Sous l’image virevoltante, « Hommage à Blériot » qui
figure dans les collections permanentes du musée de Grenoble, le conférencier
devant les amis du musée, va s’attacher à mieux faire connaître l’artiste dont
la notoriété est moindre en France qu’en Allemagne ou en Russie. Sa femme Sonia
Terk, sa « petite russe » avait aussi mieux pris la lumière.
Il est né en 1885, à l’époque où le pointilliste
Seurat
expose. Les bases de la modernité sont posées : la peinture de la
perception objective passe avant celle de l’émotion.Son «Autoportrait» de 1906 témoigne de
son émerveillement à la rencontre de Matisse, Seurat pour leur manière de construire avec la
couleur. Contemporain de Picasso, Léger, Braque, il ne restera pas longtemps dans le
« terne » laboratoire cubiste, lui
a plutôt « le
cubisme heureux ». Il réintègre le noir après une période impressionniste et joue sur les complémentaires
dans un « Marché breton » évoquant également Gauguin.Un autre «Autoportrait» de 1909 multiplie les
points de vue sans s’enfermer dans les couleurs ternes, Cézanne est passé par là qui
remet en cause les formes. Il en est à une période « destructrice ».« La flèche de Notre Dame» depuis un point de vue inusité nous
touche évidemment.La lumière incurve les lignes dans la série des «Saint-Séverin» et dissout les ombres du sol au plafond.Il a contribué à
magnifier « La tour Eiffel»,
totem de la modernité, toujours élégante, très présente ou perdue dans les
nuages.Il se réapproprie « Les Trois Grâces» peintes
jadis à Pompéi, quand elles paraissaient devant Pâris, il les met en scène
devant « La ville de Paris» intégrant des connotations de Douanier
Rousseau.
« Ce tableau marque l'avènement d'une
conception d'art perdue peut-être depuis les grands peintres italiens. […] il
résume aussi et sans aucun appareil scientifique tout l'effort de la peinture
moderne. » Blaise Cendrars
Guillaume Apollinaire a été inspiré par « Les
fenêtres»
« Du rouge au vert tout le jaune se meurt
Paris, Vancouver, Hyères,
Maintenon, New-York et les Antilles
La fenêtre s’ouvre
comme une orange
Le beau fruit de la
lumière ».
Ces fenêtres pourraient diffracter bien des apports venant du
«cubisme» allant vers l’« abstraction », faisant naître le «simultanisme», l’«orphisme»
terme qu’il refuse.
Bien qu’il se tienne loin des théoriciens, il s’enrichit
des lectures du chimiste Chevreul et de
correspondances avec Kandinsky ou Klee.
« J’eus l’idée à
cette époque d’une peinture qui ne tiendra techniquement que de la couleur, des
contrastes, mais se développant durant le temps et se percevant simultanément,
d’un seul coup ».
En «hérésiarque du cubisme»(chef d'une secte hérétique), il
se défendait d’appartenir aux «futuristes»,
mais les remous autour de ses disques colorés, le dynamisme de « L’Equipe
de Cardiff » et ses recherches du mouvement l’en rapprochent.Ses « Formes circulaires, Soleil n° 2 »
éblouissent, tournent et vibrent.
Réformé, il habite en Espagne et au Portugal. Il cherche
toujours la nouveauté : «La femme portugaise ».L’ami Tristan Tzara se tient devant « Le
manège des cochons ».Les phonographes de « La Baraque des poètes » rappellent
les liens avec les expérimentations musicales. Loin des chevalets il intègre la
peinture monumentale à l’architecture.« Relief gris ». Il travaille avec de la
caséine, des plâtres, propose des colorations dans la masse, des inclusions de graines,
des installations en rhodoïd. Il réalise la décoration du « Palais de l'air »
et celui du chemin de fer pour l’exposition universelle de 1937. Il avait déjà
réalisé une autre « Tour Eiffel » pour l’Exposition internationale
des arts décoratifs et industriels modernes en 1926. Formé dans un atelier de
décorations de théâtre, une de ses dernières interventions sera pour les
ballets russes de Diaghilev dont il fit les décors alors que
Sonia se voyait confier les costumes.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire