Deuxième jour dans Angkor, sous le signe du soleil.
Après avoir passé les guichets de l’entrée principale, nous révisons les monuments d’hier en les longeant et continuons la route vers le Preah Khan : l’épée sacrée en khmer.
Il s’agit d’un monastère, une université où enseignaient 1000 professeurs. Pour nourrir tout le monde, 15 tonnes de riz étaient récoltées par jour. Encore aujourd’hui Sothy, notre guide, nous apprend qu’un cambodgien mange un kilo de riz par jour, surtout ceux qui travaillent aux champs (En 2000, la consommation annuelle de riz a été de 163 kilogrammes par habitant. La consommation moyenne en Asie du Sud a été de 78 kilogrammes). Ce temple très fréquenté doit son succès aux racines des arbres majestueux et monumentaux qui emprisonnent et écrasent les murs. Un curieux bâtiment de deux étages se distingue des autres à cause de ses piliers ronds « style gréco-romain ». Il nous semble que c’est dans une des salles de ce temple qu’on aperçoit des trous régulièrement espacés : ils recevaient les torches, les bougies, et des diamants qui réfléchissaient la lumière. Au centre un stupa à la mémoire du père du roi appelait à tant de richesse.
La deuxième visite concerne Néak Pean= serpents enroulés. Le site est très différent des autres. Il comprend plusieurs bassins avec son temple central entouré de quatre autres bassins possédant une « chapelle » alimentée par les canalisations. Chaque édifice est caractérisée par une gargouille d’où s’échappait l’eau symbolisant les quatre éléments : une tête d’éléphant ( l’eau), une tête d’homme ( la terre) une tête de lion(le feu) et une tête de cheval (l’air). Il semblerait que l’on soignait les gens d'ici, une sorte d’hôpital avec un quelque chose de Lourdes. Dans le bassin central, des paysans coupent l’herbe à grands coups de machette pour la rassembler avant d’en faire des ballots. A l’entrée du site, un groupe de musiciens se produit en continu et tente de récolter quelque monnaie : ce sont des victimes des mines déposées dans le secteur par les khmers rouges.Bien que ce ne soit pas tout à fait l’heure, Sothy nous propose la pause méridienne, ce qui nous évitera l’attente au restaurant. Nous repartons plein d’énergie après un bon repas de beef soit aux champignons, soit à l’ananas, soit au gingembre. Nous visitons le temple Ta Prohm dont le site servit à Jean Jacques Annaud pour tourner le film « Les deux frères », histoire de deux tigres. On lui doit l’allée sablonneuse d’accès ; les racines de fromagers « comme autant de reptiles à travers les anfractuosités des édifices qu’elles bouleversent et soulèvent comme des fétus de paille » (Petit futé). On retrouve une salle dédiée cette fois à la mère du roi.
Après un bref transfert en Toyota climatisée, nous escaladons les redoutables marches de Ta Keo temple montagne inachevé dépourvu de bas relief, de culte hindouiste. Puis nos terminons la visite avec un ensemble Thommanon et Chau Say Tevoda reconstitué par l’école française d’Extrême Orient qui a remplacé les blocs disparus par des blocs ou des sculptures qui tranchent avec les pierres authentiques.
Nous commençons un peu à tout mélanger lorsque nous rentrons à l’hôtel. Nous avons juste le temps de profiter de la piscine avant l’orage. En fin d’après midi je retourne à mon échoppe internet favorite, m’accordant cette fois-ci une heure complète sans contrainte pour savoir comment l’OM s’est renforcé.
Nous assistons ensemble au dîner(buffet) spectacle au « Angkor Mondial » restaurant, pour 12$ chacun , nous festoyons en goûtant la grande variété des plats proposés avant d’admirer les danseuses khmers, reins cambrés et orteils s’agitant en tous sens, pouce relevé. Des clients se précipitent sur la scène à côté des artistes pour se faire photographier. Bonne soirée, on joue la flemme et un tuk tuk nous ramène à l’hôtel.
mercredi 28 avril 2010
mardi 13 avril 2010
Construire un feu. BD.
D’après la nouvelle de Jack London, Chabouté, nous fait partager les derniers pas d’un homme qui n’arrivera pas à rejoindre ses compagnons dans les étendues du Klondike par des températures où les crachats se gèlent avant d’atteindre le sol. Epreuve physique ultime, et minimalisme métaphysique, dépouillé, beau, essentiel. Le chien qui l’accompagnait ira retrouver d’autres pourvoyeurs de feu, cet homme là a été vaincu par son orgueil et ses allumettes mouillées.
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Je reprendrai la publication de mes articles le mercredi 28 avril.
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Je reprendrai la publication de mes articles le mercredi 28 avril.
lundi 12 avril 2010
Alice au pays des merveilles
Charles Lutwidge Dodgson, le professeur de mathématiques qui de l’autre côté du miroir fut Lewis Caroll, termine son livre
« Elle était certaine que, dans les années à venir, Alice garderait son cœur d’enfant, si aimant et si simple, elle rassemblerait autour d’elle d’autres petits enfants… » Et c’est Tim Burton- qui mieux que lui ?- qui nous convie au pays des merveilles. Bien sûr, rien de mièvre dans ces contrées où le maître des nuées et des forêts mystérieuses nous précipite. Le retour d’une Alice plus âgée dans un pays qu’elle a oublié, comme nous, s’accorde bien avec une iconographie fidèle aux illustrations du XIX° siècle ravivées par les techniques modernes les plus spectaculaires. En effet, c’est Burton qui est le mieux placé encore, pour nous permettre de retrouver les délices premiers de l’attraction de foire qu’était le cinématographe, avec les lunettes pour une vision en trois D. Il faut baisser la tête, quand le chapelier projette son chapeau sur l’autre rive, et s’éviter de tousser quand la chenille vous envoie, dans les yeux, la fumée de son narguilé. Des personnages familiers, avec un bon dosage de trouvailles, rendent ce conte fluide alors qu’à l’origine celui-ci est complexe et peut décourager les enfants. Je n’avais perçu les charmes de ces aventures initiatiques, et encore pas tous, que devenu adulte en revisitant les phares de la littérature enfantine. Le chat de Chester est parfait.
« Elle était certaine que, dans les années à venir, Alice garderait son cœur d’enfant, si aimant et si simple, elle rassemblerait autour d’elle d’autres petits enfants… » Et c’est Tim Burton- qui mieux que lui ?- qui nous convie au pays des merveilles. Bien sûr, rien de mièvre dans ces contrées où le maître des nuées et des forêts mystérieuses nous précipite. Le retour d’une Alice plus âgée dans un pays qu’elle a oublié, comme nous, s’accorde bien avec une iconographie fidèle aux illustrations du XIX° siècle ravivées par les techniques modernes les plus spectaculaires. En effet, c’est Burton qui est le mieux placé encore, pour nous permettre de retrouver les délices premiers de l’attraction de foire qu’était le cinématographe, avec les lunettes pour une vision en trois D. Il faut baisser la tête, quand le chapelier projette son chapeau sur l’autre rive, et s’éviter de tousser quand la chenille vous envoie, dans les yeux, la fumée de son narguilé. Des personnages familiers, avec un bon dosage de trouvailles, rendent ce conte fluide alors qu’à l’origine celui-ci est complexe et peut décourager les enfants. Je n’avais perçu les charmes de ces aventures initiatiques, et encore pas tous, que devenu adulte en revisitant les phares de la littérature enfantine. Le chat de Chester est parfait.
dimanche 11 avril 2010
Oper Opis
Traduit du suisse allemand signifie « quelqu’un, quelque chose» et c’est vrai que les objets chaises, tables, planches, cales, miroirs, participent à l’affolement du monde de Zimmermann et de Perrot. Heureusement hommes et femmes ont quelques trappes pour s’échapper. Les glissements semblent burlesques au premier abord puis la tension grandit avec la musique originale. Le plateau penche sans arrêt, d’un côté puis de l’autre, les performances des équilibristes n’en seront que plus méritoires. Les séquences sont réglées au millimètre, c’est qu’il faut beaucoup de précision pour mimer le désordre. Les couples de tous les formats arrivent à s’échapper avec légèreté à cette frénésie, un instant. Leurs silhouettes rappellent Bosch pour les acrobates difformes, Crumb pour la beauté callipyge d’une danseuse, Keaton aussi, mais cet univers précaire, bancal, en déséquilibre constant est tout à fait insolite et le public de la MC2 en redemande.
samedi 10 avril 2010
La prospérité du vice.
Le qualificatif mis entre parenthèses dans le sous titre du livre de Daniel Cohen : « introduction (inquiète) à l’économie » a rassuré le piètre consommateur d’informations économiques que je suis. Je ne saurai avoir le recul nécessaire pour apprécier si l’histoire que Fukuyama estimait arrêtée, s’est remise en marche, ou pour nier le choc de civilisations de Huntington. Mais le livre de l’économiste, tant vanté, est accessible et met en perspective nos informations touffues. Le balayage de l’histoire du monde est magistral et pédagogique mais le regard est sombre : le commerce, n’est pas « doux », et l'éducation n’apporte par forcément « la raison ». Nous passons d’un monde infini où la croissance s’alimentait d’elle-même à un monde clos par la réalité écologique. Nous sommes sortis des temps simples : « celui qui fabrique des biens , le prolétaire, qui ne dispose que de ses mains pour assurer son salaire n’est plus une source de plus value ; il est un coût qu’on cherche à externaliser » . Et si ma mémoire s’accroche mieux aux formules poétiques dont j’ai découvert que Marx en était l’auteur : « dans les eaux glacées du calcul égoïste », on pourrait souhaiter que les approches du grand barbu ne soient pas gommées de nos programmes. L’introduction, par le professeur de l'école normale supérieure, des faiblesses humaines éclaire les mécanismes. La mondialisation n’est pas venue d’une autre planète, c’est bien la réorganisation du capitalisme qui l’a précédée. Il n’y a pas qu’en Inde que les plus jeunes passent des passions politiques à des plans de carrières dans le domaine économique. Dans ces moments où l’expansion est faible, les biens à consommer se raréfient, le collectif devient trop coûteux alors ce sont les valeurs de l’individu qui sont vantées. Bien des réflexions relèvent du simple bon sens mais valent d’être rappelées : « les français sont incomparablement plus riches en 1975 qu’en 1945, mais ils ne sont pas plus heureux. » Nous sommes heureux en regard de la comparaison avec nos voisins. « Etre heureux, c'est gagner dix dollars de plus que son beau-frère ».
Dans un entretien, celui qui avait appelé à voter à gauche à la dernière présidentielle dit : « Le paradoxe du monde actuel est qu'on vit simultanément une percée dans ce nouveau monde virtuel, qui est la conséquence logique de l'enrichissement : tout devient de plus en plus simple à produire si bien qu'il ne reste plus à produire que de l'esprit pur, et dans le même temps on est rattrapé par le mal des origines. La donnée fondamentale du XXIe siècle, pour moi, c'est trois niveaux de risque majeurs. Un, celui de la répétition de nos violences par les pays émergents. Deux, le retour aux origines malthusiennes du monde, la terre devenant trop étroite ce qui entraînerait un effondrement comme on en a connu dans l'histoire. Trois, la schizophrénie. Une partie de l'humanité migre vers un cybermonde où il n'y a ni rareté, ni violence. Est-ce que les nouvelles générations qui naissent dans ce cybermonde vont être dans l'oubli du monde réel, ou au contraire vont être capables de construire un lien entre le virtuel et les ours polaires (comme symboles de la dégradation du climat) ? »
Dans un entretien, celui qui avait appelé à voter à gauche à la dernière présidentielle dit : « Le paradoxe du monde actuel est qu'on vit simultanément une percée dans ce nouveau monde virtuel, qui est la conséquence logique de l'enrichissement : tout devient de plus en plus simple à produire si bien qu'il ne reste plus à produire que de l'esprit pur, et dans le même temps on est rattrapé par le mal des origines. La donnée fondamentale du XXIe siècle, pour moi, c'est trois niveaux de risque majeurs. Un, celui de la répétition de nos violences par les pays émergents. Deux, le retour aux origines malthusiennes du monde, la terre devenant trop étroite ce qui entraînerait un effondrement comme on en a connu dans l'histoire. Trois, la schizophrénie. Une partie de l'humanité migre vers un cybermonde où il n'y a ni rareté, ni violence. Est-ce que les nouvelles générations qui naissent dans ce cybermonde vont être dans l'oubli du monde réel, ou au contraire vont être capables de construire un lien entre le virtuel et les ours polaires (comme symboles de la dégradation du climat) ? »
vendredi 9 avril 2010
La pension Eva.
Je remercie mon pourvoyeur en livres policiers, dont je ne partageais pas l’enthousiasme envers le célèbre romancier sicilien Camillleri, pour ce livre délicieux comme un bonbon.
L’idole des lettres italiennes s’est offert selon ses dires « des vacances narratives » avec cette histoire d’un bordel dans les années 40. Ce microcosme donne lieu à des portraits hauts en couleurs, à des histoires pittoresques vivement contées, mais la partie la plus convaincante, pour moi, est l’éveil à la vie d’un garçon avant ses dix huit ans. Faut il atteindre ses quatre vingt ans pour décrire avec efficacité, tendresse sans jamais être scabreux la découverte de la sensualité avant la première communion ?
« Après quoi tout changea, le jeu devint presque une lutte désespérée. Ils s’embrassaient, se baisaient avec rage en se mordant au sang, se caressaient, se griffaient, se léchaient, tantôt entortillés l’un à l’autre très étroitement comme deux serpents, tantôt glissant comme des poissons, la peau comme savonnée de sueur. »
L’idole des lettres italiennes s’est offert selon ses dires « des vacances narratives » avec cette histoire d’un bordel dans les années 40. Ce microcosme donne lieu à des portraits hauts en couleurs, à des histoires pittoresques vivement contées, mais la partie la plus convaincante, pour moi, est l’éveil à la vie d’un garçon avant ses dix huit ans. Faut il atteindre ses quatre vingt ans pour décrire avec efficacité, tendresse sans jamais être scabreux la découverte de la sensualité avant la première communion ?
« Après quoi tout changea, le jeu devint presque une lutte désespérée. Ils s’embrassaient, se baisaient avec rage en se mordant au sang, se caressaient, se griffaient, se léchaient, tantôt entortillés l’un à l’autre très étroitement comme deux serpents, tantôt glissant comme des poissons, la peau comme savonnée de sueur. »
jeudi 8 avril 2010
Le jardin lettré en Chine.
Dans la forêt des symboles qui peuplent l’empire du milieu, la conférencière Yolaine Escande a été bien utile pour se frayer un chemin en particulier dans « le jardin du fonctionnaire maladroit » entre le lotus qui représente la pureté et la grue qui accompagne les immortels. Ceux-ci pourront se réfugier dans une grotte de la montagne ou dans une des trois îles qui émergera de l’eau. Ce microcosme où se rencontrent, à tous coups, la montagne (Yang ) et l’eau (Yin), qui peut tenir dans un pot, sur un balcon, est à l’image de l’univers. Au pays où il y a quinze mots pour écrire paysage dont un pour « celui où arrive la lumière après la pluie », la tradition des jardins remonte à une époque très lointaine. Le paysage pictural, bien plus présent que chez nous où dominent les portraits de la figure humaine, se distingue des jardins où les fleurs sont là avant tout pour témoigner du temps qui passe, des saisons. Le jardin est un lieu de retraite et celui de la pratique des arts : musique, calligraphie, poésie, peinture. Il ne comporte pas de belvédère qui donnerait une vue d’ensemble ; pour faire connaissance, il faut emprunter des sentiers sinueux où l’imaginaire fréquente la sagesse.
Tao Qian un fonctionnaire lettré dans les années 300 a démissionné pour revenir dans son enclos personnel et mourir de faim.
« Jeune, je ne m’adaptais pas au vulgaire, de nature j’aimais collines et monts,
Par erreur, tombé dans les filets du monde, sont partis treize ans de ma vie,
L’oiseau captif regrette son ancienne forêt, le poisson du bassin, sa source passée.
J’ai défriché, au sud, des champs incultes.
Pour préserver ma simplicité, je suis revenu à la campagne. […]
Chez moi, aucun tumulte du monde de poussière, les pièces vides laissent du loisir,
Longtemps enfermé en cage, j’ai enfin pu revenir à ma nature »
Tao Qian un fonctionnaire lettré dans les années 300 a démissionné pour revenir dans son enclos personnel et mourir de faim.
« Jeune, je ne m’adaptais pas au vulgaire, de nature j’aimais collines et monts,
Par erreur, tombé dans les filets du monde, sont partis treize ans de ma vie,
L’oiseau captif regrette son ancienne forêt, le poisson du bassin, sa source passée.
J’ai défriché, au sud, des champs incultes.
Pour préserver ma simplicité, je suis revenu à la campagne. […]
Chez moi, aucun tumulte du monde de poussière, les pièces vides laissent du loisir,
Longtemps enfermé en cage, j’ai enfin pu revenir à ma nature »
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