jeudi 11 décembre 2025

Ostende

Il est 15h lorsque nous sortons de table (sans café vu l’heure..). Pourquoi ne pas aller à OSTENDE que nous avons dédaigné sur l’autoroute, et qui nécessite un petit retour en arrière par rapport au voyage de ce matin ? C’est maintenant ou jamais.Nous roulons peu de kilomètres pour atteindre la cité balnéaire.
Mais une fois parvenus dans la ville nous devons résoudre l’énigme des parkings payants car nous ne voyons pas de machines à parcmètre, de plus, toute information est notée en flamand.
Une jolie employée de l’Office du tourisme dégourdie nous dépanne en nous aidant à télécharger l’application 4411 pour payer les parkings valable dans toute la Belgique, ce qui prend un certain temps et me reste encore bien obscur.
C’est en toute tranquillité  que nous amorçons le circuit touristique délivré sur un plan écrit en gros caractères.
Il nous entraine en premier sur le bord de mer.
Des vacanciers plus nombreux qu’à Malo arpentent une large promenade aménagée (Albert 1erpromenade) où circulent en parfaite entente piétons, chevaux à pédales et cuistax (voiturette à pédales conçues pour plusieurs personnes). 
https://blog-de-guy.blogspot.com/2025/12/malo-les-bains.html
Les façades d’immeubles face à la mer offrent moins d’intérêt que celles de la station française.
Ils cèdent de l’espace à une statue colossale de Léopold II et à une galerie vénitienne  couverte.
Nous remontons le mail dans l’autre sens. Au sol des plaques recouvertes de noms se détachent  faisant  référence à un festival cinématographique.
Côté mer, des cabines blanches et sans motif, collées contre la promenade,  n’obstruent pas la vue sur une grande plage de sable.
Nous retrouvons les mêmes couleurs de jade et d’huitre sur la mer que  ce matin, réagissant aux rayons et à l’humeur du soleil.
Nous nous rapprochons du casino monumental mais pas très beau,
puis des grosses structures rouges « Rock strangers » créées par Anne Quinze.
Ses sculptures ressemblent à de gigantesques  briques de lait froissées, réveillant la Zeeheldenplein de leur rouge intense et éclatant
non loin du monument aux marins uniformément gris érigé dans les années 50 face à la mer. Le parcours longe ensuite les docks jusqu’au Vistrap (« escalier aux poissons »), il s’y vend encore à cette heure les restes des dernières pêches.
Là, placardé sur un mur,  un avertissement menace d’une amende de 250 € ceux qui donneraient à manger (des frites !) aux goélands: protection des oiseaux ou lutte contre leur prolifération ?
Plus loin, nous assistons au passage des écluses par deux voiliers, et en continuant, arrivons à l’emplacement de « l’Amandine ».  Nous apprenons qu’il s’agit de l’ancien et dernier bateau des pêcheurs d’Islande à avoir affronté les caprices de l’océan Arctique : à le voir,  il parait bien fragile pour ces si grands voyages !
Nous bifurquons, nous éloignant du bord de l’eau vers l’église néogothique Saint Petrus et Paulusplein  inspiré du dôme de Cologne et d’une église de Vienne.
Elle forme un ensemble homogène avec le clocher Saint-pierre ci-derrière dit « Peperbusse » c’est-à-dire le poivrier, constituant  le seul vestige d’une ancienne église détruite par le feu au siècle  dernier.
Quelques pas de plus et, changement d’ambiance, nous voilà sur la très commerçante Kappelstraat : les magasins  affichant souvent les mêmes enseignes qu’en France ont la réputation  d’ouvrir tous les jours, dimanches compris, ils contribuent à rendre la ville d’Ostende attractive.
Nous tournons à la Wittenonnenstraat caractérisée par une statue représentant trois nonnes mais l’alternance soleil nuages a cédé la place à une petite bruine anglaise, nous poussant à presser le pas jusqu’à la voiture.
De toutes façons, nous ne pensions pas conclure par la James Ensor gallerij et ses boutiques ni visiter le musée consacré au peintre Ensor (James Ensorhuis).
Nous rentrons à Aalter, avec arrêt au supermarché Delhaize ouvert jusqu’à 20 h. Il propose un choix important et varié de nourritures  pour ceux comme nous qui ne souhaitent pas cuisiner en revenant chez eux… Selon les conseils de la maman de notre logeuse, nous déposons Gédéon au parking gratuit de la gare, tellement pratique, car en quelques pas grâce au passage souterrain nous parvenons à notre très sweet home tout confort. Une soirée tranquille nous attend ; dehors, les entrées maritimes sont  passées, un ciel sans nuage les remplace.
Ferré: 
"On voyait les chevaux d'la merQui fonçaient, la têt'la première
Et qui fracassaient leur crinièreDevant le casino désert...
[...] 
Ni gris, ni vertsNi gris, ni vertsComme à OstendeEt comm'partoutQuand sur la villeTombe la pluieEt qu'on s'demandeSi c'est utileEt puis surtoutSi ça vaut l'coupSi ça vaut l'coupD'vivre sa vie !..."

mercredi 10 décembre 2025

Architecture des lieux d’enseignement. Benoît Dusart.

Pour ouvrir la conférence devant les Amis du musée de Grenoble, l’internat du « Lycée Huizhen de Ningbo, Chine » ( Bâtiment mondial de l’année 2023), extraverti et transparent est présenté comme une « forêt flottante », avec des salles de classe comme des cabanes reliées par des sentiers sinueux. 
Les premières expériences de l’espace en société pour les enfants se jouent dans des projets architecturaux nouveaux ou portant la mémoire d’ambitions anciennes. La protection de l'enceinte scolaire doit permettre des relations sereines entre les élèves et la communauté éducative sans se couper de l'environnement de l'institution.  
Alors que les édifices de la III° république apparaissent aujourd’hui comme des casernes « Lycée Champollion » (1887),
Jules Ferry déclarait : 
« Autrefois, l'école était une prison ; aujourd'hui l'on rêverait d'en faire un jardin. 
On y a fait pénétrer à longs flots le grand air et la grande lumière ; 
on cherche à en rendre les murailles instructives et souriantes. »
« Le lycée Pasteur De Neuilly »
(1912) au caractère solennel,
 dans le style Renaissance, en béton, reprenant les codes des lieux de pouvoir (campanile, balcon) n’a pas forcément étouffé la fantaisie des membres du « Splendid » qui en furent les élèves. 
https://blog-de-guy.blogspot.com/2025/11/larchitecture-au-service-du-pouvoir.html 
« L’école de plein air de Suresnes »
construite au lendemain de la première guerre mondiale était destinée aux enfants tuberculeux.
« Le lycée Karl Marx à Villejuif »
(1933) avec gymnase et stade mutualisés, bien que rénové, connait en ces temps chauds des problèmes d’isolation.
Récemment restructuré sous une façade aux placages en terre cuite, le «  Lycée Bertholet  à Annecy » date de 1885, peu après le rattachement de La Savoie à la France (1880).
Les établissements des années 60 sont plus faciles à rénover comme le « Collège Marcel Cuynat à Monestier de Clermont » que les plus récents aux structures moins modulables.
De type « Pailleron » du nom du collège incendié volontairement occasionnant la mort de 20 personnes en 1973, « Le collège  Anselme Mathieu à Avignon »  a été élégamment réhabilité.
A Dôle, le « Collège
Maryse Bastié » bénéficie à présent d’une bonne isolation utilisant les ressources locales aux couleurs jurassiennes.
L’atrium lieu de sociabilité devient banal.
L’atypique « groupe scolaire les Plants à Cergy » des années 70 en aire ouverte s’est assagi. 
L’école des Broussailles à Cannes désormais
 « École communale Jacqueline de Romilly » en travertin marque la solennité des lieux tout en préservant la sûreté.
Une même monumentalité est manifeste avec le « Lycée Marc Bloch de Sérignan »  au béton matricé de « sagnes » (roseaux camarguais) où des ganivelles connues comme palissades protègent du soleil. 
« L’école Voltaire à Châtenay-Malabry »
a récupéré les gravats de l’Ecole centrale démolie.
A Rosny-sous-bois, la paille a été utilisée avec des ossatures bois à l’ « Ecole des Boutours ». 
Sur le modèle des bâgdirs iraniens, des échangeurs géothermiques air-sol assurent une ventilation bienvenue en temps de canicule.
https://blog-de-guy.blogspot.com/2014/10/iran-2014-j4-yazd-au-matin.htm
La désigneuse néerlandaise Rosan Bosch qui a participé à de nombreux projets d’architecture scolaire, a modélisé cinq espaces illustrant diverses situations d’enseignement : le feu de camp comme lieu de débat, le forum pour les exposés, le point d’eau pour les interactions, le laboratoire pour s’exprimer librement, le nid ou la grotte pour la concentration personnelle…
 
« Académie occidentale de Pékin ».
Des maisonnettes composent une
« Crèche à Copenhague ».
Le nouveau bâtiment de l' « Université Bocconi à Milan » 
aux espaces suspendus se relie à la ville.
Conçue par le même cabinet d’architectes irlandais, l’ « Ecole de commerce de Toulouse » est considérée comme un hommage au patrimoine de « la ville rose ».
L’ « Université de technologie et d'ingénierie de Lima », construite à la verticale
invente des circulations comme Piranese en imagina.
L’« École allemande de Madrid » équipée de systèmes géothermiques, photovoltaïques et de pompes à chaleur de pointe pour assurer une efficacité énergétique maximale cite le Bauhaus mélant ainsi passé et présent.

mardi 9 décembre 2025

Le repos du guerrier. Zidrou & Jordi Lafebre.

Le numéro quatre de la série «  Les beaux étés » nous régale comme les albums précédents, où nous avions appris à connaître chaque membre d’une famille belge en vacances. Même si les quatre enfants, maman et papa dessinateur de BD risquent d’apparaître seulement comme silhouettes si on commence par cet album.
L’originalité de ces 50 pages nous ravit par ses histoires positives, où les désagréments  se surmontent dans une bonne humeur communicative, elles ne courent pas les cases ni les bulles dans les productions de BD habituelles.
Sur un air enjoué de« Banana split », du temps de « The Wall », les bonnes formules abondent : 
« Si t'as pas tâté les pis de la vache, faut pas t'étonner si t'hérites d'un taureau! » 
Un supplément de croquis préparatoires permet de prolonger le plaisir des dessins expressifs, en accord avec la simplicité du propos, la douceur des sentiments, l’énergie des plus jeunes et la bienveillance des ainés. Les étés sont beaux.

lundi 8 décembre 2025

Vie privée. Rebecca Zlotowski.

Jodie Foster jouait à 13 ans dans « Taxi Driver », 50 ans après elle interprète une psychiatre en plein doute, « elle va de mal en psy » comme un commentateur l’écrit dans Allociné.
Nous passons un bon moment à nous perdre où ses questionnements la mènent à la suite de la mort d’une patiente. Ses investigations fantaisistes la conduisent à réviser des mots de clients en thérapie, vers une hypnothérapeute, dans les dédales de la mémoire juive, avec recours à son ex mari et  retour vers son fils auprès duquel elle finira par demander pardon car comme toutes les mères… 
Daniel Auteuil, Virginie Efira, Mathieu Amalric, Vincent Lacoste sont de la partie avec des réparties savoureuses. 
Mais nous aurons vite oublié les prétextes de leur rencontre, indifférents  à l'issue de l'enquête moins intéressante que les chemins pour y parvenir.

dimanche 7 décembre 2025

Cécile McLorin Salvant.

Nous avons entendu une chanteuse au répertoire varié dont la voix permet des intonations étonnantes. Mais l’annonce d’ « expériences folles » parait exagérée à l’auditeur qui ne saura pas si la filiation revendiquée avec Sarah Vaughan pourrait être homologuée.
Je l’ai préférée dans ses chansons facétieuses aux accents caribéens, « il m’a vue nue », « mon doudou » et j’ai apprécié la reprise du poème « Est-ce ainsi que les hommes vivent » d’Aragon et Ferré.
Mon niveau en anglais étant à peine meilleur qu’en occitan, seule la sonorité des mots étirés parfois d’une façon artificielle a pu me parvenir servie par des musiciens dynamiques.
Une rencontre agréable avec la franco-américaine à la voix plus élégante que le costume qu’elle portrait ce soir à la MC2. Bien que des publicitaires trop facilement flatteurs mettent trop haute la barre des attentes, son professionnalisme a permis d’apprécier la variété des chansons proposées.

samedi 6 décembre 2025

Comme un empire dans un empire. Alice Zeniter.

Encore un titre qui ne dit pas grand-chose ou trop, bien que les 445 pages qui suivent s’avèrent copieuses, comme pour illustrer l’ambition de Robert Capa à propos duquel un des deux personnages principaux essaye, en vain, d’écrire un livre. 
« Si la photo n'est pas bonne, c'est que tu n'es pas assez près ». 
Les paysages familiers se succèdent : ZAD, « Nuits debout », « Gilets jaunes ». 
«  ça ne ressemblait à rien, les signes qu’ils s’étaient choisis, les gilets jaunes, les ronds points c‘était épars, c’était moche et ça ne voulait rien dire à part ça, exactement ça : l’absence de forme. »
Dans le foisonnement des réflexions, parfois non-conformes, autour de l’engagement en politique, un dispositif narratif élémentaire met en scène avec une certaine finesse psychologique :
- l’un en « dehors », Antoine, assistant d’un député socialiste. 
« Et maintenant... nous régnons sur des miettes et elles continuent pourtant à exploser.
Quatre socialistes, six opinions, n'est-ce pas ? »
« Je ne participerai pas à la ronde de grimaces dans laquelle s'engagent les élus qui veulent prétendre qu'ils ne sont pas hors-sol. Je suis hors-sol. »
 - et L, hackeuse, au « dedans » vivant parmi les « haters », les « backstallers », les « concerned », les « griefers », les « crybabies », les religieux, les pervers, les « grammar nazis », les « shitposters »...
« Des adolescents qui savaient qu’ils n’avaient aucune chance de devenir quoi que ce soit dans la viandosphère, mais qui, sur Internet, regagnaient un pouvoir dont ils étaient privés. »
En ces temps paranoïaques, les deux dépressifs finissent par se croiser.
Parfaitement documentée, l’écriture appliquée, m’a semblé parfois laborieuse, assez loin, à mon avis, de la découverte heureuse que fut « L’art de perdre » 

vendredi 5 décembre 2025

A bord de nuit. Marie Claude Durand Paire.

Sous un titre poétique signifiant « à la tombée de la nuit », « la » Marie Claude, a recueilli des expressions dauphinoises depuis son village de Chélieu, à côté de Virieu, auquel elle est restée fidèle.
Elle remercie celles qui : 
« Toutes trempes après la radée, se réchauffaient les mains dans leur pichaule. » 
Voilà de quoi enrichir le lexique de quelques mots inédits pour moi : 
Un tâque : une vraie « peau de vache », un trumeau.
Une ratapène : une chauve-souris, une personne fluette.
Un muet : tas de bois.
Marliaque : neige fondue, plat raté, équivalent de la patiauque …
Les variantes pour désigner les pas très dégourdis ne manquent pas : niarin, nioque rien qu’à la lettre « N ».
Les instruments de travail ont gardé longtemps leur noms spécifiques :
bariot (petite charrette) ,
benatte (récipient),
biguard (fourche recourbée),
le carbot (étui pour mettre la pierre à aiguiser le daillon (La faux),
un goui (serpe).  
Les glissements de genre sont fréquents : un vipère, une ongle, une lièvre, un dinde, de beaux affaires, un dragée, …avec parfois l’extension du domaine du pluriel : les autrefois.
Je révise la surprise : « Ben des fois ! »
la lassitude : « ça me fait flique »
la discrétion: « ça sera pas de connaître », « elle veut pas que ce soit le dit ».
Les sonorités appellent  souvent le sens : « débarouler », «  chounier », « empiager », « gabouiller ».
Je n’aurai pas orthographié boï mais plutôt boye pour une génisse, et quelques accents peuvent aussi être sujets à discussion : des lapés et non des lapès pour ces maudits rumex si difficiles à déraciner.
« La Mino » du Pin, une « payse », a joliment illustré ces 50 pages éditées à compte d’auteur.