La salle a pu se laisser aller à la nostalgie sans vergogne
car l’évocation de ces années a su conserver la légèreté que l’on prête à notre
jeunesse.
JMP venait d'avoir l’honneur de toute une page dans le
Dauphiné libéré, il a rendu hommage à son père le comédien François Perrier, alors
que c’est un des amants de sa mère qui lui a révélé que son géniteur était
Henri Salvador. Il n’a pas prononcé son patronyme, comme à d’autres moments il
a fait preuve de pudeur, évité la vulgarité. Le photographe a mis en
scène tous les héros des ados d’alors mais n'était pas un paparazzi : lorsqu’il
va chercher Brigitte Bardot que les Beatles voulaient rencontrer, il n’a pas
pris de photos.
Passionné de musique, un jour, il a fermé le piano pour
toujours. Au retour d’un tournage d’un film de Fellini où son père l’avait amené, sa rencontre avec Daniel
Filipacchi va être déterminante pour sa carrière. Avec lui, il fait la
connaissance des rois du jazz : Miles Davies, Ella Fitzgerald… et Dizzy
Gillespie qui un jour embarqua le jeunot dans sa limousine sous le nez de tous les
photographes chevronnés l’attendant à Nice.
Il accomplit son service militaire à Oran d’où il
revient avec la conviction que la guerre par les civils est encore pire que "les évènements".
Et puis tout commence avec « Salut les
copains » doté de la seule consigne du patron Filipacchi : «
Faire des photos qui déplaisent aux parents ». Scandale quand Johnny pose
devant le drapeau tricolore ! A
l’époque Aznavour et Devos sont les seuls à le défendre.« Je préfère
passer pour un con, comme ça je les vois venir »
La proximité est grande entre le photographe et ses
modèles aussi jeunes que lui, ne refusant jamais ses propositions les plus
délirantes, les plus poétiques, les plus belles.
Le mur de ce soir composé de photographies drôles,
tendres, fraîches, est raccord avec la programmation de l’association invitante
qui consacre ses saisons à partager la beauté sous toutes ses formes. Si une
photo de Delon sera de toute façon réussie, l’allégresse de ce temps et
l’optimisme éclatent encore depuis toutes ces pages en papier glacé, auxquelles les tapisseries doivent bien des trous.
Des vies à 280 à l’heure : JMP se retrouve
avec Johnny n’ayant pas dormi depuis 3 jours dans une Lamborghini qui
devait rejoindre Bayonne depuis Saint Tropez. Il y aura arrêt à Tarbes autour
d’un arbre où il a failli finir comme son idole James Dean.
L’idole des jeunes était accessible et son
photographe un intime, n’aime pas les inélégants abimant les souvenirs, ni ceux
qui parlent du « taulier » alors que son ambition était de faire de
la musique avec ses potes et se donner sur scène. C’est l’époque où certains jeunes
gagnent plus d’argent que leurs parents où les stars vivent essentiellement par
le regard des autres.
Il mettra les Beatles dans sa poche alors que son
anglais est déplorable en les faisant poser allumant une cigarette, pour un
seul cliché ; il y aura d’autres séances.
Photographier Antoine au milieu des Champs Elysées
ne posait aucun problème, ni suivre Chuck Berry qui ne commençait pas ses
concerts sans avoir été payé en cash. Passer de l’exigeant Claude François avec
le plaisir encore vif d’avoir connu les Claudettes, à Dylan le solitaire au
milieu des foules, chantant « I want you » à Françoise Hardy, demande
de l’agilité. Et tout était possible, pour les jeunes nababs, quand avec Dutronc ils se déroutent vers Hong
Kong à la suite de divines hôtesses de l’air. Il reste de la tendresse à
l’égard de ses conquêtes Marianne Faithfull et Françoise Hardy, sans
forfanterie excessive.
Pour donner une idée de la variété des yéyés en ses
sixties, et résumer ces belles années, internet est un bon recours pour mettre
des noms sous la photo en tête de l’article, dite « du siècle », prise
en 1966 où figurent : S.
Vartan - Johnny - J.J. Debout - H. Aufray - Catherine Ribeiro - E. Mitchell -
Danyel Gérard - Claude Ciary - F. Gall - S. Gainsbourg - Frankie Jordan - M.
Torr - Sheila - Chantal Goya - Danny Logan - Michel Paje - Ronnie Bird - Monty
- Sophie - Noël Deschamps - Jacky Moulière - Annie Philippe - C. François -
Eileen - Guy Mardel - Billy Bridge - M. Berger - Michel Laurent - Nicole
(Surfs) - Adamo - Thierry Vincent - Tiny Yong - Antoine - F. Hardy - Benjamin -
D. Rivers - Monique (Surfs) - H. Vilard - Jocelyne - Dave (Surfs) - Rocky
(Surfs) - Coco (Surfs) - Pat (Surfs) - Pascal (Le petit prince) - Chouchou - R.
Anthony - Christophe.
Il manque Nino Ferrer, Petula Clarck et Jacques Dutronc.
Et bien, il est un bel homme. Mais, tout compte fait, je ne peux pas m'empêcher d'être triste qu'il ait choisi de fermer son piano pour aller se faire le PRODUCTEUR de tant d'autres.
RépondreSupprimerCertes, il a réussi une carrière qui l'a mis bien en vue, mais bien en vue en PRODUISANT d'autres, il me semble. Au dépens de son piano, et de sa musique.
Je vais être dure, mais pour moi, il y a une forme d'échec, et de lâcheté dans son abandon du piano. (D'autant plus que je passe beaucoup de temps avec le mien... et c'est un sacerdoce. Le piano est un lieu, où, quand on est assis devant, il n'y plus de possibilité de faire illusion à soi-même, plus de possibilité vraiment de se dérober. C'est un lieu de vérité pour ceux et celles pour qui le piano n'est pas un "hobby". C'est un lieu où il faut travailler, et où le travail est récompensé, et le manque de travail... puni. C'est un lieu de justice, et de justesse.)
La vie de Périer est un album d'instantanés accumulées.
Oui, je le juge durement. Un jour se jugera-t-il durement ? Le fait-il déjà ?
En tout cas... il a réussi, aux yeux du monde...
Etre photographe, écrire des souvenirs, est-ce être auteur/compositeur comme le père géniteur ? Est-ce sur le même plan ? Quelque chose dans le fait de s'installer derrière un objectif pour regarder le monde me gène maintenant...