vendredi 25 octobre 2024

Les non-dits.

Maudit, soit celui qui prétendrait à plus de lucidité que ses contemporains quand l’intelligence forcément humaine est si vite soupçonnée d’arrogance et d'artificialité. Nos sociétés voient leur ciel s’obscurcir encore un peu plus derrière les nuages de poussière des villes bombardées, sous un ciel témoin d’évolutions affolantes du climat.
Antilles et Nouvelle Calédonie, nos îles lointaines souffrent et les discours décoloniaux s’éternisent bien que notre ancien Empire ait été réduit depuis longtemps à l’état de confettis. Les guerres de libération les plus glorieuses étaient animées par des nationalistes ayant étudié dans nos facultés. Leurs indépendances ont été conquises au prix du sang pour « regagner » - à entendre dans tous les sens - leur sol, mais ces transitions complexes ont clopiné dans la douleur et ont fait long feu. Autour du mot « libération » que de crimes contre la vérité, que de crimes tout court. Dégagés de leurs chaines, certains viennent se soigner, se nourrir, travailler, chez l’ancien oppresseur. 
La fierté patriotique des peuples désormais autonomes à l’instar de nos compatriotes derrière nos barricades hexagonales, se manifeste tout autour de notre planisphère. 
Les xénophobes de tous pays se font des clins d’œil par dessus les murs.
Si les cartes du XIX° siècle étaient coloriées aux couleurs britanniques ou françaises, aujourd’hui l’encre de Chine fait tache. 
Les faiseurs d’histoires remontant à l’esclavage et aux bagnes, délivrant des images en noir et blanc incontestablement scandaleuses, allègent de leur responsabilité les politiques exerçant présentement dans les territoires anciennement colonisés.
Les populistes extrêmement gauches y trouvent du combustible depuis les boucs missionnaires de jadis, aussi caricaturaux que les démagogues d’extrême droite et leurs étrangers en boucs émissaires. S’il n’y avait pas les anciens convertis des pères blancs comme prêtres dans nos campagnes, les messes seraient encore plus rares.
Les « toubabs » savent bien que la crise de recrutement ne touche pas que les toubibs et les vétérinaires.
Les thématiques coloniales, religieuses ou souverainistes étaient peu abordées dans nos conversations, elles ont cheminé et sautent aux yeux si bien qu’elles nous aveuglent. 
Alors que le mot « race » était à manier avec des pincettes, « racisé » est arrivé et le blême est invité à sortir de la salle.
Le terme « Grand remplacement » vient des fachos avec son cortège de peurs et d’exclusion, mais qu’y a-t-il de mal à remarquer qu’à la station de métro, nous sommes les seuls pâlichons si nous avons abandonné toute idée de supériorité?  
On peut ne pas voir de péril dans l’engoncement des silhouettes des mamans à la sortie des écoles, mais qui peut nier que les coiffures ont changé? 
Ne pas le reconnaître fait le jeu de ceux qui se vantent de dire tout haut ce qui se pense tout bas. Devenus les rois des sous-entendus, les réseaux d’extrême droite cultivent leur entre-soi. LFI fait de même avec des allusions aux « Dragons célestes »  contrôlant le monde « comme qui vous savez » : les juifs. 
Les homosexuels ont une situation qui s’est améliorée ces dernières années, allant vers une indifférence recherchée. Il serait souhaitable que la couleur de peau puisse passer de la qualité de marqueur au détachement, quand les chanteurs de Marseillaise les plus expressifs sont nos champions devenus atones au-delà du podium.
« Quand vous gagnez, vous êtes Français. 
Quand l'équipe perd, vous êtes considéré comme Sénégalais »
Patrice Evra 
Danger des généralisations : aurait-on pu parler de réfugiés pour les pieds noirs en 1962 ?Ceux qui demandaient de ne pas essentialiser au moment des attentats islamistes voient en chaque homme un violeur potentiel pour manifester leur solidarité avec la courageuse Gisèle Pélicot. 
Maintenant que s’est adoucie la culpabilité portée par l’idéologie judéo-chrétienne, il est cocasse de voir la conscience du mâle blanc d’un certain âge être chargée de tous les maux. Mais après m’être insurgé contre ces fardeaux genrés, je me suis demandé si nous n’avions pas, y compris, les tribunitiens du « Monde » un peu du Trump en nous. Dans nos mondes parallèles, nos ghettos peints aux couleurs universelles, nous cultivons nos vérités alternatives, écartant ce qui nous gène, ne retenant que ce qui vient de nos cercles. 
« En vérité, la vérité, il n'y a pas de vérité ! » 
Jean-Claude Van Damme.

1 commentaire:

  1. Bel écrit, bien pensé. Il est trop tentant de s'imaginer que la culpabilité serait forcément le reliquat de notre héritage religieux, surtout au moment où nous sommes sommés de respecter un tri quasiment religieux. Non, la culpabilité est universelle, je crois, et indépendante de la religion, même. L'avantage de la religion, c'est de la délimiter, la circonscrire afin qu'elle n'envahisse pas toute l'activité humaine. Mais prétendre la chasser est d'une naïveté consternante, à mon avis. En plus, la culpabilité est un frein considérable à l'épanouissement de trop de satisfaction pulsionnelle dangereuse à.. la vie en société. Elle a du bien, la culpabilité, même si point trop n'en faut.
    Ce qui m'interroge en ce moment, c'est le fait que se montrer "gentil" est vite perçu comme une invitation sexuelle, par exemple. Le fait de chercher à plaire à autrui serait une séduction sexualisée, de surcroît...
    Que de cynisme... naïf, forcément naïf, de mon point de vue. Charger autrui de sa propre difficulté de voir le bien chez son voisin témoigne du délitement de la cohésion sociale, d'une DEFIANCE généralisée.
    Mais dans un contexte de sur-sexualisation médiatique, les individus, les PERSONNES en chair et en os, sont-elles en train de faire l'amour, par exemple, et ont-elles du plaisir à le faire ? Ou est-ce une performance comme une autre à l'heure actuelle ?

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