La chorégraphe canadienne, nous a offert deux séquences de
danse distinctes et notre plaisir a été entier avec tant d’inventivité et de
simplicité, de douceur et de puissance électrique, de drôlerie et de
profondeur. Exceptionnel !
Dans les Gymnopédies de Satie, les
danseurs viennent au piano: la lenteur de la musique nous enveloppe, sa
délicatesse convient parfaitement aux apparitions de corps nus magnifiques
depuis une enveloppe de tissus qui peut évoquer Penone installé récemment au
musée, lui qui remet l’homme parmi les arbres.
Les corps se frôlent, les plaisirs sensuels peuvent
s’exhiber derrière un nez rouge, les copulations sont joyeuses, les duos beaux.
On voudrait que le temps s’étire comme lors d’habiles au revoir à la fin de la
première partie, jouant avec nos applaudissements qui ne furent pas comptés.
Michaux s’accordait
bien à nos postures lycéennes, aujourd’hui je craignais son hermétisme, et
ce fut une révélation. « Les mouvements » donnent vie aux signes tracés
sur le papier.
Pour avoir tenté de saisir par le dessin des gestes de danse
dans un atelier de dessin, j’ai intensément vécu la recherche autour des
calligraphies du poète pour faire surgir la vérité des corps. Vêtus de noir,
hommes et femmes se succèdent, fusionnent, dansent, crient, parfaitement associés
à la cascade de dessins projetés : cette énumération distrayante et
poignante est une performance de mémoire, de justesse.
« Au vacarme
au rugissement, si
l’on donnait un corps...
aux sons du cymbalum,
à la foreuse perçante
aux trépignements
adolescents qui ne savent encore
ce que veut leur
poitrine qui est comme si elle allait éclater
aux saccades, aux
grondements, aux déferlements
aux marées de sang
dans le cœur
dans les artères tout
à coup changeant de sens
à la soif
à la soif surtout
à la soif jamais
étanchée
si l’on donnait un
corps ».
J’ai vu des électrochocs et la mort quand une page blanche
interrompt le flux des figures effectuées avec une musique percussive, envoutante
et brutale de Louis Dufort.
Sous des lumières stroboscopiques, des danseurs pales
viennent conclure : la blancheur des rêves s’invite en négatif après
l’empreinte intense et fugitive de noires virgules rythmant tant de mots
enfouis.
Superbe article et illustrations, bonsoir belge
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