mardi 8 janvier 2013

Moi René Tardi prisonnier de guerre au Stalag IIB. Jacques Tardi.



Après la commune, la guerre de 14, le dessinateur qui vient de refuser la légion d’honneur nous livre un premier volume de l’histoire de la seconde guerre mondiale telle que l’a vécue son père. Retracée d’après les carnets minutieux de René, Jacques se met en scène accompagnant son père, mais cela n’apparait pas comme un artifice narratif. Par ses questions ironiques, répétitives, sa compassion parfois, le gamin qu’il n’était pas encore, rappelle efficacement ces années dérisoires et terribles à nos contemporaines amnésies.
Les cases en format panoramique rendent bien compte de ces jours qui n’en finissent pas, auxquels participent des couleurs grises tranchées une seule fois par le rouge des drapeaux nazis. 
Si les 1 800 000 prisonniers de guerre (PG) français connurent un sort plus enviable dans les stalags que les déportés des camps de concentration, leur situation fut misérable, et celle des russes bien pire. Elle ne devait pas être oubliée.
Trahis par un commandement débile, après une guerre dite « drôle », ces hommes furent méprisés par les vainqueurs de la grande guerre.
Contrairement à d’autres condamnés, ils ne connaissaient pas la durée de leur peine. Dans des baraquements plantés dans le sable près de la Baltique, l’inventivité des hommes qui arrivent à installer un alambic, à capter la BBC, leur petitesse aussi, se trouvent condensées tout au long de ces interminables années où la préoccupation de manger est obsédante.
Ce père ne quitta jamais sa colère.
Dominique Grange la chanteuse des « Nouveaux partisans »(68) a écrit la préface, c’est la compagne de l’auteur qui livre là une œuvre personnelle qui concerne chacun.
Ses travaux sur la guerre de 14 avaient nourri mes cours sur le sujet, cette fois c’est mon fils qui m’a offert ce bel album où  est posée la question des générations.
Nos adolescences qui furent si sûres d’elles mêmes n’en finissent pas de se documenter, nos avis péremptoires ont de quoi se nuancer.
« Et votre évasion, où ça en est ? »

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