La basque née en 1959, sous Franco, a été la compagne de Juan
Munoz déjà exposé au musée de Grenoble
L’artiste reconnue, du Guggenheim de Bilbao en biennale de
Venise, présente au musée de la place Lavalette jusqu’au 31 juillet, claustras
et fontaines grâce à Guy Tossato qui avait reconnu très tôt son talent alors
qu’il administrait le Carré d’art à Nîmes.
« Œuvre ambiguë,
où le paradoxe se mêle au faux-semblant, elle constitue une exploration
fascinante d’un univers parallèle, où le réel ne se départit pas du fantasme,
où la vérité est double, claire et obscure, douce et cruelle. »
Telle est
l’appréciation reportée de site en site internet : la barre est haute.
Notre guide Etienne Brunet va être bien utile pour étendre
l’intérêt de ces installations et rappeler leurs tenants et aboutissants :
aux sources de l’art en quelque sorte avec ses dérivations.
L’aquarium à l’entrée, entouré de photographies en noir et
blanc retravaillées au pastel, joue sur les échelles et rappelle des panneaux
ajourés que la créatrice a immergés dans le Pacifique au large des côtes
mexicaines.
L’eau peut évoquer l’Alhambra, voire le château d’eau de la
place Grenette, le lion et le dragon Isère et Drac, monumentaux au pied de la
montée Chalemont…
Dans une autre salle, les lumières accentuent les « espaces
feuilletés », les ombres pénètrent derrière les grilles métalliques devant
un mur en résine à l’allure liquide, tel un théâtre aux motifs végétaux.
Plus loin une cabane suspendue, toute de fils métalliques tressés en lanières,
se réfère à un livre de Clarke : « Les fontaines du paradis ».
Les lettres qui sont formées se lisent de droite à gauche : mélange des
cultures.
Au fil des eaux, nous arrivons à un puits où le socle
faisant partie de l’œuvre met en valeur un lacis de branchages et de racines
aux couleurs de bronze découvert et recouvert par une mini marée aléatoire. La
nature confrontée aux structures.
Le jeu d’ombres avec des nattes végétales rappelle les souks
arabes sous le soleil et fait référence cette fois au livre « Vathek »
de Bedford qui raconte comment un sultan abandonnant sa religion s’interrogea
sur sa place dans l’univers.
En passant de salles en salles, notre guide intarissable,
évoque aussi bien l’atelier de Brancusi installé dans son intégralité au centre
Pompidou car chaque élément s’inscrivait dans l’ensemble, que Palladio qui
inventa à l’époque de la Renaissance la notion d’ « espace
accéléré », jusqu’à notre contemporain Georges Rousse et ses anamorphoses,
expériences de la sculpture passant par la photographie.
Après « La chambre végétale » à la fois étrange et
familière, O Keeffe est de retour
accompagnée d’une citation de Huysmans :
« Après les
fleurs factices singeant les véritables fleurs, il voulait des fleurs
naturelles imitant les fleurs fausses »
« La Porte de l’Enfer » de Rodin et ses effets de
collage, de moulage, sait revenir dans nos références pour nous rassurer, si quelques
mystères naissant de ces parois monumentales aux miroirs trompeurs nous avaient
impressionnés. La foire de l’Esplanade fournit sans doute des émotions plus ébouriffantes.
Un autre puits rectangulaire garni de drapés en aluminium
évoque la fontaine de Trévi de l’époque baroque. L’extension pédagogique vient
avec le rappel des travaux du suisse Markus Raetz sur les jeux entre réalité et
irréalité quand le « non » tourne au « oui ».
Dix huit panneaux en grès rappellent les moucharabiehs mais
il conviendrait de dire « jalousies » pour ces « fenêtres
empêchées » qui se réfèrent à José de Acosta missionnaire jésuite en
Amérique latine, un des pères de l’anthropologie.
Ils occupent 300 m 2 en face
d’une dernière sérigraphie sur métal où un bazar à Beyrouth est vivement
dessiné, laissant deviner son dessein, comme l’inévitable Duchamp qui intitula
un de ses tableaux « Le Roi et la
Reine entourés de nus vites » pour insister sur les conditions
de l’exécution.
Le pavillon de cristal en fin de parcours ne peut fournir un
refuge ; la nature, pas aussi aimable que Pénone la voyait est boueuse
sous un strict caillebottis.
« La Pentecôte »
du Gréco prêté par le musée du Prado s’aperçoit depuis le patio, ce serait
dommage de ne pas approcher cette œuvre bien expliquée, dont la modernité saute
aux yeux.
L’an prochain au musée :
Les années parisiennes de Kandinsky à la Toussaint puis Fantin
Latour.
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