Le Pérugin né près de Pérouse a pris pour l’éternité, comme d’autres
artistes, le nom de sa ville ; il s’appelait Pietro di Christoforo Vannucci.
A la manière des flamands, il inscrira souvent les paysages
de sa paisible Ombrie natale dans ses tableaux en se souvenant des perspectives
de l’orchestrateur de la lumière, Piero della Francesca. Elève de Verrocchio à Florence,
il est en bonne compagnie avec Léonard de Vinci où l’étude de l’anatomie
souligne l’harmonie du corps humain comme expression de la perfection divine.
Une exposition au musée Jacquemart André à Paris est
consacrée au maître italien jusqu’au 19 janvier 2015.
« L’adoration des mages » dont les coloris soutenus
deviendront plus subtils plus tard, contient déjà des éléments d’un système
dans sa clarté d’énoncé, ses équilibres : la masse des rochers vis-à-vis de celle de l’étable aux
verticales vigoureuses. Les portraits serrés des mages ont des allures d’un
gothique tardif, mais leurs mains sont si délicates.
Cette "diversitas" où sont régulièrement disposés
les personnages autour d’un axe vertical constitue une marque de fabrique qui
rend la lecture limpide sur fond de paysages diaphanes apparaissant dans une échancrure
centrale.
« La grande Pietà » avec un Christ au corps de cendre
appartenait à une bannière, un gonfalon. Ses couleurs ternies rendent plus
émouvant encore cet édifice des corps de la mère et de son fils.
« Les
Miracles de Saint Bernardin » forment huit panneaux. La guérison
d’une petite fille occupe seulement un quart de la scène à l’architecture
imposante, aux personnages disposés rigoureusement, sans lourdeur.
Appelé à Rome par le
pape Sixte IV, père de la Sixtine,
il retrouve Botticelli, Ghirlandaio, Rosselli, et Raphaël. Son projet d’une « assomption de la vierge » au
dessus du maître autel sera recouvert par le «Jugement dernier » de Michel Ange.
Cependant il est présent dans « Le Christ
remet à Saint Pierre les clefs du Paradis », parmi un déploiement de personnages, sur le devant d’une
esplanade resplendissante de lumière.
Dans « le triptyque de San Gimignano »,
le christ est serein sur la croix, Marie regarde vers le sol, Saint Jean vers
le ciel. Saint Jérôme et Marie Madeleine sur les panneaux latéraux participent à l’équilibre de la
composition dont le paysage forme une vague où le lointain lumineux se
raconte avec la même précision que les plantes les plus modestes.
« Francesco
delle Opere » tient dans
sa main un texte de Savonarole, le vigoureux notable nous regarde droit dans
les yeux. C’est l’époque ou des tableaux de Botticelli ont été jetés au feu.
L’habile Pérugin traverse sans encombre cette période et multiplie les tableaux
religieux : annonciations paisibles, vierges à l’enfant, humaines et
célestes, tendres Saint Sébastien, Nicomède au bord du tombeau du Christ, à l’effusion
si forte et tant d’« anges
patineurs » qui rendent les œuvres si légères, aériennes.
Quand Raphaël copie « le mariage de la vierge », le prêtre penche un peu la tête, alors que celui de son maître présidait sous une verticale immuable au centre du tableau.
Quand Raphaël copie « le mariage de la vierge », le prêtre penche un peu la tête, alors que celui de son maître présidait sous une verticale immuable au centre du tableau.
Pour une commande d’Isabelle d’Este destinée à son studiolo de
Mantoue où arts et des lettres devaient s’harmoniser, le roi de l’équilibre
était tout désigné. Mais sa « Lutte
de l’amour et de la chasteté » fut jugée trop confuse.
Le Pérugin assure la décoration du collégio del Cambio à Pérouse
où il est revenu : sous les planètes et quelques de divinités, les vertus
cardinales (prudence, tempérance, force, justice) triomphent
à coté des vertus théologales
(foi, espérance, charité).
Son autoportrait figure en trompe l’œil avec cette
mention :
« Pietro Perugino,
peintre émérite. Si l'art de la peinture était égaré, il la retrouva. Si elle
n'était pas encore inventée, il l'éleva jusqu'à ce point »
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