mercredi 14 septembre 2016

Equateur # J2. Quito , le matin.

L’un d’entre nous, levé à minuit a eu le temps de prendre sa douche avant de réaliser qu’il n’était pas 7h comme il le croyait. Quant à nous, Orange  nous a sifflé trois fois dans la nuit pour nous conseiller un opérateur. Vite prêts nous descendons déjeuner et faisons connaissance avec deux nouveaux compagnons de voyage, français résidant aux Etats-Unis qui complèteront notre groupe. Nous mangeons solidement, avant d’être pris en charge par Edgar et une suissesse originaire de Berne, responsable de l’agence locale.
Je remonte une première fois sous les injonctions de mes comparses pour prendre un chapeau, une deuxième fois pour de la crème solaire et nous montons bien équipés dans le mini bus pour notre première journée équatorienne.
Par des rues inégales, nous roulons de collines abruptes en collines abruptes, nous stoppons au sommet de l’une d’elle, le Panecillo «  le petit pain », où trône une vierge de l’Apocalypse en aluminium.
Construite en 1955, elle est monumentale, ailée et terrassant un dragon.
A l’intérieur une petite chapelle sert d’antichambre à un escalier qui accède palier par palier à une promenade extérieure.
Nous bénéficions d’une vue panoramique sur les habitations basses accrochées aux pentes,  et sur la ville coloniale.
On aperçoit même à travers quelques nuages, les neiges du Cotopaxi.
La température est idéale avec un soleil vite brûlant alternant avec  un air frais délicieux.
Nous reprenons le véhicule pour gagner le centre historique, croisant des étals disposés au milieu de la circulation à l’air libre ou sous des tunnels. La suissesse, nous abandonne quand nous parvenons à la Basilica del Voto Nacional.
Construite à l’image de la cathédrale de Bourges, elle fut édifiée au XIX° siècle ; les gargouilles s’inspirent d’animaux locaux : tamanoirs, tortues, crocodiles, iguanes, pumas, singes ou dragons aux ailes déployées.
L’intérieur expose des vierges multiples, comme leur fonctions, parfois revêtues de tissus. La nef ressemble à nombre d’églises grises néo gothiques de chez nous avec une grande chapelle repeinte récemment dans le style.
« Certaines croyances racontent que le jour où la construction de la Basilique sera achevée, ce sera la fin du monde. »
Une sorte d’alcôve abrite des vierges sud américaines particulières à chaque pays, chacune dans une vitrine dorée individuelle.
Nous descendons la rue jusqu’à la Place de l’Indépendance qui regroupe tous les pouvoirs.
Le palais gouvernemental  pour l’état,
avec en plus moderne le palais municipal,
l’archevêché
et une banque.
Dans le jardin central, préside la statue aux héros du 10 août 1809 qui furent les premiers à se battre pour l’Indépendance.
Quant au palais du gouvernement il a récupéré les grilles et les balustrades du palais des Tuileries de Paris. Deux soldats comme à Buckingham palace montent la garde dans un uniforme rappelant les grognards de Napoléon.
Au bout de leur lance au manche en bambou, le drapeau équatorien possède des couleurs semblables à celui de la Colombie et du Venezuela :
une bande jaune représente la richesse (maïs, or),
une bande bleue représente le ciel,
un bande rouge représente le sang versé pour l’indépendance.
Un condor signifie la liberté.
Dans un médaillon central, une rivière coule au pied d’un volcan
et accueille deux bateaux, symboles de la modernité.
Des familles posent pour la photo au pied de la petite estrade des soldats qui n’ont pas l’immobilité de leurs confrères anglais ou du Vatican.

mardi 13 septembre 2016

Voyages à ma porte. Louis Fournier. Jean Philippe Repiquet.

Au moment où le canton de Virieu-sur-Bourbre va disparaître, l’association des maires et adjoints des communes le composant a édité un livre consacré à ce territoire qui rejoint  désormais celui du Grand Lemps.
Comme le dit par ailleurs Didier Rambaud, conseiller départemental, aux multiples mandats :
« les 14 communes de ces 4 vallées vivent leur destin différemment sur les territoires du Pays Voironnais, de Bièvre Est, de la Vallée de l’Hien, Bourbre-Tisserands, les Vals du Dauphiné »
Loin des exercices compassés des publications institutionnelles, cet ouvrage bien maquetté, à l’iconographie soignée, se lit facilement.
Le propos respecte le titre et ne verse pas dans la nostalgie.
128 pages permettent de mieux connaître cette partie du Dauphiné aux paysages façonnés par les glaciers. Le dernier a  beau avoir fondu il y a 15 000 ans,  ce n’est pas leur présence pendant 12 millions d’années qui offre une clef pour expliquer la dénomination « Terres froides » qui reste discutée : « terre pauvre où la vigne ne poussait pas. »
On ne se refait pas, et je vois là matières à réviser ou à apprendre:
- De l’histoire avec des châteaux et des Chartreux, les chevaliers-paysans, la résistance, les réfugiés et le marché noir avec quelques cocasses procès verbaux de la gendarmerie.
- De la géologie à la recherche de pierres bleues, de pisé et de molasse.  
- De la géographie en parcourant quatre vallées de La Bourbre, de l’Hien, du Surand et du lac de Paladru.
- De l’éducation civique expliquant le rôle d’un canton : justice de paix et conseil de révision.
- Des sciences naturelles allant à l’essentiel : châtaigniers et hêtres.
 Et le travail des hommes et des femmes : tuileries, ganivelles (tressage de lattes de châtaigniers avec de fils d’acier pour une palissade), fromageries, citronade (avec un seul « n ») Bigallet, papeterie et taillanderie, fabrique de galoches, tissages, fourneaux et mobilier urbain… les hôpitaux et les pensionnats, le tramway et le train, les mutations du monde agricole : ses vaches et ses moulins,
Le tourisme suit les chemins de Saint jacques de Compostelle mais aussi le chemin de Saint Martin.
L’éducation artistique s’enrichit avec ceux qui apprécièrent lumières et collines, lacs et étangs dont Jongkind, « le père Jonquille ».
Et le cinéma qui trouva ici décors à son goût : « Les rivières pourpres », « le crime est notre affaire », « La religieuse », « Tristesse Club »…  

lundi 12 septembre 2016

Voir du pays. Delphine Muriel Coulin.

Quand la psychologie entre dans un groupe de soldats de retour d’Afghanistan dans un hôtel de luxe à Chypre, elle ne révèle pas seulement une face méconnue de l’armée française, mais que le groupe peut essayer de sauver l’individu.
Je suis comme ces touristes insouciantes que croisent des jeunes femmes et des jeunes hommes ayant mis leur vie en jeu pour notre confort. Ils sont de passage dans ce sas entre la violence de là bas et celles qui s’annoncent ici.
De beaux acteurs et un scénario au cordeau - forcément- nous questionnent sur la patrie, l’Europe, le courage, les femmes et les hommes, ceux qui ont besoin de se créer des ennemis, la vérité…
Ces corps gainés se protègent et sous les apparats de la force, leur fragilité n’en est que plus émouvante.

dimanche 11 septembre 2016

Loin. Alex Beaupain.

Je persiste à chercher sur CD de nouveaux airs, car il ne faut plus compter sur les radios pour vous les mettre en tête.
Pour ceux qui ont tant aimé les Brel, Brassens, le musicien des films de Christophe Honoré, qui les a également appréciés, ne peut éviter d’être confronté à ces phares ou à quelque Souchon, voire un contemporain  comme le fluide et délicat Albin De La Simone.
Cet album qui compte un maigre bonus est dans la veine mélancolique, quoique sautillante, du précédent http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/09/alex-beaupain.html .
« Loin », l’enfance :
« On est loin des peaux fruitées,
Gel de douche à la mangue »
Et s’il est question de « Couper les virages »
« Les caravanes
Sont scellées aussi »
« Les voilà » dont le rabâchage qui est trop souvent un  procédé, rend ici poignante la chanson :
« … sa longue déchéance
Dévore jusqu’au noyau le fruit de nos enfances »
 « Je te supplie » et « Tout a ton odeur »  sont adressés à son amoureuse disparue :
«  La pomme n’a plus ce goût vert »
La musique de la précédente est de  Vincent Delerm qui a écrit aussi « Rue Battant »
« Laissez la lumière du couloir
J’éteindrai en rentrant »
Julien Clerc a inventé la mélodie de« La Montagne »:
« Nous avons oublié l’Espagne
Et ses étoiles hors de portée »
Je préfère « L’amour en cage », du nom d’une baie appelée aussi « cerise d’hiver » dans sa lanterne vénitienne, que le trop explicite « Cela valait-il la peine ? » :
« Mais cette baie orange
Que tu veux que je mange
Très peu pour moi mon ange »
La gainsbourienne « Reste » avec la Grande Sophie est entrainante :
« J’étais un peu à l’Ouest
Un peu soul sans conteste
Mais à l’éthylotest
Plus d’alcool plus un zeste »
Il fallait au moins ça, car la phrase attribuée à Van Gogh  aurait pu titrer l’album :
« La tristesse durera toujours »

samedi 10 septembre 2016

Les passants de Lisbonne. Philippe Besson.


Ce livre vite lu a le charme des hôtels de luxe un peu démodés, hors du monde, où se rencontrent une veuve récente et un garçon fraîchement délaissé par son ami. Dans la sincérité permise par leur douleur respective, ils s’écoutent.
Bien loin de l’enthousiasme des lecteurs qui ont donné leur avis sur Internet, j’ai trouvé ces échanges bien conventionnels et la conclusion nunuche. Je n’ai pas ressenti la « saudade », la mélancolie, qui m’a parue un cliché de plus attaché au Portugal. 
L’ennui peut être reposant, et condition de la connaissance, il ne permet pas ici d’aller au-delà des apparences. 
Protégés de la chaleur de la ville, dans leurs fauteuils, sirotant sans soif, Hélène et Mathieu m’ont laissé froid.
Un serveur revenu chez lui raconte à sa compagne :
« Il l’enlacera et racontera combien il s’est ennuyé tout l’après midi. Il dira : il n’y avait personne. Ah si un homme et une femme, un couple peut être, si c’est un couple, ils n’avaient pas l’air très heureux. Sa copine ajoutera : il y a des gens comme ça, qu’est ce que tu veux, » Et ils passeront à autre chose. »  
Alors pour jouer : mieux vaux « Mort à Venise » que « Dort à Lisbonne » car cette Lisbonne trop lisse est loin d’être bonne.

vendredi 9 septembre 2016

Na !

Bien de ceux qui apparaissent aux écrans ne semblent pas avoir pris  de vacances, ni tari leurs propos dignes de ceux qui se tiendraient, dit-on, dans les cours de récréations.
Cameron chantonne avant d’annoncer sa démission: tellement cool !
Quand Vals parle de Liberté en évoquant Marianne : tempête sur les réseaux !
Il ne peut prononcer le moindre mot.
Pour avoir moi-même un jour dépassé la limite de mes compétences, j’en vois trop qui butent au seuil du principe de Peters : Vals était un bon ministre de l’intérieur, mais trop clivant pour être le premier, Ségolène Royal faisait habilement valoir sa région, et Mélenchon en secrétaire d’état à la formation professionnelle n’avait alors pas besoin d’en faire trop…
Au moment  où « Les Guignols de l’Info » perdent leur magister, le débat public tourne à des bastonnades de castelet.
Ces comédies n’arrivent pas à nous distraire de toutes les tragédies niçoises, turques, kurdes…  sociales, économiques, écologiques, morales.
Alors le son monte, les rires enregistrés haussent le ton, à l’instar des opposants à la loi travail se radicalisant, niant leur échec à mobiliser d’autres travailleurs que ceux qui sont protégés.
La recension de quelques paradoxes proches de l’absurde devrait calmer quelques donneurs de leçons, elle me tiendra lieu de pense-bête.
Interdire le burkini, les multiplie : na !
Il ne faut pas en parler, mais tout le monde en parle.
Le MEDEF avait promis un million d’emplois l’an dernier :
cette année Gattaz  en annonce deux millions.
Les cours de calligraphie se multiplient car nous écrivons de moins en moins.
Les pédagogues qui ont abandonné les classes estiment que l’école française soumet les élèves, pourtant j’entends que bien des ados considèrent les profs comme des larbins et se montrent plutôt arrogants. En tous cas le mépris envers les profs est répandu, la dérision naturelle face à une institution invitée désormais à faire gazouiller les classes en îlots préparant des ilotes. L’école n’ose plus émettre, ni prôner l’étude. Le mot est en voie de disparition. Il n’y a plus d’ « études surveillées ».
Les taches éducatives côté famille ne semblent guère plus enviables. J’ai été surpris, sur le réseaux dits sociaux, de la vogue de l’expression : « délivrée, libérée » pour dire le soulagement des parents au moment de la réouverture des  écoles considérées comme  des « garderies » qui font pourtant preuve d’imagination en recevant les élèves avec des écharpes de reines de beauté où sont mentionnés : « Miss C.P., Miss CE2/CM1 » (Ecole publique Paul Langevin, à Fontaine, lui qui disait : « Plus je m'instruis, plus je me sens communiste. »)
Le PC est moribond et Rocard a disparu.
Il avait incarné nos rêves bavards de 68, puis adultes devenus, il nous a assagi et a réalisé de nombreuses réformes pragmatiques et innovantes. Courageux, inventif, travailleur, parlant tellement « vrai », que ce trait souligné, doit être finalement assez exceptionnel comme l’honnêteté.   
Retraité, l’irréductible, a continué à délivrer quelques fulgurances vite effacées dans cet air du temps rétif à toute phrase qui ajouterait une subordonnée aux sempiternels sujet-verbe-complément au delà desquels les sarcasmes pleuvent.
Il a fait si beau cet été : ce n’est pas bon !
…….
Le dessin du Canard que j’ai préféré cette semaine :

jeudi 8 septembre 2016

La demeure du chaos.

Ce musée original situé au nord de Lyon à Saint Romain au Mont d’Or est ouvert au public le samedi et le dimanche après midi.
Depuis une quinzaine d’années, le propriétaire du lieu avait fait parler de lui pour ses ennuis avec la municipalité qui ne voyait pas d’un bon œil, à l’orée du village aux pierres dorées, ces noirs bâtiments déstructurés parmi lesquels émergent des crânes gigantesques au milieu de sculptures rouillées.
J’aime la rouille, les « vanités » qui rappellent notre mortelle condition, et les démarches artistiques novatrices, mais comme nous en étions en plein dans la polémique sur la fresque de « Marianne et les policiers » à Grenoble, ce n’est pas qu’en consommateur d’art contemporain, amateur de nouveauté, que j’ai déambulé parmi les 5400 œuvres proposées.
J’avais participé sur Facebook à la polémique contre les partisans de la liberté d’expression et les allergiques à l’état policier (mais pas à ses subventions). Ce bombage dont le thème constitue l’ordinaire des publications sur Internet et dans des publications militantes s’imposait à tous, la semaine où deux policiers étaient assassinés.
La posture victimaire du propriétaire Thierry Hermann, chef d’entreprise qui gagne sa vie sur le web m’a parue surjouée, alors que son implantation dans les monts du Lyonnais est vraiment ostensible. La liberté de création, tellement sollicitée, s’épuise dans tant de provocations datées, à Grenoble et ici.
Faut-il tellement douter de son bon droit pour écrire en lettres énormes sur un toit :
« Non aux réacs » ? pour se sentir tellement révolutionnaire.
Beaucoup d’objets installés sont  surdimensionnés suivant le procédé adopté par certains artistes actuels. Les nombreux portraits légendaires de Platon à Obama sont « délégendés » quand les références vont du facteur Cheval à  Dada dans un boulguiboulga ésotérique bavard où souffle entre autres « l’esprit de la salamandre ».
Parmi les 99 totems en acier découpés au laser rien qu’à la lettre « A » il faut voir :
« Abraxas, alchimie, algorithme, allégorie, annonciation, apologue, apparition, arcane, art royal, attribut, avènement …»
Par ailleurs 99 « sentinelles alchimiques », dont la base forme un triangle équilatéral, concourent dans la catégorie des plus grandes installations statuaires d’Europe.
Des containers créent-ils selon l’intention de l’auteur : « une présence évanescente et subtile… où la panne du système équivaut à une soudaine illumination »
Un bunker au centre de ce capharnaüm pourrait rassurer ceux qui seraient pris de court par l’apocalypse imminente, à moins qu’elle ne soit déjà bien avancée.
L’underground tape à l’œil.
Alors qu’un livret gratuit de 146 pages est à la disposition des visiteurs, il me semble qu’un dispositif plus pédagogique, moins répétitif, moins fouillis, mais nous sommes bien dans « le chaos », permettrait de mieux apprécier certaines propositions.
Vaut cependant le détour, forcément quand un tel tumulte est placé sous le patronage de l’auteur du « musée imaginaire » André Malraux dont je viens de découvrir cette phrase :
«Il n’est qu’un acte sur lequel ne prévale ni la négligence des constellations ni le murmure éternel des fleuves: c’est l’acte par lequel l’homme arrache quelque chose à la mort.»
Discours pour sauver les monuments de Haute-Égypte.