vendredi 25 avril 2014

"L'Europe et la mondialisation: atouts, défis et perspectives". Pascal Lamy

Pour sa 90° réunion depuis sa création en 2006, l'Université populaire européenne de Grenoble avait invité à une conférence débat, l’ancien chef de cabinet de Jacques Delors qui vient d’écrire «Quand la France s’éveillera ».
Europe, fille de Poséidon distinguée par Zeus : après les guerres, l’idée est devenue réalité. Son nom prononcé par les poètes, les philosophes, les géographes s’est incarnée en une entreprise d’édification politique pour gérer les affaires communes.
Aujourd’hui, la paix, qu’elle a garantie est devenue tellement une évidence, que cet argument, convaincant pour ceux qui avaient vécu des temps furieux, ne fonctionne pas plus que la perspective d’une amélioration du niveau de vie : « ensemble » ne semble pas plus porteur aujourd’hui que « chacun dans son coin ». La solution européenne devient le problème, la prime à la coopération qui avait vu le jour avec la mise en commun des ressources en charbon et acier ne semble plus aller de soi.
L’Europe est le continent le plus intolérant aux inégalités, aux atteintes à l’environnement, elle équilibre compétivité et solidarité : « une économie sociale de marché ».
En 2050 nous serons 5% de la population et représenterons 10% de l’économie mondiale alors qu’aujourd’hui c’est 20%.
Au niveau mondial, la réduction massive de la pauvreté est un fait allant de pair avec une augmentation des inégalités au sein des pays émergents et une pression sur les ressources : énergie, eau, climat. Le dumping social n’est pas l’argument obligé : les pays les moins inégalitaires sont aussi les plus performants. Quant au dumping fiscal, une question progresse : les paradis peuvent-ils se sentir menacés ?
Les technologies de l’information et l’usage massif des conteneurs quand 90% du commerce passe par la  mer ont abaissé les coûts de la distance, le marché s’est élargi mais la crise financière de 2008 a été contagieuse.
Les faiblesses de notre continent tiennent à une démographie vieillissante et son cortège de réticences à accueillir les étrangers, à une transition énergétique difficile et un déclin de la place de l’innovation dans l’exploitation des technologies.
Alors que nous sommes forts de 500 millions de citoyens, de consommateurs, avec un niveau de richesse important, nos usages d’une gouvernance supra nationale quoiqu’inachevée devraient être un atout pour inspirer une coopération mondiale plus efficiente.
Sur un territoire où les systèmes de redistribution sont plus développés qu’ailleurs, le sentiment  d’appartenance s’érode pourtant, les taux de participation aux élections européennes sont en baisse. Et les beaux agencements institutionnels octroyés et non conquis dans la lutte, paraissent « frigides », illisibles ; c’est qu’en plus, la redistribution se grippe quand la croissance passe en dessous de 2%.
Le resserrement des liens entre la France et l’Allemagne peut-il relancer une dynamique où les compétences de l’une à gérer une économie pourraient  s’échanger avec une vision géo stratégique qui va au-delà d’un niveau d’exportations ?
« Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté » W. Churchill.
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Dans le "Canard" de cette semaine:

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