Avec les premières affiches vont naître les premiers
collectionneurs si bien que les sociétés d’affichage font surveiller leurs placards
et que des timbres comminatoires y sont apposés ; des catalogues, des
revues spécialisées accompagnent un engouement des affichomaniaques de la
première heure.
Dans un tableau de Picasso, période bleue, l’accablement du
modèle est mis en évidence vis à vis d’une affiche représentant la danseuse May
Milton, désinvolte, dont le succès au cours d’une vague anglomane fut plus
éphémère que la renommée de Lautrec qui
la croqua.
Les affiches visent à communiquer une information dans
l’espace public et bien malin qui peut dater la première des premières :
peut être celle vantant les cures thermales à Salisbury en 1477 (l’imprimerie
date de 1440). Depuis François 1° les avis officiels sont en noir sur blanc ;
en 1791, Le Chapelier inscrit cette exclusivité dans la loi.
Avec la lithographie les affiches combinent textes et
images. Manet, Daumier réalisent une affiche, Bonnard quelques unes, dites de
librairie, Lautrec 30, Jules Chéret
1500.
Sa belle femme devient un archétype : la "
chérette " séduit déjà le public.
Le goût de l’époque est à l’estampe, mais le caractère
commercial indissociable de la publicité marque dès le début l’affiche qui doit
« tirer l’œil ».
Lautrec sert Bruant et s’en sert, l’écharpe rouge du
chansonnier devient une marque comme les gants d’Yvette Guilbert dont la tête
disparait, ses gants formant un « Y » comme Yvette suffisent.
Les affiches apposées sur des carrioles sont mouvantes, leur
répétition joue un rôle essentiel, Loïe Fuller prend le badaud dans les volutes
de sa danse serpentine.
« En des
allégories emportées, chatoyantes d'éclat, de lumière, radieuses de jeunesse et
d'humour, un symboliste moderne a synthétisé la vie de Paris, s'est complu à la
figuration de ses spectacles, à la représentation de ses élégances, au tableau
de ses modes. L'étonnante magie, cette apothéose du Plaisir et de la Grâce installant au détour
des carrefours, sur les crépis lézardés, contre les clôtures plâtreuses des
bâtisses son flamboiement de féerie, et d'où vient pourtant notre illusion? D’une
lithographie en deux ou trois tons, d'une image délavée par la pluie, déchirée
par la bise, demain recouverte, anéantie d'une affiche de Chéret. »
Huysmans écrivait ainsi à propos du « Watteau
des rues ».
Mucha, figure majeure de l’art nouveau, épouse le format des colonnes Morris et sort
des salons, ses affiches raffinées, serties, font contraster la profusion et le
vide.
Sarah Bernhardt calligraphie sur l’une
d’entre elles :
« Je
ne trouve rien de meilleur qu'un Petit LU, oh si ! Deux petits LU. »
Dans sa période américaine Mucha eut un
savon à son nom.
La femme fait vendre alcool et cigarette, Jane Atché, dans sa publicité pour JOB,
lui apporte l’élégance.
Chéret comme Seurat utilisait peu le noir, Cappiello en fait ses fonds, le style
bascule, les couleurs sonnent et dissonent.
Avec lui : OXO, le bouillon, a des allures de smiley, et il faut
oser une horde de rats se cassant les dents sur des pneus, le thermogène
rappelle lui les charlatans de l’époque victorienne.
Carlu plutôt art
déco s’inspire du cubisme voire des constructivistes russes en intégrant des
photographies dans une affiche pour le désarmement.
Loupot présente
les voitures Voisin dans une forêt Cézanienne et également dans une épure
expressionniste.
Cassandre, c’est
lui « Dubo, Dubon, Dubonnet », le Le Corbusier de l’affiche, installe «
le tumulte dans les rues ». Son navire Le Normandie occupait tout
l’espace, il a été reproduit en très grand dans le palais de la publicité en 1937,
un monument. Il magnifiait les objets et le graphisme était au premier plan.
Alors que Nectar, personnage de Dransy, symbole des vins
Nicolas a traversé les années et sera réinterprété encore plus de fois que ses
mains pouvaient porter de bouteilles (32).
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