Je venais de lever le nez d’un article faisant part des
problèmes de management de la part du directeur de l’institution culturelle
phare de la ville de Grenoble, attentif, disait-il, à la qualité de vie au
travail mais se retrouvant comme son prédécesseur en face de personnels « épuisés »,
« infantilisés », ne siégeant plus au C.A. par crainte de
représailles.
La saison des spectacles s’ouvrait sous de contrariants
auspices.
Et la feuille de salle laissait craindre le pire :
avec « espace-temps totalement
déconstruit »
et « autre
manière de déconstruire notre rapport à ces représentations volatiles ».
Après que furent distribués des bouchons d’oreille laissant
prévoir quelque puissant son,
ceux-ci s’avéraient inutiles dans un début
interminable avec voiture électrique télécommandée dépouillée de sa carrosserie
avançant et reculant sur fond de quelques aboiements.
Et puis arrivent les danseurs et quand ils sont tous là, les
vrombissements de la musique nous font vibrer et le propos devient clair :
les rivalités virtuelles nous atteignent.
Des bagarres chorégraphiées
magnifiquement expriment parfaitement les harcèlements Internet.
Les uniformes sous cagoule disent bien l’anonymat toxique et
la recherche de notoriété précaire.
Plus tard il sera question de jeux vidéo où se brouillent
les identités jusqu’à un final époustouflant où la didactique s’oublie dans les
étreintes.
La cohésion du groupe de seize danseurs excellents, puissant, dynamique, respecte les diverses
personnalités.
Le limpide projet, bien qu’aucun mot de français ne soit
prononcé, confronte réel et virtuel sous
l’abondance des images. Un spectacle beau et original.
Nous espérons voir cette année d’autres salles, comme ce
soir, entièrement debout pour applaudir.