en calcul rapide, j’en imposais de plus en plus à l’heure des calculatrices bien que celles-ci ne soient pas dédaignées. A utiliser par exemple pour des rafales de problèmes. Elles ne nous dispensent pas de réfléchir, au contraire : est-ce que la réponse est vraisemblable ? Elles nous laissent le choix de l’opération pertinente et l’évaluation des résultats. Elles nous permettent mieux appréhender des mécanismes comme la réitération des soustractions pour mieux comprendre la division.
Du fait de mes inhibitions, de mes faiblesses en maths, je me montrais plus bienveillant et peut être plus efficace avec les élèves en détresse.
- Introduction de la notion nouvelle : je m’appuyais sur des situations concrètes, si possible amusantes avec des dessins « humoristiques »au tableau,
Il peut y avoir de bonnes vidéos et je verrais bien une courte séquence de sauts en longueur à la télé dont les résultats introduiraient une séance sur le classement des décimaux. Ecran plat dans la classe ou vidéo projecteur : on ne se refuse rien.
- Le bloc sténo, les livrets, le cahier entrent dans la danse.
- Correction individuelle si possible. Les cahiers fautifs sont corrigés ensemble, les écoliers qui « ont bon » passent à leur travail personnel. Ceux qui accumulent encore beaucoup d’erreurs prolongent avec « maths plus ». Si plus de la moitié de la classe n’a pas acquis : c’est moi qui ai mal mesuré la marche : il faudra ralentir, revenir.
Aujourd’hui des sites bien faits se multiplient sur le net et renouvellent les approches, ils conviennent bien pour le soutien. Mais si les ordis ne demeurent pas à proximité de la classe des problèmes d’encadrements entravent l’efficacité. Les emplois - jeunes dépassaient un rôle d’auxiliaire s’il y avait place dans les plages horaires.
Les années m’ont amené à être plus rigoureux sur le respect de l’emploi du temps. Combien de fois avais-je trop débordé au détriment d’autres matières pour une efficacité presque nulle ? Il vaut mieux garantir une heure de dessin, les mathématiques n’en pâtissent pas, la mauvaise conscience est une conseillère impérieuse et juste.
Géométrie :
- Un porte- vues recueillait chaque semaine un recto-verso A3 avec suffisamment de place pour les tracés. Certains effectuent beaucoup d’aller-retour avant de rendre un travail soigné. Le bloc sténo rend encore des services pour s’entraîner.
J’ai pu vérifier ce qui me semblait fantaisiste : un enfant dans un environnement exigu est souvent plus maladroit. Les lignées bien fournies ne tirent pas toujours les lignes bien droites. Bien dotés: nous possédions de grandes tables dans la pièce attenante, propices à des soutiens en petits groupes, enseignement mutuel ou magistral.
Les jeux de stratégie, à pavage, figures à reproduire, tangrams, sudoku sont réunis sur un rayonnage accessible : pour aller plus loin et autrement. Quelques postes d’ordinateur à disposition offrent une mine infinie de propositions mais le bon vieux pentamino à emboîter rend aussi bien des services. Le musée des maths, une banque de ressources.

mardi 31 mars 2009

Les Kinés #1

« Ce qui est terrible quand on vieillit, c’est qu’on reste jeune. » Oscar Wilde.
Juliette
Les rhumatismes ? Connaissais pas.
Mais quand des douleurs sournoises ont investi bras et nuque au point de briser mes nuits j’ai consulté.
La rhumatologue, jeune Malgache aux doigts longs et fins, m’a rassurée : bien de la chance que ça vous arrive si tard…
Elle m’a piquée le cou, des images de mygales traversaient mon écran frontal.
« En attendant je vous donne quinze séances de kiné. Mais vous savez ce n’est pas un traitement curatif, ce n’est qu’un soin des symptômes. »
Ouais, en attendant les soins palliatifs ! Quand on devient vieux on peut être sûr que par malchance, ça va durer.
J’ai pris rendez-vous chez la kiné du bourg voisin : Juliette. Fortiche, au courant des dernières nouveautés. Ce qui est bien en général avec les kinés c’est qu’on peut se livrer en leur compagnie à une thérapie remboursée par la Sécu. Pendant que la praticienne vous étire, vous malaxe, vous pinçotte, vous gnognotte, vous ramolotte, elle vous parle et vous lui parlez, d’abord par politesse. Puis comme vous aimez les mêmes livres et les mêmes films et que vos petits-enfants ont l’âge de ses enfants, vous en arrivez à échanger des points de vue et des sentiments intergénérationnels. C’est quelque chose d’entendre que la mère de la kiné, que sa grand-mère même, pensent comme vous. Exactement comme vous. Personnellement ça ne me rassure pas d’être formatée à ce point mais Juliette, ça l’attendrit et j’ai droit à une caresse entre deux étirements. Toujours ça de pris. Qui ferait du mal à sa grand-mère ? Quant à sa mère, la réponse reste ouverte.
Nous avancions pas à pas dans la connaissance de nos réciproques environnements quand est apparu le mari de la Kiné, non pas dans l’embrasure de la porte de la salle des délices mais sur les lèvres bien ourlées de son épouse. « Il a des doigts de magicien, Virgile. L’as du massage thaï… ». Ses mains quittèrent quelques secondes mon épaule gauche comme si elle se passait un film très personnel.
Bon sang, il y avait encore des gens capables d’appeler leur fiston Virgile au lieu de Kevin ou… J’ai la flemme d’aller consulter mon Télé Sept Jours.
Un masseur romain et poète…
De séance en séance j’en appris un peu plus sur les capacités, talents et compétences de Virgile, le masseur thaïlandais prodigieux
Certes, Juliette, avait du savoir-faire. A la cinquième séance je ne souffrais déjà plus de mes cervicales. Mais je crois que ce qui me soignait le mieux c’étaient les descriptions du fameux Virgile coulant de la bouche bien ourlée de son épouse vers mon cou en processus inexorable de flétrissement.
Et Virgile était maître de Kwen Khi Doo (art martial plutôt hard) ! Et Virgilinounais aussi commettait des textes (c’est bien la moindre des choses) ! Et Virgilamour, les femmes en étaient folles. « Ah ! Il est si beau, le visage coupé à la serpe et le nez fort comme celui de Lambert Wilson. »
J’adore Lambert Wilson son nez fort et ses yeux doux.
« Et il chante aussi mon Virgile ! »
- Rendez- vous , la semaine prochaine.
Marie Treize

lundi 30 mars 2009

"Welcome"

C’est ce qui est écrit sur le paillasson du voisin qui va dénoncer Vincent Lindon. Nous venons de découvrir que c’est un délit d’avoir de la compassion pour d’autres hommes. Pourtant la France affichait " fraternité" à ses frontons républicains. En ces temps de sarkose, les bornes n’existent pas pour les riches dont le fric est planqué ailleurs. Les frontières sont barbelées pour les plus malheureux qui passent chez nous et essaient de se faire oublier. Le film de Lioret remet sur le devant de la scène un problème majeur qui se pose à l’humanité. Rocard avait été abrégé dans son expression : « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde » mais j’avais adhéré - lâchement - à cette maxime qu’un garant de notre morale avait apporté face à des postures généreuses certes mais qui risquaient de se retourner contre les plus faibles. Besson, lui n’est pas Rocard, il incarne sans vergogne la figure contemporaine du traître. Il fait remonter les indignations, renforce ceux qui ont depuis toujours la fraternité au corps. Ce film est utile, sans schéma simpliste. Le personnage du maître nageur ne se paye pas de mots et le jeune kurde a des airs de Patrick Bruel. Aligner des longueurs de bassin vous prépare à avoir une idée de l’infini, à tenter l’impossible. Et dire une fois encore que pour un maillot, un dribble du côté de Manchester, des vies se rêvent, s’épuisent, pour une fille aussi. A bout de souffle. A certaines séances, le public applaudit.

dimanche 29 mars 2009

Delerm, le fils.

Faudra pas qu’il se plaigne, le Vincent, que l’on cause à chaque fois de son papa Philippe, parce sur le terrain de la nostalgie qu’il emprunte à son tour, on sait faire aussi du côté des quinqua;on est même des cadors. Fanny Ardant ce ne serait pas l’univers des papas ? De sieste assassinée en petits plaisirs pour les grands et les petits, j’ai aimé l’univers paisible et provincial de l’écrivain de mon age. Les clins d’œil du fils, les marqueurs d’époque du chanteur traversent les générations et nous arrangent, nous parlent à nous les babys boomers insatiables, toujours « dans le vent » pour user d’une expression surannée. Nous avons annexé la génération Zatopek, mais Wayne Rooney nous évitons de le tâcler. Alors quand le petit fait oublier ses intonations nasillardes, nous pouvons goûter sur des mélodies souvent aguichantes:
« Et avant-hier
J'ai trouvé l'argument
Qui l'a calmée, sévère
Un tacle de Patrick Vieira
N'est pas une truite en chocolat
Une tente Quechua sur le canal
Un quatre étoiles
Un dirigeant d' la LCR
N'est pas un mono d' sports d'hiver »

Oui, c’est connoté, mais nous avons besoin de ces connivences, et j’apprécie aussi la petite surprise de trouver un photographe en chanson, « Martin Parr »repris en leitmotiv par un choeur féminin.
« Casino désert
Martin Parr
Vert fluo, dessert
Martin Parr
Cheveux bleus, grand-mère
Martin Parr
Vieillir quelque part »

Et d’ailleurs : « Souvent, le cœur des volleyeuses bat plus fort pour les volleyeurs »
et c’est ben vrai !

samedi 28 mars 2009

Monnaie d’échange

Je viens d’acheter d’élégantes baguettes en fer qui servaient en Sierra Léone chez les Kissis à payer par exemple du tabac , elles constituaient la monnaie avant les pièces de la colonisation.
En 1918, un bouquet contenant 20 ou 30 liasses de 20 pièces de Kissi penny permettait de payer une vache, il fallait le double pour une femme.
Quand cette monnaie serpent se casse, l’âme s'en échappe et les morceaux n'ont plus de valeur, seul le forgeron (aussi sorcier de la tribu) a le pouvoir de faire réintégrer l'âme en forgeant les deux morceaux.
En décrivant le détournement par l’esthétique d’objets d’usage très souvent chargés de spiritualité, est ce que je m’exonère du cynisme de l’homme blanc, est ce que j’entre dans la marchandisation du monde ?
Nous retrouvons dans les boutiques d’art africain, les verroteries qui servirent pour le commerce du temps des esclaves. Et quand dans une brocante dauphinoise je marchande un album amoureusement constitué par un enfant des années 50, pour quelques sous, je me paye une tranche de mémoire. C’est le charme ambigu de ces marchés du temps.
Si la vente ostentatoire des objets Saint Laurent par Bergé m’a parue assez indécente dans ces temps ou valsent les milliards, la mise à l’encan des pauvres lunettes de Gandhi qui fut aussi le symbole du détachement m’a parue obscène. Mais j’avais acheté à Pékin une paire de lorgnons que je trouvais très mandarin de bande dessinée. Elles avaient peut être été portées par un lettré qui fut pourchassé pendant la révolution culturelle, cet accessoire désignait l’intellectuel à combattre.