Est-ce que parce que l’art contemporain est un marqueur
culturel impitoyable, un domaine de spéculation affolant, que nous devons nous
interdire de nous tenir au courant de ce qui se présente à nos yeux ?
Les obstacles sont nombreux : un verbiage le plus
souvent abscons accompagnant les œuvres,
une communication hiératique : l’œil poché qui annonce
la biennale, une tête de cochon ou une bulle de chewing-gum sont-ils
incitatifs ?
Quand on annonce « un
moment délicieusement érotique de
superposition, et nous nous réjouissons de repérer la perfidie » pour
des bouteilles pendues sous un cadre, il y a de quoi débander, nous débander.
La profusion des artistes est-elle décourageante ou permet-elle,
aux familiers du zapping, des découvertes, en épargnant les raseurs ?
Je livre quelques mots depuis deux lieux : le MAC et la Sucrière, en passant
par-dessus les vêtements sur le sol, quelques bites, des BD agrandies, quelques
rames de papier, des parpaings, des titres bidons et des provocations datant de
Mathusalem accompagnées de tant d’oublis.
Pour être peu sensibles aux vidéos proposées en général en
ces lieux, je change d’avis avec Takao
Minami qui respecte le thème de cette 12° biennale consacrée au récit
« Entre temps, brusquement et ensuite. » Des personnages fragiles
irisés de lumière traversent des paysages rêvés participant à un univers
original, poétique qui nous offre une belle découverte tout en nous paraissant
familier.
Gustavo Speridiao
a apporté pour moi une touche d’humour au cours d’une pérégrination qui n’était
pas là pour rigoler. Une histoire de l’art vraiment personnelle : une
série de photographies souvent
originales aux titres décalés.
« Nous sommes les pirates d’une histoire
inexplorée » sonne pas mal comme titre de Takewata qui s’attaque à Fukushima, rien que ça.
Le collectif Madein
company présente sous vitrine des gestes des religions, du sport ou de la politique qui se ressemblent. Cela
conviendrait mieux à un musée d’anthropologie mais les rapprochements sont
stimulants.
Paulo Nazareth a
payé de sa personne en faisant le trajet de Johannesburg à Lyon à pied, il a déposé
quelques étiquettes ramassées au cours du périple.
Les projections d’images poétiques sur du sable de Gabriela Fridrksdottir font partie d’une installation qui regroupe une
vidéo aux allures chamaniques, des bouteilles en verre soufflé, une
construction semblable à un fruit dans un environnement soigné de sons comme
dans quelques autres propositions succinctement décrites ci-dessus.