mercredi 20 septembre 2023

Château de Fontainebleau.

Il suffit d’une heure pour rejoindre de la capitale l’agglomération bellifontaine en gare d’Avon.
Le train, à 5 €, est fréquenté par des parisiens partis pour se promener dans la célèbre forêt 
 
ou grimper sur ses rochers.
Nous avons retenu une visite guidée du plus grand château de France après Versailles.
La forteresse moyenâgeuse a été agrandie par Saint Louis
et transfigurée par l’amateur de chasse, François 1°, de retour de sa captivité italienne.
« La Joconde » de Léonard de Vinci et des œuvres de Raphaël ont rejoint les collections dans cette «  Nouvelle Rome » où prend naissance, au XVI° siècle, « l’école de Fontainebleau ».
Louis XIV y révoqua l’Edit de Nantes. 
Napoléon 1° en parlait comme de « La maison des siècles ».
En 1814, après son abdication et une tentative de suicide, 
l’empereur prononça son dernier discours devant sa vieille garde.  
«Soldats de ma Vieille Garde, je vous fais mes adieux. Depuis vingt ans, je vous ai trouvés constamment sur le chemin de l'honneur et de la gloire.» 
Depuis, le vaste espace, vu du majestueux escalier, est nommé « La cour des adieux ».
Le château, deuxième site le plus visité de la Seine et Marne après Disneyland,
comporte 1500 chambres, 40 000 objets mobiliers dont une centaine de pendules réglées chaque semaine, des hectares de toitures et de parquets, un parc et trois jardins, des étangs et un canal.

 

mardi 19 septembre 2023

Une vie de moche. François Bégaudeau Cécile Guillard.

Ce bel album de près de 200 pages traite finement des questionnements intimes quand le regard des autres est blessant.  
Elle s’appelle Guylaine : 
« Mon prénom n’a semblé prémonitoire pour personne. 
Non, personne n’a pensé qu’il sonnait comme vilaine ».
Les dessins aux volutes fluides évitent la caricature et soutiennent un texte parfois poétique sans contredire une énergie exemplaire.
La vieillesse, où les traits des moches et des beaux s’accusent, lui permet de retrouver une paix connue lors d’une enfance protégée, même si entre temps la douceur croisée parfois n’a pas permis de surmonter une solitude cachée sous le masque de la rigolote.
«Tu sais ma puce, même si tu n’étais pas belle pour les autres, 
tu le serais dans nos yeux. »
Cette dernière phrase gorgée d’amour avait été comme un coup de poignard.

lundi 18 septembre 2023

Indiana Jones et le Cadran de la Destinée. James Mangold.

Les cygnes désenchantés livrent d’ultimes images depuis l’usine à rêves hollywoodienne, 
et nos héros d’enfance so frenchies persistent.
Si des silhouettes s’effacent, 
ceux que nous avions tant aimés s’accrochent
et reviennent danser.
Bond lui même  a-t-il dit son dernier mot ?
En tous cas « Indy », Indiana Jones, parti à la recherche d’un cadran qui prévoit de « grandes perturbations » dans l'Histoire, a été rajeuni grâce à des effets spéciaux, alors que plusieurs temporalités s’emboitent, et ont même failli s’entrechoquer. 
Le film dure 2h et demie et cligne des deux yeux pour les fans de la saga en son cinquième épisode plein de rythme, d’humour.
Nous visitons des lieux ensoleillés dans des poursuites récurrentes en tok tok ou en petite Fiat. Notre nostalgie peut être fouettée par Harrisson Ford boosté à 80 ans par sa filleule, et s’accorder à notre mélancolie.

dimanche 17 septembre 2023

Défilé de la biennale de la danse 2023.

A l’approche des jeux olympiques de Paris, le défilé ouvrant la biennale de la danse à Lyon a repris la rue sur le thème «Art et sport »
Le collectif ES célébrant la beauté des corps précédait douze groupes, à la belle dynamique, aux costumes inventifs où le sérieux et l’investissement de 3000 bénévoles servent un enthousiasme d’autant plus remarquable que la chaleur était accablante.
Parmi les communes associées à des quartiers de Lyon, 
les éventails thaï de Vaulx-en-Velin apportent de la légèreté derrière les cordes d’un ring de boxe de là-bas dit l'« art des huit membres ».
Les savoyards manient avec fougue drapeaux et écharpes des fans zones,
et autour de la compagnie Stylistic, en costumes japonisants, ça percute et upercute.
Venus d’Annecy les hip-hoppers font le break 
et le haka du dimanche de la compagnie Pernette de Villeurbanne aux beaux habits bénéficiant d’un effet de masse était plus impressionnant que celui des blacks du vendredi.
Grenoble portait avec moins d’humour le souvenir de ses jeux olympiques que les « Givrés » d’Albertville 
alors que les cerceaux d’Annecy vibraient avec élégance.
Feyzin et Saint Fons en leurs beaux atours auréolés de balles scandent leur hymne
et les supers héros descendus des Monts du lyonnais ont de la gueule.
Les jeux de rubans de Caluire-et-Cuire ferment un défilé
cuit à point jusqu’à la Place Bellecour surmontée d’un funambule.

samedi 16 septembre 2023

A prendre ou à laisser. Lionel Shiver.

Convaincu par « Le masque et la plume », je passe le lendemain à la librairie derrière un client qui vient de commander ce roman sur la fin de vie déjà en rupture de stock, titré par l’auteure américaine installée en Angleterre : « Should I Stay or Should I Go » (The Clash).
Après la mort d’un père au bout d’une longue dégénérescence, un couple de quinquagénaires décide de se suicider quand ils auront 80 ans,
« Avant de coûter un bras à nos compatriotes pour survivre à l’état d’imitations grotesques de ce que nous étions jeunes ou comme de simples outres à souffrance. » 
L’auteur, sans que cela tourne à l’exercice de style, déploie toute son imagination pour inventer plus d’une dizaine de scénarios possibles après cette décision difficile. 
« J'ai un peu l'impression d'être au milieu d'une flopée d'intrigues incroyables et de devoir soudain rendre les romans commencés à la bibliothèque. »
L’intime le plus dérisoire se mêle aux questions fondamentales du choix de la sortie où sont mis en jeux les pouvoirs dans le couple, les choix d’une vie au temps du Brexit et du confinement. Lui est un ancien médecin, sa femme Kay, infirmière : 
« Pour Kay Wilkinson, le fait que le Royaume unis reste ou non membre de l’UE - ou de l’OTAN ou des Nations Unies ou du Commonwealth - se situait au même niveau que sa participation ou non au concours de l’Eurovision. » 
L’humour permet de passer d’une résidence haut de gamme à des établissements sordides au personnel malfaisant, jusqu’à la science-fiction la plus débridée, d’une planète ensauvagée à un monde apaisé. 
« Au lieu de forcer leurs populations affamées et révoltées à fuir à l’étranger en quête d’ «un avenir meilleur », les chefs de gouvernement africains supplièrent leurs diasporas de bien vouloir revenir au pays pour occuper des postes bien rémunérés qui n’attendaient qu’elles. » 
Ces 280 pages très vivantes évoquent une tendresse indestructible, la solitude, la trahison, entre deux verres de Sauvignon. Le panorama des affres de la vieillesse se laisse voir sans pleurnicheries derrière les portes où attendent des représentants de la rupture générationnelle, vivement campés: 
« En sus de la montagne de comprimés à avaler plusieurs fois par jour, les bilans incessants, les analyses de sang, d’urine, les coloscopies, les tests auditifs et ophtalmologiques, les pesées, les analyses de selles, les électrocardiogrammes et les IRM étaient manifestement le prix à payer pour quiconque dépassait sa date de péremption sur terre. »  

vendredi 15 septembre 2023

« Maladresse » rappeuse.

Un vieux laïcard comme moi, respectueux quand même de toute grenouille de bénitier, peut se sentir menacé d’une « crucifixion » par Médine, nouvelle idole des NU(L)PES, car je ne prends pas de telles paroles pour une « maladresse ». Par là, je réutilise son mot d’
«excuse » tellement facile pour ses propos anti sémites, alors que bien peu lui ont demandé des comptes pour sa violence envers ceux qui respectent toutes les religions pourvu qu’elles ne s’imposent pas dans l’espace public.
La faiblesse humaine vaut mieux que l’infaillibilité divine.
Martine Panot, qui n'est pas Jaurès, participe à la déconstruction de la poésie française: elle voit celui dont la notoriété est liée à ses provocations dans la lignée de… Brassens et Hugo ! Cette députée vivant aussi d’outrances contribue à l’échauffement des échanges politiques et témoigne de l’effondrement des connaissances et du discernement dans une civilisation sans repères.
Face à des monceaux d’insultes culminant avec l’usage courant du mot « dictateur » appliqué à des acteurs élus de notre démocratie et banalisant les vrais tyrans, les vertus de l’esprit critique tendent à devoir être relativisées. 
Pour avoir eu la prétention de cultiver le jugement de mes élèves leur demandant de justifier leurs avis, je serai tenté de privilégier aujourd’hui, la reconnaissance, le respect, tant la chicane, la diatribe sont devenues hégémoniques.
Le jeune péteux que je fus en classe dite de philo, qui voulait ignorer Bergson parce qu’il n’était pas sur la photo où Sartre montait sur un tonneau, peut ébaucher une autocritique et avouer ne rien savoir alors de l’auteur de « L’être et le néant » sinon quelque aphorisme pour carnet rouge.
Aujourd’hui, vieux pétard mouillé, je me la pète en mon blog et regrette que toute annonce gouvernementale soit submergée par les blâmes à la crédibilité relative ne reconnaissant jamais le moindre aspect positif. 
« De tous les conformismes, le conformisme du non-conformisme est le plus hypocrite et le plus répandu. » Jankélévitch
Mes regrets naïfs de voir s’aggraver les discordes ne peuvent rien face aux stratégies assumées de radicalisation des débats quand il importe si peu de savoir à qui profite l’invective. 
En manque d'humour, plus que jamais, je suis adepte du « en même temps » de la fluidité,  de l’adaptabilité, en ces temps qui se veulent d’airain d’autant plus que « tout fout le camp ».
Et je continue à accumuler dans mon débarras à paradoxes des figures nouvelles de « base jumpers » et autre funambule dont la mise en danger n’est pas étrangère à des recommandations excessivement protectrices. Nul n'est censé ignorer les effets pervers mais la démarche éducative apparait illusoire quand dans les faits la première cause de mortalité est le cancer et la première cause de cancer est la consommation de tabac. 
Les climato-sceptiques n’ont jamais tant prospéré qu’en cet été meurtrier pour la planète.
Les habitudes ne changent pas aussi facilement que les injonctions constantes le voudraient.  Les campagnes publicitaires, l’augmentation des prix, ni la répression ne sont décisives.
- « En 2021, selon Santé publique France, 31,9% des 18-75 ans ont déclaré fumer, un chiffre en hausse par rapport à 2019. »
- « La consommation totale de viande en France a augmenté sur le long terme, passant de 3,8 millions à 5,8 millions de tonnes équivalent carcasse entre 1970 et 2022 (+ 50 %).»
Et le cannabis ? Et l’héroïne ? 
C’est pas gagné et pas si simple, mais c’est bien joli : 
« La liberté commence où l'ignorance finit. » Victor Hugo
J’y ai cru et ça vaut mieux que : 
« Je scie l'arbre de la laïcité avant qu'on le mette en terre, 
Marianne est une Femen tatouée "Fuck God" sur les mamelles ». Médine.

jeudi 14 septembre 2023

Cy Twombly.

Je me doutais que les œuvres présentées jusqu’au 24 septembre au musée de Grenoble étaient destinées à étonner un public que plus rien n'étonne.
Pourtant quelque peu averti dans le domaine de l’art contemporain, devant ces gribouillages, ces ratures, ces salissures, mes bras fatigués m’en sont tombés.
Je pourrais me contenter de ne rien dire puisque c’est de rien dont il s’agit, mais la reconnaissance mondiale de cet artiste inspiré par l’abstraction lyrique, mort en 2011 à l’âge de 83 ans, interpelle. 
« Cy m’a scié » : piètre jeu de mots pour une rencontre anodine.
Je n’aurai pas recours aux enfants barbouilleurs en bas âge et ne saurai me mettre à la place d’un gardien confronté pendant des heures à tant de griffonnages climatisés, mais pour avoir résisté longtemps, en particulier dans les FRAC (Fonds Régionaux d'Art Contemporain), je veux aller au-delà du sentiment qu’ « on se fout de notre gueule ».
Certes je n’ai pas suivi quelque médiateur désormais indispensable dans bien des institutions muséales, mais il y avait plus à lire sur les cartels que dans les mots souvent inachevés, « Mont… Montaigne », tracés à l’arrache sur des papiers qui font gémir les arbres abattus pour de tels gestes vains.
La photographie de deux cygnes barbouillés de craie grasse vaut un développement sur le destin de Léda pour accompagner le collage, comme est évoqué sur huit tableaux, Virgile par la seule mention de son nom griffonné, dans une accumulation de références mythologiques muettes ou de grands noms de la poésie invisibles.
N’émerge qu’un pédantisme insignifiant, puisque les titres des dessins, collages, estampes réalisés entre 1973 et 1977, sont interchangeables et même lorsqu‘il est question de saisons : juillet en noir aurait pu valoir pour novembre, à moins que le génie soit dans ces non-sens. La révélation de l’absurdité peut avoir son charme, mais là les murs nus, les pièces désertes crient la fin d’une civilisation.
Seuls des mots de Rilke ou de Mallarmé inscrits dans les couloirs valent le détour : 
« La chair est triste, hélas ! Et j’ai lu tous les livres.
Fuir ! Là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe
Ô nuits ! Ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature ! »
 
Et même l’avis poétique de Barthes manquerait-il de cohérence ou se montrerait-il plus critique qu’Yvon Lambert le galeriste commanditaire, souvent cité, l’aurait voulu ?
« La Méditerranée est un énorme complexe de souvenirs et de sensations : des langues, la grecque et la latine, présentes dans les titres de Twombly, une culture historique, mythologique poétique, toute cette vie sur des formes, des couleurs, et des lumières qui se passe à la frontière des lieux terrestres et de la plaine maritime. L’art inimitable de Twombly est d’avoir imposé l’effet Méditerranée à partir d’un matériau qui n’a aucun rapport analogique avec le grand rayonnement méditerranéen ».
Il est acquis que la beauté n’est plus l’enjeu des productions picturales, bien qu’il convienne de s’adosser au passé, non pas ici dans le domaine artistique mais dans une liste froide de références littéraires sans rapport avec ce qui est montré.
Heureusement, les textes d’accompagnement sont toujours des moments divertissants : « Avec ses collages où se télescopent des images de toutes sortes et notamment de nombreuses illustrations de champignons, l’artiste rend hommage à l’Histoire naturelle de Pline l’Ancien. »
Parmi d’autres « Sans titre »  cette œuvre s’intitule «  Mushrooms » (champignons). 
« Vingt huit collages de grand format, où prédominent des feuilles stylisées de ficus, motifs graphiques et ovales, aux formes évocatrices tant sexuelles que botaniques » : pas de quoi appeler les ligues de vertu, ce n’est que du « panthéisme expressif » !
A la sortie les petits tableaux d’Aurélie Salvaing dans un coin d’« Extravagance » boutique d’objets décoratifs nous ont rassurés sur les capacités des peintres à proposer de jolies choses.
Un graff en face du musée affirmait d’une façon tonitruante l’incohérence de sa démarche en utilisant les manières du street art qu’il dénonce. Il est dans la lignée de ceux qui ne cessent d’assassiner la littérature dans leurs livres, de nier l’art dans les musées, d’exposer sur une fresque à l’intérieur d’un collège, une école qui brûle.