Le village en couverture du
livre est couvert de nuages. Nous sommes loin de 81 quand une icône à clocher de
la campagne de Mitterrand figurait sur un fond bleu. Cet essai de 370 pages murmure
à mes oreilles couchées par l’inquiétude,
avec le mot « malheur » pour appeler, excessif, fidèle pourtant au
sentiment que se complaisent à renvoyer nombre de nos compatriotes.
La clarté de l’expression
favorisée par la forme de dialogue avec un journaliste de Marianne et un chercheur
du CNRS permet d’avancer dans la compréhension de cette dépression française.
De surcroît, je me retrouve dans cet essai en terrain rassurant avec la laïcité
rappelée comme valeur inaliénable. Tout en admettant que je n’avais pas
envisagé une telle importance du rôle de la religion dans les processus
historique, ni que le général De Gaulle fut dans la durée aussi exceptionnel :
« En mettant ensemble l’autorité de l’Etat et la
légitimité démocratique, l’incarnation monarchique et l’impersonnalité républicaine,
le dynamisme économique et l’identité historique du pays, les bourgeois et les
prolétaires. »
Notre universalisme, depuis
89, événement majeur dans la formation de notre nation, s’est perdu dans la
mondialisation.
La sévérité de l’historien
philosophe à l’égard de la construction européenne prônée depuis un moment
comme substitut au socialisme, m’amène à réviser quelque naïveté. Au moment où
la réconciliation avec l’Allemagne n’était pas acquise, le projet du
« marchand de Cognac », Jean Monnet, visait à : « en finir avec l’Etat jacobin à la
française en le contournant, disperser les pouvoirs, retrouver les vraies
communautés, favoriser un style de gouvernement paternaliste où les gens
éclairés prennent pour eux à la bonne distance des passions et des pressions
populaires, les décisions qui s’imposent pour le bien commun. »
Quant à aujourd’hui, alors
que l’économie a supplanté le politique:
« On ne peut parler de l’Europe qu’au nom des
objectifs que nous lui assignons. L’épreuve de la réalité n’a pas de place dans
le discours sur elle »
Aimant les paradoxes,
j’apprécie la formule qui relève cette « ruse
de la raison » :
« Mitterrand aura été le président par lequel
sera passée la libéralisation de la société française que Giscard aura échoué à
opérer »
Et cette façon de gouverner
qu’on redécouvre à chaque fois :
«… l’axiome qui guide notre classe
gouvernante : il vaut mieux ne pas affoler les français en leur décrivant
sans fard la mutation à laquelle ils sont condamnés. »
Plus près de nous
Sarkozy :
« Pour lui, énoncer les problèmes équivalait à
les résoudre »
Et pour se faire du mal,
extraire quelques mots du plan Langevin-Wallon et voir que ces ambitions ne
sont plus d’actualité :
«La possibilité effective, pour les enfants français,
de bénéficier de l’instruction et d’accéder à la culture la plus développée,
afin que les fonctions les plus hautes soient réellement accessibles à tous
ceux qui auront les capacités requises pour les exercer et que soit ainsi
promue une élite véritable, non de naissance, mais de mérite, et constamment
renouvelée par les apports populaires. »
Et après avoir remarqué la
dissipation foudroyante des souvenirs après Charlie et le Bataclan à la mesure
de l’émotion, insister sur le retour du « Business as usual »:
« Le néolibéralisme n’a pas besoin de se définir
comme un passé parce que ce passé est révolu au regard de ce que sont les
mœurs, les croyances, les aspirations spontanées des individus »
Pourtant : « Les questions qui sont devant nous,
la question écologique, la question migratoire, la question des dérèglements du
capitalisme financier, la question de la confrontation des cultures, la
question du régime démocratique en mesure de faire face à ces urgences, signent
toutes , de manière convergente, la fin de l’économisme triomphant… »
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Le dessin de la semaine vient de Télérama: