Le conférencier, directeur du centre de recherche du musée
et du domaine national de Versailles, possède tous les titres requis pour
présenter devant les amis du musée de Grenoble un patrimoine d’exception constitué
en cinq décennies (1661-1715) pendant le long règne (72 ans) de Louis XIV.
Plus d’un millier de statues ornent les jardins alors
qu’elles sont 1300 en façades et que celles de l’intérieur n’ont pas été
décomptées. Ces sculptures participent pleinement à l’esthétique baroque en
prenant place dans les jardins dessinés par André Le Nôtre puis Jules
Hardouin-Mansart qui ne se résument pas à de la végétation et de
l’hydraulique fussent-elles mises en perspective.
A la tête de l’administration des jardins, la fonction de
secrétaire d’état à la marine de Colbert facilita les acheminements des marbres
de Carrare plus prestigieux que la pierre et le poste de ministre de la guerre
de Louvois
permit de fondre des ensembles monumentaux en bronze à la place du plomb.
Le château de Louis XIII fut amélioré, enrichi par son fils
qui s’occupait de tout jusqu’à vérifier la taille des vis devant tenir les
miroirs. En 1682, Versailles devient résidence royale, mettant fin à
l’itinérance de la cour ; le gouvernement s’y installe.
Tuby qui travaillait aux gobelins a réalisé « Le
char du soleil » en plomb doré : Apollon quitte l’onde en direction de
l’Ouest et va répandre ses bienfaits. « Nec pluribus impar »
« Je suffis à plusieurs
mondes » devint la devise du « Roi Soleil » après Philippe II,
fils de Charles Quint.
« Latone et ses enfants ». La mère d’Apollon, Latone,
commandée aux frères Marsy est au centre d’un autre bassin. D’après
« Les métamorphoses » d’Ovide, des paysans qui l’avaient empêchée de
boire sont transformés en grenouilles par Jupiter, la providence divine.
Apollon au terme de la journée rejoignait Thétis. Une grotte
artificielle à lui dédiée soutenant un réservoir d’eau a été détruite,
mais les trois groupes de sculptures ont été conservés. « Apollon servi par les nymphes » par Giraudon mort le même jour que son royal commanditaire est plus indifférent aux belles
que ne le fut le roi qui vivait avec trois reines : Mme de Montespan, Mme
de Maintenon et son épouse Marie-Thérèse, mère de six enfants.
« Quand le Soleil
est las, et qu’il a fait sa tâche,
Il descend chez Téthys, et prend quelque relâche.
C’est ainsi que Louis s’en va se délasser
D’un soin que tous les jours il faut recommencer. » La Fontaine.
« Le parterre d’eau » devait recevoir 24 statues,
une
« Grande
commande », dont Le Brun avait tracé les dessins.
Elles sont
aujourd’hui dispersées : parmi les quatre éléments, « L’air » aux
vêtements emportés par le vent tient un caméléon, qui d’après Cesare Ripa,
la référence des allégories, « se nourrissait d’air ».
« Le colérique » pour représenter un des 4
tempéraments de l’homme figure à présent
pas loin de « L’hiver » et 3 autres saisons, comme Diane pour
évoquer un des moments de la journée :
« La nuit ». Pour arriver à 24, il convient de
compter aussi 4 genres poétiques : pastoral, satyrique, héroïque et lyrique,
auxquels il était prévu d’adjoindre 8 groupes d’ «enlèvements » pour
signifier les mutations de la matière autour d’un Parnasse qui ne verra pas le
jour.
Bien des œuvres ont dû être restaurées ainsi « L’Afrique »
ou
« L’Enlèvement
de Proserpine par Pluton », visible dans l’Orangerie.
Désormais la représentation des fleuves et affluents d’une
France qui était alors la plus peuplée, la plus puissante d’Europe, se reflètent
dans deux bassins au pied de la galerie des glaces, ainsi « La Dordogne »
de Coysevox.
Le dauphin se promenait avec son précepteur Bossuet dans le « Bosquet
du labyrinthe » pensé par Charles Perrault avec 39 fontaines
illustrant des fables d’Esope. « Un Paon se plaignait à Junon de
n'avoir pas le chant agréable comme le rossignol. Junon lui dit : « Les Dieux
partagent ainsi leurs dons, il te surpasse en la douceur du chant, tu le
surpasses en la beauté du plumage.» L'un est bien fait, l'autre est galant, chacun
pour plaire a son talent. »
L’antique est à la mode, et bien des meilleurs sculpteurs
qui travaillaient au Louvre partent pour Rome. Leurs copies s’alignent dans la
perspective : « Le gladiateur mourant » devant l’Apollon du
belvédère.
Pierre
Puget n’est pas dans le réseau officiel mais son « Milon
de Crotone » est bien reçu, pourtant l’athlète vieillissant qui a
présumé de ses forces, stigmatise l’orgueil, sa main prise dans l’arbre qu’il
croyait fendre.
Vers la fin de sa vie Louis XIV voulait voir l’enfance se
répandre partout. Son héritage sera enrichi par Louis XV : « Le
bassin de Neptune ».
Sous Louis XVI, Hubert Robert peint « L’abattage des
arbres »
et dans un jardin à l’anglaise sous une grotte
artificielle replace Apollon et ses chevaux, mettant en scène le conflit entre
nature et art. « Bosquet des Bains
d'Apollon »
Une campagne de mécénat originale est en route afin d’adopter
une statue en ronde-bosse, un vase et ses reliefs, un « terme » en hommage à Terminus le gardien des bornes à ne
pas confondre avec un buste, voire un banc dans un ensemble qui fut un sommet
dans le domaine de la commande publique.
http://www.chateauversailles.fr/resources/pdf/fr/mecenat/bancs-et-statues.pdf