mercredi 20 avril 2011

Touristes en chine 2007. # J 14. Eaux à Dali.

Lever matinal (4h50) pour prendre l’avion. La pluie n’a pas cessé depuis hier au soir et d’après Yuihu c’est une pluie moyenne, il y aura une petite pluie à Dali.
Vol assez rapide. Par le hublot nous voyons beaucoup de verdure, des cultures, des lacs, de la terre rouge.
Installation et repos d’une heure à l’Asia hôtel après prise en charge par un nouveau chauffeur. Nous sommes au centre de la région du Yunnan dans la ville du marbre (marbre se dit : pierre de Dali) en général blanc veiné de gris comme dans les montagnes dans la brume des peintures classiques.
Dali est la ville de l'ethnie minoritaire Baï, qui signifie blanc. Pour les fêtes le costume des femmes est blanc, les pantalons et hauts sont brodés de roses roses, les coiffes sont très particulières. Pour tous les jours : les vêtements sont bleus, fermés à la chinoise.
Nous nous dirigeons vers le lac Erhai (oreille à cause de sa forme) en longeant des champs par une route en galets. La terre est noire, où poussent des aubergines, salades, maïs, sur des tables sans mauvaises herbes. Nous croisons un très beau ficus chenu aux racines impressionnantes. Quand nous embarquons pour une croisière sur le lac avec un groupe de jeunes chinois, nous voyons une bonne troupe de cormorans attachés destinés à la pêche. Nous visitons l’île Jinsuo Dao où le marché est sur le quai avec ses coquillages, crevettes séchées, civelles, poissons chats, poissons qui se dégustent sur place.
Yuizou nous conduit à un charmant temple de village, de taille et de décorations modestes qui abrite aussi un club du troisième âge. Les vieux tapent le carton, au premier étage les vieilles chantent des soutras répétitifs accompagnées de percussions : 2h le matin, 2h l’après midi. Elles sont installées toutes vêtues de bleu face à face, perpendiculaires à l’autel devant lequel prie une des leurs, le bâton d’encens à la main. Images fortes où l’on retrouve des pratiques magiques qui évoquent le chamanisme. Nous nous promenons dans le village aux demeures authentiques qui s’effondrent.
La vieille ville de Dali est orientée Sud/Nord bien sûr. La porte Sud est d‘une épaisseur conséquente. La grande rue est bordée de saules, trop restaurée, flanquée de boutiques à touristes, les néons cachent trop à notre goût les façades des vieilles maisons plus modestes et différentes de celles de Pingyao.
Restau de poissons, carpes, cèpes et aubergines très épicées.
Visite des trois pagodes SanTa Si : jolis jardins, les trois pagodes ont des airs penchés. Des pétards attirent l’attention de Yuizou, il nous conduit à une fête dans un petit monastère. Fête des enfants, au cours d’un énorme pique-nique. Des offrandes sont disposées devant les autels bourrés d’encens et dans le temple (poulet, papiers écrits par un écrivain destinés à être brûlés dont la fumée s’envolera jusqu’à Bouddha). La salle où les femmes se sont protégées de la pluie est enfumée comme une salle hors sacs. Dans les champs l’on reconnaît des plans de cannabis. Des femmes portent des palanques ; retour dans le centre et découverte du marché. Repas au Yunnan café : rouleaux aux crevettes excellents, retour à pied à l’hôtel.

mardi 19 avril 2011

Bienvenue dans le monde merveilleux de l’informatique. Scott Adams.

Un volume dans la vie du héros Dilbert d’origine américaine dont les tirages se comptent en millions d’exemplaires avec des traductions en 22 langues différentes dans des milliers de journaux.
Charly Brown serait devenu ingénieur informatique et porterait une cravate réticente, Snoopy serait rémunéré en tant que consultant et nous serions dans un humour dans la filiation de Mafalda. En trois cases, le sort en est jeté, et se révèlent les folies, les drôleries, la lucidité.
Dilbert demeure impavide, à peine effleuré par une vie de bureau absurde où le boss est incompétent et abuse du langage managérial.
- Excellent rapport. Il faut juste remplacer à chaque fois le mot « utiliser » par
« exploiter ». Remplacer « aider » par « faciliter » et au lieu de « faire » mettez « entrer dans la phase d’implémentation »
- Hmm…c’est encore un peu trop lisible.
- Je pourrai réduire la taille des caractères et le photocopier sur le fax.

La mondialisation est passée par là, et tous les spécimens humains sont représentés : le sadique, le consciencieux, et même la femme qui n’est pas un archétype
De l’humour connoté, à prendre par petites doses pour en saisir tout l’arôme.

lundi 18 avril 2011

Road to Nowhere. Monte Hellman.

Dernier plan, le cinéaste tient sa caméra alors que la police cerne une maison:
“Lâchez votre arme ! ”.
Pas de quoi s’affoler : il n’y a que des balles à blanc dans ce film qui m’a laissé à distance.
La seule réussite est que les pistes sont si bien brouillées que nous devenons indifférents au scénario qui superpose au cours du tournage d’un film : la réalité, la fiction et les souvenirs.
Depuis les plans lents du début, j’avais pourtant l‘intention d’apprécier cette proposition -comme on dit aujourd'hui- mais je me suis vite lassé et je n’ai pas vu le rapport entre les séquences historiques vues sur ordi et le scénario.
...........
Robert Mitchum est mort. Olivier Babinet
Et le cinéma se sent un peu patraque. Enième road movie dans des voitures volées où Olivier Gourmet en agent peu artistique conduit un autre looser qui passe son temps à dormir vers un festival minable sur le cercle polaire. Là quelques haut-parleurs crachotent sur le parking désert, un pôle encore qui ne fait plus rêver. Triste.

dimanche 17 avril 2011

Thelonious Monk. Antoine Hervé.

Pour clôturer la saison des leçons de jazz à la MC2 Antoine Hervé a fait parler le piano dans un hommage à celui qui fut surnommé « Melodious Thonk ».
Pour dénoncer les donneurs de leçons en politique qui parlent beaucoup sans se mouiller, j’avais retenu l’expression : « ceux qui jouent du piano en se tenant à dix mètres du clavier »
Ce soir, Antoine Hervé a mis les mains dans la musique et nous a servi un beau concert pendant une heure et demie. Je m’étonnais qu’il ne tourne pas les pages de ses partitions c’est qu’il a improvisé en hommage au pianiste inventif qui a influencé des cohortes de musiciens. Je révise ce que le pédagogue et le virtuose m’ont fait découvrir cette année : les phrases musicales qui se répondent, qui varient, des oiseaux au vol imprévisible, des ruptures, des surprises, de l’humour, la recherche d’un horizon qui fuit dès qu’on s’approche. Le charme de cette route est dans ses détours, ses zigs et ses jazz.

XXI. Printemps 2011.

Le trimestriel culte en son numéro 14 est toujours aussi passionnant, varié, une bouffée de fraîcheur dans l’air pollué du temps. 37 pages consacrées à « nos meilleurs vieux » avec des religieuses qui ne veulent pas aller en maison de retraite, un groupe de féministes qui imaginent une maison pour partager du temps et la rencontre de délinquants qui ne sont plus jeunes du tout. Le reportage photographique est consacré aux enfants qui vivent en prison avec leurs mères à Buenos Aires et la bande dessinée décrit la route du kif au Maroc. C’est Jonathan Littell le reporter au Sud Soudan, un pays neuf. Nous partageons la tournée d’un facteur à Kaboul, la vie d’un contrebandier dans le Sinaï et quelques plans sur les riches de Rio qui voient la vie du haut de leur piscine sur les toits. Des portraits hauts en couleurs d’un américain qui fut un compagnon de Mao et du patron d’Emmaüs Défi. Les brèves sont toujours pertinentes. Je n’avais jamais entendu parler d’Isabelle Lambret qui a vécu 9 mois en captivité en Somalie, son récit puissant va à l’essentiel. « J’avais raison d’y croire » dit elle quand elle retrouve la liberté.
Dans le même esprit de reconquête, ils éditent « 6 mois » un bisannuel, 350 pages de photographies sans une virgule de publicité autour de 12 photojournalistes avec un dossier principal consacré à la Chine et des rubriques concernant l’actualité, des entretiens, des récits variés et des univers à partager : à trouver dans ces lieux rares et précieux que sont les librairies.

vendredi 15 avril 2011

La laïque part en vrille.

Je n’ai plus que le sourire daté d’une Marianne dessinée par Jean Effel sur les timbres de la quinzaine de l’école publique pour m’accrocher, quand je vois qui a ramassé le mot « laïque » pour servir à son contraire !
A gauche, nous avions déjà gémi quand le « Roublard Souverain » (appellation Patrick Rambaud) avait cité Jaurès dans des discours écrits par d’autres.
La captation du mot laïque par ses ennemis d’hier vient encore de nos abandons, le vide laissé par la religion catholique finissante nous laisse sans audace.
« Le roi est mort, la religion est morte, et les esprits s’égarent » Emmanuel Todd
Quantitatif :
La fermeture de dizaines de milliers de postes dans l’éducation nationale chaque année devient la jauge dont on s’accommode.
Pour avoir milité jadis avec la CFDT en milieu enseignant, en regardant les massacres d’aujourd’hui, j’ai encore plus le sentiment que nous œuvrions alors dans le feston qualitatif alors que l’urgence est présentement au quantitatif.


Quelques chiffres
vus dans l’hebdomadaire « Le Point »:
- 700 millions d’Euros consacrés à la gratuité de la scolarité des enfants des français à l’étranger alors que les subventions sont à la baisse pour les associations de soutien scolaire.
- Plan de cohésion sociale (réussite éducative) :
411 millions en 2008, 79 millions en 2009
- en 2005 : 62 % de la classe d’âge a eu accès au bac, ce nombre a baissé de 5% en 10 ans.
La moitié des inscrits en fac échouent en premier cycle.
- Compréhension de l’écrit, évolution depuis 2000 :
France : - 9, Allemagne : + 13
- Culture mathématique :
France : - 14, Allemagne : + 10
- Revenus d’un prof en début de carrière en 1990 : 1,6 Smic, en 2010 : 1,5 Smic
- Scolarisation des 3 ans : 35% en 2000, 15% en 2009


Fonctionnaires : Quand j’ai transmis à mes correspondants quelques mots de Michel Serres qui insiste sur les qualités de l’école française, Debra m’a répondu en soulignant l’envie accompagnant le mépris des français en ce qui concerne les fonctionnaires avec en outre les contradictions de notre modèle républicain sans cesse invoqué d’où suintent d’amères marinades. Elle partage le constat de la destruction de l’éducation nationale et s’il est facile d’approuver sa remarque que tous les profs ne sont pas des saints (encore heureux voire bien heureux en terre laïque), j’ai plus de mal à envisager que certains se vengeraient sur les enfants des frustrations générées par le système.
Des fausses poitrines sont proposées à des fillettes par des marchands aux Etats-Unis et des crèmes antirides dans les kits de maquillage pour des écolières de huit ans.
Il va falloir ouvrir une cellule d’aide psychologique pour les vieux instits.
……..
Suggestions du Canard pour les lectures de Frédéric Lefebvre pour prolonger ceux de la semaine dernière : « Ainsi parlait Zara » de Nietzsche, et bien sûr « La princesse Tam Tam de Clèves » de Mme Galerie La Fayette.

jeudi 14 avril 2011

Chagall et l’avant-garde russe.

Le peintre aux petits bonhommes naïfs n’était pas « ma came » comme dirait la femme de « Notre Fugace » (appellation Patrick Rambaud).
Dans l’effervescence du début du XX° siècle, parmi d’autres peintres, il est aisé de comprendre que « l’inclassable, l’original n’est pas né nulle part ».
La formule est de Guy Tosatto lors de sa conférence devant les amis du musée en complément à l’exposition de 150 œuvres des années 1908 à 1930 qui ont déjà attiré beaucoup de monde.
Marc, (Moïse) Chagall a adopté la nationalité française quand notre pays était un phare et non la contrée du « Phosphorescent » (appellation Patrick Rambaud) ; il est né en Biélorussie à Vitebsk et les souvenirs de son enfance là bas, où la communauté juive était très importante, vont habiter son œuvre tout du long.
Paul Gauguin le fauve, venu de l'impressionnisme, enrichi par le symbolisme, théorisera le "synthétisme", il permet au jeune russe de penser un monde où se réconcilient le primitif et le moderne.
Les icones, les gravures de la tradition populaire ont nourri la simplicité du conteur qui va au-delà de l’anecdote.
- Le violoniste sur le toit est une âme qui s’élève au dessus de la rue où un homme est mort de froid.
Ce parcours au musée de Grenoble est l’occasion de connaître Larionov et Gontcharova et leurs peintures néo-primitivistes, de voir des Kandinsky originaux avec une série de paysages aux couleurs séduisantes.
- Improvisations III est un témoignage clef du passage à l’abstraction. Les variations du titre en témoignent : « cavalier au dessus d’un pont » puis « tableau avec mur jaune ».
1912 : A l’écoute des autres et de lui-même. C’est le temps de « La Ruche » avec Soutine, Zadkine, Apollinaire, Cendrars... Les formes se distordent, les couleurs s’exaltent. Il a vu des Van Gogh, précurseur de l’expressionisme.
Dans le foisonnement des écoles qui naissent et meurent chaque année, le cubisme est passé à la postérité, retiendrai-je que l’orphisme en fut une branche ainsi que le rayonnisme ?
Le peintre errant en fera sa farine :
« Seul est mien
Le pays qui se trouve dans mon âme.
J’y entre sans passeport
Comme chez moi… »

1914 : il est contraint par la guerre de rester en Russie où il ne faisait que passer
1915 : Croix noire sur fond blanc, de Malevitch, c’est du suprématisme ; Pougny et sa boule blanche dans un tiroir repeint en vert claque comme une œuvre contemporaine, 100 ans après.
- La route vers le marché aux bestiaux mène vers le cosmos et recèle tous les âges de la vie.
- Blanc et doré, « le double portrait au verre de vin » célèbre le bonheur du couple qu’il a formé toute sa vie avec Bella.
Le futurisme saisit la vitesse, le constructivisme débouche sur l’architecture et veut signer l’avènement d’une humanité nouvelle.
Chagall dirigera une école d’art où il introduit Malevitch qui l’évincera. Ses toiles portent la trace de ces querelles avec cet indéfectible goût pour la poésie et l’expression individuelle.
« J’ai apporté mes objets de Russie et Paris leur a donné la lumière »