lundi 4 novembre 2013

Le transperceneige. Bong Joon-ho.



Le gaz qui devait combattre le réchauffement de la planète l’a gelée.
Ne subsiste plus en 2031 qu’un train tournant sans arrêt autour de la terre glacée, chargé de quelques humains : les riches, devant en première classe, les pauvres, à la queue.
Je reprends le mot révisé sur le site « avoir alire.com » de « dystopie » : une utopie qui a mal tourné, et me hasarde à avancer le mot : « apocalypse snow », pour caractériser ce récit aux métaphores politiques et écologiques bien visibles.
L’énergie perpétuelle, qui entraine tous les wagons lancés à toute vitesse, a un prix, que nous  découvrons après avoir franchi bien des portes depuis le wagon sans fenêtre où sont entassés les parias, en passant par le bar à sushis, l’aquarium, la salle de classe, la boite de nuit, le sauna,... jusqu’à la Machine et son maître.
Il en a fallu des corps transpercés, du sang sur les vitres, des membres broyés, mais une certaine ambigüité concernant l’alternance des chefs au pouvoir rattrape de quelques lourdeurs.
Les moyens du cinéma d’aujourd’hui aux décors soignés qui ont du "coûter un bras", servent parfaitement cette fable fatale, avec les traits marqués de la BD des années 80 qui a inspiré le film, quand le monde était simple.
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Le billet de François Morel: C'est pour qui la... par franceinter

dimanche 3 novembre 2013

Histoire du soldat & l’amour sorcier.


Du monde au générique pour ce spectacle de début de saison à la MC2 avec la ministre dans le public et sa cohorte de caméras : les régionaux de l’étape rassemblés, Minkowski à la baguette, Galotta à l’arabesque et Osinski en lever de rideau autour du Russe Stravinsky et de l’espagnol De Falla avec leurs œuvres centenaires.
Un récitant à la belle voix nous raconte l’histoire du soldat écrite par Charles Ferdinand Ramuz qui laisse son violon au diable, autant dire son âme, contre un livre devant le rendre riche.
Les danseurs furtifs  donnent du rythme à un récit qui ne m’a cependant pas accroché ; les comédiens disparaissant derrière la musique et les mouvements caractéristiques de notre sautillant meneur de ballet  accompagnant une musique guillerette.
Après un poème de Llorca pour assurer la transition, j’ai préféré les passions gitanes même si j’aurai vu plus de « corones » dans une histoire ne manquant pas de « corazón ».
Olivia Ruiz danse et garde tout son souffle pour chanter son amour
«Né lors des nuits d’août
 Quand la chaleur est insupportable ».
Grâce à la musique plus familière, s’ajoute le plaisir de retrouvailles.
J’ai pourtant trouvé que dans cette séquence aux accents entrainants, les danseurs étaient presque trop mignons, je les aurai aimés plus telluriques, plus passionnés.
Celle qui « trainait des pieds » dans ses chansons est tout à fait à sa place, impeccable, presque trop. 
La salle comble a adressé à l’orchestre, aux danseurs et aux comédiens des applaudissements nourris sans la folie qu’aurait pu entraîner les flamenquants accents.

samedi 2 novembre 2013

Le bel âge. Régis Debray.


Le septuagénaire est alerte, chacun de ses mots virevolte, mais cette virtuosité qui m’enivre me conduit à me laisser bercer là où il voudrait que le lecteur use de la lenteur.
Il fulmine élégamment contre le zapping mais produit à la pelle des livres qui dépassent à peine la centaine de pages pleines d’une verve qui vous amène trop vite à la page ultime:
«  si la nuit est si longue, c’est que le jour est là ».
Cette fois il s’en prend au jeunisme  au nom de la jeunesse :
« Dans cet univers de séniors aux loyers prohibitifs, aux candidatures mijotées vingt ans à l’avance, aux promotions longuement mûries et aux conseils de surveillance verrouillés, le jeune, qui expie en réalité, triomphe en image et par l’image, avec l’aveu et le soutien enthousiaste du kroumir aux commandes. »
Le sens de la formule toujours aussi affuté :
« C’est en oubliant qu’on répète, c’est en se souvenant qu’on invente »
Il illustre dans ces pages vives le bonheur d’être libre, détaché des modes, donc bougrement actuel.
« Nous chassons le trépassé comme un témoin gênant qu’il importe de réduire en cendres prestissimo pour nous éviter l’écœurante image d’une lente décomposition, en oubliant que la fermentation, pourriture conduite à bon escient, nous a donné le pain, le vin , le fromage et la bière, soit quelques sérieuses raisons de vivre. »

vendredi 1 novembre 2013

Gauche à Saint Egrève : la fosse.



Pour ceux qui ont suivi la constitution d’une liste d’opposition à la municipalité en place ( voir sur ce blog l’article d’il y a deux semaines intitulé la machine à perdre).
Depuis l’enclos où je me retrouve avec d’autres à qui on n’apprend plus à faire la grimace, on va dire d’abord « fosse » comme celle où des éléphants fatigués viennent chercher un rayon de soleil dans les zoos à l’ancienne.
Alors qu’il s’agit surtout de «  la fosse » ouverte dans la terre grasse par DSKahuzac où sont enfouis nos idéaux.
En tous cas « fausse » gauche pour finir de jouer des mots et tendre un miroir où des éminences revenues du diable vauvert n’aiment guère s‘attarder.
L’exercice du pouvoir par l’actuelle maire, face à une opposition anodine l’a ancrée dans des certitudes cassantes mettant en évidence des contradictions entre quelques technos aux manières peu en phase avec son électorat conservateur, suppléant un conseil municipal sans personnalité.
Mais qui est conservateur dans la campagne qui s’annonce ?
Il est vrai que pour avoir sa photo dans le journal mieux vaut flatter les intérêts individuels, utiliser l’énergie des revanchards et des NINBY (« Not In My Back Yard » « Pas dans mon jardin ») que d’exprimer une vue d’avenir où l’intérêt général ne serait pas un gros mot comme « logement social » ou « densification urbaine ».
« Il faut que tout change pour que rien ne change » Le Guépard 
J’aurai du mal à dénier à d’autres le droit de changer d’option, ayant moi-même varié.
Par exemple sur la démocratie : du temps de Ségolène j’avais pris la « démocratie participative » comme une résurgence d’une utopique autogestion, j’en suis aujourd’hui à me méfier des appels au référendum à toute occasion, à la concertation au moindre ralentisseur, car s’expriment surtout les « contre » qui conduisent à la paralysie de l’action politique.
D’entendre aujourd’hui certains en appeler au « contrat citoyen » alors que décisions de couloir et billard à trois bandes ont été une façon d’être au cours de plates carrières politiques m’offre encore des occasions de sourire.
Finalement il n’y a que la clarté des engagements qui vaille, d’autant plus que la prudence nécessaire aux équipages hétéroclites qui se mettent en branle à la dernière minute, est de mise. Surtout ne pas dire. Ne pas dire quel est son parti, nier son histoire.
Les décisions se prennent à la Métro : les mots de cohérence, de solidarité, figureront sur les programmes mais risquent de rester vides quand les pratiques antérieures font douter de la sincérité, quand une liste d’intérêts locaux ne peut envisager une voie autre que défensive.
Elle peut gagner des voix.
A Meylan, un travail de longue haleine a débouché par une liste commune de la gauche et des écologistes, bien loin de la course pathétique aux égos de ce côté de l’agglo.
A l’heure ou bien des débats se tiennent autour du FN, qui crame tout débat bien au-delà des abords de sa flamme, quelle défaite de ne pas assumer son histoire, de se comporter comme eux, héritiers de la Cagoule, en se voilant la face.
Se taire : la place est libre pour les plus brutaux !
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 Dans le Canard de cette semaine:

jeudi 31 octobre 2013

Le MuCEM.



Le musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, MuCEM, est devenu à Marseille un nom commun directement identifiable par son architecture en résille de béton.
Le magnifique carré de Riciotti construit à l’emplacement du hangar portuaire J4 est la partie la plus remarquée d’un ensemble relié par des passerelles très fréquentées menant au fort Saint Jean aménagé également pour des expositions. Les fortifications à l’entrée du vieux port sont désormais agrémentées de jardins et nous pouvons profiter de point de vues variés sur Notre Dame de la Garde d’un côté et de l’autre le quartier Euro méditerranée et la Joliette, derrière la cathédrale Nouvelle Major de style romano byzantin aux pierres alternant le vert et le blanc.
Au fort Saint Jean des maquettes anciennes concernant le cirque ou des marionnettes nous reposent d’autres expositions plus roboratives.
Jusqu’à début janvier dans le musée de société ,« bâtiment de pierre, d’eau et de vent », une exposition particulièrement d’actualité s’intitule « Au bazar du genre » et brasse les notions de masculin et de féminin.
Il est question de régulation des naissances, de maternité, de virginité, de séduction, d’égalité homme / femme, des droits des homosexuels, et  de ceux qui jouent de leur genre.
Des objets rituels sont présentés où une écharpe d’enterrement de vie de jeune fille en Angleterre côtoie une serviette d’apparat syrienne brodée à nouer autour de la poignée du sabre du marié.
Des installations d’artistes, des témoignages, des affiches rappellent ces luttes sempiternelles pour l’égalité, la liberté. Agréablement présentées, elles n’apportent pas d’éléments vraiment inédits à ceux et celles qui ont vécu ou se sont bagarré pour des évolutions de la société française.
Mais  bien des victoires remportées se situent plutôt dans le passé alors que dans une vidéo une femme ne cesse d’enlever les tissus qui lui masquent le visage : nous pouvons être perplexes.
Dans la galerie de la Méditerranée, semi permanente, nous suivons 2000 ans d’évolution de l’agriculture avec beaucoup de pièces provenant du musée des arts et traditions populaires de Paris : blé, eau et troupeaux. Je n’avais pas vu qu’il était aussi question de l’invention des dieux.
Nous passons ensuite à Jérusalem la ville trois fois sainte avec son Mur, sa mosquée Al Aqsa son église du Saint Sépulcre, puis derrière une guillotine et une vidéo où la liberté de Delacroix finit mal, un parcours est consacré à la citoyenneté et un autre aux découvertes des routes maritimes.

mercredi 30 octobre 2013

Ethiopie J 8. Turmi. Omorate.

Depuis la tente, la nuit retentit de chants d’insectes, d’oiseaux nocturnes, des colobes (singes) et d’autres animaux inidentifiables. La couverture a été inutile. A 7 heures une douche fraîche nous revigore avant le petit déjeuner.
Départ pour Omorate en 4X4.  Girmay notre guide raconte l’histoire de sangliers dans le Royan dont un agriculteur croyait s’être protégé en clôturant son champ alors que ceux-ci ont pénétré dans les maïs, mais par contre n’ont  plus pu en ressortir.
La piste traverse la brousse presque désertique d‘où s’aperçoivent quelques singes, pintades ou dick dick, la plus petite des antilopes.
Après la vérification des passeports à un check point nous nous nous approchons de la rive du fleuve Omo à Omorate où nous attendent 3 pirogues taillées dans des troncs d’arbre assez courbés. Un pont a été emporté avant d’entrer en service, le nouveau n’est pas encore fini.
Nous embarquons, accompagnés de jeunes nageurs qui nous aident à nous extirper des bateaux quand nous accédons au bord glissant et pentu.
De la partie ombragée au bord du fleuve nous allons vers le village Dassanech, encadrés par des enfants de différents âges, nous franchissons l’enceinte du village en branchages et épines. 
Quelle est charmante cette fillette portant un chevreau dans ses bras, mais plus loin six enfants portant des chevreaux dans leur bras nous attendent avec un comité d’accueil où certains arborent des coiffes fabriquées avec des capsules de bouteilles :
« Photo ! Photo ! »
Les cases recouvertes de tôle et de matières hétéroclites retenues par des cordes donnent une impression de misère. Pas un arbre, pas une herbe, du sable et un soleil accablant.
La palabre commence pour s’entendre sur le prix à payer pour les photos. On se met d’accord pour 100 birrs (4€).
Les femmes posent en ligne, certaines avec des calebasses sur la tête contenant une drôle de cuillère, d’autres avec des poteries, les vieilles à part, beaucoup semblent souffrir de maladie des yeux. Peu à peu elles se dispersent, les gamins découvrent leurs visages sur les écrans des appareils photo. A côté un feu brûle en permanence pour éloigner les mouches et en particulier la fameuse mouche Tsé tsé.
« Cela fait plus de six ans que la mouche tsé-tsé a disparu de Zanzibar. En conséquence, la production de lait a triplé et la production locale de bœuf a doublé. D'après l'Organisation mondiale de la santé, environ 60 millions de personnes sont menacées par la "maladie du sommeil" qui est au Congo, la principale cause de décès, devant le SIDA »
D’un coup une tornade balaye la poussière et fait fuir dans son sillage les femmes assises  qui façonnent des bijoux en perles ou des jeunes qui rasent une peau de chèvre. Le soi disant chef du village et un homme avec une kalachnikov, seuls hommes présents ici, sollicitent la photo et réclament quelques birrs.
Nous reprenons le chemin du retour, et déjeunons à l‘Hôtel du Tourisme de Tourmi de poulet frit, et  de french fries. Nous choisissons de rentrer à pied jusqu’au camping distant de 3 km. Le ciel menaçant se dégage. Bien sûr quelques birrs changent encore de main pour des photos.
Puis nous nous reposons au camping, où nous rejoint un strasbourgeois fier de voyager en « free » : le baroudeur est quelque peu fanfaron. Nous mangeons tôt car une soirée nous attend dans un village Hamar. Pendant le dîner nous nous précipitons vers le lit asséché de la rivière qui longe le camping car l’eau des pluies des montagnes arrive, progressant tel le Mascaret ou une coulée de lave.
A la nuit, nous prenons un jeune guide à l’hôtel du tourisme qui doit nous conduire au village des danseurs, pas facile à repérer dans la nuit noire. Cette danse de jeunes commence dans l’obscurité et nous la verrons mieux à la lumière des phares du 4X4 et d’un feu d’eucalyptus. Les hommes chantent en rythmant la voix par des claquements de mains. Filles et garçons se rapprochent en sautant, pubis en avant et leurs intentions sont sans équivoque. Avant le mariage, les filles excisées dès l’âge de 8 ans profitent d’une certaine liberté sexuelle qu’elles perdent avec le mariage. Lorsque deux éthiopiens se saluent, ils se serrent la main puis se cognent épaule droite contre épaule droite. Au retour nous profitons du groupe électrogène et écrivons sous l’ampoule. J’ai perdu mes lunettes.

mardi 29 octobre 2013

Bébé blues. Rick Kirkman, Jerry Scott.



J’ai emprunté à la bibliothèque le tome 6 d’une série qui en compte 19 dans l’édition française aux titres significatifs :
« Si je suis une mère au foyer, pourquoi suis-je toujours dans la voiture ? »
« Chut, Papa dort ! »…
celui là s’intitule : « Nous traversons une zone de turbulence parentale »
Bien que d’origine américaine et d’une date de parution remontant à 15 ans, la permanence des  émotions crées par les petits enfants autour d’eux est réjouissante surtout quand le sujet est traité avec tendresse et humour. 
Les jeunes parents débordés n’auront pas forcément le loisir de le lire mais les grands parents pourront se régaler, surtout qu’un léger parfum rétro persiste après la lecture.
Le dessin mis en tête de l’article m’a trop rappelé ma petite fille mettant ses pieds dans mes vastes chaussures et disant : 
« je suis vieux ! »
Tout est juste : le bain, l’inquiétude chez le pédiatre : « elle est trop tranquille », l’omniprésence de grands parents abusifs, les progrès scrutés chez les autres bébés, les assiettes renversées, l’impossibilité de  parler d’autre chose que des enfants, les nuits perturbées, les poussettes récalcitrantes, la voiture chargée…
-  C’est bien ma grande fille !
- On devrait utiliser des mots qui la mettront en confiance sans être condescendants.
- Comme quoi ?
- Eh bien, par exemple : « je suis heureux de tes efforts mais en aucune manière ne te pousserai à continuer si tu ne l’estimes pas nécessaire.
- Tu as encore parlé à ton ami avocat n’est ce pas ?
- Peut être.
- Ouiinn ! »