mercredi 19 octobre 2016

Equateur J 4. (suite) Cotacachi.

Cotacachi la ville du cuir, au caractère sud américain est coquette et bien entretenue, elle semble prospère.
Pour l’après-midi nous avons au programme la lagune Cuicocha (3246m) : « le lac des cochons d’Inde ».
Nous marchons sur le chemin « Los ancestros » », nommé aussi « chemin des orchidées » dont malheureusement beaucoup sont en fin de floraison.
Mais nous voyons d’autres plantes inconnues.
Le sentier surplombe le lac de cratère du Cotacachi, volcan « endormi » mais pas « éteint ».
Quelques moustiques nous attaquent lors de la petite randonnée et la pluie s’invite sans trop d’ardeur.
Nous ne poursuivons pas le sentier jusqu’au bout et rebroussons chemin pour prendre un petit bateau à moteur.
Vêtus de gilet de sauvetage pour une simple promenade autour des îles jumelles interdites d’accès Teodoro Wolf et Yerovi, nous approchons les foulques et les aigrettes.


Au retour nous avons droit à un vin chaud que nous apprécions, profitant du soleil revenu avant que les gouttes de pluie nous poussent à regagner le mini bus direction Santa Barbara dans nos familles.
Nous rentrons à pied et arrivons en pleine fête, Ernesto nous accueille chaleureusement avec de la bière et nous présente une partie des invités. Des enfants jouent dans la cour et Karen téléphone. Je m’éclipse pour écrire mon journal. Guy se mêle à l’assemblée, invité à danser la lambada puis à aller chercher les bêtes.
A la nuit tombée, une bonne partie des invités s’est retirée et nous prenons place autour de la table : Digna Maria, Ernesto, Huaïta la deuxième fille de la famille qui parle bien l’anglais et dont on comprend bien l’espagnol, un jeune cousin timide sans natte, et nous deux. Le menu se compose d’une soupe aux pinces de langoustine dans laquelle on trempe des beignets de bananes, du pop corn accompagné de jus de citron vert, d’un plat de riz agrémenté de haricots verts et d’une variété de petites  pommes de terre à la saveur particulière et de l’avocat. Nous avons droit à une part du gâteau d’anniversaire offert aux invités dans la journée. Ernesto s’endort, ce qui nous offre l’occasion de prendre congé. Guy estourbit une araignée replète dans la salle de bains.

mardi 18 octobre 2016

L’homme qui tua Lucky Luke. Matthieu Bonhomme.

Les héros de BD ne meurent jamais.
L’auteur ne manque pas de finesse pour rendre hommage, sans ironie, à l’original cow-boy qui arrive à ses 70 ans. Une atmosphère plus sombre s’installe qui conserve cependant la désinvolture et l’humour du juste justicier.
« Ouaip ! »
La nuit est là et les rues sont boueuses, LL doit changer de flingue mais ni de fringues, ni de cible : les ignobles sont pourtant excusés de leur méchanceté par des enfances difficiles.
On apprend pourquoi désormais il porte une herbe à la bouche, et que sa main a pu trembler, un peu, une fois, et son cœur, peut être.
Le trait est vigoureux, les cadrages efficaces, le scénario original est fidèle aux fondamentaux avec des clins d’œil qui vont ravir les nombreux adeptes du flegmatique solitaire.

lundi 17 octobre 2016

Voyage à travers le cinéma français. Bertrand Tavernier.

Trois heures de plaisir ne pourront remplacer tous les films que nous n’avons pas vus, ni épuiser la liste de ceux que nous aurions à revoir.
Le pédagogue chaleureux met en valeur ses confrères : du chef opérateur au compositeur de musique. 
Il finit de me guérir de mes conformismes de jeunesse qui excluaient tant de plaisirs.
Il réconcilie Godard et Gabin, Sautet et Eddie Constantine.
Il reprend les mots de Gabin :
« Renoir, comme metteur en scène : un génie. Comme homme : une pute ». 
Il nous livre quelques informations intéressantes.
Quel aurait été le sort de « Pierrot le fou » si Aragon qui avait été hébergé par le père de Tavernier n’avait vu le film invité par le futur réalisateur de l’Horloger de Saint Paul, alors attaché de presse, et n’en avait livré quatre pages très favorables dans Les lettres françaises ?
Trois heures trop courtes.

dimanche 16 octobre 2016

Tordre. Rachid Ouramdane.

Quand le programme annonce :
« Rachid Ouramdane sonde l’endroit ténu où le mouvement oscille entre poétique et thérapeutique » : faut voir.
C’est toute la difficulté de partager qui se mesure au moment d’écrire à propos de ce spectacle dans la salle René Rizzardo en l’honneur d’un adjoint à la culture de la ville de Grenoble quand il y avait une ambition dans ce domaine. Cette salle de la MC 2, plus petite avec ses gradins, se prête mieux pour moi, aux émotions que la plus grande.
Cette heure pour deux danseuses s’ouvre par des musiques genre Broadway qui s’enrayent et se clôt par des danses enjouées mais furtives du même genre.
Entre temps la rondelette lituanienne nous hypnotise par ses tourbillons interminables où sous les projecteurs ses bras forment un cercle parfait comme un cerceau qui n’en finirait pas de s’enrouler autour d’un plot.
Et l’anglaise avec sa prothèse de bras nous brasse en solo et en duo, nous tord.
Nous avons entendu aussi la voix de Nina Simone. 
J’avais bien aimé les grands ensembles du chorégraphe
Cette fois Lora Juodkaite et  Annie Hanauer sont seules, et vont au bout d’elles mêmes, se croisent, se soutiennent un peu.
Si les références aux derviches tourneurs
vont de soi, au-delà,  nous approchons, sans violence mais avec intensité, l’intimité  de ses deux artistes pour qui la danse est un constituant vital.
La distance des intentions et des actes a été résolue. 

samedi 15 octobre 2016

Paroles d’ex. L’Equipe.

Au moment où je résilie mon abonnement Canal + dont je ne profitais plus guère avec des matchs du dimanche soir de peu de saveur, je viens de me plonger avec délices dans les 40 pages hors série de l’Equipe qui donne la parole à quelques acteurs passés de la Ligue 1.  
En première page, figure celui qui fut un produit d’appel pour moi : Raymond Kopa, sa raie sur le côté et quelques phalanges en moins du temps où il était galibot, et où j’étais enfant.
Les  témoignages d’actuels consultants sont nombreux : Dugarry, Paga, Bravo…
quelques illustres pas forcément pour leur talent : Domenech,
et des sans grade : Thomas, Sicora, Meyrieu, Boli le frère de Baz, Genghini…
Hiard  le gardien de Rennes raconte comment il ressembla à un Picasso après être sorti dans les pieds d’un attaquant : quatre dents en moins et une pommette à refaire.
Pardo vit avec un cœur transplanté et si Giully donne dans l’événementiel haut de gamme, Bibard est heureux de s’occuper d’amateurs.
Des joueurs magiques du FC Nantes ont la parole : Loko, Pedros,
des hauts en couleurs : Govou, Porato, Alonzo
et des sages : Eric Roy, Vincent Guérin , Pascal Despeyroux.
Beaucoup regrettent la domination sans suspens du PSG, tout en reconnaissant la valeur d’un Veratti.  Si tous ont admiré Platini, bien de ceux qui ont croisé Carlos Moser l’ont trouvé le plus rude et Ivic l’entraîneur le plus énigmatique
Quelques anecdotes sont savoureuses : l’arbitre Michel Vautrot écrivant dans son rapport
«  La commission de discipline tranchera » après que Gilbert Gress, lui eut dit :
«  S’il y a hors–jeu là, je me les coupe. »

vendredi 14 octobre 2016

Promesses monstres !

Quoi que disent les politiques, quoi qu’ils fassent : ces « inaudibles » n’« impriment pas ».
Des cohortes de communicants ne masquent plus rien, ils pédalent dans la vase, les rois sont nus. Et j’attendrai un peu pour prendre connaissance dans le texte des paroles de notre si peu chef de l’état qui plonge semble-t-il les commentateurs dans la consternation.
Et pendant ce temps la kermesse aux promesses continue à battre son plein, comme si  de rien n’était, comme si les programmes avaient été respectés par Hollande et sa finance ou Piolle et sa co-construction quand l’une n’est plus son ennemie et que l’autre gît dans la confusion.
Bien sûr tout le monde pleure sur le discrédit des politiques et loue la maturité des citoyens : voilà qui plaiderait pour que les engagements soient plus raisonnables afin d’être tenus. Mais que déni !
Si bien que l’électeur gavé de sucreries préélectorales va aller vers ceux qui lui promettent augmentation du temps de travail et baisse de la qualité des services publics. Cela devrait convenir à de noires humeurs qui identifient parait-il, le français.
Les médias fustigent les lobbies et appellent tous les quatre matins à des déclarations fracassantes et sommaires, à des serments d’un jour, à des annonces impensées.
Nous avons les médias et les politiques que nous méritons, guère plus vertueux, toujours collés à nos écrans voués par ailleurs à des gémonies bipolaires ; nous varions au gré des vents ou restons calfeutrés dans quelque cabane rétro, loin du monde.
Le moindre des problèmes n’est pas que le débat se polarise à droite, il s’agirait de discerner ce qui l’a permis. Des stratèges d’extrême droite ont lu dit-on Gramsci. Jouissent-ils de cette prophétie ?
« Le vieux Monde se meurt, le nouveau tarde à apparaître et dans le clair-obscur surgissent les monstres. »
Ils ont repéré dans les écrits du prisonnier communiste le rôle de la culture pour la conquête du pouvoir. Tous leurs espoirs sont permis, et ce ne sont pas seulement les succès de librairie de Sarko qui peuvent nous mettre Martel en tête. Les renoncements à transmettre à l’œuvre dans l’école, les anathèmes des artistes rigolos, et le mépris des belles âmes ont préparé «  la défaite de la pensée ».  
Nous en sommes à nous apercevoir que le « droit dans ses bottes » serait de droite: magnanime avec les riches et impitoyable avec les pauvres.
Quelle clairvoyance au bout de décennies d’Obsorama dans un Monde Inter en pleine Libération !
Je réserve mes indignations envers ce qu’il était coutume de considérer comme la gauche.  
La droite, qui sait, elle, qui elle est, dans la surenchère des trahisons de valeurs chrétiennes qu’elle ne cesse d’autant plus d’invoquer, me ravit quand elle persiste dans la malhonnêteté la plus éclatante (Balkany) et dans l’égoïsme le plus sec (réfugiés).
Nous étions, depuis l’autre bord, si forts dans les enterrements ou les défaites, Overney, Rocard,  mais cette fois la gaudiche se défait avant la défaite annoncée, dans un étalage des ego sans émois.
Plus elle s’efface, plus elle crie, plus elle se montre impuissante, plus la violence devient un mode d’expression trop vite pardonné. La métaphore des « couteaux tirés » n’est plus de mise : les impacts contre une permanence du PS à Grenoble provenaient d’un fusil !
Les fondamentaux sont passés à l’as : le consentement à l’impôt qui était l’acte de base de la fraternité tout en constituant un outil imparfait visant à l’égalité est devenu ringard, n’est ce pas Duflot !
Alors comme c’est nouveau,  « le revenu universel » fait le buzz : un petit tour et puis comme pour le « care » on n’aura plus qu’à se le carrer…
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le dessin de la semaine de Pessin sur le site de Slate:

jeudi 13 octobre 2016

Magritte. « La duplicité des images ».

Christian Loubet devant les amis du musée de Grenoble a préféré cette formule plus ambivalente au titre de l’exposition se tenant  en ce moment au centre Pompidou :
« La trahison des images », pour mieux signifier qu’un train peut en cacher un autre.
« Le maître d’école » préside la soirée consacrée au peintre qui vécut de la publicité mais se voyait avant tout comme un penseur en images, correspondant d’ailleurs un moment avec Foucault. Picasso n’étant pour le Belge qu’un « artiste peintre ».
René Magritte vient à la suite de son compatriote, Ensor, le symboliste à l’humour sarcastique, timide jeune homme qui s’affirmait en « rejetant des avatars de lui-même pour contourner les obstacles ». Son « Entrée du Christ à Bruxelles » représente l’artiste célébré mais incompris au milieu d’une foule de masques et de morts, de fantoches.
Alors que la manière la plus connue de Magritte se retrouve dans l’hyper réalisme et pas seulement chez les surréalistes qu’il trouva tristes, il va traverser une période « vache » (1948) proche du « bad painting ». « Le Stropia » est une parodie d’Ensor.
Il a été bouleversé par la peinture métaphysique de De Chirico pour qui  « l'objet familier et banal devient énigmatique » « silence et ombres inquiétantes s'installent dans des espaces immobiles ». De son « Chant d’amour », il retient une ligne claire qui cherche du côté énigmatique de la vie.
« Mes yeux ont vu la pensée pour la première fois »
Les éléments contradictoires de « L’homme du large », robotique, hésitant entre deux mondes à l’atmosphère sombre, inquiètent.
Il n’a pas toujours été aussi noir : pour se distraire de l’oppression en temps de guerre, il emprunte les couleurs des impressionnistes. Ainsi « Le premier jour »  pour illustrer cette période  de « plein soleil » qui ne fut pas un plein succès.
En 1926, « Le Jockey perdu »  peut évoquer le rêve - ce dont il se défendait - et le rapproche des Surréalistes avec lesquels les rapports seront fluctuants. Il se fâchera avec Breton pas seulement parce que celui-ci avait demandé à Georgette, la femme de sa vie, d’enlever la croix qu’elle portait au cou, mais il récuse la psychologie dans l’art, l’automatisme, se garde de la spontanéité. Il séjournera pendant l’été 29 avec les Eluard à Cadaquès chez un Dali alors foudroyé d’amour par Gala.
Ils sont tous là : Aragon, Breton, Bunuel, Eluard, Tanguy, Ernst, Dali… entourant « Je ne vois pas la femme cachée dans la forêt » pour illustrer le dernier numéro de la revue surréaliste. Ils ont tous les yeux fermés ; c’est que la vérité vient de l’intérieur.
Dans « L’image parfaite » : l’important, c’est ce qu’on y met, rien n’est donné.
Delvaux, son épigone, qu’il traita de « pauvre couillon », se reconstruit dans un onirique royaume où règnent les femmes. Peut-on voir sa mère possessive, dans « Pygmalion » où la sculptrice arrête son geste pour garder sa créature ?
Si le pinceau semble arrêter le flux des images, en les condensant, le titre trouvé en groupe : « La philosophie dans le boudoir » évoque Sade et fournit un troisième degré ludique à la dualité présence/absence.
« La mémoire » : alors qu’il a toujours nié l’interprétation psychologique, quand on voit cette tête de marbre aux yeux clos devant une mer se perdant dans les nébulosités du ciel, comment ne pas évoquer sa mère suicidée, qu’il dut reconnaître à 14 ans, trois semaines après sa noyade ?
La poésie  guérit-elle du deuil ?
«  La grande guerre » cette élégante au visage obstrué de « forget me not » est-ce encore sa mère sur fond marin ?
Cette colombe géante s’intitulant « La grande famille » se découpe sur un ciel d’orage, elle restitue le beau temps. Lui ne croyait pas assez en la vie pour avoir un enfant.
La réalité prise au piège d’un faux miroir, les « réfléchit »  pourtant souvent avec humour.
Les signifiants sont déplacés par métaphore ou métonymie.
« Nous avons bu une excellente bouteille. Le contenant désigne le contenu »: merci Wiki.
La peinture de Magritte qui surmonte la mélancolie par l’ironie laisse la place à l’interprétation du spectateur : les enfants peuvent en parler.  
Dans «  La clef des songes » les mots trahissent, il y a malentendu,  mais il ne faut pas non plus se fier aux images :
cette fameuse pipe, « Ceci n’est pas une pipe », allez donc la bourrer ! 
 « La condition humaine » est un trompe l’œil qui cache ce qu’il prétend montrer.
Comme «  Les vacances de Hegel » ou la logique vacille.
« Le déjà vu s’effondre devant le visible et c’est du jamais vu » Bernard Noël