Qui peut s’intéresser à des histoires de poète à vers de
mirliton, précédé par son grand
nez, jouant au mousquetaire, roucoulant
sous un balcon?
Moi, passionnément et je n’étais pas le seul dans une salle
comme rarement debout, enthousiasmé, par une mise en scène novatrice mettant en
valeur la modernité de la pièce de 1897.
Je connaissais le sujet : le pouvoir des mots, le jeu
avec les apparences ; mais aussi, pas seulement à cause des défauts de ma
mémoire, j’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir des dimensions nouvelles.
« …. Dédier,
comme tous ils le font,
Des vers aux financiers ? Se changer en bouffon
Dans l'espoir vil de voir, aux lèvres d'un ministre,
Naître un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ?
Non, merci ! »
Des vers aux financiers ? Se changer en bouffon
Dans l'espoir vil de voir, aux lèvres d'un ministre,
Naître un sourire, enfin, qui ne soit pas sinistre ?
Non, merci ! »
Fraternel avec les cadets de Gascogne :
« De gloire leur
âme est ivrogne. »
Gourmand :
« Et fais tourner
au feu des strophes de rôtis ! »
Loufoque, arrivant de la lune :
« J’ai aux éperons, encor, quelque poils de planète ! »
Emouvant :
« Elle vient. Je
me sens déjà botté de marbre,
Ganté de
plomb ! »
Donnant à réfléchir :
« Ah je vous reconnais tous mes vieux
ennemis !
Le Mensonge ? Il frappe de son épée le vide. »
Les alexandrins se dégustent comme un
muscat, vin naturel et sucré. Quand ils sont outrés, l’émotion
passe avec ce qu’il faut d’autodérision, on rit et on se dit : la
lutte contre les faux semblants ne date pas d’aujourd’hui.
Avec tout ce « théâtre »
ce disgracieux a donné tant de grâce à la vie, avec panache.
« Pas monté bien haut, peut-être, mais tout seul. ».
Depuis la salle d’hôpital où Torreton en survèt’ est prostré
jusqu’au final où il a revêtu la cape et l’épée, la cohérence est complète, les
2h 30 passent comme un Rivesaltes.
Baschung chante :
« Et tous ces
petits êtres qui courent »
Ça colle.
Les morceaux de bravoure se succèdent : tirade des
nez, les cadets de Gascogne, la duègne
est éloignée avec des pâtisseries servies dans des pages de poèmes. La scène du
balcon par Skype arrive vraiment à propos : Roxane intime, en gros plan
sur l’écran, réussit totalement sa
prestation.
La pièce où l’humour succède au pathétique épouse les états
d’âme changeants de Cyrano à l’énergie communicative, arrogant, touchant (à la
fin de l’envoi), seul. Fini d’un coup de bûche.
Pas l’ombre d’une restriction quand l’inventivité sert aussi
bien le théâtre populaire avec des acteurs
complètement investis.
Je cours relire encore des passages.
« Oh…Délabyrinthez vos sentiments »