jeudi 20 décembre 2018

Art russe religieux du XI° au XVII° siècle. Marie Ozerova.

Venue de Saint-Pétersbourg  où elle est attachée scientifique au Musée de l'Ermitage, la conférencière devant les amis du musée de Grenoble, rappelle la fonction spirituelle des icônes et de l’architecture, chargées d’expliquer les vérités éternelles, loin de toute fonction décorative.
A l’origine une « icône », le même mot en russe et en français, du  grec eikona, « image de l’infini », est un  objet religieux destiné à la prière. Le bâtiment d’église représente l’univers vu dans sa totalité, tout en verticalité de la terre vers le ciel.
Comme l’homme, son aspect doit être modeste de l’extérieur et riche à l’intérieur.
Le bulbe apparu tardivement est semblable à la flamme d’un cierge.
Dans la moindre chapelle orientée vers l’Orient, la lumière révèle la présence et la gloire du Seigneur.
Chaque forme a un sens : le cercle énigmatique sans début ni fin représente le caractère infini de Dieu alors que la carré symbolise le monde créé.
A Kiev, la plus ancienne église orthodoxe du XI° siècle est enchâssée dans une enveloppe du XVII°. Avant cette époque, la Russie était un pays païen. Le prince Vladimir après avoir envoyé des ambassadeurs dans plusieurs pays d’Europe, adopte les rites de Byzance, la cité plus puissante. Il se fait baptiser, répudie ses femmes, fait venir une princesse byzantine et des artistes.
La cathédrale Sainte Sophie de Kiev, « la mère de toutes les villes russes » comporte 13 coupoles (12 apôtres et le Christ).
 La lumière insaisissable, forcément divine, inaccessible, provient de mosaïques composées de morceaux de verre transparents, comportant une feuille d’or, rouges comme le royaume de Dieu ou opaques, collés selon des angles différents.
Le Christ Pantocrator (en majesté) est entouré des quatre archanges dont les intervalles entre leurs ailes forment une croix au dessus des quatre évangélistes représentés sur les quatre pendentifs qui ont permis de passer de la coupole ronde au carré d’ici bas.
La Vierge orante au visage calme, aux yeux, tournés vers l’invisible, ne nous regarde pas, elle prie pour l’éternité, les bras levés au ciel comme Moïse au moment où son peuple pénétrait en terre promise, car lorsqu’il les laissait retomber, le peuple d’Israël perdait sa force.
Le Christ est doublement présent lors de la communion des apôtres, brandissant le calice rempli de son sang et le pain de l’hostie. Les perspectives, la pesanteur sont abolis.
Le petit embrasse sa mère, la Vierge de Vladimir, dite de la tendresse. Saint Luc, le protecteur des artistes, l’aurait peinte selon la légende; commencée par les byzantins elle aurait été complétée par des russes. Cette icône vénérée fut volée, mais lorsque les chevaux qui la transportaient refusèrent d'aller plus loin, l’un s’agenouillant devant l’apparition de la Vierge, c’est à cet endroit que fut érigée la cathédrale de la dormition.
Kiev perdit de l’influence et la petite ville de Vladimir prospéra.
Le XIIIe siècle est tragique, le pays morcelé en principautés est envahi par les Mongols. Novgorod, la ville la plus septentrionale, résiste aux pillages.
La Sainte-Face de Novgorod  icône acheiropoïète (image qui n’a pas été faite de la main d’un homme) est peinte sur un tissu, depuis que le christ eut envoyé à Abgar, un roi grec, le lin blanc dont il s’était lavé le visage et qu’il l’eut guéri ainsi de la lèpre.
Dans L’Annonciation, la Vierge porte déjà l’enfant Jésus.
Celui-ci tient dans ses bras un enfant représentant l’âme de sa mère au moment où on lui annonce qu’elle va le rejoindre, lors de La dormition aux nuages.
Sur un fond au rouge énergique Saint Georges terrasse le dragon.
Alors que bien des artistes sont restés anonymes, celui « qui croit en Dieu », Théophane le Grec, s’est fait connaître avec  « le Christ au regard de feu » aux touches originales.
Il est appelé pour décorer le monastère Saint Andronic à Moscou dont les princes vont réunir toutes les forces de Russie pour chasser les Tatars.  Il est aidé par un jeune moine André Rublev. Au centre de « La Trinité », le christ deux doigts levés (la double nature de Dieu) et trois doigts repliés (la Trinité) forme un cercle avec les deux anges qui l’accompagnent.
Dès le XVI° siècle, l’art dût servir le tsar considéré comme semblable à Dieu et l’extérieur des lieux de culte se pare de riches ornements ; mais les tambours par lesquels entraient la lumière sont devenus aveugles.

1 commentaire:

  1. Très belles images, merci.
    Je trouve que ces églises ont un petit air de maisons de pain d'épice, ce qui n'est pas un insulte pour moi, en tout cas. Très insolites, mais très belles.
    Pour Marie... c'est difficile de savoir faire la différence entre "sérieuse" et "triste", j'en conviens...

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