Les mômes du Mali qui profitaient de notre visite pour nous
glisser au creux de la main leur adresse pour qu’on les emmène chez nous, ne
nous ont pas attendus, ils ont pris les barques pour franchir la Méditerranée.
Le débat autour de l'accueil des réfugiés me tarabuste, car s’il est bon devant sa tasse
d’avoir l’infusion humaniste, quelle légitimité aurai-je pour juger qui
franchit les bornes ou non ?
Je suis né du bon côté de la frontière.
Nous ne pouvons laisser seuls les italiens gérer les flux
humains échappés des flots, bien que des mesures partagées avec nos voisins de
l’Est de l’Europe soient tout aussi difficiles à prendre collectivement que
trouver un consensus avec La CIMADE par chez nous.
Quand il s’agit de gérer une nation nerveuse et non une association
ou un parti, à 28 peuples, c’est mission impossible. Pourtant les solutions ne
peuvent être pertinentes qu’à l’échelle européenne, lorsque, comme
l’Angleterre, les décideurs n’ont pas tiré l’échelle.
Les chiffres concernant le respect de la décision de la
commission européenne instaurant des quotas de réfugiés remontent à 2017 et La
France n’avait pas rempli toutes ses obligations: mieux que La Pologne mais moins bien que
l’Irlande pour prendre sa part de la misère du monde .
Il est si difficile d’amener notre cher et vieux pays à une
position équilibrée sur des sujets moins cruciaux, alors quand vient le moment
de trancher, il n’y a plus qu’à laisser les polémiqueurs polémiquer et convaincre les convaincus.
Dans un domaine où je croyais avoir acquis de l’expérience,
l’école, je ne suis plus sûr de grand-chose, alors les considérations géo
stratégiques d’où émergerait la « bonne » position me semblent bien
hasardeuses.
Ici, les riches qui ne savent que faire de leur richesse ont
tous les droits et la liberté de choisir, là bas les misérables s’entretuent
avec nos armes, ou passent une vie à transporter de l'eau sur leur tête.
Je ne sais m’en tirer aussi facilement en disant que Gérard Collomb
doit être dans le juste milieu puisqu’il a reçu des critiques acerbes provenant
des deux extrêmes.
Par ailleurs, je ne me reconnais plus parmi les
opposants perpétuels prêts à accueillir la terre entière tout en se montrant
bien intolérants envers leurs voisins de palier qui ne se seraient pas abstenus
aux dernières élections. Ils ne cessent de cracher sur la France, toujours partants
pour la paralyser, mais souhaitant quand même faire profiter à tous de quelques
avantages sociaux qu’ils auraient bien du mal à vanter.
Dans leur monde aux couleurs tranchées qui m’a servi de fond
d’écran depuis toujours, dont je n'hésite pas à réutiliser pigments et ficelles, ça m’écorche d’avoir besoin de préciser que je ne peux
être renvoyé parmi ceux qui, revêtus de confortables doudounes bleues, ont
empêché quelques pauvres bougres de franchir les cols. Parmi eux un certain
Piano, c’est trop beau, dont les ancêtres avaient peut être pris ces routes glacées.
Chez les jeunes africains exilés, il y a ceux qui n’ont pas
d’autres solutions que la fuite de pays en guerre, mais d’autres seraient bien
utiles au développement de leurs contrées.
Ils deviendront nécessaires pour travailler dans nos
abattoirs ou renforcer l’équipe de foot du chef lieu de canton.
Nos enfants, eux, se voient plutôt en fabricants de panneaux publicitaires pour producteurs de proximité et brandissent des pancartes pour retenir ces consommateurs venus de loin.
Combien de nos jeunes se sont dessouchés pour aller au
Canada ou en Australie, combien ont comme projet de toucher le RSA
après avoir fait un peu de tourisme étudiant ? Ils croisent ceux qui
souffrent moins sous une guitoune à Calais que dans leurs champs de poussière
natals, eux qui rêvent d’une France sur laquelle tant de ses habitants cognent.
« Dans les eaux glacées du calcul égoïste » n’est
pas qu’une formule particulièrement bien goupillée extraite du manifeste du
parti communiste, elle a la force obscène du premier degré qui obsède nos
années d’un siècle à ses balbutiements. Car ce qui fait défaut là bas comme ici,
est que le sens de la vie en société ait tant de mal à être compris et
transmis. La sagesse qui était attribuée aux nations se fourvoie en médiévales
intolérances ou en dépressives passivités avec des ayants droit qui rouspètent ou
roupillent.
Et l’école, lieu commun, sensée apporter connaissances,
valeurs, entre deux ponts, susurre.
Pour ce qui est de la citation hebdomadaire, citation dans la
citation, je puise dans un article du Monde où est traité le sujet de l’échec à
l’Université, valant pour tous sujets :
« Emile
Durkheim : « C’est aux causes les plus apparentes que nous attribuons la
puissance la plus grande, bien qu’elles la reçoivent d’autres causes »
(Montesquieu et Rousseau, précurseurs de la sociologie, 1966). Les causes
affichées ne sont généralement que prétexte. Lorsqu’elles apparaissent
irrationnelles, il faut donc leur chercher d’autres raisons. »
.....
Le dessin de la semaine vient du magazine "Le Point"
Il y a quelques semaines, j'étais sur les grands boulevards à Paris, tard, le soir, quand je me suis fait accoster par une jeune femme tunisienne à qui j'ai donné une pièce.
RépondreSupprimerEt j'ai profité de la situation pour lui demander de me parler un peu de son histoire.
Allons savoir par quel miracle quand je pose des questions à des gens dans des contextes comme celui-ci, généralement, je sais qu'on me répond... la vérité du sujet singulier dans l'instant même. Les gens ne dissimulent pas dans leur réponse. C'est ainsi.
Et elle m'a dit qu'avant de venir grossir les rangs des sans abris en France, elle avait une situation en Tunisie, une voiture. Elle était quelqu'un.
Bien sûr, tu peux imaginer que sa réponse m'a interloquée au plus haut point. Et je lui ai demandé ce qui l'avait prise pour la.. DERACINER et la faire venir en Europe, et elle m'a répondu que c'était une impulsion, une fièvre à laquelle elle n'avait pas su résister. Elle avait été balayée par cette pulsion de venir en Europe.
Elle m'a assuré que ce qui la préoccupait maintenant dans sa galère personnelle, c'était de réunir la somme nécessaire pour repartir en Tunisie, et je ne vois pas pourquoi je ne la croirais pas. En cela, son histoire ressemble à d'autres histoires que j'ai récoltées auprès d'autres déplacés qui ont cru trouver l'El Dorado en France, le pays... des Droits de l'Homme, de la Révolution Française, des.. LUMIERES, et ont sérieusement déchanté... SUR LE TERRAIN (un peu comme moi, tiens, maintenant que j'y pense...).
Je lui ai dit que mes propres enfants vivaient des conditions de vie bien difficiles, nantis qu'ils sont, et que la situation n'ira pas en s'améliorant, et je l'ai enjoint de TEMOIGNER UNE FOIS RENTREE AU PAYS pour ses concitoyens afin de les dissuader de passer par la même galère qu'elle.
Force est de constater que la Grande Dispersion est sur nous, et que l'Homme a la bougeotte ; il est hyperactif dans tous les domaines.
Cela n'a pas forcément grand chose à voir avec l'Europe, d'ailleurs.
Si l'Homme a la bougeotte, je dis, il bougera...
Et s'il a besoin de bouger vers une terre promise, et bien, il trouvera bien sa terre promise pour bouger.
Qu'elle soit ou pas.... une terre promise.