mercredi 15 décembre 2010
The king of New York. A. Ferrara
Heureusement que sur la boite du DVD - le film est sorti en 90 - ils précisent que « l’impitoyable Franck White nourrit aussi le rêve de construire un hôpital pour les plus démunis » parce que les préoccupations humanitaires ne semblent pas au premier rang des priorités du gangster passant de la prison à une suite au Plazza ; et ses sbires ne ressemblent vraiment pas à des fonctionnaires appointés par des mutuelles agissant dans le social. Leur carburant est poudreux et leurs moyens de convaincre expéditifs. « Le brouillage des frontières entre le bien et le mal » revient comme une expression convenue et le film noir pour décrire New York a fini par devenir conformiste. La nuit, le métro, les ponts métalliques et leurs dessous, autos tamponneuses, flaques, et sang sur les murs. Christopher Walken a le regard hagard et sa coiffure n’est pas la seule à être en pétard. Les nanas sont là pour la décoration et les flics démunis sont amenés à user des mêmes méthodes que leurs compagnons de pan pan doum doum !
mardi 14 décembre 2010
Le Roi Banal.
Finalement c’est loin d’être insolite de faire naître la fantaisie depuis un pavillon de banlieue.
Le contraste peut ouvrir des facilités dans lesquelles ne sombre pas ce un papy inventant un royaume intitulé Georgetta en souvenir de sa défunte épouse. Le trait soigné de Kyung-Eun se rapproche de Lapointe, très intelligible, il contribue au charme de cette B.D.
Ce qui est original c’est que les personnages ne sont pas linéaires et la famille de sa fille qui vivote sur des bases un peu dépressives ne va pas virer au noir. Le scénario clair de Ozanam qui joue entre fantasme et réalité ne tombe pas dans le délire, juste de la poésie, de la gentillesse. Les personnages se cherchent et nous trouvent ravis.
Le contraste peut ouvrir des facilités dans lesquelles ne sombre pas ce un papy inventant un royaume intitulé Georgetta en souvenir de sa défunte épouse. Le trait soigné de Kyung-Eun se rapproche de Lapointe, très intelligible, il contribue au charme de cette B.D.
Ce qui est original c’est que les personnages ne sont pas linéaires et la famille de sa fille qui vivote sur des bases un peu dépressives ne va pas virer au noir. Le scénario clair de Ozanam qui joue entre fantasme et réalité ne tombe pas dans le délire, juste de la poésie, de la gentillesse. Les personnages se cherchent et nous trouvent ravis.
lundi 13 décembre 2010
Mardi, après Noël. Radu Montean
Une première scène où les deux amants s’abandonnent à leur plaisir ne constitue pas une situation vraiment originale, comme l’histoire d’une séparation entre un homme et une femme dans un milieu aisé en Roumanie; et pourtant la sympathie du réalisateur pour ses personnages, l’authenticité des portraits participent à la grâce de ce film. Je me suis laissé porter par les longs plans séquence que j’aurais encore volontiers étirés tant chaque personnage est vrai dans ses culpabilités, ses maladresses, ses audaces, ses tendresses.
Un film délicat et juste, grave et léger, à cœur.
Un film délicat et juste, grave et léger, à cœur.
dimanche 12 décembre 2010
Un tramway.
Eh oui ! D’ « après » « Un tramway nommé désir », ce grand rendez-vous de la saison à la MC2 a eu pour moi un léger air de déception malgré la prestation d’Isabelle Huppert « incandescente », à la hauteur des attentes vis-à-vis d’une star. Je n’avais pas choisi ce spectacle, au moment de la prise des abonnements, échaudé par « La nuit de l’iguane » de l’an dernier avec Tchéky Karyo qui me faisait douter des vedettes; un billet offert m’a permis d’assister à la représentation de 2h1/2 qui s’évertue à compliquer une intrigue se suffisant pourtant à elle-même. J’ai peut être trop coutume de penser surtout en politique : « on nous prend pour des billes » pour regretter que sur ce coup, on nous prend pour des profs de lettres ayant réussi leur thèse sur Tennessee Williams, familier de culture grecque et par ailleurs anglophones maitrisant l’espagnol. Comme dans beaucoup de reprises de grandes œuvres, les concepteurs d’une nouvelle version se défendent de penser à l’original, alors que nombre de spectateurs viendront parce qu’ils en ont au moins entendu parler. Sur Internet, les critiques sont souvent féroces. J’ai apprécié le décor, le bowling, la passerelle, Blanche derrière la vitre, la musique, les acteurs, la chanteuse, les costumes, la mise en scène où la vidéo convient bien et offre de belles images, les micros HF, mais pas l’intertextualité. « Remodelant le texte de Tennessee Williams, il (Warlikowski) y rajoute des extraits qui vont de la Correspondance de Flaubert à Œdipe à Colone, de Sophocle, en passant par la Dame aux camélias, un sketch de Coluche, un extrait du Banquet de Platon ou le combat de Tancrède et de Clorinde tel que raconté dans la Jérusalem délivrée de Torquato Tasso. » Merci Libé de m’avoir renseigné mais à trop me consacrer jadis à San Antonio, c’est Branlon Mado qui me vient sous la langue avant même le sex symbol qui fit face à Vivien Leigh. Là, Blanche tient toute la place.
samedi 11 décembre 2010
Nos cœurs vaillants. Jean Baptiste Harang.
Roman léger aux mots choisis, qui feint la désinvolture et nous amène vers plus d’attention au monde. L’ancien journaliste à Libération s’empare d’un prétexte original, une lettre anonyme envoyée par un lecteur, pour se lancer dans un récit de souvenirs de colos où se joue l’éternelle question de la fiction. Un regard tendre, sans mièvrerie, avec des souvenirs ni embellis ni méprisés, appliquant sans en avoir l’air ses réflexions sur le temps qui passe, la fidélité.
« La vie est une porte qu’on nous claque lentement au nez, et lorsque l’ouverture se réduit à une fine fente de lumière, nous tâchons de nous souvenir de ce merveilleux paysage qu’elle nous offrait jadis, grand ouvert, le panorama d’un souvenir sans fin ; cet avenir meurt ce jour même où je me souviens. »
Son souffle nous épargne, pour un temps, les graves, les pontifiants, les menteurs.
« Qui c’est ? »lui demandait-on, à travers la porte, quand il apportait des colis.
« C’est Le Printemps ». Oui.
Description d’un jeu chez les « Cœurs Vaillants », espèces de scouts :
« La « vie » est un petit foulard que l’on porte dans le dos, engagé dans son pantalon, il dépasse un peu, et l’on doit, dans un corps à corps vigoureux et sans se faire prendre la sienne, retirer la vie à l’envoyé du camp d’en face… »
« La vie est une porte qu’on nous claque lentement au nez, et lorsque l’ouverture se réduit à une fine fente de lumière, nous tâchons de nous souvenir de ce merveilleux paysage qu’elle nous offrait jadis, grand ouvert, le panorama d’un souvenir sans fin ; cet avenir meurt ce jour même où je me souviens. »
Son souffle nous épargne, pour un temps, les graves, les pontifiants, les menteurs.
« Qui c’est ? »lui demandait-on, à travers la porte, quand il apportait des colis.
« C’est Le Printemps ». Oui.
Description d’un jeu chez les « Cœurs Vaillants », espèces de scouts :
« La « vie » est un petit foulard que l’on porte dans le dos, engagé dans son pantalon, il dépasse un peu, et l’on doit, dans un corps à corps vigoureux et sans se faire prendre la sienne, retirer la vie à l’envoyé du camp d’en face… »
vendredi 10 décembre 2010
Ecole décriée.
Dès le petit déjeuner (de plus en plus gras et sucré), l’école est au menu.
« La présence des parents pendant les publicités ne modifie pas le comportement des enfants » d’après Que Choisir ?
Avec une assiduité devant le téléviseur qui a tendance à s’amenuiser au bénéfice d’autres écrans, la parole des parents s’est elle dématérialisée ?
« D’après l’OCDE, les disparités parmi les élèves de 15 ans sont plus grandes en France qu’ailleurs, le poids du milieu social plus lourd. »
Et le ministre qui a su préserver au moins un emploi dans l’éducation nationale, le sien, de se féliciter de l’aide personnalisée. Il a pourtant fait diminuer, entre autres, la scolarisation avant trois ans qui était essentielle à la réussite des plus défavorisés.
Une dévastation sans précédent de l’éducation nationale où les valeurs morales sont mises à terre, les moyens drastiquement amputés, et ce sourire!
Des mesures se prennent et se déprennent. Entre deux week-end : semaine de quatre jours, un jour valable, un autre à jeter.
Des programmes à fondre et à refondre; les minutes consacrées au français diminuent et « c’est pourquoi votre fille est muette »(Le malade imaginaire)… ou plutôt votre garçon…
Ce flot de communications relayé en interne par des cadres new look récitant le catéchisme de l’instant, mine les personnels et fournit des alibis à leur flemme aux porteurs de portables sans cartable, ados et adulescents.
Alors que la droite appelle à la responsabilité des individus, la clameur de tous côtés vocifère : « c’est la faute de l’école ! »
C’est ce bruit qui nuit à l’école. J’avais rêvé du temps de Savary qui avait mis en place les ZEP et des consultations ; il y avait encore une foi dans l’éducation.
« Allègre m’a tuer ».
Désormais l’ironie a dégagé la plaine, le marché a planté ses panneaux, sottises et sornettes ont la voie libre, et le refus d’apprendre s’étale sans vergogne.
L’autre jour, j’accompagnais un groupe de jeunes élèves à la découverte de la ville. Un parent en tête de rang demande à un enfant de ne pas le dépasser ; c’est alors qu’un jeune attablé à une terrasse de claironner « tu es arabe, tu as raison de ne pas obéir ». Le petit en est resté coi. Je n’ai vu sur le moment qu’un jeu où la régression peut avoir des côtés attendrissants, mais fourvoyer ainsi une identité falsifiée dans le refus, accroit mon pessimisme.
Ma mère, 88ans, me demande :
« tu as vu, dans le journal, ce gosse qui s’est jeté au Rhône, à 11 ans ? »
..........
Un dessin du Canard:
« La présence des parents pendant les publicités ne modifie pas le comportement des enfants » d’après Que Choisir ?
Avec une assiduité devant le téléviseur qui a tendance à s’amenuiser au bénéfice d’autres écrans, la parole des parents s’est elle dématérialisée ?
« D’après l’OCDE, les disparités parmi les élèves de 15 ans sont plus grandes en France qu’ailleurs, le poids du milieu social plus lourd. »
Et le ministre qui a su préserver au moins un emploi dans l’éducation nationale, le sien, de se féliciter de l’aide personnalisée. Il a pourtant fait diminuer, entre autres, la scolarisation avant trois ans qui était essentielle à la réussite des plus défavorisés.
Une dévastation sans précédent de l’éducation nationale où les valeurs morales sont mises à terre, les moyens drastiquement amputés, et ce sourire!
Des mesures se prennent et se déprennent. Entre deux week-end : semaine de quatre jours, un jour valable, un autre à jeter.
Des programmes à fondre et à refondre; les minutes consacrées au français diminuent et « c’est pourquoi votre fille est muette »(Le malade imaginaire)… ou plutôt votre garçon…
Ce flot de communications relayé en interne par des cadres new look récitant le catéchisme de l’instant, mine les personnels et fournit des alibis à leur flemme aux porteurs de portables sans cartable, ados et adulescents.
Alors que la droite appelle à la responsabilité des individus, la clameur de tous côtés vocifère : « c’est la faute de l’école ! »
C’est ce bruit qui nuit à l’école. J’avais rêvé du temps de Savary qui avait mis en place les ZEP et des consultations ; il y avait encore une foi dans l’éducation.
« Allègre m’a tuer ».
Désormais l’ironie a dégagé la plaine, le marché a planté ses panneaux, sottises et sornettes ont la voie libre, et le refus d’apprendre s’étale sans vergogne.
L’autre jour, j’accompagnais un groupe de jeunes élèves à la découverte de la ville. Un parent en tête de rang demande à un enfant de ne pas le dépasser ; c’est alors qu’un jeune attablé à une terrasse de claironner « tu es arabe, tu as raison de ne pas obéir ». Le petit en est resté coi. Je n’ai vu sur le moment qu’un jeu où la régression peut avoir des côtés attendrissants, mais fourvoyer ainsi une identité falsifiée dans le refus, accroit mon pessimisme.
Ma mère, 88ans, me demande :
« tu as vu, dans le journal, ce gosse qui s’est jeté au Rhône, à 11 ans ? »
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Un dessin du Canard:
jeudi 9 décembre 2010
La couleur dans l'art contemporain
C’est bien parce que la couleur ne me semblait pas un enjeu majeur de l’art contemporain que je suis allé trainer mon pliant devant quelques toiles du musée de Grenoble à la suite de la conférencière Lorelana Gritti autour de ce thème.
La couleur confronte la science et ses spectres face au sensible et ses humeurs météorologiques, la physique et la force émotionnelle.
Au moyen âge la couleur est symbolique après les particules qui s’entrechoquaient dans les visions de l’antique Platon. L’objet est plus important que la teinte. Celle-ci deviendra éclatante mais les protestants y virent là une dépravation. Le marron, couleur de la terre où nous retournerons, arriva. La Florence du dessin affronte Venise des couleurs. Bien que les œuvres aient pris de la profondeur, les formes enserrent les couleurs, on peut dire « couleur locale ».
A l’époque des impressionnistes, c’est l’atmosphère qui irradie. La couleur devient motrice, la pâte picturale va exercer sa séduction. Matisse sature la toile avec ses rouges comme il a exagéré la décoration. L’espace se construit par la couleur chez Cézanne, et avec De Staël la couleur devient frontale.
Kandinsky troublé par une meule de paille de Monnet, donnera toute sa puissance à la palette, discréditant les objets ; le couleur accède à la légitimité, seule.
Olivier Debré calé dans la nature, simplifiera le geste, cherchant l’essence dans l’huile.
Sam Francis a quitté un lit de douleur par la peinture, avec moins de théâtralité que Pollock, le vide devient le sujet principal du tableau dont ressortent les limites. « Dieu ne peut pas voir sans l’artiste. »
Morris Louis, lui retourne aux teinturiers, il n’a plus recours aux pinceaux, ses coloris déversés, il éprouve les différents degrés d’absorption de la toile et les effets de la gravité. Sortie de son atelier exigu, la toile déployée se découvre alors.
La couleur confronte la science et ses spectres face au sensible et ses humeurs météorologiques, la physique et la force émotionnelle.
Au moyen âge la couleur est symbolique après les particules qui s’entrechoquaient dans les visions de l’antique Platon. L’objet est plus important que la teinte. Celle-ci deviendra éclatante mais les protestants y virent là une dépravation. Le marron, couleur de la terre où nous retournerons, arriva. La Florence du dessin affronte Venise des couleurs. Bien que les œuvres aient pris de la profondeur, les formes enserrent les couleurs, on peut dire « couleur locale ».
A l’époque des impressionnistes, c’est l’atmosphère qui irradie. La couleur devient motrice, la pâte picturale va exercer sa séduction. Matisse sature la toile avec ses rouges comme il a exagéré la décoration. L’espace se construit par la couleur chez Cézanne, et avec De Staël la couleur devient frontale.
Kandinsky troublé par une meule de paille de Monnet, donnera toute sa puissance à la palette, discréditant les objets ; le couleur accède à la légitimité, seule.
Olivier Debré calé dans la nature, simplifiera le geste, cherchant l’essence dans l’huile.
Sam Francis a quitté un lit de douleur par la peinture, avec moins de théâtralité que Pollock, le vide devient le sujet principal du tableau dont ressortent les limites. « Dieu ne peut pas voir sans l’artiste. »
Morris Louis, lui retourne aux teinturiers, il n’a plus recours aux pinceaux, ses coloris déversés, il éprouve les différents degrés d’absorption de la toile et les effets de la gravité. Sortie de son atelier exigu, la toile déployée se découvre alors.
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