jeudi 7 septembre 2023

François Auguste Biard. Musée Hébert.

Un illustre inconnu est présenté jusqu’au 4 septembre au musée Hébert de La Tronche dont les choix sont souvent pertinents.
L’artiste né en 1799 à Lyon avait connu le succès pour ses peintures expressives multipliées en gravures puis tomba dans l’oubli après avoir été apprécié par Louis Philippe.
Sa disgrâce suivit la chute de la monarchie de  juillet.
Des panneaux présentant les critiques qui lui furent adressées témoignent d’une démarche originale et font confiance aux œuvres mises en lumière.
Souvent amusé, son regard porte sur des sujets de la vie quotidienne peu représentés à cette époque, mais aussi au-delà des frontières autour de la Méditerranée, au pôle Nord, au Brésil.
Il met « Le monde en scène » et livre un de ses tableaux figurant dans beaucoup de manuels scolaires : « Abolition de l'esclavage ».
Une précédente exposition dans la maison de Victor Hugo doit sans doute à sa femme qui l’avait accompagné au Spitzberg, surprise avec l’auteur des Misérables en situation d’adultère. Elle fut emprisonnée, le pair de France en fut pour quelques dessins railleurs.
Nous découvrons un agréable découvreur lors de ce voyage dans l’espace et le temps sans empreinte carbone.

 

mercredi 6 septembre 2023

Paris # 1.

«Ici, c’est Paris ! » scandent les supporters du PSG, équipe financée par le Qatar, Paris est à tous.
Le monde en toutes ses couleurs et toutes ses langues habitent notre capitale,aux transports bondés, aux appartements minuscules.
Le nom de chaque rue nous dit quelque chose tant notre mémoire a été enchantée par quelques formules :
 
« Je suis le dauphin de la place Dauphine
Et la place Blanche a mauvaise mine. »
et comblée d’images du pont Alexandre III
ou des maquettes de bateaux voguant depuis toujours au bassin de Tuileries.
Si loin d’une première visite de fin d’adolescence au Mur des fédérés, en ces temps blessés nous sommes allés aux Invalides, sa cour des hommages et son dôme doré souvent contournés.
Le tombeau de Napoléon mort en 1821, enfermé dans cinq cercueils est au centre de l’édifice depuis que Louis Philippe l’a fait revenir de Saint Hélène en 1840. 
Toujours en service, comme hôpital de jour, les bâtiments datent de Louis XIV qui les alimenta en estropiés, pour que « ceux qui ont exposé leur vie et prodigué leur sang pour la défense de la monarchie (…) passent le reste de leurs jours dans la tranquillité », d’après un édit royal de 1670.
Nous ne nous sommes pas attardés dans l’espace dédié au général De Gaulle ni à la présentation des plans reliefs,
intéressés par l’exposition temporaire intitulée « La haine des clans », rappelant les huit guerres de religions qui divisèrent le royaume entre 1559  date de la mort dans un tournoi d’Henri II, et l’assassinat d’Henri IV, en 1610.
Les armures portées par les ligueurs catholiques des Guise et celles du clan protestant des Condé sont exposées ainsi que l’édit de tolérance (de Nantes, 1598),
et la loi de séparation de 1905 - encore en vigueur aujourd’hui - où politique et religieux, Etat et foi sont séparés.
L’affaire des placards (affiches) protestants apposés jusque dans les appartements royaux avait affaibli les partisans d’une réforme. La régente Catherine de Médicis avait tenté des conciliations mais difficultés sociales, rivalités de familles ajoutées à une vague d’iconoclasme suivie de tueries connaitront leur paroxysme lors de la Saint-Barthélemy, en août 1572.
Si les niveaux de violences sont d’un autre niveau aujourd’hui, ces antagonismes exacerbés par images et pamphlets font écho bien entendu à nos querelles quand l’Etat se trouve en prise aux factieux.
« Paris plage », les vélos autour de la place de la Bastille et les foules du Marais nous rassurent en ce mois de juillet 2023.

mardi 5 septembre 2023

La revue dessinée # 40. Eté 2023.

Depuis le premier numéro et la trentaine de numéros chroniqués depuis, je n’avais pas souvent oublié d’acheter le trimestriel   
et je le retrouve plus pessimiste que jamais, ayant délaissé quelque peu la joliesse graphique au détriment d’une démarche essentiellement militante.
L’écho suscité par leur intervention à propos de la prolifération des algues vertes en Bretagne les encourage à alerter
sur la pollution à Fos-sur-Mer et sa quinzaine de zones classées Seveso 
ou à Montreuil quand des résidences sont prévues sur des emplacements d’usines au sol pollué pas vraiment « nickel chrome ».
Le géant pétrolier Total a longtemps semblé ignorer le réchauffement climatique alors que dès 1970, ils en étaient conscients.
Tout le monde n’a pas la modestie de cette élue : 
«  On a un devoir d’humilité, car la dépollution n’est pas une science exacte »
«  Certains riverains ont une maîtrise du dossier plus poussée que nous-mêmes. »
 Pour les garants du droit, les inspecteurs du travail, la tâche n’est pas aisée.
C’est en Afghanistan qu’il faut repérer une issue favorable avec une famille qui arrive à échapper aux talibans. En 2021, 120 000 personnes avaient pu quitter Kaboul grâce à l’OTAN.
Dans une rubrique utile revenant sur un reportage précédent concernant la pédocriminalité au sein de l’église qui avait reconnu que 330 000 mineurs avaient pu être agressés depuis 1950, les mentalités évoluent, mais des blocages demeurent.
Le penchant critique de la ligne politique de la revue amène l’équipe à ne voir dans la pensée positive, qu’une pensée magique, religieuse et trumpiste. 
Par contre l’étude du mot « baiser » bien que classique est habilement développée et l’expérience de boxe thaïlandaise est amusante. 
Je n’ai pas les références requises pour apprécier la rubrique musicale, ni celle consacrée au cinéma et trop de désaccords politiques pour partager les critiques d’une loi anticasseurs au moment où viennent de flamber écoles et commissariats.    

lundi 4 septembre 2023

Àma Gloria. Marie Amachoukeli.

Les mots « merci » « pardon » ont toute leur importance dans ce film tourné à hauteur d’enfant. Histoire d’amour éperdu d’une petite fille envers sa nounou remplaçant sa maman morte d’un cancer. Cette seconde maman Capverdienne doit retourner dans son île d’origine pour l’enterrement de sa propre mère et la naissance d’un enfant de sa fille. 
La petite française la rejoindra le temps des grandes vacances.
Les deux actrices nous entrainent parmi leurs rires et leurs larmes, dans une proximité de tendresse qui redonne foi en l’humanité quand la subtilité rencontre la simplicité. 
Gentil mélo mais pas trop, juste comme il faut.

vendredi 30 juin 2023

Scolaire.

Cette dernière page de la saison s’inscrit dans un calendrier aux allures scolaires ; je reprendrai mes écritures en principe à la rentrée.
A tous coups, le mot « scolaire » ramène chez moi quelques obsessions, bien que ma légitimité s’amenuise pour m’exprimer sur un milieu quitté depuis bientôt 20 ans.
Quand s’affole l’immédiateté, ce regard rétro implorera l’indulgence malgré les rabâchages: l’école-devenue-une-activité-entre-deux-week-ends ne dicte plus un tempo voulu par l’industrie du tourisme.
Je me garderai cependant de désigner comme unique coupable un secteur d’activité, fut-il prépondérant dans notre vieux pays où poussent musées et autres attractions sur les friches industrielles, tant la désignation simpliste par exemple de « Big pharma » comme mère de tous les maux a épuisé toute tolérance.
La dénonciation systématique de boucs émissaires pèse méchamment dans le débat public, alors que s’impose la mise en évidence de la complicité de tous dans une consommation effrénée de loisirs modifiant en profondeur les mentalités.
Quand la retraite devient le graal, le travail est grillé.
A réenfiler les perles élimées de valeurs caduques, j’aggraverai mon cas en n’apportant pas de nuances, en généralisant. 
« Un grand nombre de secteurs ne va pas se relever avant longtemps : la restauration, le tourisme, l’industrie du spectacle » Quand Jacques Attali à propos de la pandémie de Covid 19 prophétise ainsi, on peut se permettre de causer aussi. 
A l’encontre de la tendance à éviter le labeur et ses pollutions, je n’ignore pas la volonté de ré industrialisation de l’exécutif pas plus que les progrès en matière de chômage qui ont fait passer cette préoccupation jadis prioritaire au second plan. Et dans la lignée de mon légitimisme, concernant les décisions réformant des retraites qui n’ont guère flatté l’opinion, je reprendrai volontiers l’image d’un journaliste allemand à propos d’une question quelque peu orientée sur la semaine de quatre jours en la mettant à la sauce bretonne : qui refuserait un Kouign aman à la chantilly qui fasse perdre 5 kg ?
D’après la même source étrangère, il semble que la crise des recrutements dans les écoles, dépasse les limites de l’hexagone, la multiplication des temps partiels appelant un nombre plus grand de candidatures.
Le salaire n’est pas la cause unique de la crise des vocations en milieu scolaire.
Ma persistance à lire « Le Monde » prend des allures encore plus aristocratiques avec une porteuse qui glisse dans ma boite désertée de tout autre papier, le jadis « journal de référence », la Poste n’étant plus en mesure d’assurer ce service d’une façon fiable.
Mais le vieux lecteur a de quoi « stresser » quand dans les titres, est dénoncé le stress de lycéens au moment de leur orientation, alors que l’épreuve de philo ne les stresserait pas suffisamment ! Je me trouve ridicule à penser que la philo ne servirait pas seulement à gagner des points. La marchandisation du monde touche aussi ceux qui la dénoncent quand ils refusent toute tâche non rémunérée. Leurs élèves les suivent en comptables de points pourtant accordés généreusement au bout d’une scolarité qui a évité tout chiffrage.
Titulaire d’un bac en 68, j’approuve Luc Ferry : 
« Pour ne pas avoir le bac, il faut en faire la demande » 
Un dernier paradoxe relevé avant de solaires vacances: les radicaux écologistes venus de loin en voiture pour s’opposer à une ligne ferroviaire Lyon Turin avaient noté sur un panneau :
« Plus de trains, c’est plus de camions » avant de s’approvisionner en cailloux depuis le balast  où roule la SNCF sur les voies qui conduisent aux plages et autres grèves.          

jeudi 29 juin 2023

Histoires de peintures. Daniel Arasse.

345 pages à déguster en 25 chapitres et plutôt deux fois qu’une 
pour traverser 10 siècles de peinture depuis une Joconde revisitée avec finesse jusqu’à Rothko ; de l’invention de la perspective à la figure engloutie.
45 toiles en trop petit format sont regroupées au centre du livre de poche, simples rappels format Smartphone pour des développements exigeants où peut s’appliquer la réflexion de Saint Bernardin à propos de l’Annonciation, quand  
« l'infini vient dans le fini, l'incommensurable dans la mesure ».
Nos horizons peuvent s’élargir sans risquer l'anachronisme, notion fouillée ainsi que les restaurations, les détails, les photographies, les façons d’exposer: 
« La perspective construit d’abord un lieu d’architecture, qui est une place, et sur cette place l’Histoire se déroule […] Alors que la maison privée, en particulier celle du prince, est le lieu de la trahison et de la fourberie. » 
Rien que le positionnement de Judas dans la Dernière Cène, isolé ou dans le groupe, permet de comprendre le passage d’ 
« un système mnémonique, juxtaposé, clos, répétitif même, à un système rhétorique de persuasion du spectateur ».
A propos de l’Olympia de Manet et de la Vénus d’Urbino du Titien : 
« On peut s’interroger sur la façon dont une œuvre peut suggérer un regard tout à fait inattendu, singulier, personnel, appropriateur, de tel artiste sur tel artiste du passé. »
Nous sommes conduits au-delà des images des dieux des anciens  
« enchevêtrés les uns avec les autres, qu’un même dieu montre souvent diverses choses et que divers noms signifient parfois une même chose »  
quand Freud est cité : 
« Des associations d’idées mènent d’un élément du rêve à plusieurs pensées, d’une pensée à plusieurs éléments. » 
La description d’une Annonciation par une étudiante peut aussi nous éclairer : 
« A gauche, il y a un jeune homme richement vêtu avec des ailes. C’est peut être un ange. Ce jeune homme a l’air de rendre hommage à une jeune femme vêtue d’un très beau manteau bleu. Au dessus à gauche, bizarrement il y a un vieillard accoudé sur un nuage, peut être Dieu. »
Oui il est question du maniérisme, de « pensements » et du « désoeuvrement de l’art » pour permettre de savoir pour mieux voir.

mercredi 28 juin 2023

Musée de Paladru.

Le MALP (Musée Archéologique du lac de Paladru) a trouvé sa place au bord du lac
où des fouilles entreprises à partir de 1972 ont fourni en objets rares l’immense salle d’exposition sous sa coque évoquant l'emblématique pirogue de l’an mil découverte en ces eaux.
Outre l’explication des techniques de fouilles
et de conservations qui font la singularité des collections regroupant 600 objets,
deux parcours sont proposés.
L’un est consacré au néolithique (2700 ans av JC) où un couteau à moissonner au manche en osier parfaitement
préservé dans les limons du lac se présente comme une pièce exceptionnelle.
L’autre circuit détaille la vie des chevaliers paysans au moyen âge qui vivaient de l’autre côté du lac avant la montée des eaux, depuis les pièces d’harnachement des chevaux aux jeux d’échecs.
La majesté du bâtiment inauguré enfin en 2022 et son emplacement attirent de nombreux visiteurs où une muséographie très pédagogique redonne une seconde vie aux trésors que présentait la maison de pays de Charavines.