Le titre justifié par la qualité
évidente d’un père atteint de poliomyélite insiste sur la contradiction
contenue dans ces 280 pages entre l’admiration dont ce livre témoigne et le
côté impersonnel du terme général pour désigner celui qui ne sera jamais nommé.
Ce n’était guère la mode autrefois d’appeler son père par son prénom.
Les ambigüités sont passionnantes,
les flous laissent de la place aux lecteurs, mais, à mon goût, encore pas assez dans ce
livre.
Le père, personnage principal, est devenu
expert dans le nucléaire et espion sans doute. Son fils écrivain affiche ses
valeurs « humanistes » sans explorer davantage le passage d’une
tradition communiste au service zélé des pouvoirs en place.
Mon plaisir de lecteur avait commencé
fort, dès l’incipit :
« La plus belle des fictions est celle qu’on entretient sur ses
proches dans des souvenirs qui jalonnent une mémoire flottante. Ce n’est pas la
biographie d’inconnus, c’est un vrai roman. »
Des pages sont magnifiques quand
il est question de la fin du père et de leurs rares moments d’intimité.
« J’allais mourir une première fois avec lui et il me faudrait
ensuite trouver la force de la résurrection, seul. Je n’avais jamais imaginé
que si jeune, au seuil de mon existence, j’allais être confronté à la violence
d’une telle épreuve. La question de la dépression qui allait suivre risquait de
se poser mais j’en avais déjà démonté les mécanismes : ne sombre dans ce cancer
de l’âme que celui qui refuse le monde tel qu’il est. Il faut savoir s’avouer
vaincu si l’on veut perdurer dans son être, et toutes les illusions sont
permises pour persévérer. »
Résolution sans faille, ambition
pour sortir d’une condition modeste, travail acharné, leur description fait du bien d'autant plus que ces vertus ne sont plus guère à la
mode, surtout lorsque est sacrifiée la tendresse à l’égard des enfants, voire
une présence que sa mère non plus n’a pas assurée.
J’ai eu plus de mal quand des
considérations parfois anachroniques alourdissent le récit pourtant aventureux
qui a mené le père fils de marin à vivre en Nouvelle Calédonie ou au Sénégal. Les conditions favorables de son existence en tant qu’expatrié sont peu explorées
bien que le récit soit parsemé de réflexions anti colonialistes décidément tendances, comme
n’est pas divulgué le nom de la ville de Grenoble où ils ont vécu.
Ça a l'air assez intéressant, mais tes réserves m'éloignent.
RépondreSupprimerEt puis, avec le temps, les exhortations à faire face à la réalité telle qu'elle est me semblent reposer sur des illusions qui s'ignorent comme telles. A quoi bon jouer au jeu de "ma réalité est plus réelle que la vôtre ?"
Je peux m'occuper autrement. Surtout dans un monde où les incertitudes ont recommencé à prendre la place qu'elles n'auraient jamais dû perdre.