dimanche 10 mai 2020

Le portrait de Dorian Gray. Thomas Le Douarec.

La pièce adaptée du roman de Wilde traite bien plus que de la recherche de la jeunesse éternelle : le portrait de Dorian qu’a réalisé Basil va vieillir alors que le modèle restera beau physiquement mais se désagrégera moralement sous l’influence d’Harry le brillant désabusé aux accents qui font parfois penser à Edouard Baer.
Wilde dont les formules peuvent peupler sans peine un dictionnaire de citations nerveuses disait : «  Dorian Gray contient trop de moi-même, Basil est ce que je pense être, Harry ce que les gens pensent que je suis et Dorian ce que j'aurais aimé être en d'autres temps. »
Le metteur en scène tient le rôle central d’Harry, l’influenceur, et cite l’auteur qui l’a inspiré après avoir présenté ses comédiens. Il renoue ainsi avec une tradition sympathique après un moment de théâtre à l’ancienne où les acteurs et actrice jouent plusieurs rôles avec virtuosité dans une mise en scène qui exprime sans tapage les aspects fantastiques d’un destin tragique.
« Spiritualiser son temps : certes, la tâche est enviable. »
Il est question du pouvoir de l’art, des remords, de la beauté, de la mort, de la vieillesse, de la sincérité, de l’amour, d’amitié, de la méchanceté, de l’humour :
« Pour être populaire, il faut être médiocre ».
« La chose la plus commune, dès qu'on nous la cache, devient un délice. »
Ses vacheries en particulier à propos des femmes peuvent sembler déplacées aujourd’hui, mais la cruauté peut se pardonner de temps en temps quand elle est bien tournée :
« Les femmes sont faites pour être aimées, pas pour être comprises.»
Autour de sujets éternels, le suranné peut avoir ses charmes pour aller au cœur de ce que nous masquent les tapages d’un omniprésent présent.

1 commentaire:

  1. Pour une fois qu'on a vu le même spectacle...
    Je partage ton avis sur le traitement du "Portrait".
    Nous avons eu droit à un beau spectacle qui était très maîtrisé, vu le nombre de fois que les acteurs/metteur en scène l'avaient donné avant d'arriver chez nous. Tout en étant très maîtrisé, ça ne sentait pas le désabusé, ni l'usure, quand même.
    Vive les sujets éternels. Même en vieillissant, je ne m'en lasse pas. Toujours quelque chose à découvrir dans les sujets éternels. Ouf.
    Harry est un vrai Méphistopheles, un séducteur pervers qui est bien plus vénéneux qu'Edouard Baer. Edouard Baer est un peu délavé pour Harry. Moderne, disons. Un mal... mou, amolli par l'inconséquence, et le manque de conviction. A mon avis.
    Edouard Baer est un personnage/acteur trop sympathique pour vraiment nous séduire (ou séduire Dorian) comme le fait Harry.
    Il faut un peu de consistance pour séduire, si ce n'est pas séduire pour se faire materner. Harry est au delà de séduire pour se faire materner, tout de même.

    RépondreSupprimer