vendredi 28 mars 2014

On the déroute again.

Dimanche soir, madame Vallaud-Belkacem vous sembliez tellement fatiguée, votre lumière habituelle tellement éteinte que  même Guaino Henri pouvait taper juste en repérant l’absence d’autocritique du pouvoir.
A gauche, nous excellons toujours à désigner les autres comme coupables : le parti du bien ne peut faillir et ceux qui refusent nos bienfaits sont trompés.
Dans la configuration baroque de notre commune de Saint Egrève, la maire sortante étiquetée divers gauche - frissons chez quelques colistiers - qui n’avait pas de concurrent à droite, est passée au premier tour malgré trois autres listes de gauche.
Mais je n’en suis pas mécontent, après m’être résolu à voter écologiste malgré une défense des parcs et jardin un peu étroite - ils avaient travaillé - de voir les choix de mon ancien parti (PS) rejetés par les électeurs. Je m’étais pourtant imaginé que leur démagogie pourrait être payante, donc ma récente conversion à une vision pessimiste du genre humain a été démentie.
Comme tant de responsables de là haut envoyés sur les plateaux au soir des défaites, qui n’ont plus que cendre dans la bouche à force d’agiter leur langue de bois, la tête de liste imprudemment nommée « Autrement », Jean Marcel Puech déclare qu’il doit sa « veste » à son tout nouvel affichage à gauche au moment où l’ambulance est criblée de balles. Ce manque d’opportunisme l’honore mais qu’il se rassure : ce n’est pas dans la minceur de ses propositions, ni dans la profondeur de ses textes, que quelques traces de valeurs de gauche aient pu être décelées dans ses tracts. Le prix du m2 pour les propriétaires de pavillons ne figuraient pas dans les priorités des héritiers de Jaurès, fussent- ils devenus socio démocrates.
Mais trêve de railleries dans un contexte qui a plutôt tendance à  tirer vers le noir nos désirs d’avenir. Des leçons seront-elles tirées au-delà des déclarations mécaniques, juste après des moments enivrants en cours de campagne où l’entre soi se baptise fraternité et contribue aux aveuglements ?
Le problème de la gauche n’est pas l’affaire d’une seule personne, fut-il président, mais il est collectif : nous avions eu le ministre du budget que nous avons mérité, et les élus locaux colonne vertébrale, si sûrs d’eux, si compétents,  dopés à la com’, tombent des nues. Ils ont pris la fessée du Nord au sud, à « Marseille la gauche vaut peu cher » (Libé), de haut en bas.
Stratège de table basse, je pensais que la démarche de la gauche unifiée patiemment à Meylan était la bonne, las, en face la maire sortante porteuse de casseroles perdure. Est-ce que les abstentionnistes  voulaient plus de gauche dans une société qui penche de plus en plus à droite ? Ils ont permis à Copé de regonfler ses plumes.
A Grenoble qui se voit encore en modèle mais cette fois dans le bancroche, il y a de quoi désespérer Minatec et Casabio réunis. Médiapart voit Piolle en nouveau Dubedout sauf que Mendès France était alors la référence, cette fois c’est Mélenchon et « son navire amiral » qui fait l’épouvantail. Safar était pour la fusion à condition d’être chef, il se montre mauvais joueur.
Un Marc Baietto président de la Métro, où tout se passe, qui cumule les mandats (huit) se voit soulager de celui de maire, c’est une bonne nouvelle, alors qu’à l’autre bout, Balkany réélu au premier tour découragerait de persister à croire en l’honnêteté. 
                                  Les dessins sont  parus dans "Le Canard " de cette semaine.

jeudi 27 mars 2014

Ernest Pignon Ernest à Grenoble.

La fresque réalisée en 1976 pour la bourse du travail qui venait de déménager aux abords de Grand Place a tenu 25 ans. Elle rassemblait des affiches qui ont marqué l’histoire des luttes dans la région, mémoire ouvrière inscrite sur les murs d’un bâtiment qui maintenait ainsi son rôle initial de transmission, d’éducation.
Au centre figurait une fillette montant avec légèreté un escalier sur lequel était cité aussi un célèbre gisant comme ceux qui avaient été collés par l’artiste en 71 sur les escaliers du Sacré Cœur pour commémorer le centenaire de la Commune de Paris.
Ce travail venait après une campagne d’affichage beaucoup plus éphémère concernant les conditions de travail en 1975 dans le cadre d’un atelier collectif à la maison de la Culture dirigée alors par Catherine Tasca où il était question aussi de Maïakovski. Le jeune comédien qui avait servi de modèle pour l’affiche sur « les agressions subies par le corps au travail » est mort asphyxié par un chauffage défectueux.

mercredi 26 mars 2014

Trois jours à Marseille.

La formule  de location Airbnb est excellente : notre emplacement à côté de la gare de la Blancarde nous assurait le calme et la proximité du centre ville pour un prix raisonnable.
J 1 :
Nous nous posons sans encombres au parking du MuCEM là où la deuxième ville de France se métamorphose et nous nous dirigeons vers le vieux port incontournable qui oblige les photographes
avec « l’ombrière » de Norman Foster et son immense miroir au plafond sous un toit élevé, sans toutefois renoncer aux clichés du petit marché aux poissons.
J’ai connu des accumulations d’ex-voto plus émouvantes que celles de « La bonne mère » mais le point de vue qui se mérite est  grandiose depuis Notre dame de la Garde.
Avec un repas de midi au bout de l’avenue du Prado en face de la mer, nous sommes ailleurs, bien reçus, sans coup de fusil dans un restau italien.
Le Musée d’art contemporain étant fermé, nous profitons du Château du parc Borely rénové qui accueille les arts décoratifs : faïences, tissus, verreries bien mis en valeur.
En soirée nous vadrouillons dans le quartier de La plaine, vers le cours « Ju », Julien, où un large choix de possibilités de restauration nous est offert. En ce début novembre nous optons pour une terrasse.
J 2 :
Par le métro nous retournons sur le Vieux port et suivons le circuit proposé par Lonely Planet dans le quartier du Panier, le plus vieux quartier de France qui porte le nom d’une ancienne auberge. Les rues qui ont inspiré les décors de« Plus belle la vie » montent et descendent avec des églises au bout ou d’anciens hôpitaux. Celui de la Vieille Charité qui accueillait les mendiants au XVII° est remarquable et abrite sur trois niveaux de galeries, des collections d’art amérindiens et océaniens qui valent  de s’y attarder, bien que quelques salles soient fermées.
Nous mangeons chinois rue de la république avant d’aller au FRAC à la Joliette qui proposait dans un bâtiment original des expositions excitantes déjà décrites sur ce blog dans les archives beaux arts.
Ainsi que le MuCEM  http://blog-de-guy.blogspot.fr/2013/10/le-mucem.htmldont l’architecture avec sa résille de béton est vraiment belle, les collections bien conçues et la situation magnifique au coucher du soleil. Alors que l’OM venait de perdre contre Reims au vélodrome.
Après un tour cours Belsunce  aux alentours de La Canebière, là ou poussait le chanvre (canebé en provençal), sur la Place aux huiles: bouillabaisse ou aioli ; on n’allait pas commander un gratin dauphinois.
J 3 :
Au marché qui s’installe à Noailles,  nous prenons un petit café sur une des places où les chibanis sont habillés en dimanche, avant d’aller au musée Cantini, gratuit le dimanche matin. Tous les courants de la peinture du XX° sont représentés, l’expo temporaire était réservée au régional de l’étape : César.
Nous faisons la queue avant d’entrer dans l’enceinte du fort Saint Jean, où de petites expositions concernant les marionnettes et le cirque ne nous retiennent pas trop longtemps, avant de revenir au J4 à l'intérieur du MuCEM qui nous aimante vers une exposition temporaire consacrée cette fois au « bazar du genre », sans surprise.Nous sommes repus mais pas au point de ne pas apprécier les poissons rue Saint Saens.

mardi 25 mars 2014

Une si jolie petite guerre. Marcelino Truong.

Saïgon 1961-63 : chronique familiale et documentaire en 270 pages au moment où Kennedy renforce la présence US (15 000 « conseillers » militaires) au Viet Nam.
Le père de l’auteur est alors traducteur au service de Diem le président impopulaire de la république du sud, la mère d’origine bretonne connait des troubles psychologiques, les deux petits garçons jouent à la guerre sous les yeux de la grande sœur.
L’imbrication du récit privé et de l’histoire dans ses moments les plus paroxystiques est toujours intéressante, en apportant un éclairage nouveau, alternant les espiègleries et les drames.
Une petite sœur Anh Noël arrive dans cette famille mixte où les petits font combattre des grillons et assistent depuis leur balcon à une attaque sur le palais présidentiel de deux avions de la propre armée du président, une immolation de bonze crée un embouteillage…
Alors que l’auteur au trait efficace donne le chiffre de 50 000 soldats américains morts (sur les 8 700 000 ayant participé au conflit) parmi des millions de morts civils et militaires, Wikipédia nous renseigne : « un million de combattants et quatre millions de civils avaient été tués durant la guerre ».

lundi 24 mars 2014

Quelques heures de printemps. Stéphane Brizé.

Je n’avais pu suivre mes copines qui m’avaient chaleureusement recommandé ce film quand il est sorti en 2012, alors quand j’ai pu le voir à la télévision, j’ai compris leurs émotions.
Lindon sort de prison et revient habiter chez sa mère malade qui a décidé de  se suicider en Suisse.
 A résumer ainsi cela  préparerait à quelques dossiers de l’écran : « Euthanasie et réinsertion » quand la télé faisait de la pédagogie, mais le cinéaste nous emmène bien plus loin : quand nous nous interrogeons sur le sens de la vie.
Cette femme atteinte d’un cancer s’aggravant malgré les traitements, qui a vu souffrir son mari au caractère impossible, veut choisir sa mort à défaut d’avoir choisi sa vie.
Et le retour du fils également rigide et taiseux, plein de colère dans une maison trop rangée est magistralement interprété et filmé.
Les objets : la cafetière, la gazinière, les gestes : une main qui enlève les miettes sur la toile cirée, le chien, tout contribue à une densité émouvante. Film délicat et juste.
Seul le titre laissant croire à une parenthèse lumineuse ne me semble pas le plus adéquat, quand la mort seule apaise après une existence où chacun est passé à côté des autres en ne les rencontrant que furtivement ou trop tard.

dimanche 23 mars 2014

Les amants parallèles. Vincent Delerm.

Délicates, frêles, légères, les paroles s’envolent, le temps a passé, les cheveux sont devenus blancs. Le piano est « préparé », arrangé, et la voix du quadra aussi qui a perdu ses « œu » trainants, de quoi éloigner les dénigrants.
L’amour fragile se raconte dans la durée entre le premier soir et la paternité.
La natation était synchronisée dans un CD précédent, à présent les corps si légers ne sont « pas loin et à côté quand même » mais arrive « le jour où tu croyais qu’on ne repartirait  pas » pourtant elle avait « le plan à la main ». Le couple voyage, passe d’appart en appart.
J’aime cette mélancolie qui n’est surtout pas tonitruante, gentille, elle nous fait oublier les grandes gueules.
Il avoue qu’il a fait semblant pour « Joe Montana » d’aimer ça et nous excuse de nos conformismes d’un jour.
Sur la plage aux romantiques, désormais il y a un filet de volley ball  photographié en noir et blanc.
« Est-ce que ça s’arrête
Page quatre cent vingt sept
Est-ce qu’on atteindra
La page trente trois »
Il est plutôt de la génération de mon fils, mais les époques se confondent. Si j’ai bien connu  aussi l'Antoine Doisnel de son père, je prends garde de ne plus courir sous la pluie pour ne pas m’enrhumer; j'aime cette image au cinéma et les chansons douces.

samedi 22 mars 2014

Fête du livre Bron 2014.

A la table du festival des littératures contemporaines, deux promeneurs solitaires et rêveurs : Gilbert Vaudey et Jean Christophe Bailly  dont les routes s’étaient déjà croisées.
Un boulevard s’ouvrait donc à l’animateur de la table ronde autour du mot « traboules » pour trouver une thématique commune, plutôt que le rallumage de petites bougies de l’enfance face aux lasers froids des fêtes actuelles : 35 de ces chemins de traverse dans Lyon restent ouvertes sur 350.
Une fois secouée la fatale nostalgie qui colle à une évocation de Lyon  par Vaudey, « une ville pas comme tout le monde », dans son livre « Le nom de Lyon », le débat pouvait s’approfondir avec Bailly,  l’auteur de « La phrase urbaine »
Il nous emmène au delà du seuil de notre maison,  là où commence le monde, vers « L’impasse des beaux yeux » à Marseille dont la plaque de rue a été mainte fois volée, mais où subsiste le nom écrit à la craie, dans la lignée lyonnaise de la « Montée de tire cul », « Rue des tables claudiennes » ou « Allée des cavatines » dans le « quartier du Point du Jour ».
En accord avec le titre « Plan B », de cette 28° fête du livre, dans le cadre insolite de l’hippodrome de Parilly, nous sommes invités à prendre la tangente, des raccourcis, à faire un pas de côté pour continuer à vivre nos villes constituées de la totalité de nos promenades et non d’un patrimoine en plaques. Chaque ville est  comme un texte à articuler, à conjuguer.
Les urbanistes visent pour certains à revenir sur le zonage stupide qui a modelé nos aglomérations et nous avec, mais quand un coq dérange le résidant  secondaire comment envisager un atelier bruyant en bas de chez le quidam qui cherche le sommeil, quand on ne doit pas trop s’exclamer aux terrasses des cafés ?
 « La façade d’une maison n’appartient pas à celui qui l’habite mais à celui qui la regarde » Proverbe Chinois.
Pierre Jourde de « Pays perdu » http://blog-de-guy.blogspot.fr/2011/06/cest-la-culture-quon-assassine-pierre.html  et  Eric Chevillard du « Désordre Azerty » constituaient une autre paire de choix, complice, punchy, sensible et drôle pour s’interroger sur les pouvoirs de la littérature.
La réalité a été contondante pour l’écrivain qui vient de livrer « La première pierre ». Ses enfants métis avaient reçu pierres et injures quand il est revenu dans le hameau à propos duquel il avait écrit.
Cette violence vient dans ce monde rural en voie de disparition, que toutes les folklorisations n’ont pas épargné, là où justement se racontent des histoires. L’écrivain cherchant à « désenfouir le réel » contourne les évidences quand la vérité ne se trouve pas forcément aux creux des mains ou des poings, ni dans un trou dans la terre.
En farfouillant à l’intérieur du «  réservoir du monde » qu’est la littérature, je retiens quelques phrases stimulantes :
«  L’écrivain doit être mort pour ses lecteurs », « La littérature n’a pas de compte à rendre »…
A la recherche des mots qui ne soient pas taillés dans le prêt-à-poster, un détour par le silence est peut être nécessaire, alors comme au bout d’un champ en Auvergne, P. Jourde continuera à essayer d’apporter des réponses à : « Ce pays me veut quelque chose ».
Son œuvre est en route.