jeudi 8 novembre 2012

L’art et le sacré en France au XVII° siècle dans les collections du musée de Grenoble.



Les saisies révolutionnaires vont alimenter les cimaises du musée de Grenoble et son premier conservateur Louis-Joseph Jay va se montrer particulièrement avisé en choisissant nombre de toiles remarquables.
Valérie Lagier lui a rendu hommage lors de sa deuxième conférence aux amis du musée consacrée aux œuvres françaises du XVII°.
Oui, il est question de peinture française, même si la notion de nationalité est incertaine avec des frontières mouvantes.
Le Lorrain est né en Lorraine qui n’avait alors point Paris pour capitale, Philippe de Champaigne est né à Bruxelles, Poussin passa sa vie en Italie, école de tous ceux qui font profession de peindre. Quand il n’y a plus d’ateliers en France, c’est Rubens, le flamand, qui vient pour la déco.
Ce XVII°  siècle connaît trois rois : Henri IV, Louis XIII, Louis XIV et deux régences de Marie de Médicis et Anne d’Autriche.  La période est troublée avec huit guerres de religion, alors les commandes des églises sont plus rares. Les cardinaux Richelieu et Mazarin mécènes et grands conservateurs ont le pouvoir : la noblesse et les protestants se soumettent.
La contre réforme est plus lente à se mettre en place chez nous qu’en Italie.
Les formes picturales seront moins exaltées, plus cérébrales, plus mesurées, les martyrs moins sanglants.
Un petit livret  intitulé joliment «  les couleurs du ciel », disponible au Musée, situe quelques tableaux de la collection grenobloise dans leur établissement  religieux d’origine en complément d’une exposition qui aura lieu au musée Carnavalet jusqu’au 23 février.  
Plus amateur des impressionnistes que de ces impressionnants, je regarderai  désormais avec plus d’attention ces tableaux
Claude Vignon et son Jésus parmi les docteurs a le réalisme du Caravage, avec une touche vénitienne dans les étoffes.
Jacques Blanchard, Le Titien français, a peint un Saint Jérôme émouvant.
Provenant de l'abbaye de Saint-Antoine, l’anachorète, patron des traducteurs est également remarquable avec ses jambes démesurées, peint par Georges De La Tour.
Le maître du clair obscur, réputé à son époque puis oublié, fut réhabilité grâce à un historien de l’art allemand en 1915.
Devant un majestueux paysage, un personnage se bouche le nez parmi la foule compacte lors de la résurrection de Lazare par Philippe de Champaigne dont l’Assomption de la vierge est plus retenue que celle de Rubens.
Son christ  cloué par quatre clous, et non pas trois, venant du monastère de la Grande Chartreuse témoigne de l’influence des jansénistes de Port Royal et de ses scrupules à respecter les écritures à la lettre. Saint Jean Baptiste désignant le christ « l’agneau de dieu qui ôte les péchés du monde » accompagne le courant qui prône un retour à des règles monastiques plus strictes.
Simon Vouet est le chef de la colonie française de Rome, il introduit une dimension flamboyante dans ses peintures. Les belles couleurs  du repos de la Sainte Famille se retrouvent avec Le christ apparaissant à Saint Antoine abbé tout en arrondis et drapés gracieux.
Eustache Le Sueur met en scène Marie Madeleine, souvent choisie par les peintres d’alors, au moment où elle reconnaît le christ qui lui demande de ne pas la toucher : Noli me tangere.
C’est sa reproduction qui figure en tête de compte-rendu.
Laurent de la Hyre  est fidèle au texte  lui aussi avec Les pèlerins d’Emmaüs
"... Or une fois à table avec eux, il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et Ie leur donna. Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent... mais il avait disparu de devant eux. Et ils se dirent l'un à l'autre: « Notre cœur n’était-il pas brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin et qu’ 'il nous expliquait les Écritures ? »
Il est considéré comme un représentant éminent de l’atticisme (venant de l’Attique en Grèce), tout en élégance et simplicité.
Charles Le Brun,  anobli par Louis XIV, fut l’œil du roi soleil, sa Marie Madeleine à la grotte de la Sainte Baume est installée dans un magnifique paysage et les chardons ne sont pas là par hasard, ils sont le symbole de l’immortalité.
Louis Testelin est protestant, il répond aux commandes des catholiques ainsi Saint Louis soignant les malades de la peste.
 Jean Baptiste Jouvenet met en lumière, d’une façon quelque peu grandiloquente, Saint Ovide dont les reliques vont connaître un certain succès avant que des doutes soient émis quant à leur authenticité.  

mercredi 7 novembre 2012

Les pommes brayaudes.



Une recette de cuisine c’est bien plus que des patates et des tranches d’agneau, c’est de la culture et du soin pour ses invités.  
Nous sommes entre amis et la moindre bouchée n'est pas considérée comme un danger, dans un pays où manger ce n'est pas que se nourrir.
Michel a voulu honorer son auvergnate amie et lui  a mijoté depuis sa maison dans la pente un plat venu du Livradois entre Ambert et Marsac appelé « pommes brayaudes ».
La dénomination « pomme »  débarrassée de sa glèbe convenait mieux à cette attention que le vulgaire « patate » accommodé à toutes les sauces rapides.
A regarder sur internet pour cette recette, d’agneau il n’est question que  de gigot, alors que notre hôte avait disposé  dans le plat au four des tranches qui peuvent être des barons débarrassés de toute graisse, voire des côtes, au dessus de ses pommes de terre qui étaient déjà  avancées dans leur cuisson depuis vingt minutes dans un peu d’eau au dessus d’un lit d’oignons et  de subtiles échalotes. Il a retourné la viande au bout d’un quart d’heure et elle était parfaite sans apprêt, sans graisse. Il est des versions avec des lardons, du beurre du thym et  du laurier. Ne pas oublier sel et poivre et auparavant frotter le plat avec de l’ail.
Le site « Escout moi voir » précise « les brayauds sont les habitants de Riom. Leur nom provient de la "braye" ou culotte du 18° siècle que portent encore les hommes qui transportent la chasse de Saint-Amable, le 11 juin ou le Dimanche qui suit, pour la procession »

mardi 6 novembre 2012

Les filles électriques. Zep.



Il n’y a pas que Titeuf dans la vie de Zep.
Cette fois c’est Robert, adolescent à la moustache naissante,  à la libido impérieuse, qui cherche à « conclure » page après page avec les filles les plus belles qui ne veulent pas de lui : un grand classique.
Les émotions avec Canal + codé et les posters de bombasses sont  insuffisantes, alors il apprend la guitare mais ce sont les autres qui emballent.
Il met beaucoup de bonne volonté mais ce sont les grossiers qui embrassent férocement les beautés délicates qui ne savent pas reconnaître le poète :
« Je marche seul comme un avion sans ailes qui survole ta maison bleue accrochée à la colline où les perles de pluie puisées à l’encre de tes yeux ne me laissent pas déjeuner en paix, ah ! je ne peux pas avoir de satisfaction. Non non non. »
L’humour c’est simple et quand une fille sourit c’est il va faire beau .

lundi 5 novembre 2012

Skyfall. Sam Mendes.



James Bond a cinquante ans, et avant que le ciel me « tombe  sur la tête », il fallait que je voie mon premier 007 au cinéma, m’étant rabattu sur les livres de Yann Fleming quand un copain de pensionnat avait, lui, la chance de voir Sean Connery et Ursula Andres  en cinémascope.
J’avais par la suite méprisé le genre, mais qui pourrait ignorer les codes et les attraits d’une série mythique qui en est à son 23° numéro ?
C’est vraiment du cinéma pendant deux heures et demie : renouvellement et tradition sont accommodés avec humour.
Le méchant en 2012 est un trader qui vient de chez sa gracieuse majesté.
Le générique est superbe, les poursuites époustouflantes, les décors somptueux, le rythme haletant, et les actrices : de la bombe, en dose homéopathique.
James résiste mieux aux incessants assauts adverses qu’à ceux du temps.
Il n’en est que plus humain, désabusé, amer, mais  il maintient un bon niveau d’activité : courses, plongeons, tirs, apnée, conduites périlleuses, initiation à la pelleteuse et retour vers l’Aston Martin.  

dimanche 4 novembre 2012

El Gusto.



Qui n’a pas évoqué en ce qui concerne ce groupe de 20 musiciens venus d’Alger : Buena vista social club pour l’âge des protagonistes, Benda Billili pour le rôle d’une cinéaste pour reformer un groupe et le relancer ?
Mais les références cubaines ou Congolaises valent surtout pour l’entrain communicatif qu’ils insufflent aux spectateurs : You you !
Les accents sont andalous, arabes,  mélangés, qui a commencé ? Avec des mots de français, à forte connotation nostalgique puisqu’il s’agit de la musique chaâbi ( le son du peuple) qui rassemblait dans la Casbah, arabes et juifs autour des luths, mandolines, bendir, derbouka, violons… avant guerre. Un moment dispersés, ils se sont retrouvés et leur plaisir de jouer est évident.
Comme le dit le morceau « L’oriental », la rime avec sentimental va de soi.
Je reprends sur le net la traduction de la chanson Ya Rayah « Ô voyageur » qui clôt la soirée fraternelle où chaque membre de l’orchestre est mis en valeur et les chants ensemble ont une chaleur qui vous transporte au soleil avec une anisette à portée de main :
« Ya rayah win msafar trouh taaya wa twali
Chhal nadmou laabad el ghaflin qablak ou qabli
Oh voyageur, où pars-tu ? Tu finiras par revenir
Combien de gens peu avisés l'ont regretté avant toi et moi»

mardi 30 octobre 2012

Bitter Komix. Conrad Botes, Joe Dog



Ce recueil de BD sud africaines est  amer et les bites sont en botte dans l’épais volume de la maison d’édition L’Association.
Une ligne claire met en scène des Tintins déjantés revenus de toute prétention coloniale, et des traits charbonneux vont fouiller dans une mémoire afrikaner dégueulant de noirceur.
Anthologie de dessins parus dans les années 90 post apartheid aux connotations très sixties, quand Crumb depuis la Californie tenait le haut du pavé de l’underground mis à la portée de toute une jeunesse à déniaiser.
Eminemment politique, la révision de la bible  par des artistes  désormais reconnus dans l’art contemporain est réjouissante, un récit d’amitié enfantine décapant, la récupération du corps d’un blanc tué dont le squelette était enchevêtré avec celui d’un noir symbolique est terrible.
Une façon stimulante d’aborder des contrées lointaines en révisant des codes d’antan qui conviennent décidément bien aux perturbations.
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Petite pause des posts  jusqu'à dimanche.

lundi 29 octobre 2012

Madagascar. Dream works.



Quel régal de se laisser encore surprendre par la 3D dans un film  d'animation qui rendrait Tex Avery presque plan plan et dévaluerait la magie des Disney historiques !
Epoustouflant : un carrousel d’images magnifiques, nous sommes embarqués dans le manège poétique et dynamisant d’un cinéma d’aujourd’hui  inventif, fidèle au projet des origines : nous émerveiller.
Nous voyageons avec de drôles d’animaux de l’Afrique à New York où ils veulent retourner en passant par Monte Carlo, Rome, la Suisse, Londres dans les wagons d’un cirque à l’ancienne qui  évoluera vers le merveilleux contemporain en rendant hommage au cirque du Soleil. Comme dans d’autres films d’animation une poursuite tend un rythme infernal.
Je n’ai pas perçu le procédé commercial qui adresse des clins d’œil à l’adulte accompagnant de petits consommateurs justes bons à flatter : je suis redevenu enfant  pendant une heure et demie.