Fifi et Lolo sont dans un bateau.
Des enfants de maternelle ont été filmés lors de débats « philosophiques », mais la philo en terminale S est menacée. On requiert de l’autonomie à quatre ans, pendant que Tanguy prend son temps. La crise économique pèse sur certaines situations où faute de travail, de logement, les jeunes ne prennent plus leur envol, mais la crise est aussi éducative et la confusion des mots recouvre celle du sens.
Quelques voix suggèrent de primariser le collège, alors que le maquillage devient un acquis de plus en plus précoce dans les compétences des collégiennes aux sacs Longchamp. En philo on passe justement son temps à définir les mots et dans ce monde qui ne tourne pas rond, ce n’est pas vouloir maintenir un pré carré où n’auraient droit de penser que quelques lettrés que de préciser : si la discussion est le moteur des apprentissages, il me semble ridicule de parler de philosophie en maternelle. Je suis toujours preneur de mots d’enfants mais ceux que j’ai déjà mis en ligne sont venus spontanément dans le jeu de la vie et non extraits de procédures artificielles. Comme le disait une amie « nous les traitons en petits hommes en oubliant qu'ils sont des petits d'homme » : il faut avoir été petit, si l’on veut grandir. Je m’inquiète davantage de cohortes de collégiens démotivés élevés au biberon de l’enfant roi et fatigués avant d’avoir esquissé leur premier pas.
Les notes traumatiseraient les élèves pendant que nos vies seraient suspendues à des agences de notation. Ce refus d’accepter une note, c’est comme le bavardage de ceux qui annoncent : « je ne porte surtout pas de jugement de valeur » pour en général introduire un avis bien salé. C’est l’air du temps qui pourtant ne cesse de classer les lycées, les hôpitaux, de casser les stars académiciens. C’est l’indifférenciation revendiquée qui sélectionnera plus impitoyablement sur des non-dits, l’indifférence avec chacun sur sa planète où n’accèdent aucun avis, ni remarque, ni critique.
Bien de ces mots connotés mettent à bas, en ce moment, leur sens et le bon sens, et des débats incessants autour de l’école érodent la confiance de ses acteurs entre eux et minent leur aplomb personnel, en éloignant toute approche pragmatique.
Le mot « travail » est il encore prononçable pour des élèves ?
Ces notes, tout dépend de l’usage qui en est fait, elles peuvent être une indication parmi d’autres dans une ambiance constructive, mais néfastes pour les plus faibles dans une atmosphère de concurrence. Elles valent mieux que le sabir technocratique qui a envahi les livrets d’évaluation mais ne remplacent pas une expression personnelle de la professeure des écoles. J‘ai même failli dire « maître », c’est que j’essaye de maquiller mon âge. Pourtant à suivre des débats avec certains qui parlent de « zéro pointé » alors que je ne sais même pas ce que c’est ce « pointé », après toutes mes annuités dans la maison Mammouth. Les bras m’en tombent, de tant de bavardages caricaturaux.
Au pays gouverné par la politique du chiffre où les agents de pôle emploi, les personnels de santé, de sécurité, sont calés dans les starting blocks des statistiques, nous sommes étourdis par tous les zéros qui s’alignent sur les lignes des financiers.Le chiffre se sent quelque peu mol. Après les mots les chiffres ne disent plus rien.
Les scandales en ondes entretiennent un spectacle permanent et le public s’habitue.
Comment peut on avancer la notion de valeur (morale) quand les exemples viennent d’en haut qui font pousser dans les potagers scolaires des chardons et des courges : délinquance et abêtissement ?
Faut-il se réclamer d’un Platon en petits pots à quatre ans, parce que not’ résident de l’Elysée a lui d’infantiles réflexes ? On le disait « hyper président », mais il n’est pas sorti de la séquence du téléspectateur. Le mépris qu’il ne mégotte pas pour les journalistes se justifie à tous coups.
« Je n’ai pas entendu votre réponse » qui a dit ça ?
Pas les petits marquis tout contents contents d’être dans la lumière, mais c’est lui qui pose les questions, lui, le garant de not’ république répudiée.
Le majordome de Betancourt a eu plus de dignité que ces larbins.
................
Dans le cahier livre de Libé, une phrase du philosophe Walter Benjamin:
"Articuler historiquement le passé ne signifie pas le connaître "tel qu'il a été effectivement", bien plutôt devenir maître d'un souvenir tel qu'il brille à l'instant du péril"
Un dessin du Canard de cette semaine:
vendredi 26 novembre 2010
jeudi 25 novembre 2010
Nues. Renaissance.
En peinture, le nu féminin est l’incarnation de la beauté et à la période de la Renaissance les corps apparaissent.
Botticelli expose les potentialités de la féminité avec ses trois grâces: la beauté, le don de soi, la pureté. Vénus est au centre, c’est la quintessence de la civilisation méditerranéenne dans une pose christique.
Puis Venise la cosmopolite, plus pragmatique prend le pas sur Florence plus cérébrale et religieuse.
La Vénus de Giorgione aux yeux clos est sans culpabilité, une Eve sans péché.
Elles s’appellent toutes Vénus, mais celle du Titien a les yeux bien ouverts et dans une autre toile lorsqu’il représente l’amour sacré, la femme est dénudée, alors que l’amour profane disparaît dans les plis de sa robe. Suivrons nous le conférencier Christian Loubet qui joue avec l’orgue qui sonnerait avec orgasme pour un tableau à destination de Charles Quint qui ne l’entendait peut être pas ainsi ?
Véronèse multiplie les miroirs et Vénus apaise Mars. C’est le personnage de Diane, la femme de pouvoir, qui devient tendance. A Mantoue, Parme, les maniéristes jouent encore avec Danaé adolescente, Léda, mais les prétextes des titres mythologiques sont dépassés.
Bronzino peint des éros ambigus et Julio Romano dans le palais du Té a peint la vie compliquée de Psyché où en milieu olympien, Zeus ne manque pas de vigueur.
Les élèves français de l’école de Fontainebleau eurent beau refroidir la beauté, les visages de Gabrielle d’Estrées ou de Diane de Poitiers, et leurs tétins mignons, sont ceux de la beauté éternelle.
Botticelli expose les potentialités de la féminité avec ses trois grâces: la beauté, le don de soi, la pureté. Vénus est au centre, c’est la quintessence de la civilisation méditerranéenne dans une pose christique.
Puis Venise la cosmopolite, plus pragmatique prend le pas sur Florence plus cérébrale et religieuse.
La Vénus de Giorgione aux yeux clos est sans culpabilité, une Eve sans péché.
Elles s’appellent toutes Vénus, mais celle du Titien a les yeux bien ouverts et dans une autre toile lorsqu’il représente l’amour sacré, la femme est dénudée, alors que l’amour profane disparaît dans les plis de sa robe. Suivrons nous le conférencier Christian Loubet qui joue avec l’orgue qui sonnerait avec orgasme pour un tableau à destination de Charles Quint qui ne l’entendait peut être pas ainsi ?
Véronèse multiplie les miroirs et Vénus apaise Mars. C’est le personnage de Diane, la femme de pouvoir, qui devient tendance. A Mantoue, Parme, les maniéristes jouent encore avec Danaé adolescente, Léda, mais les prétextes des titres mythologiques sont dépassés.
Bronzino peint des éros ambigus et Julio Romano dans le palais du Té a peint la vie compliquée de Psyché où en milieu olympien, Zeus ne manque pas de vigueur.
Les élèves français de l’école de Fontainebleau eurent beau refroidir la beauté, les visages de Gabrielle d’Estrées ou de Diane de Poitiers, et leurs tétins mignons, sont ceux de la beauté éternelle.
mercredi 24 novembre 2010
Inside job.
Dans Libération le film figurait à la page économie, alors je me suis dit, avec des images, je vais peut être mieux comprendre cette crise des subprime de 2008, d’autant plus que le même quotidien précisait ces jours que l’aide à l’Irlande n’allait point aux Irlandais mais aux banques. Au niveau de la gouvernance économique c’est « on continue comme avant », en pire puisqu’ils n’ont rien appris, les cyniques, les autistes anti-sociaux.
Les commentaires de ce documentaire, sur fond de belles vues de Manhattan, sont sous titrés en blanc parfois sur blanc ce qui n’a pas aidé à ma compréhension. Les titres et qualités des personnes interrogées paraissent furtivement et un effet comique s’installe quand on arrive à la dizaine de responsables qui n’ont pas souhaité répondre aux interviews. C’est également amusant de présenter ce film réalisé par Charles Ferguson avec Christine Lagarde, DSK, et Matt Damon aux commentaires d’une réalité cruelle. Nous ne sommes pas vraiment à l’intérieur de ce boulot, c’est une suite d’entretiens, mais celui qui interroge est plus pugnace que les larbins de chez nous, sans la verdeur d’un Michael Moore ni la pédagogie d’un Al Gore dans « Une vérité qui dérange », ses interlocuteurs voient leur mauvaise foi révélée, leurs affirmations fausses débusquées.
Parmi mon lot d’incertitudes, j’ai quelques constantes comme celle de militer contre le cumul des mandats ; dans ces milieux de la finance, le mélange des genres, les conflits d’intérêt entre universitaires, politiques et autorité d’irrégulation sont une raison d’être.Ils vont même jusqu’à jouer contre leurs clients.
Entre Wall Street et Washington c’est la ligne directe : les conseillers sont les PDG de ces banques qui se gavent encore et encore depuis les dérégulations de Reagan jusqu’à - eh oui - Obama.
Rappel : l’Islande était un paradis, après un épisode de libéralisation sauvage, elle a été le lieu premier de la révélation d’une crise qui a été plus grave que celle de 29.
« 2,7% des américains vivent sous le seuil de pauvreté : 37 millions de personnes »
Les commentaires de ce documentaire, sur fond de belles vues de Manhattan, sont sous titrés en blanc parfois sur blanc ce qui n’a pas aidé à ma compréhension. Les titres et qualités des personnes interrogées paraissent furtivement et un effet comique s’installe quand on arrive à la dizaine de responsables qui n’ont pas souhaité répondre aux interviews. C’est également amusant de présenter ce film réalisé par Charles Ferguson avec Christine Lagarde, DSK, et Matt Damon aux commentaires d’une réalité cruelle. Nous ne sommes pas vraiment à l’intérieur de ce boulot, c’est une suite d’entretiens, mais celui qui interroge est plus pugnace que les larbins de chez nous, sans la verdeur d’un Michael Moore ni la pédagogie d’un Al Gore dans « Une vérité qui dérange », ses interlocuteurs voient leur mauvaise foi révélée, leurs affirmations fausses débusquées.
Parmi mon lot d’incertitudes, j’ai quelques constantes comme celle de militer contre le cumul des mandats ; dans ces milieux de la finance, le mélange des genres, les conflits d’intérêt entre universitaires, politiques et autorité d’irrégulation sont une raison d’être.Ils vont même jusqu’à jouer contre leurs clients.
Entre Wall Street et Washington c’est la ligne directe : les conseillers sont les PDG de ces banques qui se gavent encore et encore depuis les dérégulations de Reagan jusqu’à - eh oui - Obama.
Rappel : l’Islande était un paradis, après un épisode de libéralisation sauvage, elle a été le lieu premier de la révélation d’une crise qui a été plus grave que celle de 29.
« 2,7% des américains vivent sous le seuil de pauvreté : 37 millions de personnes »
mardi 23 novembre 2010
La vie d’Augustine.#3
Je suis entrée à l’école à 6 ans. Cela a été une grande joie pour moi d’apprendre à lire et à écrire. J’y mettais tout mon cœur car je voulais devenir institutrice.
Dans nos jeux nous jouions souvent à ce que nous voulions faire plus tard. Comme c’est bizarre qu’à cette époque on n’avait aucune possibilité de faire des études.
Les quelques institutrices que j’ai eues, je les trouvais déjà âgées.
Peut-être mon imagination d’enfant ?
Le matin on nous faisait d’abord une leçon de morale avec tout ce qui s’en suit. Je trouvais cela très bien car nous étions de petits diables.
Vers l’âge de 10 ans j’ai eu une institutrice qui m’a prise en affection : elle avait peut-être pitié de ma maigreur. Elle habitait dans l’école. Elle me demandait de venir un peu plus tôt le matin et me conduisait chez elle devant un grand bol de lait sucré et des tartines beurrées avec de la confiture. Il ne fallait pas surtout que j’en parle et je m’en gardais bien. Mais Nana a fini par avoir des doutes !
Tous les ans il y avait la fête des écoles. On chantait, on dansait.
Il y avait une sorte de loterie. Le dispositif comportait deux poteaux auxquels était fixée une corde. Les institutrices accrochaient des cadeaux, récupérés auprès de bénévoles, à ce fil. On nous mettait un bandeau sur les yeux. On nous laissait à 7 ou 8 mètres : avec des ciseaux on essayait de couper les ficelles auxquelles pendaient les cadeaux. Une institutrice m’avait mise au courant, me signalant la ficelle que je devais couper. C’est elle qui nous mettait les bandeaux pour sa classe. Naturellement j’avais un œil qui voyait un peu. J’ai fait celle qui hésitait pour ne pas semer le doute. Mon paquet était le deuxième à droite : il y avait un cadeau pour chaque enfant.
Je suis partie avec mon paquet à la maison et quand le l’ai ouvert j’ai trouvé une belle robe bleu marine avec un col blanc. Je m’en souviendrai toujours car je portais les restes de mes sœurs aînées et des fois on avait des colis pour les familles nombreuses. De la Croix Rouge probablement.
Les tabliers noirs étaient obligatoires. Les nôtres étaient tout simples, parfois trop grands, parfois trop petits.
Dans le nombre, il y avait des enfants plus riches, eux étaient plus coquets. Nous, on s’en fichait bien.
Il y avait une école de bonnes sœurs plus bas que la nôtre. C’était pour les classes supérieures, les enfants des commerçants. Mais ils n’apprenaient pas mieux que nous. C’était beaucoup de prières, matin, midi et soir !
Dans nos jeux nous jouions souvent à ce que nous voulions faire plus tard. Comme c’est bizarre qu’à cette époque on n’avait aucune possibilité de faire des études.
Les quelques institutrices que j’ai eues, je les trouvais déjà âgées.
Peut-être mon imagination d’enfant ?
Le matin on nous faisait d’abord une leçon de morale avec tout ce qui s’en suit. Je trouvais cela très bien car nous étions de petits diables.
Vers l’âge de 10 ans j’ai eu une institutrice qui m’a prise en affection : elle avait peut-être pitié de ma maigreur. Elle habitait dans l’école. Elle me demandait de venir un peu plus tôt le matin et me conduisait chez elle devant un grand bol de lait sucré et des tartines beurrées avec de la confiture. Il ne fallait pas surtout que j’en parle et je m’en gardais bien. Mais Nana a fini par avoir des doutes !
Tous les ans il y avait la fête des écoles. On chantait, on dansait.
Il y avait une sorte de loterie. Le dispositif comportait deux poteaux auxquels était fixée une corde. Les institutrices accrochaient des cadeaux, récupérés auprès de bénévoles, à ce fil. On nous mettait un bandeau sur les yeux. On nous laissait à 7 ou 8 mètres : avec des ciseaux on essayait de couper les ficelles auxquelles pendaient les cadeaux. Une institutrice m’avait mise au courant, me signalant la ficelle que je devais couper. C’est elle qui nous mettait les bandeaux pour sa classe. Naturellement j’avais un œil qui voyait un peu. J’ai fait celle qui hésitait pour ne pas semer le doute. Mon paquet était le deuxième à droite : il y avait un cadeau pour chaque enfant.
Je suis partie avec mon paquet à la maison et quand le l’ai ouvert j’ai trouvé une belle robe bleu marine avec un col blanc. Je m’en souviendrai toujours car je portais les restes de mes sœurs aînées et des fois on avait des colis pour les familles nombreuses. De la Croix Rouge probablement.
Les tabliers noirs étaient obligatoires. Les nôtres étaient tout simples, parfois trop grands, parfois trop petits.
Dans le nombre, il y avait des enfants plus riches, eux étaient plus coquets. Nous, on s’en fichait bien.
Il y avait une école de bonnes sœurs plus bas que la nôtre. C’était pour les classes supérieures, les enfants des commerçants. Mais ils n’apprenaient pas mieux que nous. C’était beaucoup de prières, matin, midi et soir !
lundi 22 novembre 2010
Lost person area
Les titres de film sont désormais en anglais, celui-ci convient tout à fait à la description d'un no man’s land. Allure de western sur un chantier où s’achemine l’électricité vers nos villes pour ce film belge de Caroline Strubbe. Seuls des pylônes ponctuent un paysage absent, la lumière des baraques signale un brin de vie, de bruit, de chaleur furtive. La violence du travail électrise les rapports familiaux où les adultes en déplacement ne trouvent pas leur place. Une enfant dispose ses petites pierres poétiques mais elle est abandonnée des grands. Un sentiment de malaise m’a poursuivi une fois le drame accompli. « Tape-la, tord-lui le cou, et dis-lui au revoir » chante la petite.
dimanche 21 novembre 2010
Les"pains-coings"
Elisabeth avait contribué à ce blog avec la recette d ‘une terrine de lapin qui est une des pages des plus visitées; elle suggère cette recette pour utiliser ces fruits qui sont le parfum de l’automne :
« On prend des coings parfaitement sains, on les lave, on ne les épluche pas, on coupe un peu le haut et le bas, pour qu'ils tiennent debout, on prépare une pâte à tarte, on la découpe en carrés - ou ronds ou ovales - on pose un coing entier sur chaque morceau de pâte, on referme bien en " collant la pâte " pour que ce soit pas hermétique, mais presque et on met au four pendant 40 à 45 minutes. Et on déguste tiède. On n'ajoute pas de sucre, le coing en contient assez. Bon appétit ! A bientôt. Elisabeth. »
« On prend des coings parfaitement sains, on les lave, on ne les épluche pas, on coupe un peu le haut et le bas, pour qu'ils tiennent debout, on prépare une pâte à tarte, on la découpe en carrés - ou ronds ou ovales - on pose un coing entier sur chaque morceau de pâte, on referme bien en " collant la pâte " pour que ce soit pas hermétique, mais presque et on met au four pendant 40 à 45 minutes. Et on déguste tiède. On n'ajoute pas de sucre, le coing en contient assez. Bon appétit ! A bientôt. Elisabeth. »
samedi 20 novembre 2010
Vous dites grandir. Albert Thierry.
Sous sa couverture de papier cristal, avec des bords de page irréguliers, ce livre offert, édité par la maison « L’amitié par le livre », a tous les charmes. Il s’agit d’un recueil d’écrits pédagogiques, de contes, de poèmes parus dans des revues, celles de Péguy ou « La Vie Ouvrière » de Monatte, voire extraits d’un ouvrage intitulé « l’homme en proie aux enfants » ou « le sourire blessé » qui ne positionnent pas cette compilation dans la bibliothèque rose ni au rayon rigolade. Bien que l’humour affleure parfois : « Ce misérable mange donc du papier ? Il parle comme une affiche ». Mais en tous cas c’est un bel ouvrage où la présence de la nature est forte. « Seuls les sapins demeuraient impénétrables : leurs pyramides opaques faisaient des torches de ténèbres ; et l’on pensait involontairement, puisqu’ils noircissaient déjà le jour, que c’étaient eux qui devaient répandre la nuit. »
Et lorsque l’instituteur syndicaliste caractérise un de ses élèves en « regardeur de nuages », sûrement en était-il, lui, de cet enfant qu’il recherche avec application dans sa vérité d’enseignant. Si ses poèmes, où il se voit« assaillis par les hyènes », me semblent trop exaltés, il est intéressant de mesurer le temps qui nous a éloignés de ces fratries penchées sous la lampe, avec des enfants qui parlent comme des livres. La proclamation de l’amour dans la relation pédagogique est incongrue aujourd’hui où le mot pédophile est plus usité que celui de pédagogue. Les souffrances d’Albert Thierry peuvent paraître surjouées alors que ses écrits depuis les tranchées de la première boucherie mondiale sont distanciés. Il mourra au front. Les dilemmes de celui qui risque de sortir de sa classe sociale en paraissant obsolètes, confirment la perte de dignité des classes populaires : l’arrivisme individuel serait l’autre nom de l’ascenseur social. Les parfums du passé ont des séductions faciles dans les décombres présents mais une fois refermé l’ouvrage moelleux et parcourant un article du Libé du jour concernant une danseuse, Germaine Acogny : « la pédagogue ne forme pas des petits Acogny mais des personnalités », j’avais compris qu’il en était de même pour Albert Thierry, fiévreusement. " Je consens que des idéaux de ma jeunesse vous fassiez un fumier pour les vôtres."
Et lorsque l’instituteur syndicaliste caractérise un de ses élèves en « regardeur de nuages », sûrement en était-il, lui, de cet enfant qu’il recherche avec application dans sa vérité d’enseignant. Si ses poèmes, où il se voit« assaillis par les hyènes », me semblent trop exaltés, il est intéressant de mesurer le temps qui nous a éloignés de ces fratries penchées sous la lampe, avec des enfants qui parlent comme des livres. La proclamation de l’amour dans la relation pédagogique est incongrue aujourd’hui où le mot pédophile est plus usité que celui de pédagogue. Les souffrances d’Albert Thierry peuvent paraître surjouées alors que ses écrits depuis les tranchées de la première boucherie mondiale sont distanciés. Il mourra au front. Les dilemmes de celui qui risque de sortir de sa classe sociale en paraissant obsolètes, confirment la perte de dignité des classes populaires : l’arrivisme individuel serait l’autre nom de l’ascenseur social. Les parfums du passé ont des séductions faciles dans les décombres présents mais une fois refermé l’ouvrage moelleux et parcourant un article du Libé du jour concernant une danseuse, Germaine Acogny : « la pédagogue ne forme pas des petits Acogny mais des personnalités », j’avais compris qu’il en était de même pour Albert Thierry, fiévreusement. " Je consens que des idéaux de ma jeunesse vous fassiez un fumier pour les vôtres."
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