jeudi 26 mai 2022

Les couleurs et les innovations au XIX° siècle. Le blanc. Serge Legat.

Avant les apports théoriques du XIX° siècle,
le conférencier devant les amis du musée de  Grenoble nous présente Léon Battista Alberti auteur au XV° siècle de « De pictura » où il associe les quatre éléments à quatre couleurs : rouge le feu, bleu l’air, verte l’eau, beige cendré la terre.
Isaac Newton
peint par Godfrey Kneller a étudié arc-en ciel et bulles de savon pour classifier les couleurs du spectre solaire en nuançant le bleu pour arriver au chiffre de sept : violet, indigo, bleu, vert, jaune, orange et rouge qui une fois mélangés donnent le blanc.
Einstein l'a validé :
 
« La lumière du soleil est blanche. Après avoir traversé un prisme, elle montre toutes les couleurs qui existent dans le monde visible. » 
William Blake donne à Newton des allures de géomètre divin dans un monotype retravaillé à la plume.
Jean Paul Marat, physicien, médecin, polémiste, avait des compétences en optique. 
Le sobre tableau de David, contribuera à sa notoriété posthume en idéalisant son martyr.
Goethe
remet en cause Newton dans un « traité des couleurs » qui lui a pris autant de temps de rédaction que Faust. 
Il pense que les couleurs nées de lumière et de l’obscurité se fondent dans le gris.
Le peintre
Philipp Otto Runge auteur du « Matin » influencé par l’auteur des « Souffrances du jeune Werther » propose aussi une « sphère des couleurs ».
D’ailleurs, les collections françaises ne recèlent que très peu de peintures germaniques : un tableau de Dürer et deux de Friedrich.
La rouge italique et la blonde s’attirent dans « Italia und Germania » d’Overbeck
Cette œuvre représente parfaitement le mouvement nazaréen, des artistes germaniques venus s’installer en phalanstère sur la terre des arts, pour un retour vers la pureté primitive dans la même veine que les préraphaélites anglais.
Le double triangle de Delacroix rejoint
« La loi du contraste simultané des couleurs » du chimiste Chevreul  
qui mettra ses compétences au service de la manufacture de Gobelins.
Si les impressionnistes cherchent  l’harmonie d’une façon empirique Seurat associe art et sciences. Le pointillisme n’est pas la bonne dénomination, il convient de parler de divisionnisme.
« Le Chahut » où la joie s’exprime au dessus de l’horizontale, juxtapose des couleurs, le spectateur par son recul fera l’addition.
Après la mort de Seurat, Signac reprend le flambeau. Les divisionnistes peignent ce qu'ils pensent, les impressionnistes, ce qu'ils voient,
partagés entre Degas et Cézanne contre Monet le dreyfusard.
Eux sont anarchistes comme Felix Fénéon théoricien du néo-impressionnisme dont le portrait ( étude) porte le titre : « 
Opus 217. Sur l'émail d'un fond rythmique de mesures et d'angles, de tons et de teintes, portrait de M. Félix Fénéon en 1890 » pour illustrer les thèses de Charles Henry « Introduction à une esthétique scientifique ».
Pour « La calanque » (Signac) la touche est peut-on dire, mosaïquée.
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 Le Blanc est une couleur de base, dès l’antiquité avec le rouge et le noir. 
Outre le fait de ne pas nécessiter de pigment, avec l’imprimerie le zéro des couleurs n’imprime pas, elle a une mine de papier.
Un lécythe, vase grec, stocke de l'huile parfumée destinée aux soins du corps 
peut servir de vase funéraire. « Hypnos et Thanatos ».
Le blanc signe le deuil en Afrique et en Asie et pour la veuve du roi. A partir de la guerre de 100 ans le drapeau blanc symbolise la paix. Les vêtements près du corps à la couleur stable se doivent d’être propres. Comme neige, l’innocent porte essentiellement des valeurs positives. Le dogme de l’Immaculée conception ne fut officialisé par l’église qu’en 1854.
A Séville depuis longtemps la Vierge, elle-même conçue sans la moindre faute, dans « 
l'Immaculée Conception » de Murillo, avait revêtu le manteau tissé de divine lumière.
«
 La reine Marie-Antoinette » par Vigée-Lebrun. L’enjeu social d’une peau aristocratique blafarde sous laquelle court un sang bleu a fluctué puisqu’était assurée la distinction avec les paysans burinés, mais la laiteuse se démoda à l’heure des privilèges balnéaires avant que les médecins rappellent à l’ordre les lézardes. A la naissance de toute chose, l’opaline nuance marque l’indécision, voire apporte un écho du monde des morts, habille fantômes et vampires.
« Le Cauchemar » Füssli.
Sous ses cheveux blancs, marques du grand âge, la laideur n’empêche pas la tendresse : « Le Portrait d'un vieillard et d'un jeune garçon »  Ghirlandaio.
Le Yang associé au ying représente le principe masculin, la chaleur, l'action… la mort et la renaissance.
Le « Carré blanc sur fond blanc », un
peu bleuté, se distingue subtilement  sur un fond légèrement plus chaud, ocre clair.  
« J’ai troué l’abat-jour bleu des limitations colorées, je suis sorti dans le blanc, voguez à ma suite, camarades aviateurs, dans l’abîme, j’ai établi les sémaphores du Suprématisme. » Malevitch
Les temples grecs désormais ivoirins et souvent les cathédrales étaient polychromes, comme « les chapiteaux de l’abbaye de Saint-Sever ».  

2 commentaires:

  1. Très très intéressant. Une mine de trésors, là. Je vais commencer en disant que le chiffre sept est un chiffre sacré pour le Judaïsme, et pas probablement que le Judaïsme. Il me semble que le mot "shabbat" veut probablement dire "sept" pour le septième jour de la semaine, le jour où Dieu chômait, a pris le repos après la création. Cela nous a donné "année SABBATIQUE", en sachant que tous les sept ans, les Hébreux étaient enjoints à faire reposer leurs terres, à émanciper leurs esclaves, (ceux qui voulaient être émancipés...), pardonner les dettes, etc.
    L'idée que le blanc, par réfraction pourrait être divisé ? pour donner toutes les autres couleurs s'oppose ? à l'intuition de Goethe que le mélange des couleurs donnerait du gris (industriel, moi). Oui, il y a une forme de logique là, aussi.
    Pour les impressionnistes, c'est trop facile de dire qu'ils peignaient ce qu'ils voyaient. Cela leur donne une forme d'innocence ? de pureté ? que je ne suis pas prête à leur accorder, vu que... les idées sont partout, et ce n'est pas parce qu'on croit ne pas en avoir qu'on n'en a pas... quelque part, qui nous déterminent à notre insu.
    Et oui... la pureté, l'innocence.
    Certes, on a la pureté qu'on peut. Par les temps qui courent, il faut le chercher dans les aliments et les préparations bio, comme quoi, "on" procède à des... rites de purification ? tout en se prenant pour un grand... rationnel.
    Et encore... les quatre opérations fondamentales, on n'en sort jamais, et je ne m'en lasse pas : faire des SOMMES (et pas roupiller), des DIFFERENCES (par la soustraction et la PERTE, donc...), les multiplications (pas trop nous, en ce moment), et les divisions...
    Oserais-je dire "vive la différence" ?...

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  2. Autre détail qui s'impose à moi : le fait qu'on fasse le blanc dans l'imprimerie, et l'aquarelle, par le support du papier lui-même. C'est une idée capitale à mes yeux.
    Le zéro... serait-il blanc ?

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