vendredi 26 décembre 2008
Vocabulaire. Faire classe # 14
Le vocabulaire, signe distinctif de classe, parcourt chaque matière, « transversal » en quelque sorte, comme n’oserait même plus le dire le moindre conseiller pédagogique.
C’est pour cela que jadis je n’organisais pas de séances spécifiques.
Et puis un ami, pilier de l’école moderne, qui tirait des pépites des apports enfantins, m’avait indiqué qu’il consacrait un temps à l’étude de la langue. Si lui aussi !
Alors pour dépasser l’aléatoire, j’ai réservé une plage dans l’emploi du temps pour étudier la formation des mots, mettre de l’ordre. Familles, préfixes, suffixes, contraires, homo et synonymes, les abréviations, les niveaux de langue, propre et figuré mais peu de sessions thématiques hormis celles sur les sports divers avant d’attaquer nos journées de ski.
Des séquences, pour que le dictionnaire ne soit pas un poids de plus dans les cartables mais un recours léger, s’appuyaient sur des stratégies ludiques comme des concours de vitesse.
Il semble extravagant le temps où les encyclopédies offraient un tremplin à toutes les rêveries d’un lecteur dans un centre culturel en Afrique qui pensait saisir tous les mystères du monde en lisant le Larousse comme un roman.
- Porte-vues pour la double page hebdomadaire.
- Recours aux dessins à exécuter dans la semaine et à faire deviner aux autres :
Quelle expression figurée se prend au pied de la lettre ?
Un petit haïku pour que deux homonymes et même plus si affinités se télescopent...
« … la rhétorique. Elle est restée presque jusqu’au bout, une énigme anguleuse et noire, comme son nom, revêche, cléricale, morte, que j’ai laissé à d’autres le soin d’éclaircir si cela, d’aventure, les amusait. » P. Bergounioux
jeudi 25 décembre 2008
Petit Coca Noël
Il fut un temps péremptoire où la politique était reine, aujourd’hui elle s'étiole dans la recension de petites phrases. Alors que Sarkos savait comme Gramsci que la lutte sur le plan culturel était déterminante : il a gagné. Avons-nous perdu de nous être tant goinfré d’ironie, de joyeuses démolitions, laissant la place aux trafiquants de valeurs ?
Je reviens sur ces années bousculantes pas seulement pour compter en rond, mais parce qu’elles ont formé la matrice de nos pensées.
Quand j’entends aujourd’hui un chroniqueur de France Inter prétendre dépuceler les oreilles des enfants, en leur révélant pour la dixième fois que la père Noël est un produit Coca Cola, je me dis que les humoristes ne sont plus forcément du côté de l’anti-conformisme.
Je n’ai pas le sentiment de courir au secours du grand commerce en pensant que nous avons besoin des Noëls.
Nous avons besoin de croire, encore plus si nous sommes athées, à la lumière au cœur de l’hiver, comme les hommes l’ont fait bien avant le christianisme.
Dans nos sociétés digicodées, un bébé dans la paille, sans papier, est un beau symbole de croyance en la vie. Sous le souffle de l’âne réprouvé et de la bête de somme : la majesté de l’homme.
Je me défends d’être atteint par quelque tardive piqûre mystique et souris toujours à la remarque de Julos Beaucarne qui trouvait approprié l’encens offert par les rois mages pour masquer les odeurs d’étable. Mais je crois les mythes nécessaires à notre construction d’homme. Un enfant grandit lorsqu’il apprend que le père Noël n’existe pas, et quand il y a cru de toute son âme, c’est encore meilleur.
mercredi 24 décembre 2008
« Les artistes du bord des routes »
C’était le titre d’un livre que l’on m’avait offert concernant ceux qui transforment leur pavillon en palais fantastique avec une conviction qui entre dans la catégorie « durable ». Tels le facteur Cheval, pierre après pierre, tesson après tesson, ils offrent aux passants leur créativité.
C’est parfois « too mutch », mais il ne viendrait à l’idée de personne de qualifier ainsi « le Palais Idéal » d’ Hauterives, monument historique.
A Noël fleurissent - pour reprendre le jargon art moderne - les « ready made » autour de la thématique dévolue aux confiseurs sans trêve.
Oui il y a le barnum commercial, et je maugrée en constatant le maintien des décorations de décembre en plein mois d’août. En outre, il me semble bien abusif, voire nocif pédagogiquement et écologiquement que les communes illuminent leurs rues trop longtemps à l’avance.
A Carrefour dès le 20 décembre, des galettes pour les rois garnissaient les gondoles.
La magie tient certes plus à une bougie qu’à une guirlande clignotante mais la naïveté de ces installations est souvent émouvante. Ces initiatives me ravissent, leur geste est gratuit : ces balcons, ces jardinets illuminés ne sollicitent pas de subvention, ils sont tournés vers les autres.
Rare.
mardi 23 décembre 2008
Vacances ,
lundi 22 décembre 2008
L’apprenti.
Premier film de Samuel Collardey. Pour revenir à la campagne, je vais au cinéma. Oui, j’avais porté aux nues le dernier Depardon qui touchait au cœur d’un monde à sa fin, à la gravité du monde. Ici, c’est autre chose mais tout aussi juste : il est question de transmission, et elle est problématique. Dans cette chronique où il m’est impossible de séparer la fiction du documentaire : je crois tout. J’ai été ému, effrayé, j’ai souri. Le jeune arrive à la ferme avec des responsabilités à assumer qui peuvent sembler démesurées car il est encore avec ses jouets d’enfants et tellement fragile, écorché. Le paysan, qui doit lui apprendre plus qu’un métier, est remarquable de vérité, de pédagogie. Dans cette ferme du Jura, il y a bien des signes de modernité, l’ordinateur, mais les cours sont toujours aussi boueuses, la naissance d’un veau toujours aussi émouvante, le cochon a beau être pendu pour sa mort à la fourche hydraulique du tracteur mais c’est sa graisse qui sert à traiter les mammites. Les paysages sont beaux, la vie violente : les beuveries, les scènes avec le père et la mère séparés, mais aussi tendre : une partie de luge, un au revoir tout en pudeur.
dimanche 21 décembre 2008
La flûte enchantée
C’est bien le même spectacle de Comédiens & Compagnie qui est joué au théâtre des Mathurins à Paris et celui que nous avions vu à Avignon au théâtre du Bélier.
Le « Canard enchaîné » sous titre cette semaine : « déjantée ». C’est ça.
Dans la chaleur et l’excitation du off, sa magie, j’avais noté : la légèreté de Mozart convient bien aux diablotins de cette Comédia del arte. Des tréteaux comme à l’aube du théâtre, du talent, de l’invention, du rythme, des clins d’œil, de la virtuosité aussi bien chez les musiciens qu’avec les acrobates. Nous sommes enchantés et ce n’est pas du pipeau. De la fraîcheur, de la jeunesse : pour tous !
samedi 20 décembre 2008
« Le niveau baisse »
Pour m’attarder dans le registre des idées simplistes sensées justifier les réformes dans l’éducation nationale, je retourne volontiers cette évaluation sommaire contre Xavier Darcos.
Mais la riposte à la mise à bas de l’école n’est guère plus brillante, pour l’instant.
Entre deux entretiens avec le camelot de l’Elysée, Jack Lang est le seul au P.S. à être promu par les médias au sujet de l’école; c’est qu’il est bien usé.
Les lycéens ont gagné, provisoirement, poussés par des motifs d’inquiétude qui dépassaient le sujet de la classe de seconde, seul thème d’ailleurs où il y avait une amorce de discussion.
Contre l’hécatombe des postes, faut-il sortir les cagoules ? Quelques militants qui n’ont pas fini de pleurer leurs années CRS, humeraient volontiers encore le parfum de quelques lacrymos. Mais depuis qu’ils crient « Au loup ! Au loup ! » à chaque printemps quand ils croisent le moindre caniche, ils ne sont plus entendus, alors que la situation est grave.
Le contexte est délétère, les chefs et petits chefs pesants, les médias aux ordres, mais je ne peux croire que des collègues aient eu peur de se rendre à des réunions ou de distribuer des tracts. Afficher sa couardise serait ainsi moins indigne que d’exprimer son désaccord avec des critiques adressées au gouvernement. Dans leur obéissance, qu’ils relisent alors la lettre de Guy Mocquet pour leur propre compte. Le niveau de courage baisse.
Si c’est le cas, il ne sera même plus utile à l’état de mettre en place des Etablissements Publics d’Enseignement Primaire(EPEP) pour assurer un quadrillage hiérarchique de la profession : elle serait déjà aux ordres.
Dans les mesures prises il y a bien évidemment, comme dans le domaine de la justice, de la sécurité, de l’emploi, des annonces d’un jour.
Mais aussi l’aboutissement de longs processus qui ont leur cohérence funeste.
Les personnels chargés de l’aide aux enfants en difficulté n’ont plus, depuis des années, de postes qui leur sont proposés aux concours : maintenant ça se voit, et il est tard. C’était dans les tuyaux.La régression des taux de scolarisation des tout-petits en maternelle préparait l’arrivée des « jardins d’éveil ».
L’affaire des couches-culottes nous a choquée, mais elle entre avec grossièreté dans une stratégie visant à déprécier les enseignants aux yeux des parents, à diviser les personnels.
Prime pour ceux qui sont en place -logique du paquet fiscal- et personnels précaires pour assurer les remplacements, et vous m’en virez un max !
Dans une école, des maîtres responsables des CE1 et CM2 envisagent d’utiliser la prime qui leur est promise pour acheter des livres aux élèves. Sont-ils ringards à s’opposer au chacun pour soi ! Refuser la division de la profession, ce doit être ça la culture instit’ !
Comme d’hab’ la grosse stratégie de com’ parle d’aide aux enfants quand les postes des personnels spécialisés sont fermés.
Les enseignants sont amenés à poser des pansements sur les blessures générées par un nouveau rythme d’enseignement qui lèse les plus fragiles.
Mais pour le samedi matin supprimé, je n’ai pas vu de tracts pour réclamer son rétablissement : la glissade était amorcée depuis un moment.Sur une scolarité, ce sera l’équivalent de six mois d’apprentissage en moins. L’école, une activité entre deux week end.
La suppression des IUFM ne mobilise guère, leur mépris à l’égard des praticiens de terrain n’a pas été oublié ; ils seront remplacés par l’Université à l’efficience bien connue !
Une révision des programmes était nécessaire, les cycles ne s’étaient pas imposés et une meilleure structuration du français n’était pas inutile pour ceux qui l’auraient abandonnée.
Les programmes sont plus ambitieux avec des horaires amoindris !
Des remèdes pires que le mal, des élèves promis à la fatigue, des personnels découragés ou qui doutent, des parents inquiets.
L’érosion des mots de « solidarité », d’ « émancipation » parmi les agents même de leur promotion a préparé ces désertions, cette atonie. Le moral est à la baisse.
Le pouvoir, ses scribes et ses sbires, ne doit pas se réjouir trop vite d’avoir comme assommé ses enseignants. Ils seront en tous cas un peu plus imperméables aux roucoulades mécaniques concernant leur mission sacrée entre une génuflexion, une perquisition et une intimidation. Le Wall de Street s’effrite après le mur de Berlin qui tomba ; et si le mammouth sortait allègrement de sa glace ?
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