et le groupe au Palais des Ducs du Poitou pour la
tournée des hôtels particuliers de la ville. Nous commençons donc par notre lieu de rendez-vous situé dans la grande salle d’apparat ou aula de la
résidence d’Aliénor d’Aquitaine et de ses deux maris Louis VII et Henri II. La
pièce monumentale dans laquelle circulent librement les touristes comporte un balcon très ciselé
de 1388, de hautes verrières gothiques et trois cheminées gigantesques. Sur les
murs se dessinent des arcades aveugles, aucun plafond ne dissimule
l’impressionnante charpente. La visite se limitant à cette seule salle, nous
nous dirigeons vers les hôtels
particuliers et belles demeures de Poitiers :Nous stoppons en premier devant
l’hôtel Pelisson, construit en
pierre avec des pans de bois au XVIème siècle. Des pilastres
décorent sa façade et à chaque étage correspond
un des 3 ordres classiques (corinthien dorien et ionien). Son
originalité provient d’une tête de vache
morte appelée bucrane et de deux inscriptions en latin : « in dno
confido » (je me confie au Seigneur) avec un signe bizarre sur le n de dno
et « Hoc est refugion meum » (Voici mon refuge)- Des maisons à pans de bois
s’élèvent toujours place Charles De Gaulle. Au n°11, Valentine nous commente l’hôtel Claveurier
édifié fin du Moyen-âge pour le Sénéchal Claveurier. Sa maison aux colombages jaunes témoigne de sa
richesse avec son pignon sur rue, se distinguant de maisons plus modestes à
pignon caché et affiche les deux clés
entrecroisées du blason de son
propriétaire.Ville universitaire depuis 1431,
Poitiers a gardé sa réputation de ville enseignante jusqu’à nos jours. Elle compte un quart de la population comme
étudiants. Très implantée dans la ville, l’université a acquis un grand nombre de
maisons et hôtels du patrimoine, se chargeant de bien les entretenir. Ainsi l’Hôtel Dieu mitoyen de l’Office du tourisme devient-il dans les années 60 un centre régional universitaire. Nous pouvons
entrer dans la cour fermée en ces temps de vacances parce que Valentine, notre guide, en
détient la clé.L’hôtel Chaboureau, propriété de l’université depuis 1954, nouvellement
adapté à des fonctions pédagogiques et de recherches modernes, date du
moyen-âge / Renaissance. Autrefois, pour échapper à l’impôt, ses habitants
obstruèrent les fenêtres. Celle à
croisées (meneaux) visible de nos jours
fut reconstituée plus tard. Plus rare, une fenêtre d’angle sur le modèle de
l’hôtel Beaucé fragilise cependant la construction. Des motifs de choux frisés enjolivent le pignon.
Nous poursuivons avec la rue
des flageolles, passons devant une ancienne auberge du XVIIIème
dotée d’une cour intérieure, et découvrons beaucoup de maisons ou jardins planqués
derrière les demeures sur rue. Square des flageolles se dresse la maison Royran. Sa toiture associe ardoises et tuiles, et mélange de cette façon
2 styles traditionnels pratiqués l’un au
nord et l’autre au sud de la France. Aujourd’hui reconverti en HLM, elle a
conservé ses caractéristiques d’ancienneté, pour preuve la survivance d’une
fenêtre surmontée d’une accolade.La maison à pans de bois 15 rue Cloche-
Perse vaut surtout pour son linteau sculpté de rinceaux interrompus par des
médaillons où figurent une femme et un homme. Une autre maison dans la même rue
au n°5 privilégie la pierre puis est
rehaussée en colombage. Mais cette pratique pas toujours réussie présentait des
risques d’effondrement.- Nous atteignons maintenant l’impressionnant
et magnifique hôtel Fumé répondant au
style gothique flamboyant dont
l’aspect moyen-âge défensif cherche davantage à en imposer qu’à protéger. Il
appartient au département de la
Vienne depuis 1911 et loge la faculté de sciences humaines et des Arts de
Poitiers. Valentine, nous donne accès à la cour intérieure où nous
pouvons admirer une loggia à pans de bois portée par de superbes colonnes
torsadées. Leur disposition en sens alterné contribue à un effet de légèreté. A
côté, une tourelle renferme un escalier menant aux étages. Nous remarquons
encore un balcon et de belles lanternes et une porte à petits carreaux que nous
ne franchirons pas car elle ouvre sur le domaine de l’université. Nous adoptons
une attitude discrète, pour ne pas déranger le gardien et sa famille bénéficiant
ici d’un appartement riche d’histoire.
D’autres locataires ont élus domicile sans y être invités, c’est la fête du
pigeon et de ses désagréments. Abandonnant la rue Descartes,
et en nous rapprochant de la place de la liberté, nous retrouvons la rue Cloche-Perse pour une
halte devant la Prévôté. La maison
comme son nom l’indique, appartenait au prévôt. Au moyen âge et à la
Renaissance, officier de gendarmerie, ou
encore magistrat s’occupant des finances, de la justice, de
l’administration, de l’ordre public, il
agissait au nom du Roi ou du Seigneur. Un accident endommagea sérieusement le
bâtiment au XVIIIème siècle et en détruisit une partie : il fut
déclenché par le passage d’une mule
chargée de barils de poudre menée par un muletier. Tandis qu’ils passaient
devant la Prévôté, une mouche agressa la bête
qui voulant s’en débarrasser tapa du pied. Mais le fer de son sabot
provoqua une étincelle suivie d’une
déflagration, celle-ci souffla les vitres, des morceaux de la toiture, et entraina la mort de la mule. En souvenir de
l’évènement, un fer à cheval reste fiché
dans la façade de la maison amputée. L'affaire est notamment rapportée en 1907
par l'auteur Raoul Brothier de Rollière dans son Nouveau Guide du voyageur à
Poitiers. Il raconte : « Vers 1775, un
mulet chargé de barils de poudre fit explosion à l'angle de la rue
Cloche-Perse. Un bruit formidable s'ensuivit, l'animal disparut, mais une de
ses jambes enfonça la fenêtre du 2 eétage, dont le fer reste
incrusté dans la pierre. Ce fer se voit encore auprès d'une petite fenêtre
carrée, près de la tourelle d'un petit pavillon ». Moins bien conservé que l’hôtel
Fumé, de l’extérieur du moins puisque nous ne verrons pas dedans, il subsiste
deux fenêtres géminées côté hôtel Fumé, une tour de noblesse intégrant un
escalier et un toit en poivrière rue
Cloche-Perse.
Tout près, nous jetons un œil
sur la place de la liberté. Autrefois,
s’y trouvait le pilori. Aujourd’hui, une statue de la
liberté le remplace en mémoire de JB Breton, décapité après un complot pour
rétablir l’empire et qui mourut en
criant « Vive la liberté »Le dernier monument prévu dans le circuit change carrément de
style et d’époque. Seul hôtel
particulier du XVIIème siècle à Poitiers, l’hôtel
Pinet ne souffre pas de concurrence :
en effet, à l’époque, Poitiers ne produit pas, on l’a considère donc comme pauvre, alors peu investissent dans de belles constructions privées.
Monsieur Pinet prélève les impôts poitevins pour le Roi, et dit posséder des
subsides ou des richesses personnelles. Il commandite ce palais grandiose sur
une large parcelle, ce qui ne manque pas d’attirer l’attention sur sa filouterie.
Accusé d’avoir pioché dans la caisse, il est arrêté et condamné à mort sous
Louis XVI. Le bâtiment se voit attribuer à un autre agent royal puis se
transforme en séminaire, en prison et en
Hôtel Dieu jusqu’au milieu du XXème siècle. Devenu trop petit pour
cette fonction, il est transmis à l’Université qui en fait sa présidence. Il
respecte les canons de l’ architecture baroque : la large entrée en
bossage s’ouvre sur une cour intérieure
face à édifice en U. Son corps de
bâtiment symétrique se divise en 3 parties ponctuées chacune de hautes fenêtres sur trois étages, un fronton
triangulaire central déborde sur la toiture d’ardoise percée d’oeils-de-bœuf.
Très minérale, la cour accepte en son milieu une fontaine et laisse deviner le passage circulaire
réservé autrefois aux carrosses. Derrière l’hôtel côté jardin s’étend un vaste
parc mais inaccessible aux visiteurs. Ainsi s’achève notre parcours copieux et
instructif, même si incomplet (il n’inclut pas l’hôtel Beaucé par exemple) et
nous apprécions une pause Perrier.
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