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dimanche 19 septembre 2021

Tu n'en reviendras pas. Aragon Ferré.

J’aurai pu essayer de mettre des mots autour de plus modestes chansons, car celle là est un monument impressionnant à propos de la première guerre mondiale pendant laquelle Aragon avait été brancardier. 
Place à l’immortel poème où tout est dit de l’horreur survenant au milieu de l'insouciance:
« Tu n'en reviendras pas toi qui courais les filles
Jeune homme dont j'ai vu battre le cœur à nu
Quand j'ai déchiré ta chemise et toi non plus
Tu n'en reviendras pas vieux joueur de manille
Qu'un obus a coupé par le travers en deux
Pour une fois qu'il avait un jeu du tonnerre »
 
« Gueules cassées »:
« Et toi le tatoué l'ancien Légionnaire
Tu survivras longtemps sans visage, sans yeux »
 
La fatalité s’inscrit dans les odeurs de la vie et la chaleur fraternelle des hommes : 
« On part Dieu sait pour où ça tient du mauvais rêve
On glissera le long de la ligne de feu
Quelque part ça commence à n'être plus du jeu 
Les bonshommes là-bas attendent la relève
Roule au loin roule le train des dernières lueurs
Les soldats assoupis que ta danse secoue
Laissent pencher leur front et fléchissent le cou
Cela sent le tabac la laine et la sueur »
 
La pierre des monuments est solide
et la terre, où ils sont tombés les uns après les autres, accueille les morts. 
« Comment vous regarder sans voir vos destinées
Fiancés de la terre et promis des douleurs
La veilleuse vous fait de la couleur des pleurs
Vous bougez vaguement vos jambes condamnées
Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit
Déjà vous n'êtes plus qu'un nom d'or sur nos places
Déjà le souvenir de vos amours s'efface
Déjà vous n'êtes plus que pour avoir péri »
 
Mes lignes intercalées ne voudraient pas profaner des paroles sublimes parfaitement mises à la portée de tous par Ferré qui sur le même album a enluminé « L’affiche rouge » : 
« Vous n'avez réclamé ni la gloire ni les larmes
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants »
 
Et tant d’autres : 
« Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent »
.
 L’étrangère : 
« Nous avions joué de notre âme 
Un long jour, une courte nuit,
 Puis au matin : "Bonsoir madame" 
L'amour s'achève avec la pluie. »

dimanche 12 septembre 2021

Les cons. Brassens.

Comme le terme « vulgaire » que je trouvais chargé en mépris de classe, je n’ai usé qu’avec parcimonie de l’insulte claquante, « con », trop commune. Mais les rassemblements du samedi,  « ce ne sont pas les couteaux les plus affutés du tiroir qui sont de sortie » certains commentaires d’irréductibles antivax sur les réseaux sociaux ne méritent pas mieux, quand tout échange est impossible. 
Par ailleurs la reprise par Le Forestier en un coffret de 7 CD des chansons de l’indémodable Georges m’ayant ravi, je reviens sur la chanson « Le temps ne fait rien à l'affaire » dont c'est le titre original plutôt que le bref terme choquant mis ici en titre. Les trépidantes strophes enluminent la catégorie par la finesse d'un vocabulaire éloignant toute grossièreté sous un emballage élégant.
« Quand ils sont tout neufs
Qu'ils sortent de l'œuf
Du cocon
Tous les jeunes blancs-becs
Prennent les vieux mecs
Pour des cons »
 
« Le blason », hommage au sexe féminin, de l’anar égratigné par Médiapart cet été, dénonçait d’autres mufles : 
« Honte à celui-là qui, par dépit, par gageure
Dota du même terme en son fiel venimeux
Ce grand ami de l'homme et la cinglante injure
Celui-là, c'est probable, en était un fameux »
 
Et même si par ailleurs« il y a peu de chances qu'on détrône le Roi des cons. »
Le match est nul, forcément, entre jeunes et vieux : 
« Quand ils sont d'venus
Des têtes chenues
Des grisons
Tous les vieux fourneaux
Prennent les jeunots
Pour des cons »
 Et ce serait se mettre à leur niveau que de renoncer à sa place dans le troupeau :
« Moi, qui balance entre deux âges
J'leur adresse à tous un message
Le temps ne fait rien à l'affaire
Quand on est con, on est con
Qu'on ait vingt ans, qu'on soit grand-père
Quand on est con, on est con
Entre vous, plus de controverses
Cons caducs ou cons débutants
Petits cons d'la dernière averse
Vieux cons des neiges d'antan»
 
J’avais déjà cité le poète dans un article concernant nos querelles générationnelles. 
 ou un livre de Liebig dont le titre semblait renouveler la question
« Vous, les cons naissants
Les cons innocents
Les jeunes cons
Qui, n'le niez pas
Prenez les papas
Pour des cons
Vous, les cons âgés
Les cons usagés
Les vieux cons
Qui, confessez-le
Prenez les p'tits bleus
Pour des cons
Méditez l'impartial message
D'un qui balance entre deux âges
 
Le temps ne fait rien à l'affaire 
Quand on est con, on est con»

dimanche 5 septembre 2021

Fils de… Jacques Brel.

En attendant que les spectacles vivants reviennent dans les salles, j’entame une série de digressions à propos de quelques chansons.
Je me rattrape de mes négligences envers Jacques Brel ces dernières années alors que je le trouvais tellement puissant à l’âge des enthousiasmes.
Ce texte me semble plus que jamais d’actualité au moment de la rentrée des classes https://blog-de-guy.blogspot.com/2018/09/rentree.html
Il vient pourtant de cette époque où un voisin pouvait intervenir auprès d’un enfant sans se faire renvoyer à ses affaires. 
« Fils de bourgeois ou fils d'apôtres
Tous les enfants sont comme les vôtres
Fils de César ou fils de rien
Tous les enfants sont comme le tien »
 
Les mômes d’alors n’étaient pas forcément les rois, mais aimés sans qu’il soit nécessaire de l’afficher à tout moment, ils n’étaient pas pris comme maintenant dans une exclusivité familiale se rachetant de ses abandons devant les écrans. Le « tout pour ma gueule » se contentant d’un cercle rabougri par les confinements et les solitudes mono parentales.
Les passions enfantines restent mystérieuses, elles  gardent une part de cette liberté tellement galvaudée chaque samedi, ce précieux trésor échappant aux pilleurs d’inconscients. 
« Le même sourire
Les mêmes larmes
Les mêmes alarmes
Les mêmes soupirs
Fils de César ou fils de rien
Tous les enfants sont comme le tien »
Je ressors ces mots prononcés d’une façon quelque peu grandiloquente pour argumenter en faveur de la transmission, telle que Comte Sponville l’énonce  
« un humaniste est celui dont le fils est humaniste » 
reprenant une formule de la tradition juive où l’identité vient certes de la mère mais se gagne dans l’éducation. 
Je persiste par ailleurs à faire confiance en l’intelligence des gamins comme à leur imagination.
« Ce n'est qu'après
Longtemps après
Fils de sultan, fils de fakir
Tous les enfants ont un empire
Sous voûte d'or, sous toit de chaume
Tous les enfants ont un royaume
Un coin de vague
Une fleur qui tremble
Un oiseau mort
Qui leur ressemble
Fils de sultan, fils de fakir
Tous les enfants ont un empire
Ce n'est qu'après
Longtemps après
Mais fils de ton fils, fils d'étranger
Tous les enfants sont des sorciers
Fils de l'amour, fils d'amourettes
Tous les enfants sont des poètes
Ils sont bergers
Ils sont rois mages
Ils ont des nuages
Pour mieux voler
Fils de ton fils, fils d'étranger
Tous les enfants sont des sorciers
Ce n'est qu'après
Longtemps après
Mais fils de bourgeois ou fils d'apôtres
Tous les enfants sont comme les vôtres
Fils de César ou fils de rien
Tous les enfants sont comme le tien
Le même sourire
Les mêmes larmes
Les mêmes alarmes
Les mêmes soupirs
Fils de César ou fils de rien
Tous les enfants sont comme le tien »

dimanche 4 juillet 2021

C’est gentil chez vous. L’arrière boutique.

Belle surprise différée pendant des années avec cet album de 2005 oublié dans mon coin à CD et si peu documenté sur Internet que le temps semble s’être arrêté aux années 60 avec choucroute, rouge à lèvres et corsages pointus telles que la pochette orange l’annonce.
Cela permet d’apprécier que le groupe ait anticipé la mode :  
«  Un autre genre » avertit de ne pas se fier aux apparences, 
et pourrait servir d’intitulé aux douze chansons : 
«  Au balcon la gorge qui pigeonne
Du genre de celle qui a croqué la pomme »[…] 
« Oui mais derrière le décorum…
Se cachait bel et bien un homme ! » 
Le ton narquois et les « musiques de guinguette » font passer des textes bien tournés qui s’attaquent à des sujets difficiles.
Il est question d’un enfant « mongolien », comme on disait alors, 
dans « Huitième merveille » :
« Quand tu râles, que tu grondes,
J’ai trop honte d’avoir peur,
Je te déteste d’avoir honte » 
«  La main de Fatma », c’est la main du menuisier à laquelle manquent deux doigts : 
« D’une main il comptait jusqu’à trois
Au mieux quatre, la belle affaire. »
 Les allitérations  de « Mâles en colique » enrobent la solitude d’immigrés : 
« Les sous amassés si chichement qu’il en chiale
Les sous hommes cassés slalomant en slips sales »
Celle qui  cherche un emploi accepterait haltérophile ou « Reine des Belges »
quant à la Rom « Febronia » : 
« Mieux vaut, c’est vrai, qu’elle ramène des lovés
Pour éviter la volée, qu’elle n’aura pas volée »
 La mort n’a pas la majesté qu’elle avait chez Brassens, pour le « Champ du signe » 
«  Je suis mal à l’aise dans mon alaise
Et même mes larmes sont rouillées » 
L’humour noir permet de voir la réalité en face et parait si léger quand il est question de « Petites rides » : 
« Elles te piétinent le coin des yeux,
S’y accumulent, à qui mieux mieux ? » 
Le temps passe, alors même «  A leurs guises » :
« Réveiller mon corps
Avec des jeteurs de sort » 
Voire prendre le temps d’être « Indécis »alors que sages,  
« Les vaches » nous ressemblent : 
« Et toute leur vie se taisent et mâchent
Un seul même foin et elles sourient » 
Jusque dans leurs rêves : 
«  Je sais que Gavroche m’aguiche
On me croit mioche, pas chiche de clash ! »
 Mais : « Les vaches… on les lynche ! »

dimanche 6 juin 2021

Chansons populaires de France # 2. Yves Montand.

A écouter les chansons du passé, l’amour côtoie souvent la mort
ainsi dans « Le soldat mécontent » 
« Qui a composé la chanson
C'est un tambour du bataillon
C'était un soir, en battant la retraite
En pensant à sa mie que toujours il regrette »
 
Tout est dit d’emblée dans « Le chant des canuts », ouvriers lyonnais de la soie révoltés au début du XIX ° siècle par le vil prix proposé pour leur travail quand de nouveaux métiers à tisser sont apparus : 
« Pour chanter "Veni Creator"
Il faut avoir chasuble d'or.
Nous en tissons
Pour vous, gens de l'église,
Mais nous pauvres canuts,
N'avons point de chemises. »
 
En première page du cahier de chansons de la gauche, figure « Le temps des cerises » de Jean Baptiste Clément, l’auteur de « Dansons la capucine », qui abandonna pour une pelisse les droits de l’impérissable hymne à la commune de 1871, où il tint une des dernières barricades. Il y eut alors tant de sang dans les rues de Paris que l'écarlate chanson d’amour porta pour les siècles des siècles la nostalgie et les espoirs de tous les merles moqueurs et cueilleurs de pendants d’oreille : 
« J'aimerai toujours le temps des cerises :
C'est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte »
Si Montmartre avait été un foyer de résistance, « La butte rouge », est située en Champagne et a pris ce nom avec d’autre sang encore versé lors de la guerre de 1914.
« La butte rouge, c'est son nom, l'baptême s'fit un matin
Où tous ceux qui grimpaient roulaient dans le ravin.
Aujourd'hui y'a des vignes, il y pousse du raisin.
Mais moi j'y vois des croix portant l'nom des copains »
Rosa Holt, allemande réfugiée en France, pressentant l’horreur, écrivit en 1935  « Giroflé, Girofla » en reprenant une comptine où le contraste entre l’innocence et la férocité  n’en est que plus frappant : 
« Que tu as la maison douce !
Giroflé, Girofla
L'herbe y croit, les fleurs y poussent,
Le printemps est là.
Dans la lune qui devient rousse...
Giroflé, Girofla
L'avion la brûlera, l'avion la brûlera ! »
 
Que dire après Malraux lors de l’entrée de Jean Moulin au Panthéon ? 
« L’hommage d’aujourd’hui n’appelle que le chant qui va s’élever maintenant, ce « Chant des Partisans » que j’ai entendu murmurer comme un chant de complicité, puis psalmodier dans le brouillard des Vosges et les bois d’Alsace, mêlé au cri perdu des moutons des tabors, quand les bazookas de Corrèze avançaient à la rencontre des chars de Rundstedt lancés de nouveau contre Strasbourg. Écoute aujourd’hui, jeunesse de France, ce qui fut pour nous le Chant du malheur. C’est la marche funèbre des cendres que voici. »
« C'est nous qui brisons les barreaux des prisons pour nos frères
La haine à nos trousses et la faim qui nous pousse, la misère
II y a des pays où les gens au creux des lits font des rêves
Ici, nous, vois-tu, nous on marche, nous on tue ou on crève. »
Il fallait bien scinder en deux la chronique concernant ces chansons pour diluer un peu ces émotions qui s’accumulent et que le vieil écrivain chevrotant ranime à tous coups.

dimanche 30 mai 2021

Chansons populaires de France « #1. Yves Montand.

Si j’ai bien compris un historien aperçu récemment, il convient de ne pas s’attarder sur les figures du passé, de Napoléon en passant par Mitterrand, tant le futur incertain doit appeler plutôt notre attention.
Mais comme je transporte plus de passé que d’avenir, j’ai bien eu du plaisir à exhumer le plus ringard des CD, où les fusils ne sont jamais loin, dans les 12 morceaux historiques retenus en 1955 et réédité en 1991. Ici une première moitié.
Comme les contes, ces chansons à destination des enfants sont corsées. 
Et il y en a tant dans le genre: 
Tenant ses tripes dans ses mains, « Le roi Renaud de guerre revient » et son épouse qui vient d’accoucher l’accompagnera dans sa tombe, après qu’on lui eut masqué tous les signes qui auraient pu l’alerter sur le drame. 
« Terre, ouvre-toi, terre fends-toi,
Que j'aille avec Renaud, mon roi!
Terre s'ouvrit, terre fendit,
Et ci fut la belle engloutie. »
A l’origine cette histoire médiévale mettait en scène des elfes nordiques, elle évoque les passions et la mort, la pudeur et la vérité, après avoir transité par la Bretagne et la Catalogne.
« La complainte de Mandrin » a fait passer à la postérité « le plus magnanime des contrebandiers » d’après Voltaire 
Un candide soldat finit par déserter dans « J'avions reçu commandement »: 
« On s’étripait, on s’épiaulait
C’était pis que de la volaille
Ma foi, la peur m’a pris
J’ai pris mon sac et je suis parti. »
Les allusions érotiques dans « Aux marches du palais » sont évidentes:
« Et c’est en la chaussant,
Qu’il fit sa confidence »
Mais « la tant belle fille » qui « a tant d'amoureux » 
dans ce lit entouré de fleurs, ne serait-elle pas fatale ? 
« Et là nous dormirions
Jusqu'à la fin du monde lon la ».
C’est que souvent, l’amour est tragique :
« Adieu, ma mie, adieu, mon cœur !
Adieu mon espérance »
 
Quand « Le roi a fait battre tambour »  
« Pour voir toutes ses dames
Et la première qu'il a vue
Lui a ravi son âme »
 
comme La Montespan, mais
« La reine a fait faire un bouquet
De belles fleurs de lys
Et la senteur de ce bouquet
A fait mourir marquise. »
 
 La « Chanson du capitaine » est une chanson d’amour 
« Je me suis t'engagé
Pour l'amour d'une belle »
 encore fatale :
« Que l'on mette mon cœur
Dans une serviette blanche
Qu'on l'envoie au pays »

dimanche 23 mai 2021

Indocile heureux. Bénabar.

Oui Bruno Nicolini est un anticonformiste: positif, tendre, drôle, il ne se prend pas au sérieux, mais nous ravit depuis - je n’arrive pas à m’y faire - vingt ans, le prenant toujours pour le petit dernier des chanteurs qui ont des textes et une personnalité. 
Au delà des formules heureuses, des points de vue nouveaux, pour des scénettes vives où il sublime la banalité, accompagnées de musiques sautillantes, notre quotidien en est tout éclairé. Il se permet d'être cérémonieux pour traiter avec distance des sujets pas si anodins que ça. Son romantisme le plus vibrant nous touche grâce à un humour très contemporain qui met de la légèreté à la gravité.
Le temps passe : « Oui et alors » : 
« … Il ne faut pas douter
Qu’on se passera de nous
Comme nous de nos ainés ». 
Toujours garder « Un lego dans la poche ». 
«  L’enfance est si courte
Et dure si longtemps. »
 L’amour en fuite :  
« Tous les divorcés »
 Se sont aimés tendrement
Un weekend sur deux,
Ils le répètent à leurs enfants
Quel est le plus important, l’premier amour ou l’plus récent ? »
 Toujours croire « Les belles histoires » où subsiste : 
«… le piment doux
Des premières querelles d’amoureux ». 
Il renouvelle la vieille histoire: « On ne choisit pas d’aimer » : 
« Tu peux faire le blasé
Arguer que tu t’en moques
T’as pas fini de pleurer
Si ce n’est pas réciproque. »
A un enterrement, il a jeté sa rancune à la rivière : 
« Au nom du temps perdu », il trouve  belle la veuve qui a été sa femme.
Le refrain d’« Une âme de poète » a beau contenir:  
«  Ça me troue l’fion bordel à cul »:  
« On connaît des gens très classes
Distingués, bien comme il faut
Qui disent des trucs dégueulasses
Sans employer de gros mots » 
Pour évoquer les classes moyennes « William et Jack » Dalton sont parfaits. 
Et le slogan « Exigeons l’impossible » risque de se résoudre 
 «  quand les poules auront des caries ».
 Plaisir de vacances avec « Le bain de 23h 30 » 
et celui de chaque jour :
« Les filles de plus de 40 ans » 
« N’aiment pas qu’on leur mente
Sauf quand on fait semblant
De leur en donner 30 ».
« Les indociles heureux » fait la distinction entre les vrais et les faux rebelles de cour d’école ou des open space, les anarchistes de ministère, les insoumis à la fashion week: 
« Y'a les rebelles d'Internet,
Révolutionnaires de Twitter
Et qui vont sauver la planète
En postant partout des petits cœurs
De faux rebelles sous toutes les formes,
L’époque est à la vaine querelle
Anticonformiste, c'est la norme,
Rebelle c'est consensuel » 
Je biche.

 

dimanche 16 mai 2021

Oh ! Pardon tu dormais… Jane Birkin.

Fidèle à la fragile sylphide 
je n’ai pas perçu que sa voix avait vieilli, et avec ses paroles sur des musiques d’Etienne Daho et de Jean Louis Piérot, je pensais revenir en terrain connu parmi les rayonnages qui rétrécissent de la chanson française.
Les jeux sur la pudeur ou l’impudeur sont à la base de la poésie, et  peuvent s’illustrer par exemple dans un duo intitulé  « F.r.u.i.t. » ou l’anglaise ne veut pas dire « sexe », alors que le compagnon auquel elle lia son destin, fit sa notoriété entre autres avec quelque Mickey maousse,  
« gourdin dans sa housse ».
L’ambigüité sur la force des mots court tout au long de l’album.
On entend «  t’as fini de m’emmerder » en cours de conversation,  
« Oh pardon tu dormais… », fin pathétique d’un amour,
mais encore « Promis je t’emmerderai plus »,
en conclusion de « Ta sentinelle » 
et « Dors ! Tu m’emmerdes ! » dans « Je voulais une telle perfection pour toi » 
alors que contraste « l’herbe avait cette odeur de pipi »
dans Paris qui « s’ouvrait comme un coffre à bijoux ». 
Il peut bien y avoir « l’institut médico-légal » 
pour rimer avec « vide sidéral » 
dans la remarquable et déchirante chanson « Cigarettes » puisqu’il est question de la mort de sa fille :
« Ma fille s’est foutue en l’air, et par terre on l’a retrouvée ».
Et encore dans «  Ces murs épais »: 
« Comme je les hais ces murs épais ».
Le sort des amours penche vers des thèmes à peine moins noirs :
« Max », quitté, appelle la sincérité et de belles images : 
« Mon ombre atroce s’est décollée de moi et elle me fait peur » 
« A marée haute » connaît les basses eaux : 
« Si tu ne m’aimes plus, je n’m’aime plus non plus ».  
« Pas d’accord » : 
« Tu m’as touché aux ailes je suis blessée ». 
« Telle est ma maladie envers toi » : 
« Oui, comme l’herbe, ma folle jalousie pousse » 
Je croyais «  Catch me if you can » plus primesautier comme le titre le laissait entendre, mais : 
 « Will you protect me
From the fear of growing old?
Me protégeras-tu?
De la peur de vieillir » 
Pour qui les fantômes sont familiers « Ghosts » peut presque  rassurer avec 
« Grandpa, Grandma, Mother, Father, Daugter, Nephew, Cats, Husbands and Friends »
en ribambelles.
Pourtant même « Les jeux interdits » se jouent au cimetière : 
« Elles enterraient tout
Porcelaines échangées, mes assassines
Légères et clandestines », 
ses autres filles.

dimanche 9 mai 2021

Concerti. Paolo Conte.

« Gelato al limon »
date de 1979 : l’avocat pétillant d’Asti a traversé le temps et les frontières. 
« Et je t’offre l’intelligence des électriciens
Comme ça au moins un peu de lumière
Notre chambre aura, dans les tristes hôtels
Où la nuit chaude nous fera fondre »
Jazz rauque, avec la nostalgie qui mène à l’éternel.
Le rital chante en anglais et joue avec le français.
Mon livret est traduit en allemand, alors je me tourne vers  Google, le recours suprême des insuffisants de la langue de Boris Johnson et de celle de Francesco Totti.
« Sotto le stelle del Jazz » 
« Certains comprenaient le jazz
l'argenterie disparaissait...
voleurs d'étoiles et de jazz
nous étions ainsi, nous étions ainsi »
 
Nous sommes parents, « Lo Zio » « l’oncle » est à China Town, 
où flotte le souvenir de Duke Ellington et des parfums de jasmin ; 
le cireur fait briller une chaussure de clown. 
«Shoe shiner » 
« Come di » 
« Parle-moi, donc le souvenir se simplifie
dans la musique douce et triste, il y a ici
Comme des comédies » 
« Via con me », « pars avec moi », on part avec lui :
« C'est magnifique, c'est magnifique, c'est magnifique
Bonne chance, mon bébé, c'est magnifique,
c'est magnifique, c'est magnifique,
Je rêve de toi...
Chips, chips, du-du-du-du-du »
 
Les musiques sont porteuses : Rumba pour « La ricostruczione del Mocambo »  
et « en face » la danse et les volutes des musiques  
«  Alla prese con la verde milonga » 
« Je déchire un sourire de trêve à un accord, 
tandis que vous condamnez mes doigts
io sono qui, sono venuto a suonare,
Je suis ici, je suis venu pour jouer, »
 
« La topolino amaranto » vient après guerre, 
la voiture enjouée, dans ses atours pourpres avance parmi les ruines : 
« Blonde, ne regarde pas par la fenêtre,
Car c’est un paysage d’enfer :
L’orage finit à peine,
Six maisons sur dix sont à terre. »
 A « Parigi » ville lumière, ville des amoureux, 
les images de toujours brillent sous la pluie : 
« Hum laisser aller à cet hôtel si proche,
 très accueillant, où les gens vont mourir d’amore ».
Et « Les lucioles tournent 
Dans les cercles de la nuit » 
chez quelque « Diavolo rosso ».
« Hemingway » au cazou côtoie « Bartali » et c’est tout neuf.
Il sublime les évidences « Una giornata al mare » 
« Une journée à la plage
seul et avec mille lires
je suis venu voir
cette eau et les gens qu'il y a
le soleil qui brille plus fort
le vacarme du monde qu'est-ce que
je cherche pour les raisons et les raisons de cette vie
mais mon âge semble faire quelques heures
le rire des dames me tombe sur la tête »
 
Il est difficile de tout nommer de ce CD essentiel, 
mais il peut renouveler l’envie d’aller à Gènes ou ailleurs 
pour retrouver la vérité de ces mots qui savent approcher l’indicible :  
« Genova per noi » 
« Avec ce visage un peu comme 
cette expression un peu comme 
celle qu'on a avant d'aller à Gênes 
que nous ne sommes jamais tout à fait sûrs 
que cet endroit où nous allons 
dont nous ne sommes jamais tout à fait sûrs
ne nous engloutit pas 
et que nous ne reviendrons jamais. »

dimanche 2 mai 2021

Amour/chien fou. Arthur H.

Sous des musiques «  électro-disco-rock-chaotiques » comme A.H. les décrit lui même, deux C.D. rapprochent « Dr. Jekyll et Mr. Hyde » plus proches que ne le laisse entendre le projet.
En « Brigade légère » le fils du grand Jacques Higelin montre un sens de la famille certain, parmi frère et sœurs : 
« Allez mon père
Ta grande voix
Résonne encore »
Il développe pour sa maman : « La boxeuse amoureuse ».
Il voyage « Sous les étoiles à Montréal ». 
« Musique hypnotique et le thé trop chaud
Princesse mexicaine au sourire de Mona Lisa » 
et « I lost my name » in a « Tokyo kiss ».
Sa voix portée sur la nostalgie convient bien aux racontages que j’apprécie davantage en version CD intime que sur scène,
contrairement à d’autres spectacles, par exemple avec Bartabas sur un écran de télévision où la puissance de ses cérémonies en présentiel s'est affadie. 
« Lily Dale symphonie » :  
« Oh Lily, where are you been ? » 
Il ne faut pas avoir peur de « La dame du lac » 
«  De ses maléfices inefficaces
Ses sortilèges s’effacent ».
Les innovations discrètes du fond sonore conviennent bien à la rêverie dans « Inversion mélancolique », lorsque « je ferme les paupières » dans « Moonlove fantaisie » ou au moment d’aborder «  Le passage » : 
«  Plus léger que la neige
Tu n’emportes qu’un sourire ».
 Le familier de « Nosferatu » : 
« Je suis l’ennemi
Nuits infinies »
rencontre une « Assassine de la nuit » qui doit avoir quelques atouts :  
« Je te sphinx, tu me félines
Je te démon, tu me divines ». 
Le « Carnaval chaotique » ou « Moon love déesse »  sont un peu trop démonstratifs à mon goût mis en condition cette fois par des ambiances plus feutrées. 
Comme loin de moi plane le « Super héros de l’instant Zéro ».
« Il-Elle » dit bien : 
« Elle est beau
Il est belle » 
Et au pays des rouges cœurs, les images de la dernière chanson renouvellent les couleurs quand la musique s’assoupit :
« L’amour est un chien fou
Qui court sur l’autoroute
L’amour est un loup doux
Hurlant sa lune blanche »