A travers quatre tableaux majeurs de l’histoire de la
peinture, le théologien protestant a développé le thème de la dualité
haine/amour omniprésente dans la bible. Il cite la philosophe suisse Litha Basset
plaçant le précepte « aimer son prochain » face à ceux qui sont
« fermés à l’amour », voire habités par la haine.
Adam et Ève au paradis
ou Le Péché originel, a été intitulé également « La chute »
dans une des trente versions donnée par l’ami de Luther, Lucas Cranach (l'Ancien) en 1533. De quoi relativiser les interprétations : il n’y a pas
toujours trois pommes comme dans la trinité et le regard du serpent n’est pas
forcément à la hauteur des yeux d’Adam, pour disculper la femme d’avoir fait
chuter l’humanité. Le tableau qui réunissait notre papa et notre maman à tous
était meilleur marché que deux panneaux séparés. Le serpent n’est pas uniquement
la représentation du mal : rusé et puissant, donnant la mort et guérisseur
(caducée), il peut être la représentation du Saint Esprit alors que le lion
puissant et bon symbolise le père et le cerf l’animal pur : le fils. Le
serpent d’airain de Moïse immunisait des morsures des serpents du désert. Eve
est encore sur l’herbe, les pieds d’Adam se posent sur les cailloux qui
l’attendent.
« Les yeux de
l'un et de l'autre s'ouvrirent, ils connurent qu'ils étaient nus, et ayant
cousu des feuilles de figuier, ils s'en firent des ceintures. »
Dieu les a puni mais leur donna une seconde peau pour qu’ils
s’habillent : une seconde chance.
Ils eurent deux fils : « Caïn et Abel», le
cultivateur tua Abel le berger. Le Titien en a fourni une présentation
puissante, en contre plongée. La ténèbre - oui l’expression existe et attire
l’œil - où Dieu n’est plus, affronte la
lumière.
« L`Éternel dit à
Caïn : Où est ton frère Abel ?
Il répondit : Je ne
sais pas ; suis-je le gardien de mon frère ? »
Mais magnanime, après le premier meurtre de l’humanité, Dieu
va mettre un signe sur Caïn pour qu’il ne soit pas tué : l’homme peut changer.
Ainsi « la malice
de l'homme était grande sur la terre, toute l'imagination des pensées de son
coeur n'était que mauvaise en tout temps. Et l'Éternel se repentit d'avoir fait
l'homme »
Il déclencha le déluge. Dieu épargna Noé (« le repos de
Dieu »).
« Noé lâche la colombe par la fenêtre de l'arche »
(Genèse, VIII, 6-9) de Marc Chagall. Il avait d’abord envoyé
un corbeau, puis une première colombe revenue sans rien et ce n’est qu’une semaine
après une nouvelle tentative, qu’elle ramena un rameau d’olivier.
Le même mot
« arche » désigne la corbeille qui a sauvé Moïse des eaux et aussi ce
lieu protecteur qui a permis finalement l’alliance de Dieu et de la famille des
êtres vivants symbolisée par l’arc en ciel. La vie est là : un enfant est
au sein et le coq qui l’accompagne annoncera le jour nouveau. Le vieillard de
six cents ans recommencera alors à repeupler la terre.
Son petit fils, Nemrod, voulut installer une ville en Irak,
à l’est d’Eden, avec une grande tour pour « se faire un nom ». Comme
les demi-dieux grecs pris par l’hubris, cela tourna à la tragédie.
« La Tour de Babel » de Pieter Brueghel l'Ancien http://blog-de-guy.blogspot.fr/2016/05/la-tour-de-babel-gilbert-croue.html
est construite sur le modèle des ziggourats
d’où les prêtres voyaient Dieu de plus près. Les hommes s’affairent,
asservis à leur travail, la technique domine, et le souverain menace des
hommes, Philippe II d’Espagne soumettait alors le peuple flamand.
Babel signifiait « la porte de Dieu », Babylone
« la porte de la dispersion ».
Depuis la chute de la tour, « l'homme est appelé à vivre partout, à se rencontrer, à vivre
ses différences. »
Dans ce qui est détruit, il y a de la place pour construire,
même s’il reste des questions
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Pourquoi Adam a un nombril ?
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Ne serait-il pas temps de réhabiliter Judas, si
Dieu lui a pardonné ?