jeudi 16 juin 2022

Gustave Caillebotte. Claire Grebille.

  « Gustave Caillebotte et son chien » photographié par Martial Caillebotte.
Même si ses neveux l’ont considéré un moment comme un « peintre du dimanche », le titre « L’impressionniste méconnu » donné par la conférencière devant les amis du musée de Grenoble a été démenti dans son exposé mettant en valeur l’artiste discret, le mécène généreux.
Caillebotte est né en 1848 dans une famille aisée.
Après la mort de son frère René, il va rédiger un premier testament où il confie à l’Etat sa collection de Renoir, Monet, Degas, Pissarro, Cézanne … afin qu’ils soient exposés au musée du Luxembourg, réservé aux artistes vivants. 
Le « Martyre de saint Denis » de Léon Bonnat, qui  fut son maître aux Beaux Arts, ne fait pas partie du lot impressionniste, de plus ce portraitiste à succès n’avait pas besoin d’être soutenu.
A ses débuts, Gustave Caillebotte propose une
« Femme nue sur un divan » mais ne poursuivra pas dans le genre. Pourtant, malgré la pesanteur, le charme avait pu se dispenser de l’idéalisation classique.
Le quotidien héroïque se manifeste dans
« 
Intérieur d'atelier au poêle », 
marquant son goût pour le naturalisme.
R
ecalés au salon de 1875, «Les Raboteurs de parquet » connaissent le succès à la deuxième exposition des « refusés ». La fugacité et la force mises en valeur dans une perspective vigoureuse, les jeux de lumières, justifient la célébrité du tableau.
Il s’intéresse au travail manuel : 
«  Les peintres en bâtiment » figurent dans la modernité haussmannienne.
Les lumières de la neige vont bien à l’originale
« Vue de toits » de Paris (aujourd’hui inscrits au patrimoine de l’UNESCO) les touches vibrantes n’abolissent pas le dessin. 
Sur bien des variations vues depuis des immeubles, la verdure contrarie souvent la rectitude, cet
« Homme au balcon » est conquérant.
« Dans un café »
rejoue dans les miroirs la rivalité avec les sculpteurs, en révélant l’envers. Le personnage à la façon d’Hopper appelle un récit, une intrigue. 
La vaisselle apporte du rythme parmi les couleurs sombres du « Déjeuner », sa mère porte le deuil du père. Si cet intérieur à l’atmosphère lourde tranche avec les lumières de ses amis, 
il les rejoint en plein air au bord de « l’Yerres », quand la pluie fait ses effets dans une composition asymétrique.
L’incertitude des rives du « Petit bras de la Seine » à la touche libérée séduit Durand-Ruel le visionnaire promoteur des impressionnistes de l’internationale des marchands d’art.
Dans le triptyque d’une « journée idéale au bord de l’eau » peut s’esquisser un frêle esquif :
«  Canoë sur Yerres », qui vint après les périssoires. 
Le philatéliste ingénieur nautique est devenu conseiller municipal.
Les jardins l'inspirent : « Les roses du jardin »
« Capucines »
« Parterre de marguerites »
. 
« Orchidées Cattleya et anthuriums ».
Dans « Le Parc de la propriété d'Yerres » chapeaux et massifs jouent avec les cercles
.
« La serre »
qui protège une jungle sous une solide structure construite dans sa propriété du Petit-Gennevilliers résume une œuvre avec ses cadrages inspirants pour le cinéma. Sa production nous  invite à table, en barque, sur les ponts et sur les balcons d’une époque fleurie. Il meurt à 45 ans en 1894. Renoir son exécuteur testamentaire aura pu prendre connaissance de l'avis de Gérôme parlant du legs de Caillebotte, noyau aujourd’hui des collections d’Orsay :  
« Nous sommes dans un siècle de déchéance et d’imbécillité. C’est la société entière dont le niveau s’abaisse à vue d’œil… Pour que l’État ait accepté de pareilles ordures, il faut une bien grande flétrissure morale. »

1 commentaire:

  1. Ton rapprochement de "Dans un café" avec l'oeuvre de Hopper est bien tentant, mais je ne mords pas à l'hameçon : pour moi, il y a une dimension dévitalisée, lisse, à l'oeuvre de Hopper qu'il n'y a pas dans "Dans un café". Et puis... il y a plus d'expression, plus d'épaisseur dans l'Homme de "Dans un café" que dans les oeuvres de Hopper. Chez ce dernier, la modernité poursuit son terrible travail de... sape de l'humanité dans l'Homme. Son travail de faire de ce dernier un... automate. Triste travail, et triste automate.
    Ça fait belle lurette que je vois dans la peinture impressionniste un désir fulgurant de célébrer une nature qui est en train de s'amincir dans les abords de la capitale pour laisser place à la chose mécanique. Le regard impressionniste est un regard où la photo n'a pas encore l'emprise qu'elle a sur nous à l'heure actuelle, pour déterminer à outrance notre vision des possibilités ? de la réalité.
    Cela m'intéresse de pouvoir admirer les transformations haussmanniennes dans la capitale. J'aime beaucoup cette architecture, cette modernité... là.

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