dimanche 20 décembre 2015

En avant marche ! Franck Van Laecke Alain Platel.

Le spectacle est total qui parle de la mort sous des airs de fanfare.
La danse est là, quand par exemple dans une ultime performance le désespéré à la brioche de bon vivant est porté par son partenaire.
Le théâtre bien sûr en des langues diverses mais intelligibles tant il va à l’essentiel.
La musique  est des plus éclatantes avec tant de cuivres si poignants aussi quand ils s’apaisent.
On disait « harmonie » municipale le plus souvent pour ces formations, telles l’ensemble musical de Villard-Bonnot intégré à la fête qui a joué Verdi, Malher, Schubert devant une paire de majorettes, dont le rapport à l’adolescence est celui des grands-mères encore bien vertes dans leurs habits dorés.
Un des joueurs de trombone  doit désormais jouer des cymbales depuis son cancer à la bouche.
Il lui faut apprendre à « quitter la table ».
La fragilité de la vie, les solitudes, « En avant marche » comme on dit « haut les cœurs »
Il y a de la déraison belge, du sentimentalisme, chez le metteur en scène  dont nous venions de voir  un « coup fatal »
et plus loin en arrière « For Pina »
Bien sûr que nos impatiences excités par tous les zapages peuvent se calmer au théâtre, mais  l’intensité autour d’un sujet ambitieux  a tendance à se diluer quelque peu en une heure quarante.

samedi 19 décembre 2015

La fête de l’insignifiance. Milan Kundera.

Ces 125 pages n’ont pas eu de signification pour moi.
Le titre en était attirant en ces temps de lourdeurs et fournissait l’occasion de retrouvailles avec l’auteur de « L’insoutenable légèreté de l’être » qui accompagna un printemps à Prague.
En ouverture, une méditation sur le nombril nous relie à des souvenirs d’une littérature sensuelle, originale, mais l’auteur insiste et le sujet devient creux comme le reste de conversations entre des personnages sans consistance, sans existence, les « excusards ».
Des évocations de la vie de Staline et de la distance qu’il aurait pris avec son propre pouvoir nous rappellent les vertus de l’humour quand existait le rideau de fer, mais soulignent la difficulté de regarder la période actuelle avec clairvoyance et grâce. 
« Il n’y avait qu’une résistance possible : ne pas se prendre au sérieux. Mais je constate que nos blagues ont perdu leur pouvoir. Tu te forces à parler pakistanais pour t’égayer. En vain. Tu n’en ressens que fatigue et ennui. »   

vendredi 18 décembre 2015

Pensées en papillotes.

 « Qui ne peut comme il veut, doit vouloir comme il peut »
J’ai trouvé cette citation  de Térence, « poète comique latin », précise Wikipédia, dans un papier de papillotes. 
Cette phrase nous emmène au-delà des tragédies surjouées de Mélenchon ou des comédies d’un supporter du PSG irresponsable politique, pris en écharpe au Parc des Princes, un soir d’élections. Barto a été acclamé et Waukiez cumule. Pov’ France.
Mes élucubrations, chaque vendredi, alors que se sont amoncelés Daech puis le FN, peuvent-elles avoir quelque cohérence, quand c’est le grand vide qui gravite autour de nous ?
Le premier parti de France qui regrette que la peur soit utilisée contre lui, aime tant jouer sur les peurs.
Et entre ces peurs là et l’angoisse climatique comment ne pas se réfugier dans les étoiles fussent-elles en guerre ? La peur sauve qui peut. La COP 21 a disparu derrière Estrosi.
Banksy sur les murs de Calais a peint Steve Jobs pour rappeler que le père du patron d'Apple,  venait d’Homs en Syrie ; l’artiste des rues nous fait la leçon.
Ne pas perdre une occasion de sourire : dans les soupçons d’affabulation de l’instit’ qui avait inventé une attaque d’un individu se réclamant de l’Etat Islamique, le fait qu’il soit à 7h et quart à l’école avait éveillé les soupçons. J’ai connu pas mal de suspects qui s’ignoraient.
Et « le » syndicat de demander plus de personnel pour fouiller, surveiller : le portail n’est plus celui qui grinçait quand les enfants le poussaient et grimpaient dessus quand il s’ouvrait; maintenant celui-ci doit détecter les kalachs.
« Une erreur originale vaut mieux qu’une vérité banale »
Fiodor Dostoïevski de chez Révillon et chocolat noir.
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Ci-dessous un dessin de Courrier international et de Schot (Pays bas) et l'autre sur le site de "Le Monde"

jeudi 17 décembre 2015

Les arts décoratifs au XX° siècle. Gilles Genty.

Il sera question de continuités comme celles relevées au XIX° siècle
en les  illustrant avec un coffre à jeux de cartes de 1907 par la relieuse, sculptrice, peintre, Nathalie Martin Sabon dans le genre revival médiéval.
André Mare un des fondateurs de l’art déco a réalisé des camouflages pendant la guerre de 14 en  décomposant les formes à la manière des cubistes. 
Ci-dessus une page de ses carnets de  guerre. Le XX° siècle commençait.
L’étiquette de Georges Lepape pour le parfum Mam'zelle Victoire de Paul Poiret, le couturier peut-elle représenter une réconciliation de l’histoire et de l’esthétique où l’oubli ? 
Il avait illustré des poèmes d’Henry Jacques dont j’ai retrouvé quelques lignes :
« Les hommes aplatis sous les effondrements,
Les enterrés tout vifs dans les abris qui croulent,
Les fantassins fauchés par les balles en houle,
Les asphyxiés, les écrasés, les massacrés,
Les malades crachant leurs poumons déchirés,
Spectres dont le bacille épuise la poitrine.
Ceux qui mettent des mois à mourir dans leur ruine...
À quoi bon ! Ils sont trop, on ne les connaît plus.
Un monument, des mots exaltant leurs vertus.
Des fleurs et des drapeaux joyeux ! Ô morts de France,
N'est-ce pas qu'il ne faut qu'un douloureux silence
À ceux dont la jeunesse a peuplé les tombeaux ? »
Une délégation de « Gueules cassées » se trouvait en bonne place sous les yeux des signataires du traité de Versailles.
Le rideau de scène peint par Picasso pour « Parade » de Satie en 17 semble signifier un retour à l’ordre : les formes sont rondes, la profondeur de champ revient, le cubisme devient décoratif et prend des couleurs.
Le ton est donné dans « La Gazette du Bon Ton ». Les arrosoirs  au « cubisme bien tempéré » par Roger de La Fresnaye sont destinés à la maison cubiste de Mare.
Mais l’offensive est plus radicale  avec « Les Métèques contre l'art français » commis par l’anti sémite Camille Mauclair, qui disait-il « avait des amis juifs ».
Les guirlandes de fleurs sont  à l’art déco ce que les carquois et les flèches furent au style Louis XV ;
est ce que la clarté, l’ordre et l’harmonie du XVIII° se sont  retrouvées revivifiées début XX°  dans les appliques aux gouttelettes de verre en forme de conques, modèle Patou?
La Bouilloire électrique dessinée par Peter Behrens apparait au catalogue d’AEG.
L’art s’applique aussi dans les ventilateurs, les lampes à suspension. Ce n’est pas cher, mais quand Emile Bernaux couvre ses chaises en ébène de galuchat (cuir de raie ou de requin) ce n’est pas vraiment à la portée de tous, ou lorsque le bois est de rose et les applications de nacre.
Jean Dunand est renommé pour ses laques, son tableau des corbeaux perchés comporte aussi  des perles et des coquilles d'œuf. Avec son compatriote suisse François Schmied, ils mettent 14 ans à réaliser quelques illustrations du livre de la jungle, parmi mille deux cent œuvres d’une vie artistique très riche que je viens de découvrir comme celles de tant d’autres personnalités présentées cet après midi là.  Ainsi Jacques Doucet, couturier, collectionneur, mécène, qui avait « Les Demoiselles d’Avignon » de Picasso dans la montée d’escalier de son hôtel particulier conçu par Mallet-Stevens.
A la cascade de noms de créateurs aussitôt évanouis que notés en vitesse, je pourrai ajouter  dans la farandole d’images, quelques sofa, tabourets, paravents, tables, cabinet, lit, coiffeuse… je retiens l’image d’une pendule en étoile filante assez curieuse.

En voulant compléter cet exposé devant lequel je manquais de trop d’éléments préalables pour profiter pleinement de cette heure et demie, j’ai découvert un site sur internet riche et pédagogique   
Si vous n’avez pas le temps d’aller y faire un tour, je recopie une de ses phrases pour  mieux comprendre la différence entre art nouveau et art déco :
« L'Art déco, art de la modernité, colle avec son époque : là où l’Art nouveau vantait une femme arrondie, bucolique et poète, l’Art déco révèle une toute nouvelle femme, longiligne, mince, élancée, habillée à la mode, voire androgyne, en totale rupture avec la représentation artistique classique de la femme. »

mercredi 16 décembre 2015

Paris au mois d’août 2015.

Pour les provinciaux montant à la capitale, la halle Saint Pierre, au pied de la butte Montmartre fait partie de nos habituels rendez vous.
Une curiosité persistante autour de l’art brut nous a permis de connaître ce lieu charmant où leurs manières généreuses et modestes de présenter des œuvres très variées a renforcé notre fidélité.
L’exposition des « cahiers dessinés » qui allait prendre fin alors, réveille le goût pour le dessin. Sempé évidemment, Steinberg, et la découverte des pastels d’Anne Garouben et de Marcel Bascoulard, clochard de Bourges, nous ont enchantés.
Le centre Pompidou à Beaubourg fait tellement partie du paysage, pourtant nous aurions eu tort de ne pas y retourner. http://blog-de-guy.blogspot.fr/2015/09/mona-hatoum-centre-pompidou.html
Nous avons découvert Mona Atoum, intense et inventive, exposée pour un temps :
et dans les collections permanentes,  nous avons renouvelé notre vision des modernes reconnus, ainsi Kupka un abstrait singulier.
Au musée des arts premiers du quai Branly, « Tatoueurs tatoués » faisait se rencontrer un phénomène insistant de la mode avec les traditions les plus universelles et les plus anciennes. D’autre part, la mise en parallèle de la vie d’Atahualpa l’Inca et de Pizarro le conquistador au XVI° siècle était pédagogique. Les collections océaniennes et africaines toujours un émerveillement.
Avant la fin de la tonique exposition d’art contemporain congolais à la fondation Cartier j’avais fait paraître un article http://blog-de-guy.blogspot.fr/2015/09/beaute-congo-fondation-cartier.html
Les sacs ont fait la fortune de Vuitton en sa fondation qui a bénéficié d’accord avec la ville de Paris pour ériger le magnifique bâtiment de Franck Gehry et échapper à l’impôt.
La bâtisse de la première fortune de France sise au jardin d’acclimatation aux connotations très XIX° est bien belle. Des guides à chaque étage, pardon des médiateurs, permettent de mieux comprendre les œuvres présentées qui s’estompent quelque peu derrière l’architecture spectaculaire, surtout qu’il s’agit beaucoup de vidéos autour de la musique, pardon autour de « sculptures musicales ».
Pas étonnant que Warhol soit en majesté lui qui comprit que la société de consommation se nourrissait grassement de sa propre critique pourvu qu’elle soit aux couleurs pop.
« La terrasse des jardins » est un restau sympathique dans ce cadre magnifique.
Avec tout ça, on en oublierait Le Louvre. Les arts de l’Islam après les Allemands et les Flamands, Delacroix, les tanagras grecs et la victoire de Samothrace : 7h de visite.
Alors le « Pressionnisme » à la Pinacothèque m’a paru assez surfait bien qu’enrobé de baratin pour nous faire prendre le « pinceau spatial » des bombes aérosol dont le pschitt ferait impression, pour la pâte des réprouvés, forcément des génies à ne pas louper.

mardi 15 décembre 2015

Les derniers jours de Stefan Zweig. Sorel & Seksik.

L’écrivain autrichien dont je ne soupçonnais pas la notoriété universelle, pas plus que le rôle du Brésil terre d’asile pour les juifs, s’est suicidé à Petropolis à côté de Rio, où il avait fui la barbarie nazie dont il avait très tôt mesuré l’ampleur.
Les douceurs tropicales, l’amour de sa femme Lotte ne pourront surmonter sa fatigue de vivre et sa nostalgie d’un monde disparu dont Vienne, qu’il avait quittée dès 34, lieu majeur de créativité, d’humanisme, de douceur de vivre, avant son envers radical.
« Toute ombre, après tout, est fille de la lumière et seul qui a éprouvé la clarté et les ténèbres, la guerre et la paix, la grandeur et la décadence a vraiment vécu. »
De magnifiques aquarelles rendent sans tapage, la tristesse de cette tragédie, l’implacable dépression du fin chroniqueur  du « Monde d’hier »  et de sa secrétaire, jeune asthmatique, devenue sa femme.
« L’endroit n’est pas si désagréable, mais il ne faudra pas s’éterniser non plus. »

lundi 14 décembre 2015

Mia Madre. Nanni Moretti.

Difficile d’échapper en regard de la critique unanime qui encense le film, à une voix originale qui trouve le titre inapproprié dans la mesure où ce n’est pas la mère en vedette mais la fille : oui mais on a quand même échappé à « my mother ».
N’empêche que parler sans pathos de la mort qui approche n’est pas évident, et là Moretti conduit bien son affaire. Il traite avec finesse et humour, de la création artistique, du rôle du cinéma dans le débat social, des impatiences, des malentendus, de la transmission, de la fin de vie.  Les acteurs sont excellents : John Turturro sa mémoire défaillante et la belle Margherita Buy, femme forte et fragile, Nanni Moretti léger et juste. Les thèmes foisonnent : cette demande de la metteuse en scène à ses acteurs de jouer à côté de leur personnage, n’est pas forcément comprise, alors que cela peut caractériser sa vie. Tous ces dilemmes, et les rêves, les fantasmes, les colères, les douleurs, les pertes, se croisent et débouchent sur une émotion qui nous rappelle d’autres bouleversements que ceux qui s’allument sur un écran.