Dans le livre « 366 jours de poésie » chez Omnibus, à la date d’hier, Verlaine :
« L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable,
Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ?
Vois, le soleil poudroie à quelque trou,
Que ne t’endormais-tu, le coude sur la table ? »
Un brin de paille.
dimanche 14 juin 2009
samedi 13 juin 2009
Désarroi au P.S.
Pas d’annonce fracassante par Dame Tartine, c’est ainsi que Le Canard enchaîné surnomme Martine Aubry, il faut ben sourire.
La situation créée est plutôt sympathique- je n’ai pas écrit pathétique- car elle résiste au tempo hystérique des médias. Mais de laisser à nouveau du temps, pour des questions qui ne datent pas de ce dimanche, risque de décourager un peu plus les militants qui travaillent encore dans la maison.
Plutôt que d’ajouter une pelletée en jouant mon petit Boutih, Vals, ou Mosco, très en forme, je me contenterai de lire le journal :
Dans Libé : Gilles Finchestein de la fondation Terra Nova parle des Européens qui doutent « de la capacité des sociaux démocrates à atteindre les objectifs qu’ils se fixent.
Ils constatent que sur beaucoup de sujets,
ils hésitent entre l’abstention-ils n’ont pas de position-,
la division-ils ont chacun une position-,
et la circonvolution- ils ont une position confuse.
Ils ont le sentiment que les mots utilisés sont usés jusqu’à la corde. »
« Ce n’est pas parce qu’ils ont de mauvais résultats qu’ils sont moroses mais parce qu’ils sont moroses qu’ils ont de mauvais résultats ! Ils doivent retrouver l’audace d’adopter des positions courageuses, de formuler de nouveaux compromis, de saisir de nouveaux problèmes- tout simplement de repenser leur projet et de le porter avec enthousiasme. »
Jean Paul Fitoussi :
« Les inégalités sont inefficaces économiquement et politiquement…
elles retardent la sortie de crise. Elles empêchent les catégories les plus touchées de se projeter dans l’avenir, et donc de prendre en compte l’impératif environnemental. Les inégalités et l’écologie sont les deux questions majeures actuelles, abandonnées par le centre gauche, qui préfère avoir des discours intemporels éloignés des réalités. »
La situation créée est plutôt sympathique- je n’ai pas écrit pathétique- car elle résiste au tempo hystérique des médias. Mais de laisser à nouveau du temps, pour des questions qui ne datent pas de ce dimanche, risque de décourager un peu plus les militants qui travaillent encore dans la maison.
Plutôt que d’ajouter une pelletée en jouant mon petit Boutih, Vals, ou Mosco, très en forme, je me contenterai de lire le journal :
Dans Libé : Gilles Finchestein de la fondation Terra Nova parle des Européens qui doutent « de la capacité des sociaux démocrates à atteindre les objectifs qu’ils se fixent.
Ils constatent que sur beaucoup de sujets,
ils hésitent entre l’abstention-ils n’ont pas de position-,
la division-ils ont chacun une position-,
et la circonvolution- ils ont une position confuse.
Ils ont le sentiment que les mots utilisés sont usés jusqu’à la corde. »
« Ce n’est pas parce qu’ils ont de mauvais résultats qu’ils sont moroses mais parce qu’ils sont moroses qu’ils ont de mauvais résultats ! Ils doivent retrouver l’audace d’adopter des positions courageuses, de formuler de nouveaux compromis, de saisir de nouveaux problèmes- tout simplement de repenser leur projet et de le porter avec enthousiasme. »
Jean Paul Fitoussi :
« Les inégalités sont inefficaces économiquement et politiquement…
elles retardent la sortie de crise. Elles empêchent les catégories les plus touchées de se projeter dans l’avenir, et donc de prendre en compte l’impératif environnemental. Les inégalités et l’écologie sont les deux questions majeures actuelles, abandonnées par le centre gauche, qui préfère avoir des discours intemporels éloignés des réalités. »
2002-2009 : 7 ans de "rénovation" au PS - Nouvel Obs
Au soir du 21 avril, Lionel Jospin, en se retirant de la vie politique, appelait les socialistes à préparer la reconstruction de l'avenir. Le 7 juin 2009, après un score plus que décevant aux élections européennes, Martine Aubry demande de l'unité et de la rénovation au PS.
Au soir du 21 avril, Lionel Jospin, en se retirant de la vie politique, appelait les socialistes à préparer la reconstruction de l'avenir. Le 7 juin 2009, après un score plus que décevant aux élections européennes, Martine Aubry demande de l'unité et de la rénovation au PS.
vendredi 12 juin 2009
Les dépossédés
Bonne nouvelle !
Robert Mcliam Wilson vit à Paris, il est l’invité d’un nouveau fait littéraire « Paris en toutes lettres » ; et aux lecteurs de Télérama, il confie qu’il a toujours rêvé d’être éboueur, avec cet humour qui lui est si particulier.
Robert Mcliam Wilson, je l’ai rencontré en 2007, lors du Printemps du Livre Grenoblois ; il était l’évènement ; son dernier livre « Les dépossédés » venait d’être traduit de l’irlandais et bouleversait les lecteurs par l’actualité du livre, ici en France ; une France d’avant la crise pourtant, mais qui découvrait qu’au XXIème siècle, on pouvait y vivre, y travailler et ne pas pouvoir se loger.
Ecrit en 1992, alors qu’il n’avait que 27 ans mais trois livres derrière lui sur les luttes et la misère au Royaume Uni, les « dépossédés » tente une analyse d’une forme particulière de la pauvreté et décrit une classe moyenne ravagée par la politique ultralibéraliste de la Dame de Fer Margaret Thatcher ;le projet de l’écrivain est de réaliser une enquête objective, accompagné d’un photographe, sur « la pauvreté , (celle-ci) étant la seule expérience humaine, en dehors de la naissance et de la mort, que tout être humain est capable de partager ».
Pour être « dépossédé », il faut avoir « possédé » quelques biens, un emploi, une famille et c’est le processus de déchéance financière, sociale, morale vécue par des femmes et des hommes rencontrés à Londres, Glasgow et Belfast, qu’il partage et nous invite à partager : en compagnie d’ Henry « beau, intelligent enflammé, mais sans le sou, noir et gay, tu ne peux pas être plus marginal ! » ; de Gabrielle qui lui apprend qu’être pauvre c’est moche mais qu’être pauvre et femme l’a « laminée plus sûrement que tout autre facteur » ; ou bien encore de Marty et Ann, l’un travaillant dans un « club social » et l’autre, femme de ménage dans un hôpital ; fiers de leurs enfants intelligents et doués, ils se privent de tout pour que ceux-ci poursuivent leurs études au lycée .
Loin de l’étude distancée prévue, Robert MC Liam Wilson raconte avec compassion, faconde et parfois drôlerie, un an de rencontres avec des êtres auxquels il s’est attaché et dans lesquels, issu lui-même d’un quartier pauvre de Belfast, il s’est retrouvé. Il souligne leur dignité au milieu de ces situations inextricables, intenables et pourtant supportées ; il stigmatise les critiques et les clichés ordinairement proférés à leur encontre : un téléphone ? une télévision ? C’est superflu ! Et pourquoi faire autant d’enfants ?
Mais face au cynisme dominant du gouvernement et des riches, il considère que sa démarche a échoué. « Il n’a rien publié depuis plus de dix ans et sa voix nous manque » dit son traducteur.
Marie-Françoise Proust
Robert Mcliam Wilson vit à Paris, il est l’invité d’un nouveau fait littéraire « Paris en toutes lettres » ; et aux lecteurs de Télérama, il confie qu’il a toujours rêvé d’être éboueur, avec cet humour qui lui est si particulier.
Robert Mcliam Wilson, je l’ai rencontré en 2007, lors du Printemps du Livre Grenoblois ; il était l’évènement ; son dernier livre « Les dépossédés » venait d’être traduit de l’irlandais et bouleversait les lecteurs par l’actualité du livre, ici en France ; une France d’avant la crise pourtant, mais qui découvrait qu’au XXIème siècle, on pouvait y vivre, y travailler et ne pas pouvoir se loger.
Ecrit en 1992, alors qu’il n’avait que 27 ans mais trois livres derrière lui sur les luttes et la misère au Royaume Uni, les « dépossédés » tente une analyse d’une forme particulière de la pauvreté et décrit une classe moyenne ravagée par la politique ultralibéraliste de la Dame de Fer Margaret Thatcher ;le projet de l’écrivain est de réaliser une enquête objective, accompagné d’un photographe, sur « la pauvreté , (celle-ci) étant la seule expérience humaine, en dehors de la naissance et de la mort, que tout être humain est capable de partager ».
Pour être « dépossédé », il faut avoir « possédé » quelques biens, un emploi, une famille et c’est le processus de déchéance financière, sociale, morale vécue par des femmes et des hommes rencontrés à Londres, Glasgow et Belfast, qu’il partage et nous invite à partager : en compagnie d’ Henry « beau, intelligent enflammé, mais sans le sou, noir et gay, tu ne peux pas être plus marginal ! » ; de Gabrielle qui lui apprend qu’être pauvre c’est moche mais qu’être pauvre et femme l’a « laminée plus sûrement que tout autre facteur » ; ou bien encore de Marty et Ann, l’un travaillant dans un « club social » et l’autre, femme de ménage dans un hôpital ; fiers de leurs enfants intelligents et doués, ils se privent de tout pour que ceux-ci poursuivent leurs études au lycée .
Loin de l’étude distancée prévue, Robert MC Liam Wilson raconte avec compassion, faconde et parfois drôlerie, un an de rencontres avec des êtres auxquels il s’est attaché et dans lesquels, issu lui-même d’un quartier pauvre de Belfast, il s’est retrouvé. Il souligne leur dignité au milieu de ces situations inextricables, intenables et pourtant supportées ; il stigmatise les critiques et les clichés ordinairement proférés à leur encontre : un téléphone ? une télévision ? C’est superflu ! Et pourquoi faire autant d’enfants ?
Mais face au cynisme dominant du gouvernement et des riches, il considère que sa démarche a échoué. « Il n’a rien publié depuis plus de dix ans et sa voix nous manque » dit son traducteur.
Marie-Françoise Proust
jeudi 11 juin 2009
« Girls by girls »
« Girl » : c’est du vocabulaire anglais qui m’est encore familier, mais quand je me suis mis à la recherche du mot « junk » parce que la galerie qui expose des plasticiennes s’appelle Spacejunk, je n’ai pas vu le lien, car le lieu est propret et les œuvres présentées gentilles
Et pourtant le junky c’est le « camé », en économie les « junk bond » sont des obligations pourries, quant à la « junk food » elle donne du côté malbouffe. Cette galerie a l’intention de valoriser l’art de la rue, certaines artistes exposées se réclament de la « board culture » comme skate board, les sports de glisse, où l’artiste en équilibre avec la nature est « complice des éléments ».
Caia Koopman reproduit des personnages féminins assez stéréotypés mais à bien regarder une larme peut perler au coin de leurs grands yeux. Carole Bielicki joue aussi du rose avec des présences plus inquiétantes. Sofia Maldonado l’américaine dont j’ai photographié un des dessins pour illuster l’article a une vraie patte bien qu’un peu statique à mon goût. Mizzo une suissesse est influencée par la ligne manga, ses arabesques appliquées sur des supports inhabituels (chaussures, téléphone, skis) peuvent plaire.
http://www.spacejunk.tv/
Et pourtant le junky c’est le « camé », en économie les « junk bond » sont des obligations pourries, quant à la « junk food » elle donne du côté malbouffe. Cette galerie a l’intention de valoriser l’art de la rue, certaines artistes exposées se réclament de la « board culture » comme skate board, les sports de glisse, où l’artiste en équilibre avec la nature est « complice des éléments ».
Caia Koopman reproduit des personnages féminins assez stéréotypés mais à bien regarder une larme peut perler au coin de leurs grands yeux. Carole Bielicki joue aussi du rose avec des présences plus inquiétantes. Sofia Maldonado l’américaine dont j’ai photographié un des dessins pour illuster l’article a une vraie patte bien qu’un peu statique à mon goût. Mizzo une suissesse est influencée par la ligne manga, ses arabesques appliquées sur des supports inhabituels (chaussures, téléphone, skis) peuvent plaire.
http://www.spacejunk.tv/
mercredi 10 juin 2009
Récréation. Faire classe # 33
J’ai bénéficié pendant des années de locaux multiples et confortables dans une école toute neuve, de la bienveillance de mes collègues et de la confiance de certaines directrices peu enclines à une interprétation frileuse des textes. Si bien que dans le cadre rigoureux des vingt minutes de pose qui ne s’autorisaient jamais à déborder, mes élèves ont profité d’une grande liberté qui a constitué pour beaucoup une part heureuse de leur vie à l’école. Moment éducatif scandé par le son d'une cloche de vache que les élèves de C.P avaient l'honneur d'agiter pour marquer la fin de la récré. Nous étions raccord avec l'esthétique de l'école maternelle attenante avec sa salle de jeu en forme de grange Chartrousine.
Rester en classe représentait une récompense suspendue en cas de problème pour poursuivre des constructions de maquettes, jouer à l’ordinateur,à des jeux mathématiques, musarder dans le musée de classe, lire...
Des équipes se succédaient en salle polyvalente pour préparer des pièces de théâtre, des danses. Des personnalités se sont révélées, des parodies très drôles d’émissions de la télévision prouvaient s’il en était besoin que les enfants ne sont pas forcément dupes. Ces créations annoncées par affiche, combinaient liberté individuelle et compte rendu au groupe.
D’autres pouvaient regarder une cassette amorcée ensemble.
Ainsi en comptant les vidéos proposées dans le car au retour du ski, les élèves découvraient une bonne vingtaine de films en une année scolaire : Chaplin, Wallace et Grosmitt , « L’appel de la forêt », « Le ballon d’or », « L’enfant de Calabre », « Fanfan la tulipe ». Il y eut bien des émotions partagées par une dizaine d’enfants voire en solitaire devant « Jeux interdits », « Le gône du Chaaba », « Le vieil homme et l’enfant », « Cuore », « La guerre des boutons » « Rue Case nègres ». J’ai accueilli « le Titanic », « Babe », « Billy Elliot »… Et j’ai renoncé à « Germinal »après des remarques judicieuses de parents. Je me suis gardé des trop connus « Madame Doubtfire », mais sans me lasser j’ouvrais chaque saison sur « La gloire de mon père » pour partager cette croyance en l’école qui ne renie pas la lumière des vacances mais la prolonge. Nous tricotions un petit patrimoine culturel avec aussi « Un sac de billes » et « L’argent de poche » …
Dans une école qui s’ouvrait, les architectes avaient négligé les propositions des enseignants qui demandaient des toilettes à l’extérieur. Immanquablement, le coin des lavabos installé dans les bâtiments est devenu cachette pas toujours poétique. Il est vrai que l’installation de points d’eau extérieurs n’a pu perdurer. Ils ont été vite détruits lors d’incursions nocturnes. Les aménageurs n’avaient pas noté non plus le souhait de planter un mûrier pour nourrir quelques vers à soie. Et l’idée d’un atelier qui échapperait à la dictature des femmes de ménage relevait trop de l’utopie : les salles sont blanches aujourd’hui, pas de copeaux par terre. Pas de craies floues qui fondent sous les giboulées, la municipalité a tracé des marelles qui y ont perdu de l’aléatoire.
Dans cette école qui cherchait ses marques, les règles de vie en commun et la part attendue des enfants ont suscité la constitution d’un conseil d’enfants. Ils eurent d’abord à inventer pour ces temps de récréation. Assez répressifs au départ, les délégués élèves guignaient le rôle de petits kapos ; les enseignants ont réaffirmé leur rôle de garant de la tranquillité de chacun. Les caïds des bacs à sable ont été contrariés. Pour éviter que l’instance ne dégénère en récriminations perpétuelles le conseil a été orienté vers plus de propositions. Les élèves ont tenus des stands et animé une vraie fête de l’école organisée de leur propre initiative, une occasion de bons moments pour clore l’année scolaire.
Les territoires implicites dans une cour de récréation s’ordonnent beaucoup autour des parties de foot des grands. Les maîtresses peu enclines à amortir quelque centre au deuxième poteau avaient imposé l’usage exclusif de ballons en mousse n’entravant pas la virtuosité des footeux. Parfois quelques parties à l’Agorespace voisin avec ballon cuir laissaient de la place aux petits. Mais cette exception réservée aux beaux jours dérogeait trop au principe du partage des surveillances. Car la cour offre une vitrine sur le quartier, la communauté éducative y concrétise sa cohérence en un langage commun. La force, les connivences, la sérénité, le soutien entre adultes se jouaient dans ces moments essentiels pour l’ambiance d’un groupe scolaire.
La récréation ne procure pas vraiment une pause pour les enseignants qui préparent par leur vigilance, une suite sereine à la journée.
J’ai appris qu’il existait désormais des animateurs pour apprendre à jouer aux enfants. Passé le moment de consternation, j’admets finalement ce type d’intervention s’il réamorce de l’inventivité, et n’empiète pas sur le temps de distraction réel de l’enfant ; la paix !
Les déclarations d’assurances concernent essentiellement ces périodes. Les compagnies dicteront-elles encore plus la loi ? Verra-t-on des vacataires privés pour garantir la sécurité dans les couloirs et aux abords des bunkers éducatifs ? Si les tourmenteurs des toboggans passent au « 20 heures », je crains ne pas avoir abusivement extrapolé.
Que crie le moineau ?
La joie me tient chaud.
Que crie l’alouette ?
J’ai le ciel en fête.
Et que crie la pie ?
Qui rit, s’enrichit.
Maurice Carème
Rester en classe représentait une récompense suspendue en cas de problème pour poursuivre des constructions de maquettes, jouer à l’ordinateur,à des jeux mathématiques, musarder dans le musée de classe, lire...
Des équipes se succédaient en salle polyvalente pour préparer des pièces de théâtre, des danses. Des personnalités se sont révélées, des parodies très drôles d’émissions de la télévision prouvaient s’il en était besoin que les enfants ne sont pas forcément dupes. Ces créations annoncées par affiche, combinaient liberté individuelle et compte rendu au groupe.
D’autres pouvaient regarder une cassette amorcée ensemble.
Ainsi en comptant les vidéos proposées dans le car au retour du ski, les élèves découvraient une bonne vingtaine de films en une année scolaire : Chaplin, Wallace et Grosmitt , « L’appel de la forêt », « Le ballon d’or », « L’enfant de Calabre », « Fanfan la tulipe ». Il y eut bien des émotions partagées par une dizaine d’enfants voire en solitaire devant « Jeux interdits », « Le gône du Chaaba », « Le vieil homme et l’enfant », « Cuore », « La guerre des boutons » « Rue Case nègres ». J’ai accueilli « le Titanic », « Babe », « Billy Elliot »… Et j’ai renoncé à « Germinal »après des remarques judicieuses de parents. Je me suis gardé des trop connus « Madame Doubtfire », mais sans me lasser j’ouvrais chaque saison sur « La gloire de mon père » pour partager cette croyance en l’école qui ne renie pas la lumière des vacances mais la prolonge. Nous tricotions un petit patrimoine culturel avec aussi « Un sac de billes » et « L’argent de poche » …
Dans une école qui s’ouvrait, les architectes avaient négligé les propositions des enseignants qui demandaient des toilettes à l’extérieur. Immanquablement, le coin des lavabos installé dans les bâtiments est devenu cachette pas toujours poétique. Il est vrai que l’installation de points d’eau extérieurs n’a pu perdurer. Ils ont été vite détruits lors d’incursions nocturnes. Les aménageurs n’avaient pas noté non plus le souhait de planter un mûrier pour nourrir quelques vers à soie. Et l’idée d’un atelier qui échapperait à la dictature des femmes de ménage relevait trop de l’utopie : les salles sont blanches aujourd’hui, pas de copeaux par terre. Pas de craies floues qui fondent sous les giboulées, la municipalité a tracé des marelles qui y ont perdu de l’aléatoire.
Dans cette école qui cherchait ses marques, les règles de vie en commun et la part attendue des enfants ont suscité la constitution d’un conseil d’enfants. Ils eurent d’abord à inventer pour ces temps de récréation. Assez répressifs au départ, les délégués élèves guignaient le rôle de petits kapos ; les enseignants ont réaffirmé leur rôle de garant de la tranquillité de chacun. Les caïds des bacs à sable ont été contrariés. Pour éviter que l’instance ne dégénère en récriminations perpétuelles le conseil a été orienté vers plus de propositions. Les élèves ont tenus des stands et animé une vraie fête de l’école organisée de leur propre initiative, une occasion de bons moments pour clore l’année scolaire.
Les territoires implicites dans une cour de récréation s’ordonnent beaucoup autour des parties de foot des grands. Les maîtresses peu enclines à amortir quelque centre au deuxième poteau avaient imposé l’usage exclusif de ballons en mousse n’entravant pas la virtuosité des footeux. Parfois quelques parties à l’Agorespace voisin avec ballon cuir laissaient de la place aux petits. Mais cette exception réservée aux beaux jours dérogeait trop au principe du partage des surveillances. Car la cour offre une vitrine sur le quartier, la communauté éducative y concrétise sa cohérence en un langage commun. La force, les connivences, la sérénité, le soutien entre adultes se jouaient dans ces moments essentiels pour l’ambiance d’un groupe scolaire.
La récréation ne procure pas vraiment une pause pour les enseignants qui préparent par leur vigilance, une suite sereine à la journée.
J’ai appris qu’il existait désormais des animateurs pour apprendre à jouer aux enfants. Passé le moment de consternation, j’admets finalement ce type d’intervention s’il réamorce de l’inventivité, et n’empiète pas sur le temps de distraction réel de l’enfant ; la paix !
Les déclarations d’assurances concernent essentiellement ces périodes. Les compagnies dicteront-elles encore plus la loi ? Verra-t-on des vacataires privés pour garantir la sécurité dans les couloirs et aux abords des bunkers éducatifs ? Si les tourmenteurs des toboggans passent au « 20 heures », je crains ne pas avoir abusivement extrapolé.
Que crie le moineau ?
La joie me tient chaud.
Que crie l’alouette ?
J’ai le ciel en fête.
Et que crie la pie ?
Qui rit, s’enrichit.
Maurice Carème
mardi 9 juin 2009
Elle est à toi
Il m'a dit : Elle est à toi, cette maison.
Puis il a chaussé ses godasses de montagnard, il a enfilé son anorak, enfoncé son bonnet sur sa tignasse qui grisonne. Il a ajusté son sac à dos, vérifié que ses gants étaient bien accrochés à sa ceinture. Il m'a encore regardée. Regard sans faiblesse, au gris pâli mois après mois dans son visage aminci. " N'oublie jamais qu' elle est à toi cette maison, quoi qu'il arrive…"
Devant la porte, il s'est arrêté, il s'est retourné, il a posé sa main gauche sur mon épaule droite qu'il a un peu serrée, comme si cela lui faisait mal cet effort dans ses doigts. J'ai regardé sa bouche demeurée fraîche, une bouche d'enfant. La porte s'est refermée sans bruit sur la brume d'altitude. Ses semelles ont raclé les grosses pierres au delà du perron et le silence est revenu petit à petit gelant l'espace, posant dans ma poitrine des cristaux acides.
J'ai cherché du regard la pendule et les réveils, j'ai froissé le journal de la veille, j'ai serré mes bras contre mon ventre. J'ai allumé un feu dans la cheminée histoire de dégeler la glace qui pressait mes côtes. Quand l'eau bouillante a empli la théière m'envoyant au visage sa vapeur, j'ai entendu le mot " solitude ".
Je ne reverrai plus jamais Jean.
Au matin je l'avais trouvé s'affairant autour de son sac. Il avait très mal dormi : " Ca ne peut plus durer ; je vide mon compte en banque. Je pars voir le monde, les fleurs, les bêtes et les hommes quoi ! Ne dis rien même si tu ne comprends pas. Tu as la maison ; j'ai fait le nécessaire. Tout est en ordre. Moi, il faut que j'arpente la terre avant la fin… " IL s'était appuyé du front et des mains contre le manteau de la cheminée. Ses épaules pointaient sous le pull bleu qu'il ne quittait plus. Ses hanches étroites, des hanches d'ado, avaient encore fondu ; son pantalon faisait des poches sous ses fesses. Ses jambes si longues tremblaient un peu.
Il est parti maintenant.
J'ai bu un bol de thé et j'ai installé un matelas près de la cheminée. J'ai bu de l'eau chaude toute la nuit. Le vent s'est levé vers minuit. La branche du cèdre a frotté contre les lauzes. Jean n'avait pas eu la force de la couper ; je m'y mettrai demain. J'ai écouté France-Culture. La nuit les voix sont proches, elles sont dans la pièce, feutrées, chuchotantes. J'ai écouté les voix des femmes et des hommes, surtout celles des hommes. J'ai peut-être dormi.
Au matin, j'ai remis le matelas dans la chambre d'amis, j'ai pris un petit déjeuner, beaucoup de miel. La brume s'était levée, on apercevait la muraille éclatante du Mont Aiguille. Au printemps je partirai, je vendrai le chalet. Je quitterai ce cul-de-sac. Cette maison est un bateau échoué. Bientôt elle sentira le moisi.
Jean est parti. Il n'a pas voulu partager les derniers mois. Je l'aurais aidé pourtant mais que savait-il de mon amour ? Il a choisi cette marche contre la mort qui me laisse à moitié vivante.
Dans la salle de bain, sur l'étagère de Jean, j'ai trouvé ses boîtes de pilules… la galère de la trithérapie. Aura-t-il le temps d'atteindre les premiers déserts africains?
Le café, c'est vraiment une grande invention. Je vais en boire beaucoup aujourd'hui. Je couperai la branche du cèdre comme on coupe l'avenir. Le temps me portera le temps qu'il voudra.
Philomène
Puis il a chaussé ses godasses de montagnard, il a enfilé son anorak, enfoncé son bonnet sur sa tignasse qui grisonne. Il a ajusté son sac à dos, vérifié que ses gants étaient bien accrochés à sa ceinture. Il m'a encore regardée. Regard sans faiblesse, au gris pâli mois après mois dans son visage aminci. " N'oublie jamais qu' elle est à toi cette maison, quoi qu'il arrive…"
Devant la porte, il s'est arrêté, il s'est retourné, il a posé sa main gauche sur mon épaule droite qu'il a un peu serrée, comme si cela lui faisait mal cet effort dans ses doigts. J'ai regardé sa bouche demeurée fraîche, une bouche d'enfant. La porte s'est refermée sans bruit sur la brume d'altitude. Ses semelles ont raclé les grosses pierres au delà du perron et le silence est revenu petit à petit gelant l'espace, posant dans ma poitrine des cristaux acides.
J'ai cherché du regard la pendule et les réveils, j'ai froissé le journal de la veille, j'ai serré mes bras contre mon ventre. J'ai allumé un feu dans la cheminée histoire de dégeler la glace qui pressait mes côtes. Quand l'eau bouillante a empli la théière m'envoyant au visage sa vapeur, j'ai entendu le mot " solitude ".
Je ne reverrai plus jamais Jean.
Au matin je l'avais trouvé s'affairant autour de son sac. Il avait très mal dormi : " Ca ne peut plus durer ; je vide mon compte en banque. Je pars voir le monde, les fleurs, les bêtes et les hommes quoi ! Ne dis rien même si tu ne comprends pas. Tu as la maison ; j'ai fait le nécessaire. Tout est en ordre. Moi, il faut que j'arpente la terre avant la fin… " IL s'était appuyé du front et des mains contre le manteau de la cheminée. Ses épaules pointaient sous le pull bleu qu'il ne quittait plus. Ses hanches étroites, des hanches d'ado, avaient encore fondu ; son pantalon faisait des poches sous ses fesses. Ses jambes si longues tremblaient un peu.
Il est parti maintenant.
J'ai bu un bol de thé et j'ai installé un matelas près de la cheminée. J'ai bu de l'eau chaude toute la nuit. Le vent s'est levé vers minuit. La branche du cèdre a frotté contre les lauzes. Jean n'avait pas eu la force de la couper ; je m'y mettrai demain. J'ai écouté France-Culture. La nuit les voix sont proches, elles sont dans la pièce, feutrées, chuchotantes. J'ai écouté les voix des femmes et des hommes, surtout celles des hommes. J'ai peut-être dormi.
Au matin, j'ai remis le matelas dans la chambre d'amis, j'ai pris un petit déjeuner, beaucoup de miel. La brume s'était levée, on apercevait la muraille éclatante du Mont Aiguille. Au printemps je partirai, je vendrai le chalet. Je quitterai ce cul-de-sac. Cette maison est un bateau échoué. Bientôt elle sentira le moisi.
Jean est parti. Il n'a pas voulu partager les derniers mois. Je l'aurais aidé pourtant mais que savait-il de mon amour ? Il a choisi cette marche contre la mort qui me laisse à moitié vivante.
Dans la salle de bain, sur l'étagère de Jean, j'ai trouvé ses boîtes de pilules… la galère de la trithérapie. Aura-t-il le temps d'atteindre les premiers déserts africains?
Le café, c'est vraiment une grande invention. Je vais en boire beaucoup aujourd'hui. Je couperai la branche du cèdre comme on coupe l'avenir. Le temps me portera le temps qu'il voudra.
Philomène
lundi 8 juin 2009
Etreintes brisées
J’aime bien me distinguer parfois en tenant des propos pour le plaisir de contredire des majorités. Mais mon peu d’enthousiasme à la vue du dernier Almodovar me remplit de doute : aurai-je tant émoussé mes capacités à admirer ? Tout le monde applaudit tellement à chaque apparition du grand prêtre de « La Movida » qui commence à faire long feu pourtant, me semble-t-il. Oui, toujours ses couleurs, et Pénélope est bien gironde, les citations de propres films de Pedro sont drôles, mais l’annonce des possibilités de multiples histoires nous détache de l’émotion d’une seule qui nous empoignerait. Comme un peintre que l’on connaît bien et qui nous présenterait sa palette, mais nous n’avons plus la surprise. Le plaisir de se retrouver en territoire familier s’est éventé : l’épicerie « moderne » a pris des années.
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