vendredi 17 février 2023

Blog au bloc.

Lors d’une semaine où mes petits enfants ont essayé de mettre des étoiles au bout de leurs spatules, je me suis cassé un bras dans un escalier, loin des pistes, « bras cassé ».
Mon séjour à l’hôpital après une prise en charge efficace et des soins par un personnel aguerri aurait pu être l’occasion de quelques brèves de couloir pour aborder le sujet de la santé. 
Chaque intervenant accompagné d’une personne en formation dans cet établissement universitaire crédibilise la qualité et l’importance de l’enseignement français quand des cliniques canadiennes viennent proposer des salaires de 4500 € aux apprentis infirmiers. 
Ma recherche de témoignages authentiques s’en tiendra à une vigoureuse déclaration d’un brancardier complice en tant que supporter de l’OM: 
«Je ne vais pas te voir longtemps, mais je t’aime, toi ! » 
Un autre conducteur de lit à roulettes m’avait dit parcourir parfois 15 km dans les labyrinthes de cette maison abritant 9000 travailleurs où les gros bras ne sont pas les seuls à être tatoués.
Je ne retiendrai pas - irruption de la vie - les retrouvailles parfois bruyantes d’agents hospitaliers alors que le sommeil venait enfin sur le matin, pas plus que les regrets de certains de ne pouvoir guère se lier avec les patients : on n’est pas là pour se faire des amis !
Vu depuis mon lit, le service de traumatologie alimenté par les nombreux accidentés du ski, ne m’a pas semblé débordé dans cette période cruciale, malgré la présence de nombreux chirurgiens … sur les pistes.
Je ne saurai me hasarder à émettre quelques généralités à partir de bribes de réalité quand
Vladimir Jankelevitch parlait de « la vérité comme une fine pointe », bien émoussée en ces temps, mais il revient à mon secours : 
« La lueur timide, l'instant-éclair, le silence, les signes évasifs ; c'est sous cette forme que choisissent de se faire connaître les choses les plus importantes de la vie. »
J’ai apprécié d’un juvénile voisin de chambre, sa vitalité, sa détermination et constaté les performances d’une chirurgie lui permettant de persister dans ses projets, lorsqu’il s’est levé le jour suivant son opération de la colonne vertébrale.
J’avais remarqué aussi lors de la venue de sa famille que le second degré n’avait pas disparu de tous les lieux comme je le craignais, le nez trop collé aux écrans.
Celui qui l’avait précédé, arrivé en hélicoptère, était reparti à Clermont-Ferrand en ambulance : nous sommes bien assurés dans ce pays.
Fréquenter, à proximité du cimetière des Sablons, l’hôpital, beau lieu de défense de la vie, conduit banalement à reconsidérer certaines valeurs et apprécier le privilège de vivre en France.
Notre confort, à l’image de la Suède, jadis pays modèle qui connaissait pourtant le taux de suicides le plus important, conduit  parfois à l’aveuglement, quand des mesures avancées pour pérenniser la solidarité entre générations suscitent tant d'hostilité où se mettent en scène les fatigues démocratiques.
« A  propos de la répartition des sacrifices, n’oublions pas que nous avons collectivement, évité et le chômage massif pendant les confinements et la hausse du prix de l’énergie grâce au bouclier tarifaire en mobilisant massivement la dette publique. En 2020, l’économie chute de 8% et le pouvoir d’achat des ménages augmente de 1%. Cet écart considérable sans précédent dans l’histoire, ce sont les générations futures qui le paieront, pas nous. Nous avons mobilisé le futur pour venir au secours du présent. De ce point de vue, la réforme des retraites est un renvoi d’ascenseur, qui mobilise le présent pour venir au secours du futur. » 
François Langlet

jeudi 16 février 2023

Les œuvres spoliées. Laurent Abry.

La première conférence devant les Amis du musée de Grenoble d’un cycle intitulé « les dérives dans l’art » est consacrée aux razzias et autres rapines dès que des richesses sont repérées.
Ainsi « Le tombeau de Toutânkhamon » pourtant habilement caché était connu des pilleurs. « Seul quelqu’un ayant participé à la construction et/ou à l’enterrement pouvait savoir que l’entrée de l’annexe se situait en bas à gauche du mur ouest. Celle-ci était dissimulée par des coffrets ou du mobilier empilés sous un lit doré à têtes d’hippopotame. »
« Le
papyrus Abbott » témoigne déjà d’enquêtes menées il y a 3000 ans.
Des « sept merveilles de l’antiquité » : jardins suspendus de Babylone(2), statue de Zeus à Olympie(3), temple d’Artémis à Éphèse (4), mausolée d’Halicarnasse(5), colosse de Rhodes(6) et phare d’Alexandrie(7), ne subsiste aujourd'hui que la pyramide de Khéops(1).
Érostrate, incendiaire du « Temple d’Artémis » (reconstitué à Miniaturk) », voulait la notoriété, son nom s’attache désormais à un syndrome.
« La destruction du temple de Jérusalem »
Francesco Hayez
. Ce second temple dont il reste le mur des lamentations fut détruit par les armées romaines en 70 avant JC. Il avait été reconstruit après l’anéantissement du premier temple de Salomon en 587 par l’armée néo-babylonienne de Nabuchodonosor, cela avait fait grand bruit.
La
menorah sur « L’arc de triomphe de Titus » porte témoignage de l’appropriation de trésors par les vainqueurs.
Paul Jamin
peint le gaulois « Brennus et sa part de butin »
Celui-ci avait ajouté son épée sur une balance lors de la rançon demandée aux romains en ajoutant ces mots : « malheur aux vaincus! ».
« Le Sac de Rome par les Vandales en 410 »
Joseph- Noël Sylvestre
A l’époque de Charlemagne, les Vikings « rois de la mer » venus en drakkar, le mot est du XIX° siècle, mènent des raids sur les côtes européennes. « La tapisserie de Bayeux » longue de 70 m narre la conquête de l’Angleterre par Guillaume le Conquérant, descendant de ce peuple des Normands « gens du Nord ».
« L'entrée de Mehmed II dans Constantinople » (1453) peinte par Jean- Joseph Benjamin Constant se fait sur un épais tapis de cadavres, c’est la fin de l’empire byzantin.
Des marbres du Parthénon au British Museum sont dénommés « marbres d’Elgin » du nom du Lord qui les fit découper au début du XIX° siècle. 
« … nous possédons maintenant la «huitième métope », celle avec le Centaure portant la femme. Elle nous a causé beaucoup de problèmes et j'ai été obligé d'être un peu barbare. » Depuis 1983, La Grèce en réclame le rapatriement.
« Entrée à Paris du convoi des œuvres d'art volées par Napoléon »
Pendant 20 ans, des milliers de peintures, sculptures de tous les pays conquis, depuis l’Egypte alors qu’il est encore Bonaparte vont converger vers notre capitale,
de quoi susciter des « Caricatures évoquant les Spoliations napoléoniennes ».
En 1815, l’Autriche, réclame le retour à Venise des « Noces de Cana» de Véronèse
que Vivant Denon échange contre « La Madeleine chez le pharisien » de Lebrun 
car la toile italienne de 10 m de long serait devenue intransportable.
Rose Valland
attachée au musée du jeu de paume a contribué à la mise à l’abri de certaines œuvres et permis de savoir où étaient passées celles volées par les nazis, favorisant leur restitution au bout de longues procédures.
« Himmler offre un tableau à Hitler pour son cinquantième anniversaire ».
L’éradication des mémoires se réalise quand sont détruits les « bouddhas de Bâmiyân »
ou quand Palmyre est bombardée.
Sawtche, la « Vénus hottentote, apparait dans « L'Histoire Naturelle des Mammifères ». Empaillée au muséum d’histoire naturelle après avoir été exhibée dans un zoo humain, son corps ne sera restitué à son pays d’origine qu’en 2002. 

mercredi 15 février 2023

Château de Balzac.

Nous devons reprendre la voiture pour gagner les sources de la Touvre.
https://blog-de-guy.blogspot.com/2023/02/perigueux-3.html
Nous découvrons un espace bien aménagé, propice à la promenade et au pique-nique.
Mais nous n’apercevons pas grand-chose de la 2ème résurgence de rivière en France, classée derrière
la fontaine de Vaucluse, sinon de belles couleurs d’eau à travers les arbres peuplés d’oiseaux chanteurs.
Nous décidons de consacrer l’après-midi au château de Balzac.
Cette propriété privée propose une  visite unique et guidée à 17h. En attendant, seuls sur le parking, Guy goûte au plaisir de la sieste à l’ombre d’un arbre, tandis qu’un agriculteur arrose à côté son champ de maïs avec un tuyau enroulé sur un tambour de bois.
A l’heure dite, nous nous retrouvons une douzaine de personnes intéressées, certaines recrutées par une employée de l’office du tourisme, d’autres attirées par des prospectus touristiques divers, comme nous.
Nous sommes accueillis au seuil de la demeure par la châtelaine et sa fille dont la mission sera de nous guider.
- L’histoire du château débute au XVII° siècle, à partir d’une maison seigneuriale. Il fut bâti à la demande de Guillaume Guez et Marie de Nesmond. Ce couple de nobles donna naissance au célèbre écrivain charentais Jean Louis Guez de Balzac (1597-1654).
Eh non ! Il ne s’agit pas d’Honoré, mais de l’homme le plus disert de son siècle, à l’origine du prix d’éloquence encore en vigueur. Il apprécia la demeure où il écrivit la plupart de ses œuvres et y reçut ses amis et poètes. Dans les murs de cette résidence séjournèrent en leur temps Marie de Médicis, Richelieu  ou encore le Duc d’Epernon.
- Nous accédons au château par une belle cour en forme de Ո,  typique du XVII°. Elle est pavée de ses dalles d’origine qui furent sauvegardées longtemps sous de la terre battue, comme la plupart des sols à l’intérieur en pierre ou en parquet d’orme.
- Nous nous introduisons dans une grande salle voutée. Plusieurs indices laissent à supposer que c’était une chapelle au XII ou au XIII°siècle : en effet, il subsiste un bénitier, une niche et une pièce contiguë accessible par une petite porte, possiblement la sacristie. De plus, une acoustique particulière permet de parler en chuchotant et d’être parfaitement entendu à l’opposé tandis qu'au centre les sons restent inaudibles. La chapelle disparait au XVII° au profit d’une cuisine équipée d’un potager à neuf feux et d’une grande cheminée, avec un bel évier en pierre.
- Les propriétaires du XVIII° rajoutèrent une entrée à gauche de la cuisine afin de séparer les pièces d’habitation en enfilade  et offrir un peu plus d’intimité. Un magnifique escalier en orme parée d’une élégante rampe en fer forgé prend place dans un coin en  laissant dégagé le couloir. En poussant une porte, nous accédons à une salle à manger 18°, puis à un salon de la même époque recouvert de boiseries arrondies aux angles. Nous ne visiterons pas les autres chambres de la maison, privées et habitées par la famille.
- Mais nous sortons côté jardin pour contempler la façade. Le toit, les volets, certaines fenêtres demandent encore de gros investissements  et constituent la prochaine tranche de restauration. Ils passeront avant la rénovation des jardins autrefois à la française, qui s’étalaient jusqu’au canal  généreux en eau et poissons, aujourd’hui ils se réduisent  à une prairie.
- Les derniers travaux très récents du monument historique consistent au nettoyage et à la mise à jour de fresques du XVII° exécutées dans l’ancienne entrée du château accessible de l’extérieur.
Sur les peintures apparait Mercure et son casque, son nom est écrit comme le mot amour, il tient en ses mains des lauriers. Il y a aussi un dieu jeune et ailé, de l’eau et un poisson.
Les deux amours présents figurent sans doute Cupidon ligotant son frère Anteros.
En face, sur l’autre mur, nous reconnaissons Apollon, des flammes le soleil et un arc. Bien que certaines parties des  fresques aient disparu et en l’absence de documents sur le sujet, les spécialistes s’interrogent : s’agirait-il de l’histoire de Daphné et Apollon ? Pour l’instant ils interprètent au mieux les vestiges sauvés de leur état de délabrement. Et la propriétaire ne cache pas son plaisir que lui procure cette petite énigme. Au passage, elle nous signale la marque d’usure au sol due aux roues des charrettes d’antan venues approvisionner la maison. C’est ici qu’elle termine sa visite guidée après nous avoir confié son espoir d’obtenir une aide de Stéphane Bern  afin de poursuivre ses travaux très onéreux et sauver ce patrimoine qui lui tient tant à cœur.
Avant de partir, nous nous attardons près des 2 puits ;  l’un près de l’entrée descend à 30m de profondeur ; 
l’autre est situé côté cour à proximité des écuries dans l’enceinte  des dépendances  où un portique de 21 colonnes  se distingue par la présence de 3 piliers carrés parmi des piliers ronds.
Puis nous franchissons le porche,  typique des Charentes qui a remplacé  la grille d’entrée du XVII° redressée mais inutilisée et cadenassée.
Nous abandonnons cet ermitage campagnard près de la commune du même nom, Balzac, avant de repartir pour l’urbaine Angoulême. Du coup, nous faisons quelques courses au Vival d’un village voisin et rentrons profiter du jardin et de la terrasse de notre AirB&B.

mardi 14 février 2023

Vive la politique. Mandryka et compagnie.

Intéressant de voir derrière la couverture de Binet, aux allures ringardes, une réunion politique « Ensemble vers l’avenir » avec un homme à la tribune désignant la direction opposée à celle qu’indique le public.   
Cet ouvrage collectif datant de 2006, dont on peut à priori se demander de quelle brocante s’est-il échappé, vaut surtout pour le temps écoulé mettant en valeur les invariants d’un domaine qu’on croit redécouvrir chaque matin : 
opportunisme, cynisme et vue à court terme là où l’utopie avait des ambitions.  
Emile Bravo est assez visionnaire, 
alors que Binet dénonçant la démagogie est d’actualité. 
Mathieu Sapin, familier des arrières cuisine du pouvoir,
chronique l’arrivée à l’Elysée d’un rasta.
Aranenga nous fait rire  avec le UMSCE : 
Union pour la Majorité Silencieuse des Cages d’Escalier, carrément beuh blanc rouge.
Les bonobos de Simon sont plus convenus, 
et le président affolé de Frantico trop scatologiquement délirant.
Bouzard évoque avec humour l’activisme écologique. 
Ferri avec son « De Gaulle à la plage » est tordant. 
Je retrouve avec plaisir le ton décalé de Martin Veyron que j’avais délaissé depuis un moment et découvre un autre versant de Riad Sattouf pourtant familier, 
les disparus, F’Murr, Mandrika et Bretécher, poétiques, absurdes, piquants me manquent. Barral décrit un citoyen amoureux de celle qui tient le bureau de vote: au bout de plusieurs scrutins, le bulletin nul sur lequel il déclare sa flamme permettra l’élection de Lépine.
La présidente de Sestac est à peine plus caricaturale que la dinde dingue dont elle s'est inspirée. Cependant nous sommes dispensés de cibles anecdotiques pour nous rassurer avec les permanences de nos passions politiques farcies de petitesses, de faiblesses et de rêves de grandeur. 
La seule citation que je ne connaissais pas qui ponctue ces 80 pages est de Gorki : 
« En politique, j’apprécie les prolétaires, en amour, les princesses russes. »
 

lundi 13 février 2023

De humani corporis fabrica. Verna Paravel Lucien Castel Taylor.

Images d’opérations chirurgicales dans une proximité gênante, avec récit de fin de vie, sans une respiration. 
Je suis sorti au bout de vingt minutes pour éviter de vomir dans la salle. 
Oui nous sommes fait de cette chair, mais la vraie vie et la mort sont tellement à nous tirer par la manche à nous interroger violemment, que j’ai repoussé cette vaine épreuve esthétisante. 

samedi 4 février 2023

La vie des gens. François Morel Martin Jarrie.

La principale bibliothèque de la ville propose à ses lecteurs un coin « livres qui font du bien » ainsi que « livres faciles à lire ».
Une récidive : 
C’est dans cette catégorie que j’ai emprunté sans risque de me tromper cet album, où en face de chaque portrait dessiné d’habitant de Saint Gratien associé à un objet, correspond un texte dont il est précisé : 
«  Les propos tenus par les personnages relèvent de la fiction. » 
Pourtant ils sonnent plus vrai que vrai. 
« Qu’est ce que vous voulez que je raconte. » 
«  Ne regardez pas le ménage. » 
C’est que le chanteur en verve, chroniqueur, poète sans vers, est un révélateur.
Même s’il peut manquer parfois de légèreté : 
« J’ai eu des enfants, des angines, des chaussures neuves. » 
Il sait dire les bibelots : 
« Celui-là j’y tiens, ce n’est pas le plus beau mais c’est celui que mon mari m’a offert à Pampelune aux fêtes d la Saint Firmin, il y a de ça quarante-huit ans. » 
le destin de la boulangère : 
« Je me voyais pas dans le commerce. Trop timide. Les gens ont toujours quelque chose à dire, je ne sais pas comment ils font. »
 Et les rêves : 
« L’autre fois, elle m’a annoncé qu’elle aimerait bien voir la Grande Muraille de Chine avant ses quatre-vingt-dix ans. Ce n’est pas dit qu’on y aille pas. »
........
Après une semaine sans trop d'écrans, du temps que mes petits enfants sont là, je reprendrai mes publications dimanche 12 février. 

vendredi 3 février 2023

Tananarive. Sylvain Vallée Mark Eacersall.

Encore une histoire de vieux !
Sous un titre trompeur mais juste, puisqu’il est beaucoup question de mensonges et d’amitié aussi, de transmission, Amédée, notaire part à la recherche d’un héritier de son voisin et ami qui vient de décéder.
Sa présence imaginaire l’accompagnera tout le long de son périple dans le Nord de la France.
Ce viron en décapotable décatie est exotique, sur fond de banlieue abimée aux personnages bien dessinés.
La présence des rêves n’efface pas la réalité, elle l’agrémente et fait d’un prototype de la normalité: un notaire, le roi du courage, de la fantaisie aux belles couleurs. 
« Qu’est-ce qu’un père épris d’aventure peut laisser à son fils ? 
Une maison ?
 Non, ce qu’il doit lui transmettre, c’est le goût du voyage, de l’eau salée, des vents tourbillonnants, des paradoxes humains... » 
Les mensonges peuvent être réconfortants. Les contes subliment le temps surtout quand il est compté et que les hommes ne se prennent pas trop au sérieux.