vendredi 8 avril 2022

Si loin, si près.

La guerre en Ukraine a mis en surbrillance le meilleur et le pire de l’âme humaine, mais il n’est pas certain que l’effet de sidération passé, les enseignements, pourtant payés au prix du sang, soient durables. 
Ceux qui parlaient de dictature à tous propos n’ont pas tous appris à modérer leur langage. 
Ils n’ont pas forcément compris que la dimension européenne devenait plus que jamais la mesure adéquate pour nous protéger de la guerre après l’atténuation de la crise due au Covid.
La guerre a revigoré notre continent, mais les sommes d’argent qui seront fléchées pour drones, chars ou hôpitaux de campagne ne seront pas dirigés vers les déserts médicaux.
Nous n'y couperons pas: les jachères vont être à nouveau cultivées et le nucléaire va repartir.
Dans la lutte entre régimes autoritaires et démocraties, les métaphores belliqueuses ont fini par percer les blindages. Ceux qui crachaient sur notre civilisation méprisée par le maître du Kremlin ont-ils graissé les canons des cracheurs de mort ?Face au restaurateur de l’Empire russe, nos gentils qui n’ont cessé de dénigrer l’Empire occidental se trouvent du côté des intégristes des identités et des religions.
Les damnés de la terre africaine s’abstiennent. Wagner, avance sans idiots utiles à ses basques, ceux-ci regardent ailleurs.
Les chenilles des chars en procession ne vont pas crisser sur le mail de Voiron, 
mais ceux qui estiment que le scrutin de ce mois d’avril est « volé », ont des manières trumpistes, creusant le discrédit d’un Occident qu’ils prétendent défendre !
Les abstentionnistes et autres abstinents du débat démocratique, tous les blanquistes, porteurs du drapeau noir et du bulletin blanc, ne s’abstiendront pas de commenter les résultats de la présidentielle dont ils auront contribué à amoindrir le sens. Ils auront saboté la cérémonie républicaine par leur indifférence ou leur aversion envers les autres citoyens. 
Plus grave, cette paresse est flattée par bien des candidats à la présidence de la France qui s’indignent de ne pouvoir débattre d’un bilan de la mandature, qu’ils n’ont cessé de critiquer tout au long de ces cinq ans. Ne sachant que s’opposer, ils se dispensent de toute autocritique au cas où se rappelleraient leurs positions à l’égard de Poutine.
Une jeune interviewée se lamentait de ne pas être assez informée ; que n’a-t-elle cherché, fait fonctionner son moteur de recherche, acheté un journal, regardé son téléphone, parlé à sa maman, demandé à sa voisine… mais que fait l’école ?
Commentateur des commentateurs, je partage l’avis selon lequel ce qui apparaît sur les réseaux sociaux ne reflète pas forcément l’opinion générale mais comme chacun, je fonce dans toutes ces embrouilles. Je persiste à jeter au vent quelques mots comme akènes de pissenlits qu’il me plaisait de voir s’éparpiller en première page d’un dictionnaire désormais bon pour la brocante.  
« Il pousse plus de choses dans un jardin que n'en sème le jardinier. » Proverbe espagnol

2 commentaires:

  1. Belle illustration de Larousse, Guy. J'aime bien ces vieilles images où les femmes étaient dessinées avec des traits gracieux. Etaient-elles plus respectées parce que dessinées avec des traits gracieux ? Difficile à dire.
    J'ai vu que quasiment tous les tracts de nos candidats mettent en haut de l'affiche l'égalité homme/femme comme étant leur priorité numéro un (ils ne parlent pas de la guerre en Ukraine...). Marine Le Pen en fait un argument de vote pour elle, quasiment.
    Tes propos sont assez sibyllins. Méfiance pour la manière dont le verbe nous saisit à la gorge en vieillissant. Nous tendons à développer des propos sibyllins à tout va. Ainsi va le monde... en vieillissant, surtout pour les amoureux du verbe.
    Le mot "dictateur" est pour moi comme le mot "parvenu". Je dis que mes parents étaient des parvenus, et se comportaient comme tels, car c'est un constat. Il n'y a pas de quoi avoir honte. Le mot "dictateur", comme tu le sais peut-être, car je te l'ai appris ici, ou tu le savais avant, se référait dans la Rome antique, vers 100 avant J.C., à une magistrature/fonction officielle, ayant pignon sur rue, et n'était pas plus entaché que.. "parvenu".
    Je ne peux pas m'empêcher de trouver... étrange que notre... "dictateur" se soit accaparé de beaucoup de pouvoirs sur la plèbe ? et qu'il se soit entouré d'un "conseil" "scientifique" pour gouverner.
    Cela me rappelle tellement la res publica, et ses tourments que je ne peux pas le passer sous silence. Cela me semble un retour de refoulé, un hoquet d'un passé lointain dont "nous" nous souvenons, car comment pourrions-nous oublier avec tous ces mots qui nous viennent de si loin, et qui viennent de quelque part ? Ces mots qui sont, et resteront éternellement... nos maîtres.

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  2. Suite.
    Pour le reste... l'Europe et tout, ça fait quarante ans que je constate l'américanisation de la France, qui s'accélère depuis une quinzaine d'années, avec l'invasion de la langue américaine dans nos quotidiens, et sur nos ordinatueurs.
    Cela me rend triste, moi qui étais enchantée en voyant la diversité de langues, de coutumes, de visages, d'habits lors de mon premier voyage sur le vieux Continent en 1970.
    Pour les images d'Epinal de l'Afrique qui croule sous les souffrances que nous avons provoquées par notre désordre, je ne sais pas quoi en penser. Peut-être qu'il y a des endroits en Afrique où les gens s'en tirent mieux dans leurs vies moins riches que les nôtres (pour beaucoup), avec un nombre faramineux de personnes sous calmants, anxiolytiques, et souffrant de dépression ?
    J'ai des discussions très enflammées avec certaines personnes de mon entourage, tout en restant amis. Un certain nombre de ces personnes sont infiniment plus touchées par les souffrances des hommes et femmes ailleurs dans le monde que chez nous, en France. Pour la plupart de ces personnes, "laguerre" est un mal absolu, et seules les personnes souffrant de "laguerre" méritent notre pleine compassion.
    Pour ma part, j'en ai marre de l'absolu, Guy, d'où qu'il vienne. J'ai cessé de regarder les images qui étalent devant moi la misère du monde. Par lâcheté ? Peut-être. Mon sentiment d'impuissance est déjà assez conséquent pour ne pas y ajouter par ces images.
    Mais je suis devenue très critique par rapport à la civilisation de l'information, qu'elle doit dispensée dans les journaux ayant pignon sur rue, ou ailleurs. "Informer" veut bien dire ce que ça veut dire, et je préfère le mot "instruire". Tu devrais pouvoir comprendre, là.
    Pour la démocratie... les Athéniens eux-mêmes auraient été très étonnés de voir ce que nous en avons fait, eux qui réservaient le suffrage aux citoyens, donc, aux hommes, aux propriétaires ayant plus que pignon sur rue. Est-ce qu'à Athènes, comme à Rome, les femmes étaient citoyennes, jouissant du statut de citoyen, sans suffrage ? Peut-être. Nous avons du mal à comprendre tout cela.
    Mais la question de savoir exactement quel... pouvoir le vote confère dans la chose publique, et avec le suffrage universel reste posée, à mon avis. (Les SDF peuvent-ils voter ? Les 500,000 SDF de Los Angeles dans un pays pas en guerre externe, peuvent-ils voter ? Mystère.) Et c'est une bonne question.

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