Je dois à un ancien président de la République, qui beaucoup
esquinta la France, quelques sept heures de plaisir théâtral. Puisque Sarko qui
tant brunit en cours de route avait raillé le roman de madame de Lafayette publié
en 1678, cette œuvre ne pouvait avoir que des qualités.
Quoique : « Les
paroles les plus obscures d'un homme qui plait donnent plus d'agitation que des
déclarations ouvertes d'un homme qui ne plait pas »
Avec délectation, j’ai éprouvé combien cette balise de notre
culture que je méconnaissais était constitutive de notre identité française. Le
saut à l’élastique n’étant plus de mon ressort, le risque d’être enfermé à la
MC2 de 15h à 23h 15
était jouable.
Pourtant, même si en fond de la sobre scène, un grand panneau
généalogique rappelle les noms des personnages, l’entrée dans les intrigues du
XVI° siècle à la cour d’Henri II, me fut laborieuse. Elles me semblaient hors
sol, bien peu politiques, si loin par exemple de Shakespeare qui guette
toujours quand on s’approche des planches et du pouvoir.
« Si vous jugez
sur les apparences en ce lieu-ci, répondit Madame de Chartres, vous serez
souvent trompée : ce qui paraît n'est presque jamais la vérité. »
Mais en éprouvant la dimension exceptionnelle offerte par le
temps, je fus bientôt emporté par la ferveur des actrices dépassant la
narration, par la langue de l’auteure et sa finesse pour décrire les passions
et nous rappeler la violence des vertus, la beauté, l’amour et … la liberté.
« La
magnificence et la galanterie n’ont jamais paru en France avec tant d’éclat que
dans les dernières années du règne d’Henri le second. »
Ainsi commence l’histoire qui parfois tourne au
vaudeville : à cette hauteur, il faut tenir la longueur. La performance
admirable des actrices nous facilite l’entrée dans les méandres, les
contradictions des passions très modernes, dans la fatalité des drames ;
« Je n’ai que des
sentiments violents et incertains dont je ne suis pas le maître : je ne me
trouve plus digne de vous ; vous ne me paraissez plus digne de moi ; je vous
adore, je vous hais ; je vous offense, je vous demande pardon ; je vous admire,
j’ai honte de vous admirer ; enfin, il n’y a plus en moi ni de calme ni de
raison. »
Si des blagounettes nous effleurent en comparant les
langages SMS à tant de sophistication des sentiments, la redécouverte de mots
enfouis nous régale : ainsi « commerce » qui n’est pas celui de
l’OMC, « raccommodements », « enjouement »,
« inclination », « affliction » « opiniâtrer »,
« souffrir », « manquer à soi même », « fâcheux »
… « faire la cour ».
De ces tourbillons soyeux, mieux accompagnés par la musique
que par une peintre sur le plateau qui commence bien ses tracés puis se perd
parfois dans des barbouillages, pouvons nous encore apprendre de la fragilité
des hommes, de leur quête ?
Qui peut oser clore ces riches heures, en écrivant ?
«… et sa vie, qui
fut assez courte, laissa des exemples de vertu inimitables. »
Vu hier soir en DVD : "Un roi à New York", un des derniers Chaplin qui raconte l'histoire d'un roi déchu fuyant un pays déchiré par la révolution, en Europe, pour gagner le pays de... la liberté, aux U.S.
RépondreSupprimerUn moment de pur bonheur, avec des séquences tout à fait prophétiques, surtout du côté publicitaire, et Chaplin a l'oeil très fin pour découper la différence entre le Nouveau Monde et.. l'Ancien...
Film qui date, non pas de 1600 et quelques, mais de 1957...
Je suis sûre que si j'ouvrais "La Princesse de Clèves, je pourrais avoir une attaque de... nostalgie devant une certaine grandeur... (des sentiments, des passions, des mots, des péchés ?) qui fait cruellement défaut en ce moment...
Merci.